rpf - ellen page & joseph gordon-levitt (part I)

Oct 26, 2010 22:01

I WILL BE YOUR PERSONAL CROW I
RPF ; ellen page/joseph gordon-levitt ; NC-17 ; 11 204 words
for this prompt on inception_kink 
‘‘Elle rouvrit les yeux. -Ellen. -Quoi ? -Tu veux me tuer ? soupira-t-il, les épaules abattus. L’un des rideaux venait caresser sa joue. Ellen sourit doucement. -Je sais que j’y arriverais au final… murmura-t-elle.’’



-

!!DISCLAIMER!! : alors, oui, je sais : WTF?!! c'est ce que j'ai pensé aussi, mais après je me suis "et puis merde! c'est de la fiction, mais si ce sont des perso réels. Allons-y !"

RPF soundtrack here

part I

-

.avril.

-J’ai rompu avec elle.

Ellen souleva un sourcil par-dessus le rebord de sa tasse Pasqua Coffee.

-Pourquoi tu me dis ça ?

-J’en sais rien… Joe s’enfonça davantage dans ce sofa qui n’en portait que le nom (d’après Ellen, cette « œuvre mobilière » ressemblait plus à un rendue après digestion de plusieurs heures d’une meringue violacé tirant sur le marron, posée au milieu d’un loft new-yorkais ; un des meubles moderne de son ancien hangar de L.A. qu’il avait quitté définitivement il y a plus de 3 mois… ça avait au moins le chic de la faire sourire à chaque fois qu’elle venait chez lui).
-J’en sais rien… Peut-être parce que tu es une fimme… elle l’injuria d’un nom d’oiseau au son de ce barbarisme humiliant (fille+femme) qu’il utilisait à son propos…et que j’ai besoin de déverser toute ma rancœur dans les oreilles d’une âme compatissante.

Il remit sa cigarette à ses lèvres. Elle ramena sa tasse à sa bouche.

Il souffla. Elle avala.

-Ca fait plus d’un mois que c’est fini… continua-t-il en balançant sa tête en arrière.

-Pourquoi tu me dis ça maintenant ?

Joe se redressa, au tant que cela lui était possible sur la surface instable où il se trouvait, et la fixa d’un air triomphant. Assise sur un tabouret de paille en face de lui, Ellen ne baissa pas ses yeux. Elle savait pourquoi maintenant. La même raison que pour tous les hommes.

Il prit une autre bouffée de sa cigarette

-Je… ne pouvais pas te le dire avant, avoua-t-il en expirant la fumée cancérigène par ses narines, sinon, tu aurais su ce que j’aurais fais pendant ce mois passé… et tu m’aurais traité de porc.

Son gobelet Pasqua Coffee vide se posa sur la table basse qui les séparait. Coudes installés sur ses genoux, jambes écartées, dos vouté, doigts croisés. Elle savait effectivement.

-Te rassurer sur ta fierté de mâle blessé et sur l’efficacité de ton sex-appeal en baisant tout ce qui bouge durant tout ce mois ?

Un sourire déchira le visage de Joe.

Ce sourire.

Son sourire.

Celui qui faisait disparaitre ses yeux derrière ses fossettes.

Il cligna de l’œil gauche et se tapa le bout du nez de l’index à plusieurs reprises tout en pointant Ellen de sa cigarette.

-That's a Bingo, Page.

Stupid reference is stupid. Mais elle ria.

-

-Ta séparation… Tu as l’air de le prendre plutôt bien…

Pourquoi avait-il commandé indien ? Sérieusement ! Ellen pouvait sentir ses joues s’enflammer à cause du curry. Tout en s’arrêtant de mâcher un quart de seconde, elle fit défiler dans son crâne ses multiples visites chez le médecin… Non. Elle n’était pas allergique au curry. Non… non ?

-Vous étiez ensemble depuis… 1an et demi ? Deux peut-être ? Elle chercha désespérément une serviette des yeux.

-22 mois et 9 jours… Les hommes ne souviennent pas du nombre de jours. Il se souvenait du nombre de jours. …le plus important gaspillage de temps de ma vie après AVATAR.

Et bien sur, elle sourit encore.

Ce mois d’avril était l’un des plus chauds selon les chiffres de la météorologie newyorkaise. Les fenêtres immenses du loft de Joe s’ouvraient en grand sur les bruits de la 16ème rue : voitures, cris, accélération de deux roues, klaxons, insultes... Une musique sans laquelle NYC ne serait pas NYC.

Après s’être essuyé discrètement les doigts sous la table -que celui qui ne l’a jamais fait jette la première pierre !- Ellen fixa intensément Joe. Le fait de regarder sa mâchoire monter et descendre, broyer avec force ce qui se trouver dans sa bouche pour enfin entrevoir sa pomme d’Adam trembler quand il avalait… ça en était presque hypnotisant.

-Page.

-Ne m’appelle pas comme ça…

Elle remonta ses yeux de quelques centimètres pour rencontrer deux billes ébènes inquisitrices.

-Elle était peut-être la femme de ta vie.

Pourquoi disait-elle ça ?

Ce genre de phrase allait soit 1) le faire rire et se foutre d’elle ou 2) le faire réciter un monologue ironique dont lui seul avait le secret ou 3) l’énerver. Alors pourquoi disait-elle ça ?! Parce qu’elle le pensait. Ellen l’avait déjà rencontré une fois dans une soirée à Hollywood, peut-être au château Marmont… ou ailleurs … whatever ! Mais d’après Ellen, elle était définitivement la femme de sa vie.

Il rit jaune.

-Ce concept de «femme de ta vie» est stupide, répondit-il. Une autre boule de riz dans sa bouche.

-Pourquoi ?

Son visage se contracta en une expression qu’elle ne lui connaissait pas.

-Pour moi… Ouais… Je vivais dans l’illusion avec elle… Littéralement ! Dans un autre monde. Et… peut-être qu’elle l’était finalement, la femme de ma vie… mais… on s’en fout. C’est pas ça qui compte au final…

Il alluma la cigarette KOOL qu’il gardait depuis le début du repas derrière l’oreille et la prit avidement dans sa bouche. Comme si elle précédait son injection létale.

Joe lui expliqua que pour lui la femme, ou l’homme, de ta vie était la définition d’un être capable de te faire rêver sur la vie et ses perspectives, te faire espérer sur l’avenir et ses bonheurs, un être présent durant les bons moments. En un mot, pour lui, un parasite profitant des heureux instants de ta propre existence. Ce qui importait vraiment, c’était l’être capable de te ramener dans la vraie vie, dans sa dureté, dans les limites de ce monde et de ces rêves insensés que l’on a, une personne qui est là pour les moments les plus difficiles et là avec toi face à la mort. La personne qui te tient la main quand tu expires ton dernier souffle.

-La femme de ma mort. C’est ça la vrai âme sœur… et pas la femme de ma vie…Un cercle parfait de fumée sortit de sa bouche. Et le plus triste, c’est qu’on s’en aperçoit qu’au crépuscule de son existence.

Il souriait. Il venait de mettre ses tripes sur la table et il souriait. Un courage pareil lui faisait envie.

Sa gorge se noua. Ellen baissa les yeux sur la fourchette qu’elle tenait entre ses doigts. Le riz était bien trop jaune pour être honnête… Elle voulait enrouler ses bras autour du cou de Joe. Lui dire à l’oreille ce qu’elle voulait qu’il entende. Pleurer. Hurler. Suffoquer. Vivre. Mais elle se contenta de laisser ses mains sur ses genoux et de relever son regard sur l’homme en face d’elle.

-

.mai.

Il était stone. Ou était en train de le devenir. Peu importe.

Le voir fumer de la marijuana ne la choquait pas. Ça lui était arrivait aussi avant -ce qu’elle se sentait vieille quand elle pensait ça !-. Bref, ça sonnait ridicule mais le truc c’était qu’Ellen n’aimait pas qu’il fume dans son appartement!

-Tu vas déclencher l’alarme incendie Joe…

Elle l’avait invité -en pensant qu’il refuserait- à voir sur son nouvel écran plat la revanche amicale de la finale de hockey des jeux olympique de Vancouver. Accompagné d’un pack de six, de sa guitare et de son herbe magique, il arriva tout sourire. ‘‘J’aurais bien amené un porno mais je pense qu’on à pas les mêmes goûts. Au moins que…’’. Elle se contenta de rouler des yeux et de le frapper dans le bras.

Après deux bières, Ellen hurlait LUUUUUU à chaque fois que le gardien canadien touchait le palet. Joe se contentait de voir le spectacle en souriant, sa guitare entre les mains, chantonnant de temps en temps. Discrètement, Ellen l’observait du coin de l’œil. Il lui était arrivé plusieurs fois d’envier la guitare de Joe : la voir être le centre de toute sa concentration, le fait qu’il la plaque contre lui pour mieux la toucher, voir ses doigts habiles caresser ses cordes et la faire chanter. Jalouse d’un instrument de musique. Pathétique !

Mais elle voulait elle aussi sentir ses doigts sur ses cordes. Sentir et chanter. Sentir. Juste une fois. Sentir.

-Joue-moi Redemption Song.

Joe se retourna vers elle.

-Vraiment ?

Cette chanson était magnifique. Sans doute la plus belle de Marley. Mais... il attendait un autre titre de la part d’Ellen. Elle sourit. Il déposa les armes et il s’exécuta.
Dés les quatre premiers accords, elle laissa tomber ses paupières. Le ronronnement de la télévision, les cordes frottées, la voix fatiguée de Joe et les paroles de Bob. Elle partait. Elle partait loin…

-

Profitant de la mi-temps, elle alla dans la salle de bain s’en se préoccuper de son invité, toujours avachi sur le sofa.

Un long soupir fit descendre sa poitrine quand elle ouvrit l’armoire-miroir au dessus de son évier en porcelaine. Ses pupilles se promenèrent sur les rangés de boites de médicaments, de pilules et cachets, de fioles portant des noms plus barbares les uns que les autres. On était mardi. Deux comprimés rouges. Elle se servit et referma la porte. Elle remplit un verre d’eau, mit les deux comprimés dans sa bouche, prit une gorgée et avala en lançant sa tête en arrière. Quand son visage se redressa, Joe était dans le reflet du miroir, tout sourire. Elle sursauta.

-Si tu as des pilules qui font rigoler, je veux bien les essayer

-Crois moi… elles ne font pas rire.

Appuyer contre l’encadrement de la porte, il la scrutait de haut en bas. Perplexe et fasciné.

-Moi qui pensait que les canadiens étaient des gens sympas : Jim Carrey, Neil Young…. Davy Crockett !

-Il était américain.

-Peu Importe…Ecoute Page, (elle fit volte face) je suis pas très fan de ça… j’ai du en prendre peut-être deux ou trois fois dans ma vie. Je préfère ce qui est naturel, mais vu que tu es une amie et que tu en prends, je veux bien réessayer.

-Ne m’appelle pas comme ça.

Et encore son sourire.

Appuyée contre la porcelaine, Ellen baissa ses paupières. L’étroitesse de la pièce semblait lointaine comme ça, et la proximité de Joe tout aussi loin. Tout était toujours plus facile plongé dans le noir.

Un battement de cœur.

Expiration.

Un battement de cœur.

Inspiration.

Un battement de cœur.

Elle rouvrit ses yeux.

Joe n’avait pas bougé mais elle pouvait voir son corps se raidir. De l’inquiétude… peut-être. De la perplexité… sans doute.

-Ellen, si c’est si difficile pour toi de partager ses pilules… okay, pas de soucis. Mais selon moi et vu ta réaction… tu dois avoir une relation assez étrange avec ton fournisseur.

-Tu n’as pas idée de l’identité de mon fournisseur. Non. Il n’avait pas idée. Joe… tu veux bien qu’on s’asseye au salon ?

Elle prit sa main dans la sienne pour le guider jusqu’au sofa. Brusquement, le sourire de Joe disparut quand il sentit la peau d’Ellen contre la sienne. Il y avait quelque chose de grave dans la façon dont elle encerclait ses doigts… ce qui lui semblait totalement absurde comme pensée. Ils s’assirent sur le canapé. Le regard caramel d’Ellen se baissa, cherchant désespérément un moyen original ou du moins agréable de dire une chose pareil… les pleurs de sa mère lui revinrent aux oreilles quand elle lui avoua ce qu’elle était sur le point de répéter à nouveau.

Un battement de cœur.

Expiration.

-Je… suis malade. Elle sentit les doigts de Joe se resserrer autour des siens et elle crut que ses phalanges allaient craquer sous cette prise. Ça me ronge doucement… je suis en train de mourir. Et… les plus optimistes me donne un an, mais sans doute moins…

Bizarrement, ce fut plus facile que prévu.

Une statue de sel. C’était ce en quoi elle venait de transformer Joe. Un silence pesant s’appropria les lieux.

-Dis quelque chose Joe…

Il la prit alors dans ses bras. Ce geste la fit s’étouffait de surprise. Ses bras la serrèrent d’une façon plein de force mais sans brutalité.  Elle posa ses deux mains dans son dos. Son menton se cala dans le creux de son cou, sa joue contre son oreille, son nez en trompette à l’encolure de son tee-shirt. Il sentait la marijuana et l’aftershave poivré…

-Je ne te laisserais pas toute seule, lança une voix méconnaissable.

Il ne dit rien d’autre. Et ça lui suffisait complètement.

Les américains gagnèrent le match de hockey ce soir-là.

-

.juin.

Ellen passa la première semaine de juin sur ses terres natales. Nova Scotia. Et bien qu’en plein été, l’air Canadien restait beaucoup plus tolérable que le Newyorkais. Alors quand Joe lui proposa de lui cuisiner une fondue Suisse à son retour, elle crut à une blague ("je te la cuisinerais / une fondue ? / ma spécialité Ellen… / une putain de fondue ! / avec du vrai fromage suisse / en plein mois de juin !").

Elle accepta bien sur.

-

Sa cuisine se transforma vite en champs de bataille sans qu’elle s’en aperçoive : des bouts de gruyère ici et là ; une bouteille de vin blanc à moitié vide (ou pleine, selon le point de vue) ; des miettes de pain frais ; et Joe étrangement à l’aise au milieu de tout ça.

-De la fondue. Elle n’y croyait toujours pas.

Sa tête ne prit même pas la peine de se relever vers Ellen mais elle arrivait à voir ses deux sourcils se froncer depuis l'autre côté du comptoir où il se trouvait. Suivi de ses délicieuses fossettes.

-Qu’est-ce qui te fais rire Page ? questionna-t-il en la dévisageant.

-Arrête ! Et c’est toi… ses deux coudes se posèrent sur le meuble pour installer son menton sur ses poings et le fixer…tu es bon à marier.

-J'ai envie d'étrangler toute personne qui me le dis. Y compris ma mère. Il versa un verre de vin blanc dans son fromage. Alors ? Le Canada ?

Son regard s’assombrit.

-Désolée, tu ne veux…souffla-t-il.

-Non.

‘‘Qu’il arrête de s’excuser’’, hurla une voix dans son crâne.

-Ça m’a fait du bien des les revoir…vraiment. Et puis, j’ai pu ramener mes deux bébés.

-Tango et Cash.

-Je ne savais qu'il était si facile de te détester.

Ignorant cette remarque, il commença à retourner tous les tiroirs de la cuisine.

-Où tu caches tes satanées fourchettes ?!

-Attends…

Le tabouret vacilla quand elle le quitta. Délicatement sa main dansa sur le rebord du comptoir quand elle en fit le tour pour s’arrêter au premier tiroir, juste à côté de Joe. Elle en sortit deux fourchettes et se tourna vers lui. Quelques mèches de ses cheveux fouettèrent son épaule. Ce qu’elle était petite comparait à lui.

-T’as vachement cherché…

Une voix sérieuse soupira un "je le savais", puis l’un des deux couverts disparut des doigts d’Ellen pour se retrouver entre ceux de Joe. Son attention se re-concentra aussitôt sur le plat de fromage fondu.

Elle l’observait en silence.

Et cette sensation d’uppercut réapparu dans son estomac. Un mélange d’espoir et de résignation qui lui donnait l’envie de disparaitre sous terre (‘‘ce qui au final arrivera’’, ironisa-t-elle). Mais elle ne baissa pas les yeux, désirant ne pas perdre une miette de l’homme debout à ses côtés.

Le contre jour créait un halo de lumière autour de son profil. A travers la vitre de sa cuisine, le soleil réchauffait la pièce -déjà bouillante- de ses rayons, s’ajoutant à la chaleur du plat des Alpes. Elle continuait à l’observer, et lui, feinta de l’ignorait. Mais ne pas voir ses deux billes ébène l’espionner du coin de l’œil semblait difficile à ne pas remarquer. Les manches de sa chemise étaient relevés jusqu’à ses coudes pour cuisiner. Quelques lamelles de cheddar recouvraient ses avant-bras. Et dire que dix centimètres et deux simples bouts de tissus séparaient sa peau de la sienne…

Puis, une envie soudaine.

Hier, Ellen aurait retourné la situation dans tous les sens, prudente comme elle l’était, pesant le pour et le contre des heures durant, débattant avec elle-même dans le tribunal de justice qu’était son crâne. Mais là. Là ! Au pire, la honte ne serait à supporter que quelques mois. Et au mieux…

Sa main se posa sur sa joue, l’obligeant à tourner son visage vers elle. Elle se mit sur la pointe des pieds pour atteindre ses lèvres tant leur différence de taille était importante.

Elle l’embrassa.

Il ne répondit pas à ce baiser et Ellen se détesta durant de longues secondes, voyant défiler dans sa tête tous les scénarios possibles et imaginables -Joe éclatant de rire et se moquant d’elle -Joe restant surpris et s’en allant sans rien dire -Joe l’évitant le restant de sa vie -Joe reculant par dégout -Joe se transformant en crapaud… et ce scénario là était sans doute le plus souhaitable.

Sa bouche s’éloigna, les yeux clos. Hors de question pour elle de lire quoique ce soit dans cet océan noir qui composait son regard. Elle ne se savait pas si lâche finalement... La nécessité de s’excuser revint (« je suis une saleté d’égoïste sadique qui sait qu’elle va te faire souffrir ! je suis tellement désolée ! »), mais elle se tut quand un pouce glissa sur sa lèvre inférieure.

Un goût de gruyère.
Une main large et chaude passant sur l’arrière de sa nuque.
Puis à nouveau sa bouche.
Ses lèvres.
Sa paume dans le creux de son dos pour l'obliger à se presser contre lui.

Il inclina sa tête pour avoir meilleur accès à sa langue.

Indubitablement : elle n’était qu’une sadique. Lui, un masochiste.

Elle aurait dut faire ça il y a des semaines. Des mois... Tout ce temps gâché ! Il était ce dont elle avait besoin : quelqu’un avec elle, ici et maintenant ; quelqu’un prenant soin d’elle ; quelqu’un tenant à elle ; quelqu’un se demandant à chaque seconde où elle se trouve ; quelqu’un pour qui sa vie compte.
Quelqu’un sans qui elle se serait déjà ouvert les veines.

Leurs lèvres se quittèrent dans un de ses gémissements de contrariété.

-La fondue va être foutue…

Elle déposa un autre baiser sur sa bouche.

-Mais il reste du vin blanc.

-

.juillet.

La première fois qu’ils couchèrent ensemble, ce n’était pas de l’amour mais un pot pourri de sentiments.

De l’excitation, de la frustration, de la tristesse, de la colère, de la lubricité, de l’amitié, du respect, de l'affection. Mais pas de l’amour. Pas au début.

-

Ça commença comme le début d’un vieux film romantique des années 50. Ils entrèrent en trébuchant dans son loft, trempés jusqu’aux os par la pluie torrentielle de New York. La chemise blanche de Joe faisait devinait son torse par un jeu d’humidité, faisant du tissu une deuxième peau, et les cheveux d’Ellen entouraient son visage mouillé… le cliché du début de la scène torride. Mais ce que ce genre de scène semblait omettre souvent, c’était le froid, les claquements de dents, le nez qui coule et les éternuements à chaque courant d’air.

Qu’importe. Cette situation amusait tellement Joe que la moindre tentative d’excuse pour sa mauvaise idée de partir au restaurant en scooter Vespa, finissait dans un éclat de rire.

-Il fait froid. souffla Ellen en prenant ses épaules entre ses mains.

Sans le vouloir, elle fit disparaître le sourire dans ses yeux pour y faire apparaitre de l’inquiétude. A ce moment précis, elle se promit de ne plus jamais se plaindre devant lui.

-Je reviens.

Ellen n’eut pas le temps de lui dire qu’il devenait ridicule qu’il avait déjà disparu dans sa salle de bain. Elle en profita pour enlever ses converses, sa veste et ses chaussettes trempes, les semant les unes à la suite des autres dans le salon de Joe. L’humidité restait dans son tee-shirt, ses cheveux, sur sa peau. Un frisson partit du haut de son cou pour se prolongeait le long de sa colonne vertébrale.

Une main tendue apparu à sa droite avec une serviette. Elle soupira.

-Je suis déjà mourante tu sais… il ne peut rien m’arriver de pire.

Sa blague tomba à plat. Bon… c'était pas tellement drôle finalement. Ellen se lova contre Joe, cherchant juste un peu de chaleur humaine.

-Tu ne devrais pas te coller à moi comme ça… tu vas te mouiller.

-Joe, je suis déjà..., elle s'arrêta quelques secondes, puis, mouillée...

Un rictus para son visage à se sous-entendu.

-Vraiment ? Ses yeux noirs se posèrent sur ses lèvres roses.

-Vraiment.

Il attrapa la petite frimousse d’Ellen entre ses deux grandes mains et la fixa de longue secondes. Il voulait mémoriser ce moment précis, se rappeler de la couleur de ses taches de rousseurs dans l’obscurité de cette pièce, du nombre de gouttes d’eau qui collait à son visage, de la couleur caramel unique de ses iris, de cette petite ride qui apparaissait aux coins de ses lèvres, de la chaleur de son souffle sur ses lèvres. Il voulait… il devait garder cette image aussi longtemps que sa mémoire lui permettra.

Alors il l’embrassa. Et bien sur, elle répondit. D’abord un baiser timide, qui au fil des secondes se transformait en un duo entre langues/gémissements.

-Tu devrais enlever tes vêtements, dit Joe. Ils sont humides.

Ellen ria contre ses lèvres.

-Très subtil…

Ils ne se dirigèrent pas vers sa chambre, mais restèrent au milieu de son salon, laissant leurs mains partir à la découverte du corps de l'autre. Elle, lui, les lumières de la ville et le bruit des gouttes d'eau tombant des cheveux d’Ellen.

-

Elle avait commencé par défaire sa chemise en déposant un baiser sur sa peau à chaque bouton ôté. Il retira son jeans Diesel et son tee-shirt sans arrêter de l’embrasser et de lui murmurer qu’elle était parfaite. Et tous deux se retrouvèrent nus de la façon la plus naturelle du monde sur le sol de son living-room. Chaque fois qu’Ellen repensera maintenant à sa première nuit avec Joe, le pouf violacé informe qu’elle haïssait tant apparaitra. Seul point négatif de cette soirée ! D’un autre côté, une note d’autocongratulation apparue dans le coin de son crâne pour toujours avoir deux ou trois capotes dans le fond de son sac. (« Good Girl » pensa-t-elle)

Après avoir remontés le long de ses cuisses ses doigts, Joe sourit quand il s'aperçu du bout de ces derniers qu'elle était déjà humide pour lui. Elle avait dit vrai. Ellen ferma ses yeux, anticipant ce qui allait arriver. Deux de ses doigts glissèrent en elle. Longs. Minces. Et musclés. Comme Joe l’était.

-Jesus... Joe… Il lui suça le lobe de l’oreille.

-Patience…Il lécha la ligne de sa mâchoire.

-Je suis sérieuse… Il déposa des dizaines de baisser le long de son cou.

-Comme toujours Page. Il mordilla sa clavicule droite.

-Ne… m’appelle pas… comme… ça ! Il sourit contre sa poitrine.

Et son corps se vouta à la seconde où son annulaire rejoignit son majeur et son index. Elle était si étroite autour de ses doigts que Joe ne pouvait s'empêcher d'être excité par l'idée d’entrer en elle pour la sentir se serrer autour de lui.

Ellen tremblait, ridiculement fébrile, frémissante, nerveuse, agitée… Mais elle avait besoin de ça : sentir son corps chaud et frissonnant. Se sentir simplement en vie sous ses mains. Il retira ses doigts et se servit de ce bras désormais libre pour y prendre appui. Joe plaqua les hanches d’Ellen contre le sol de son loft avec son autre main et se positionna entre ses cuisses. Ses yeux noir la questionnèrent en silence. Elle répondit par un baiser sur sa bouche entrouverte.

Ses reins basculèrent.

-Fuck… souffla-t-il au moment exact où il entra en elle, son front posé dans le creux de son cou. Ellen…

Son prénom. Dans sa bouche. Le mot le plus érotique qu’elle ait entendu.

Comment dit-on déjà ? Il voulait la baiser, la niquer, lui faire l’amour, la faire jouir, l’envoyer au septième ciel, lui faire atteindre le nirvana, lui faire oublier jusqu’à son nom… Peu importe. Pour résumer, il voulait qu’elle l’implore de continuer jusqu’à ce que son corps se brise sous son poids. Mais… il lui était difficile de se focaliser sur des objectifs précis quand, sous lui, se trouver une superbe Ellen se mordant la lèvre inférieure, le visage en arrière, ses cheveux collés par la sueur contre ses tempes et sifflant entre ses dents Joe encore et encore et encore.

Cette image allait le hanter durant des années, il en était conscient.

Sa main droite se plaça sur le ventre tendu d’Ellen et descendit vers l’endroit où leur deux corps se rejoignaient. Son pouce caressa son clitoris. Elle étouffa un gémissement dans le fond de sa gorge.

Ses yeux se rouvrirent et roulèrent instinctivement vers leur point de connexion. Voir son pouce la caresser, son bas ventre se tordre, ses abdos se contracter, chacun de ses muscles se raidir entre ses jambes était fascinant. Elle prit son visage entre ses deux mains moites et plongea dans un océan noir. Il était magnifique.

-Joe… tu…

…es beau. C’était ça qu’elle aurait du lui dire. Un regret de plus.

Peut-être était-ce du aux médicaments, à son état ou à une fatigue qui allait se faire de plus en plus réelle, mais Ellen avait l’impression d’être devenu hypersensible au toucher. Elle devinait chacun de ses muscles sous ses mains, elle percevait son cœur battre au si vite que le sien, elle se sentait devenir de plus en plus étroite autour de lui. Il l’embrassa encore.

-God ! Ellen… tu es si… petite… Une agonie en expirant cette phrase. Voilà pourquoi les français surnomment le fait de jouir la petite mort. Mais incontestablement, tout était petit chez Ellen. Sa taille, ses mains, ses hanches, ses seins… et sentir Joe en elle en était une preuve de plus.

-Qu’est-ce …que… ça veut dire ?

Il s’attaqua maintenant à sa poitrine avec ses lèvres.

-‘cune idée mais j’adore ça… et il termina en prenant un de ses tétons dans sa bouche.

Elle suffoqua quelques secondes.

Ses doigts se perdirent dans sa chevelure noire.

Elle respira à nouveau.

Elle n’eut pas le temps de reprendre son souffle qu’elle se retrouva au dessus de Joe pour le chevaucher, dressée sur lui dans toute sa nudité, sa chevelure brune collée à ses épaules humides. Il passa sa main dans ses mèches de cheveux, sur ses seins, le long de son dos jusqu’à la chute de ses reins et enfin jusqu’à ses fesses qu’il attrapa pour mieux accompagner sa pénétration.

-…magnifique…, murmura-t-il en la fixant.

Son index rejoignit son pouce autour de son clitoris. Elle enfonça ses ongles dans les côtes de Joe puis commença cette litanie composée uniquement de son prénom et de quelques consonnes qu’il avait déjà fait chanter à des dizaines de filles avant elle. Mais cette version là était incontestablement la plus enivrante qu’il ait entendu.

Le corps d'Ellen se recroquevilla et se coucha sur celui de Joe, son petit nez en trompette dans le creux de son cou. Elle le sentait gonfler en elle. Il la sentait se serrer autour de lui. Bientôt la fin…

-Embrasse-moi... balbutia sa petite voix.

Ça sonnait si romantique et cucul pour être du Ellen Page mais, bordel, elle faisait l'amour avec Joseph Gordon-Levitt! Joe ne réfléchit même pas et l'embrassa.

Salive. Halètement. Langue. Lèvre. Gémissements. Langue. Humidité. Langue. Langue.

Il s'enfonça plus profondément et durement en elle, soufflant un mix de son prénom et de grognements contre sa peau. Un son sourd et grave venu du tréfonds de sa gorge qu’Ellen ne crut jamais avoir la chance d’entendre. Elle planta ses dents dans son cou pour y gouter  un assortiment de sueur et de parfum poivré.

Elle jouit.

Il la suivit quelques secondes plus tard, sa tête lancée en arrière dans ce satané pouf violacé.

-

Elle avait remarqué quelque chose durant cette nuit, pendant que ses hanches répondaient à chacun de ses coups de reins, un geste, un petit rien auquel elle n’avait pas prêté d’égard mais qui avec du recul disait beaucoup sur lui et elle : il faisait attention de dégager toujours de son visage ses mèches de cheveux qui pouvaient la gêner.

Si ce n’était pas de l’amour au final, alors Ellen ne savait pas ce que c’était.

-

.aout.

-Tu sais quoi ? Il existe 5 étapes face à un deuil : le déni, la colère, le marchandage, la dépression et l’acceptation.

-Je sais… Moi aussi j’ai vu cet épisode des Simpsons.

Il n’y eut comme réponse de sa part qu’un coup d’épaule.

Ils avaient décidé de flâner dans les rues de New-York tout l’après-midi. Il faisait trop beau pour ne pas profiter des arbres de central Park. Cliché de touriste, mais ils s’en foutaient. Et bien qu’ils sachent pertinemment que des photos volées d’eux mains dans la main allaient éclore dans l’heure sur internet. Mais ils s’en foutaient encore plus.

La plus petite des chiennes d’Ellen -Julie- les précédait.

Joe embrassa le haut de son crâne.

-Et toi ? continua Joe, tu en es à quelle étape ?

-Probablement… entre la quatre et la cinq je pense : mi-dépression, mi-acceptation.

-Vraiment ?

-Yep. Toi, par contre, tu es en plein déni ! railla Ellen en plissant son petit nez. Le plus dure reste à venir, tu sais ?

Comment pouvait-elle être aussi distante sur sa propre mort ou sur la mort en général, alors que lui refusait totalement (et elle avait raison sur l’étape 1) l’idée qu’une jeune femme de même pas trente ans puisse mourir ? Il s’arrêta obligeant Ellen à se retourner. Sa prise autour de son poignet se fit plus forte.

-On va faire le tour d’internet en moins d’une heure si tu commences à me rouler des pelles dans des lieux publics.

Il ne l’embrassa pas. Mais se contenta du silence, de cette mer brunante dans ses yeux, du rythme de son cœur sous son pouce et de sa mèche de cheveux qu’il ramena derrière son oreille.

-

Après deux semaines de canicule, une brise venue du Nord refroidissait enfin New York.

Ellen s’allongea en dessous des ses fenêtres grande ouvertes, observant ses rideaux portés par le souffle frais du Canadien. Elle aimait voir ces morceaux de toile transparente suivre le souffle capricieux, traçant de beaux mouvements pourpres et lavande dans le silence de son loft. Des aurores boréales de tissus.

Le bruit d’un cliquetis métallique dans la serrure de sa porte la ramena sur terre. Joe venait d’arriver. Elle resta allongée, fixant le ballet de chiffons. Immobile. Sur le plancher. Ses yeux se fermèrent. Elle ressentait les vibrations de chacun des déplacements de Joe. Un pas sure mais léger. Un sac tombant sur le parquet. Chaussure numéro 1. Chaussure numéro 2. Huit pas au total depuis le seuil de l’entrée. Et plus rien. Il venait de s’arrêter. A la porte du salon d’après elle.

-Ellen ?

Il y avait de l’inquiétude dans sa voix. Ellen n’y entendit pourtant que de la fatigue.

Elle n’ouvrit pas les yeux.

Puis une course. Deux genoux tombant à ses côtés. Une main sur son front. Une autre sur son épaule.

Elle rouvrit les yeux.

-Ellen.

-Quoi ?

-Tu veux me tuer ? soupira-t-il, les épaules tombantes.

L’un des rideaux venait caresser sa joue. Ellen sourit doucement.

-Je sais que j’y arriverais au final… murmura-t-elle.

Il lui demanda comment elle s’était retrouvée en position horizontale et elle lui expliqua qu’elle adorait s’étendre par terre. L’impression de faire partit d’un tout sans doute. Après une levée de sourcils perplexes, Joe la rejoignit sur le contre-plaqué de son appartement. Tête contre tête, ils regardèrent la danse des rideaux avec le vent.

Puis…

-Tu as déjà pensé à la réincarnation ?

Sa question l’abasourdit. Joe n’était pas très croyant. Le simple fait d’évoquer la religion lui hérisser le poil. Alors la réincarnation ? Le visage d’Ellen se tourna vers lui pour fixer son profil parfait. Le parquet était chaud contre sa joue.

-Excuse-moi ?

-La réincarnation. En animal par exemple. Loup, chat, ours… araignée si tu préfères ! dit-il en dirigeant ses yeux sur elle. Alors ? Ton choix ce serait quoi ?

-Hmm… ses lèvres se pincèrent en une moue de réflexion. Un chien peut-être. Mais dans une gentille famille ! Avec gamelle bien pleine, gamins sympas, grand jardin et pour unique objectif m’amuser le restant de mon existence… une bonne vie de chien au final !

Ses mains accompagnées chacune de ses explications quand elle parlait, virevoltant dans les airs en parfaites synchronisation avec les rideaux. Ce choix d’animal lambda était curieux pour une femme comme Ellen. Certes, elle aimait les chiens -surtout les siens- mais un simple clébard ? Quoi de plus banal comme choix.

Elle lui retourna alors la question. Quel animal pour lui ?

-Un corbeau.

Elle éclata de rire mais arrêta dès qu’elle vit sa mine on-ne-peut-plus-sérieuse. Le dos de sa main atterrit contre son torse.

-Désolée… je suis sure que tu dois avoir des arguments très convaincants autre que « c’est un piaf trop cool, trop gothique, c’est trop cool le noir ».

Il enlaça ses doigts aux siens et embrasser la paume de sa main.

-S’il te plait. Tes préjugés sont blessants…Le corbeau a une image sombre, c’est triste. Sa voix descendit dans les graves comme pour évoquer un être cher. Il est extrêmement intelligent pour un volatile. Il est un solitaire, ne vit pas en horde, chasse, vole, chante, n’a aucun prédateur. Et il est un des rares animaux à rester fidèle tout au long de sa vie au même compagnon. C’est un amoureux…

Ellen se retourna, croisa ses deux bras sur la poitrine de Joe et y posa son menton. L’écouter parler la reposer. Elle se roula contre lui (en chat finalement peut-être ? pensa-t-elle)

-…et puis c’est trop cool le noir !

Elle sourit. Il glissa un doigt le long de son nez.

Un animal complexe et critiqué. Voilà pourquoi il l’appréciait. Il lui expliqua que cette décision fut prise quand il avait une dizaine d’année, quand son frère Dan jouait avec le feu -jouait littéralement avec le feu- et qu’il brula sans le vouloir avec un feu d’artifice un pauvre corbeau qui passait dans les environs. Ils le retrouvèrent, le récupérèrent et l’enterrèrent dans une boite à chaussures au fond de leur jardin. -« Converses, la boite à chaussures si je me rappelle bien »-. Il s’était renseigné sur cet animal, sa vie, ses habitudes, et avait décidé d’en devenir un si la réincarnation était possible, parce que, fascinant, fidèle et aucun prédateurs -« si on oubliait mon frère bien sur »- c’était impeccable !

Tant de souvenirs le rattachaient à cet animal…

-Bon je suis d’accord… conclu Ellen, Je suis d’accord pour me réincarner en corbeau si toi tu en deviens un aussi.

-J’avais prévu ça depuis belle lurette.

Et elle se redressa sur ses deux bras, ses longs cheveux tombant autour de son visage, pour presser ses lèvres contre les siennes. Joe lui murmura entre deux baisers un truc comme Je serais ton corbeau personnel Ellen… Il l’était déjà.

-

Après plusieurs mois sans rien paraitre, la fatigue commençait enfin à pointer le bout de son nez. Son corps suivait.
Elle venait de perdre 3 kilos en une semaine et le docteur averti que ça allait empirer. Son visage se transformait en quelque chose d’anguleux qu’elle n’aimait pas du tout : pommettes plus marquées, joues plus creuses, cernes plus profondes. Ça lui donnait un air hautain détestable !

Devant son miroir, elle mit du blush rose sur ses joues. La dernière fois qu’elle avait fait une chose pareille, Ellen devait avoir douze, treize ans… mais ça avait le chic de donner du relief à son visage. Elle posa le pinceau sur le rebord de l’évier et se regarda dans la glace.

Ses deux mains glissèrent sur sa figure pour passer ensuite sur son crâne et se perdre dans ses cheveux. Plus fins eux aussi.

Elle sentit alors un bras passé autour de sa taille. un deuxième. un torse se coller à son dos. un baiser contre sa peau. et un souffle chaud à l’endroit où son cou rejoint ses épaules.

-Qu’est-ce qui se passe ?

Elle ne le regarda pas.

Ses doigts quittèrent ses boucles brunes. Une bonne poignée de cheveux se trouvait dans ses mains. Les effets secondaires de certains médoc’ : le médecin lui avait dit de ne pas s’inquiéter sur ce point, que les effets ne seraient que bénins et ponctuels pour les cheveux. Il n’empêche… Elle s’en débarrassa dans l’évier, fit couler l’eau et les regarda disparaitre dans le siphon.

-Je suis tellement égoïste… souffla la jeune femme.

-L'égoïsme n'est le premier qui me viendrait à l'esprit...

Ses fossettes chatouillèrent son épaule. Elle sourit. Ellen n’était pas sensée rire. Elle fit volte-face et attrapa le visage de Joe entre ses doigts si minces.

-Je suis sérieuse Levitt.

-Gordon-Levitt s’il te plait. Et tu es toujours sérieuse…

Elle commença par s’excuser. S’excuser d’être égoïste. S’excuser de l’avoir embrasser en premier. S’excuser de l’avoir embarqué dans cette relation en sachant parfaitement où ça les mènerait. S’excuser de n’avoir écouté que son unique envie. S’excuser d’être malade. S’excuser d’être Ellen Page.

-Tes monologues peuvent être si ennuyeux quand tu veux... Il embrassa son front. Et contrairement à ce que tu penses, tu es très jolie.

-Tu ne sais pas mentir. Pour un acteur, c’est triste…Je' sais pas combien de kilo j’ai perdu !

-Puisque tu insistes... Burger King ce soir.

-Je suis végétarienne.

-Si tu ne fais pas d'efforts non plus.

-

.septembre.

Trois au total.

Il venait de repousser chacun de ces trois tournages de presque un an… et au passage, de briser quelques contrats.

-T’es cinglé Joe !!

Les hurlements de son manager étaient si stridents à travers le combiné de téléphone qu’elle les entendait depuis son lit. Ses yeux roulèrent. Joe se contenta de dire quelques Ouais et Hmhmm ou encore Bien sûr en contemplant la vie agité de New York depuis la fenêtre de sa chambre. Ellen l’observait depuis son lit. Ce lit qui sentait comme sa peau. Un mélange toxique et addictif d’odeur de cigarette, d’aftershave poivré et de coton sec. Il se tirait une balle dans le pied à refuser et reporter des rôles intéressants pour pouvoir rester avec elle durant son agonie. Parce que c’était ce qui les attendait.

Peut-être qu’il l’aimait. Peut-être croyait-il que passer du temps avec elle allait la faire aller mieux. Et peut-être qu’il s’imaginait un jour lui mettre un anneau au doigt et vieillir avec elle.

Le savoir s’imaginer ça lui serra l’estomac. Joe coupa la communication aussi vite qu’elle avait commençait et se tourna vers Ellen.

-Joe…

Une frimousse illuminée par un sourire ravageur apparu.

-…tu es un abruti ! Tu te rends compte des films que tu rates ?

Il tendit son bras, son i-phone 4 en main et prit une photo d’Ellen avant même qu’elle puisse dire quoi que ce soit. Un oreiller traversa la pièce en volant, accompagné d’une injure canadienne. Sans aucune difficulté, il l’évita.

-Ne fais pas de photo de moi sans mon accord bordel! C’est une atteinte à ma propriété intellectuelle. Un de ses sourcils se souleva pour l’interroger en silence. Mon corps est mon outil de travail. Je suis actrice… Enfin…Je l’étais…

Sa situation se fracassa soudainement contre elle. Certes, le fait de mourir et l’arrêt de son existence était clair dans son crâne, mais le fait d’arrêter de jouer… Oh God, elle n’y avait jamais vraiment songé. Le début de sa maladie l’avait éloigné de la comédie sans qu’elle n’y prête attention, prise dans le tourment des rendez-vous médicaux, des prises de sang, des IRM, des achats de médoc… Mais depuis quelques semaines, tout ce bordel était devenu une routine. Aujourd’hui la scène lui manquait. Porter un masque, oser dévoiler ce que l’on a dans ses tripes... Le théâtre, la petite lucarne et enfin le cinéma... et bientôt, elle allait rallonger la longue liste des acteurs morts bien trop jeune. La perspective de devenir une icône peut-être...
Elle posa les yeux sur Joe. Son satané i-phone toujours dans les mains.

-For God’s sake…. soupira-t-elle en remuant sa tête pour s’effondrer sur le lit les bras en croix, fixant le plafond clair de sa chambre.

-Tu sais Ellen, je te prends en photo depuis des jours pendant que tu dors. Tu as un profil parfait…

Sa tête se releva puis retomba aussitôt. Quoi qu’elle dise, il continuerait alors autant gagner du temps.

-Joe, tu crois… qu’on fera des tee-shirts à mon effigie comme ils font avec James Dean ?

-Non. Sa réponse se voulait on-ne-peut-plus-réfléchi. Tu es trop sérieuse pour devenir une icône rock’n’roll

-C’est dure… mais vrai.

Elle entendait son i-phone glissait dans la poche de son jeans. Le mitraillage allait enfin s’arrêter. Ellen se redressa, s’assit en bout du lit, jambes croisées pour finalement soupirer. Joe avait changé son téléphone i-tech par son fichu caméscope estampillé hit-records.

-Si jamais tu postes ne serait-ce que 30 secondes de moi sur internet ou sur to HitRecord quelque chose, je viendrais te hanter chaque nuits jusqu’à la fin de tes jours, lança-t-elle menaçante, son index pointant avec insistance l’objectif.

Il ne répondit pas. Ses yeux ne quittèrent pas l’écran à cristaux liquides de sa caméra, faisant d’elle le centre de toute sa concentration. Le fredonnement d’une chanson du Velvet Underground conduisait chacun de ses pas.

.                (il deviendra réalisateur. Ça n’était qu’une question d’année. Il commencera par de petits films dans lesquels il jouera avec des amis acteurs. Puis son nom se fera connaitre grâce à la maitrise virtuose de sa caméra. Il filmera ensuite de grandes pointures. La presse comparera son style exubérant à celui de Terry Gillian.

.                son second film sera dédié à son frère

.                son premier film sera dédié à elle)

Sur l’écran ‘deux pouces’, le visage d’Ellen donnait littéralement vie à l’appareil électronique qu’il serrait entre ses mains. Elle ne moufta pas. Telle une figure de proue assise au bout de son lit. Si une force supérieure lui informait que dès maintenant, à partir de ce moment précis, à cette seconde précise, il n’avait le droit de prendre que des images d’elle le restant de son existence et rien d’autre… ça lui irait.

Ellen ~ou le prénom de la femme la plus belle que le monde ait porté d’après les anciens textes grecs~ soupira encore.

-Tu devrais accepter ce rôle, Joe…

-Pourquoi ?

-Parce que, BORDEL !, je tuerais pour donner la réplique à Sean Penn ET Kate Winslet ! Ses petits bras s’agitèrent comme une petite poupée désarticulée.

-Je suis bankable maintenant… , sa voix feintait l’arrogance, et je fais ce que je veux avec ma carrière, je ne m’inquiète pas pour mes opportunités ("t'arrives encore à passer les portes ?!" mais il décida d'ignorer cette interjection de la part d'Ellen). Bon, mon agent veut m’assassiner, mais il s’en remettra. Quand, au film… je pense qu’il réussir à marcher même sans moi. Et oui, ‘y a des choses plus fondamentales que ma carrière.

-Si tu dis rester avec moi…

Mais il ne dit rien. Il éteignit son caméscope et la regarda directement. Les pieds d’Ellen tapaient le parquet d’agitation. Le ciel brillait trop pour rester enfermé dans une chambre (même avec Joseph Gordon-Levitt). Le matelas crissa quand elle le quitta. Elle s’avança vers lui et serra son cou de ses petits bras. Joe posa sa main gauche dans le bas de son dos, l’autre tenant toujours le caméscope. Les pieds-nus, son front arrivait à peine à hauteur de son menton. Elle y déposa un baiser.

-Si tu n’étais pas masochiste, tu partirais Joe… sa réponse se résumait en un sourire moqueur. Et … je suis désolée de te faire revivre ça…

Quand elle fit allusion à la disparition de son frère, son cœur le surprit en ratant une pulsation. Et il crut le sentir s’échapper du fond de sa gorge quand la pensée de revivre ça avec Ellen effleura son esprit. On ne s’habitue pas à la disparition, à la douleur, à l’absence… on apprend juste à bien la cacher. Son étreinte se fit plus vive autour de sa fine taille.

Cette souffrance apparut dans les yeux de Joe et Ellen se mordit la langue pour ne pas dire qu’elle était désolée. Encore une fois. Parce qu’elle l’était réellement ! Elle ferma les yeux et colla son oreille contre son torse. Joe posa son menton sur le haut de son crâne et commença à chantonner « Stop Whispering » en la serrant de toute sa hauteur. Son cœur battait en harmonie avec sa voix.

Comment ne pouvait-elle pas aimer cet homme ? Ça la tuait de savoir qu’elle allait lui faire du mal.

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( part II)
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french, ep/jgl, rpf, personal crow

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