The Musketeers fanfiction - Les péchés des hommes vertueux - Chapitre 2

Jan 03, 2019 11:34

Titre : Les péchés des hommes vertueux
Auteur : Arakasi
Base : The Musketeers (BBC)
Personnages : Athos, Porthos, Aramis, d’Artagnan, Constance
Résumé : Milady de Winter est morte. Définitivement, cette fois. Elle laisse derrière elle un présent ambigu. Fanfic se déroulant après la fin de la saison 2.

Blabla : Et on inaugure l’année 2019 avec un nouveau chapitre ! Aucune garantie que le suivant arrivera aussi rapidement (oui, deux semaine et demi, c’est très rapide pour moi…)

Les péchés des hommes vertueux

Lien vers les autres chapitres : Chapitre 1 I Chapitre 3 I Chapitre 4 I Chapitre 5 I Epilogue


Chapitre 2

D’Artagnan manquait à Constance.

C’était sûrement ridicule, même pour une mariée de fraîche date, de se languir de son époux après seulement une demi-semaine d’absence. Les faits étaient là, pourtant. Quelques soirées solitaires et la maison lui semblait vide, trop silencieuse et trop calme, le lit trop froid. À sa façon juvénile et impulsive, d’Artagnan était l’homme le plus chaleureux qu’elle ait connu. Il était facile de se laisser prendre à cette chaleur, de s’y accoutumer, de s’y lover comme un chat auprès d’un feu de cheminée. Curieusement, après deux saisons de séparation forcée et supportée vaillamment, la moindre absence prolongée lui pesait. La guerre était une atrocité nécessaire - du moins, en jugeaient ainsi les grands de France - mais ce que Constance avait toléré au nom d’un impératif patriotique auquelle elle était déjà peu encline à prêter foi, elle répugnait à l’accepter maintenant que le bruit des canons avait cessé. Avait-elle le choix, cependant ?

Trois jours passés. Une nuit et un jour encore à attendre. Assise devant le poêle de la cuisine, une tasse de tisane brûlante entre les mains et une couverture posée sur ses genoux, Constance prenait son mal en patience. Par les froides soirées hivernales, elle préférait cette petite salle douillette à la pièce à vivre qui la voisinait. L’odeur des plantes séchées et du bois fraîchement coupé la réconfortait. Elle aimait la façon dont la lumière des flammes jouait sur le verre des bocaux entreposés sur les étagères, allumait des reflets fauves sur le cuivre des marmites. Par l’unique fenêtre, elle pouvait voir les flocons tourbillonner et s’accumuler contre la vitre - un petit luxe qu’ils s’étaient offert en puisant dans les maigres économies accumulées durant son premier mariage. Au matin, la neige aurait fondu et tout Paris pataugerait dans la boue. Et, quand viendrait le soir, d’Artagnan serait là.

On frappa à la porte.

Dix heures avaient sonné à la petite horloge accrochée au mur et Constance s’apprêtait à rejoindre son lit. Sa première réaction fut un mouvement de joie irraisonné. Son pragmatisme naturel reprit immédiatement le dessus. Chartres était à un jour de chevauchée de Paris par temps estival. Les chances pour que d’Artagnan soit déjà de retour à la capitale étaient presque inexistantes. Un peu refroidie, elle décrocha une lampe à huile de sa poutre et glissa un petit pistolet dans son corsage, cadeau de son époux attentionné et fervent partisan de l’auto-défense féminine. Elle quitta la cuisine, l’arme bien dissimulée dans les plis de sa robe, une main fermement refermée autour de sa crosse.

Le porte d’entrée donnait directement dans la pièce à vivre. Quand Constance l’ouvrit, une bouffée d’air glacé s’engouffra dans le salon, parsemant le sol de gouttelettes de neige fondue.

Athos se trouvait sur le seuil.

Pendant un instant, Constance resta interdite. La température était si froide que des stalactites de glace pendaient des maçonneries, mais le mousquetaire était nu-tête et en simple pourpoint dans la bourrasque. Des flocons s’accrochaient en cristaux blancs à sa barbe et à ses vêtements. Il paraissait frigorifié, fatigué et légèrement ivre. Il la salua poliment du chef.

“Bonsoir, madame d’Artagnan.

- Il n’est pas là.” répliqua-elle par automatisme.

Sa réponse déconcerta son visiteur. Il la fixa en cillant, peinant visiblement à trouver une réaction adéquate. Elle se morigéna intérieurement. Idiote. Bien entendu qu’il savait que d’Artagnan était absent. Il avait signé lui-même l’ordre de mission l’envoyant à Chartres quelques jours plus tôt. Un bref silence gêné s’ensuivit pendant lequel ils restèrent face à face, l’homme immobile sous la neige et la jeune femme dans l’encadrement de la porte. Constante tenait sa lanterne levée dans un main, l’autre agrippant toujours la crosse de son petit pistolet.

“Ce n’est pas lui que je suis venu voir.” dit maladroitement Athos.

Il allait ajouter autre chose quand un éternuement étouffé attira l’attention de Constance. Elle tourna la tête et vit l’enfant. C’était un petit garçon de six à sept ans, les pieds enfoncés dans la neige jusqu’aux mollets. La cape d’Athos était drapée autour de ses épaules, l’emmaillotant aussi étroitement que des langes de nouveau-né. Il la regardait, son petit visage blanc disparaissant presque entièrement dans l’ombre du chapeau de mousquetaire

“Juste ciel…” souffla Constance.

Elle prit une inspiration tremblante.

“Mais vous avez complètement perdu l’esprit !”

Le pistolet échappa à jeune femme et sonna en frappant le sol dallé. Elle tendit les mains et attira précipitamment le garçonnet à l’intérieur. Le petit éternua de nouveau - un ébrouement discret de chiot enrhumé - mais se laissa faire sans protester. Athos le suivit avec raideur. Constance lui prêta à peine attention. Sans prendre le temps de fermer la porte, elle s’agenouilla devant l’enfant et dégagea ses petites mains des pans de la cape détrempée. Elle serra ses doigts gelés entre les siens et les frictionna jusqu’à y ramener un peu de tiédeur. Le chapeau dégoulinant d’Athos pendait de part et d’autre du visage du petit. Elle le lui ôta et le rendit au mousquetaire qui le récupéra sans un mot. L’enfant frissonnait toujours. Constance l’enlaça et le souleva. Malgré sa minceur, il n’avait rien d’un ballot de chiffons, mais elle ne manquait pas de vigueur. Portant le garçonnet dans ses bras, elle entreprit de l’emmener jusqu’à la cuisine où le feu ronflait toujours au creux du poêle.

À l’instant de partir, une seconde pensée la retint. Le mousquetaire était là où elle l’avait laissé, planté près du seuil, son couvre-chef en piteux état pendant dans main. Constante lui trouva le regard étrange, presque vacant. Peut-être était-il plus soûl qu’elle ne l’avait cru. Ils n’avaient pas échangé un mot depuis le retour du régiment à Paris, mais, si elle se fiait aux maigres bribes d’information échappées à d’Artagnan et ses amis lors des soirées partagées en commun, la sobriété n’était pas son état naturel à cette heure de la nuit. Peu importait. Elle n’avait pas le temps, ni la patience de s’en soucier. Elle désigna du menton l’âtre couvert de cendres de la cheminée.

“Fermez la porte, lui ordonna-t-elle. Il y a des bûches derrière la commode. Allumez un feu et séchez-vous. Vous allez attraper la mort.”

Athos baissa les yeux sur la flaque de boue et d’eau sale qui s’élargissait autour de ses bottes.

“Je vais salir votre sol, dit-il.

- Vous le faites déjà.” répliqua sèchement la jeune femme.

Elle quitta la pièce et ferma la porte.

Une fois dans la cuisine, Constance chassa le mousquetaire de ses pensées. L’enfant seul méritait toutes sa prévenance. Elle commença à lui enlever la cape d’Athos. L’épais tissu était si gorgé d’humidité qu’il semblait peser le double de son poids, mais il avait protégé assez efficacement le corps fragile du petit garçon. On ne pouvait pas en dire autant de ses pieds. Ses chaussures n’étaient pas de mauvaise qualité mais elles n’étaient pas faites pour affronter un hiver rigoureux. Les orteils de l’enfant étaient recroquevillés par le froid et elle les enveloppa aussitôt dans la couverture de laine qu’elle avait abandonnée quelques minutes plus tôt. Constance retira rapidement le reste des habits du petit garçon avant de l’emmitoufler avec tout ce qui lui tomba sous la main : torchons propres, nappes brodées et une vieille cape de son mari oubliée sur une chaise.

Se faisant, elle parlait au garçonnet. Elle lui demanda son nom, si ses orteils le faisaient souffrir, où étaient ses parents, s’il avait mangé… Le petit restait muet. Il se contenta d'acquiescer quand elle évoqua son dernier repas. Il ne la quittait pas des yeux, cependant - des yeux d’un vert très clair, transparent comme l’eau de roche. Sans savoir pourquoi, elle en fut légèrement troublée. Par ça et par l’expression du visage du petit garçon, d’une gravité presque solennelle, très inhabituelle chez un enfant de cet âge. Attentive. Circonspecte. Familière.

L’espace d’une seconde, Constance eut le souffle coupé.

Pourquoi ?

Pourquoi d’Artagnan n’était-il pas là ?

Elle se détourna prestement de crainte que l’enfant ne remarque son effarement et s’en alarme. Ses mains frémissaient un peu tandis qu’elle remplissait d’eau une marmite et la déposait près du feu pour la faire chauffer. Constance les contrôla et adressa un sourire vacillant au petit qui ne le lui rendit pas. Le poêle était brûlant et l’eau fut tiède en moins de dix minutes - laps de temps pendant lequel elle babilla nerveusement en se déplaçant d’un bout à l’autre de la petite pièce. Puis elle dépaqueta le garçonnet et le lava soigneusement de la tête aux pieds, davantage dans l’espoir de le réchauffer que de le décrasser. Quand toute trace de chair de poule eut disparu de la peau de l’enfant et que ses cheveux bruns furent aussi hérissés qu’une corolle de pissenlit, elle s’estima enfin satisfaite.

La jeune femme venait de l’enrouler de nouveau dans sa couverture quand il se mit à trembler.

Ses frissons n’avaient jamais complétement cessé, mais ils prirent soudain un tour nettement plus angoissant. Les dents du petit claquaient. Ses yeux se remplirent de larmes. Sa poitrine palpitait. Ses membres frêles se mirent à tressauter avec tant de violence qu’elle craignit un instant qu’il n’entre en convulsion. Constance prit peur. Elle tomba à genoux et prit l’enfant en état de choc dans ses bras. Elle le serra, le caressa, pressa sa joue contre la sienne, lui promit que tout irait bien, qu’on ne lui ferait pas de mal… Un instant, il resta raide et tremblotant contre sa poitrine - un petit animal pris de terreur - puis quelque chose se dénoua. Il lui rendit son étreinte, s’accrocha à elle avec l’énergie désespérée d’un chaton à la mamelle de sa mère. Il pleura un peu. Elle sentit ses larmes couler au creux de son cou.

Constance le berça ainsi pendant une quinzaine de minutes, le coeur déchiré entre l’attendrissement et une colère bouillonnante mêlée de pitié contre l’homme qui attendait dans la pièce voisine. Elle la berça jusqu’à que ses pleurs s’assèchent et que sa respiration affolée s’apaise. Puis elle le souleva pour la deuxième fois et le monta à l’étage par l’escalier exigu qui menait à la chambre à coucher. La jeune femme revêtit le petit d’une chemise propre de d’Artagnan et le glissa dans le lit conjugal - il était trop tard pour dresser un couchage supplémentaire et son époux ne s’en formaliserait assurément pas.

Avant de quitter la pièce, elle lui demanda à nouveau son nom.

Il le lui donna.



En émergeant de la cage d’escalier, elle manqua de percuter Athos.

Le mousquetaire s’apprêtait à gravir les marches. Il s’immobilisa en la voyant et s'écarta pour la laisser passer. La neige dans sa barbe et sur ses vêtements avait fondu, mais ceux-ci étaient toujours assombris d’humidité. Constance n’eut pas besoin de se rendre dans la pièce à vivre pour deviner qu’il n’avait tenu aucun compte de ses recommandations. Il avait retiré ses bottes couvertes de boue, néanmoins - une marque de savoir-vivre dont elle lui fut gré. Pas assez cependant pour passer outre son exaspération et la détresse égarée du petit garçon endormi à l’étage.

“Il va bien, lâcha-t-elle aigrement. Pas grâce à vous.”

La jeune femme traversa la cuisine et commença à étendre à grands gestes furieux les habits du garçonnet devant le feu. L’irritation la brûlait toujours, mais elle tentait de la contrôler, tout en redoutant ce qui arriverait une fois cette vertueuse colère évanouie. Dieu savait qu’elle n’était pas prête à braver une telle situation ! L’enfant, passe encore. Il était seul, impuissant, malheureux, il avait besoin d’elle. Elle n’était que trop disposée à lui venir en aide. Mais tout ce que sous-entendait la présence de cet enfant, ses yeux verts et graves, l’homme à ses côtés… C’était trop. Beaucoup trop. Particulièrement en l’absence de d’Artagnan et de ses amis. Maudits soient-ils ! Où étaient les mousquetaires quand on avait besoin d’eux ?

Tout en s’activant fébrilement, Constance ne cessait de houspiller Athos.

“À quoi songiez-vous, au nom du ciel ? Ce n’est plus de l’irresponsabilité, c’est de la démence ! Un enfant de cet âge, sous la neige, sans manteau, sans bottes, sans cape ! Vous auriez eu sa mort sur la conscience ! Dire que je vous prenais pour le plus raisonnable du lot… ”

Une mère-poule admonestant un de ses poussins indisciplinés. Elle était incapable de s’en empêcher. Plus perturbante était la passivité avec laquelle son interlocuteur subissait ses réprimandes saccadées. Il la suivait du regard sans faire mine de l’arrêter ou de l’interrompre. Ni montrer le moindre signe de compréhension, d’ailleurs. Constance doutait sérieusement qu’il ait assimilé une seule de ses déclarations. Elle aurait sans doute obtenu de meilleurs résultats en vitupérant contre sa marmite. Elle avait attisé les braises du poêle pour la quatrième fois et commençait à s’affoler à l’idée de se trouver à court de tâches ménagères, quand le mousquetaire émit un curieux bruit étouffé, quelque chose à mi-chemin entre le hoquet et l’exclamation.

Constance se retourna juste à temps pour le voir s’effondrer.

S’abattre aurait peut-être été plus approprié. Un arbre que l’on coupe. Un instant debout, l’instant suivant à terre. Le dos d’Athos percuta une étagère quand il s’assit brutalement à même le sol, entraînant la chute fracassante de plusieurs bocaux d’herbes aromatiques. La jeune femme en resta figée de stupeur, si complètement prise au dépourvu qu’elle en oublia d’un coup sa colère. Le mousquetaire était gris. Ses yeux exorbités fixaient le vide. De sa vie, Constance n’avait jamais vu une expression d’horreur si pure, si nette sur la figure de quelqu’un. Elle se précipita.

“Mon Dieu, qu’avez-vous ?”

Athos ne répondit pas. Il tremblait aussi violemment que le garçonnet auparavant, mais ces soubresauts, déjà impressionnants chez un enfant, étaient d’autant plus effrayants chez un homme fait. Constance s’accroupit à ses côtés. À ce moment précis, la ressemblance entre le mousquetaire prostré et le petit garçon tétanisé était si criante, d’une évidence si aveuglante que la jeune femme en reçut comme un coup au coeur. Elle ne savait que faire. C’était un adulte, l’ami de son époux, accessoirement son supérieur hiérarchique - un détail auquel elle avait peu songé jusque là. Elle ne pouvait décemment l’enlacer et le réconforter comme elle l’avait fait du petit garçon. À court d’inspiration, elle lui saisit les mains et les pressa. Il lui broya les siennes en retour avec tant de force qu’elle dut étouffer un cri de douleur.

“Il va bien, chuchota-t-elle. Je vous jure qu’il va bien...

- Vous ne comprenez pas.”

Il avait le regard fou d’un homme en proie à la fièvre ou au cauchemar.

“Vous ne comprenez pas...”

Et dans un souffle épouvanté :

“Elle était enceinte. Elle était enceinte quand je l’ai…”

Athos n’en dit pas plus.

Constance n’avait pas besoin d’en entendre davantage. Désemparée, elle ne pouvait que rester là, ses doigts entrelacés à ceux gantés du mousquetaire anéanti. Elle aurait voulu trouver des mots apaisants, des mots rassurants. Elle aurait voulu lui dire “Ce n’est pas votre faute”. À la vérité, elle n’en savait rien. Elle connaissait peu de choses du passé d’Athos - d’Artagnan, abondamment prolixe sur tout autre sujet, restait discret sur les secrets de ses frères d’armes - mais ce qu’elle savait était aussi triste que sordide. C’était un homme bon, elle n’en doutait pas. Un homme brave, droit et vertueux. Elle le connaissait peu mais l'appréciait et appréciait encore davantage l’affection évidente qu’il vouait à son époux, même si cette affection ne s’était guère montrée démonstrative ces derniers temps. Mais les hommes bons commettent leurs propres atrocités, parfois plus effroyables que celles des mauvais, et les paient souvent bien plus cher. Les crapules ne connaissent pas le remords.

Elle dit plutôt :

“Lui avez-vous demandé son nom ?”

Silence. Elle serra les lèvres pour retenir une remarque trop coupante et probablement injuste.

“Il s’appelle Olivier.”

Athos la considéra avec incrédulité. Il laissa échapper un rire étranglé. Ou peut-être un sanglot. Constance n’en était pas certaine. L’espace d’une seconde, elle le crut sur le point de fondre en larmes - perspective effrayante à laquelle elle n’était absolument pas préparée - mais il se contint. Elle fut témoin de l’effort intense, convulsif qu’il déploya pour retrouver une contenance. Un effort presque couronné de succès. Son visage restait blême et en sueur, mais ses tremblements se calmèrent, réduits au niveau de simples frissons nerveux.

Le mousquetaire baissa les yeux sur le sol jonché d’éclats de verre et sur ses mains crispées sur celles de la jeune femme. Il afficha un air brièvement penaud et les relâcha.

“S’il vous plaît, pouvez-vous… ?” marmonna-t-il.

Constance glissa un bras sous son aisselle et l’aida à se hisser sur ses pieds. Ses propres jambes flageolaient un peu sous l’effet conjugué du choc et du soulagement. Elle conduisit l’homme chancelant jusqu’au fauteuil en osier qu’elle avait occupé durant la soirée. Il restait un peu de soupe tiède dans une casserole. Elle en remplit un bol qu’elle amena à Athos qui s’en saisit avec une gratitude presque pathétique. En traversant la pièce, la jeune femme remarqua un baluchon encore mouillé abandonné sur la table. Elle n’avait pas noté que le mousquetaire le portait à son arrivée et lui-même l’avait tout à fait oublié si elle en jugeait son oeil terne quand elle le lui désigna. Le petit sac contenait quelques habits sommairement pliés et une chemise de nuit. Peu de choses mais déjà plus qu’elle n’en espérait.

“Est-ce à lui ?” demanda-t-elle.

Athos ne s’intéressait plus au baluchon.

“Ce n’est pas vrai…”

À peine un murmure. Et une déclaration en flagrante contradiction avec les paroles balbutiées quelques minutes plus tôt. Constance aurait pu le souligner, mais le regard d’Athos la suppliait muettement de n’en rien faire. La jeune femme s’en abstint donc. Ce n’était pas à elle de plaider cette cause. Elle ne s’en sentait ni la légitimité, ni les arguments. Mais il y avait quelque chose qu’elle pouvait faire tout de même. Qu’elle devait faire. Elle prit un tabouret et s’assit aux côtés d’Athos.

“Rien ne vous oblige à affronter cela seul.” lui dit-elle.

Silence toujours. Le bol de soupe refroidissait sur les genoux du mousquetaire, déjà oublié. Elle prit à nouveau une de ses mains entre les siennes. Un geste doux et délibéré auquel il ne tenta pas de se soustraire.

“Je peux vous le garder pour cette nuit, continua-t-elle à mi-voix, mais d’Artagnan sera là demain soir, vous le savez. Je vous en prie, promettez-moi... Promettez-moi que vous allez leur en parler.

- Ai-je le choix ?”

La question appelait une réponse sincère. Constance la lui donna.

“Non. Si vous n’en parlez pas, je le ferai à votre place.”

Il aurait pu à bon droit s’en irriter. Elle s’attendait à moitié à ce qu’il le fit et s’y était préparée. Quel droit avait-elle de le mettre au pied du mur ? Au lieu de cela, il lui adressa un sourire blafard.

“Vous êtes une femme très généreuse, madame d’Artagnan.” constata-t-il.

Elle piqua un fard - la malédiction des peaux trop claires - et détourna la tête pour dissimuler son malaise.

“Pas plus qu’une autre.

- Si.”

Il y avait tant de tristesse dans ce dernier mot, tant de lassitude désolée, que Constance ne trouva rien à ajouter. Elle récupéra le bol à moitié vide et se dirigea vers la cuvette pour le laver.


Le journée touchait à sa fin quand Athos vint les trouver.

Le temps s’était légèrement réchauffé depuis la veille et les soldats se prélassaient par petits groupes paresseux dans l’enceinte de la caserne en attendant la fin de leur service. Porthos et Aramis tuaient l’ennui en jouant au piquet sur un bout de la table commune. Ils jouaient aussi mal l’un que l’autre, l’esprit distrait par des pensées moroses, mais la chance penchait nettement du côté de Porthos - une circonstance de peu d’importance puisque le vainqueur s’était engagé dès le début du jeu à inviter le vaincu à la taverne pour le consoler de son infortune. D’Artagnan les avait accompagnés le temps de deux parties mais avait rapidement lâché le morceau. Le gascon ne tenait pas en place. Un vrai diable sur ressort. Depuis son retour de Chartres, deux heures auparavant, il rongeait son frein, manifestement impatient de rentrer chez lui et d’échapper à l’atmosphère morne de la caserne. Difficile de l’en blâmer. N’empêche, Aramis aurait apprécié qu’il cesse ses allers-retours frénétiques entre les écuries et l'armurerie. L’agitation stérile lui tapait sur les nerfs.

De leur coin de cour, ils virent Athos descendre d’un pas lourd l’escalier qui menait à son bureau. Rien d’étonnant à cela. Le soleil s’était couché et leur capitaine devait avoir hâte de se biturer tranquillement chez lui. Déprimant de constater à quelle vitesse cette attitude était devenue quotidienne, au point de ne plus susciter aucune réaction chez les hommes de la garnison.

Mais, au lieu de se diriger vers la salle d’armes pour un dernier tour d’inspection comme d'accoutumée, Athos obliqua dans leur direction. Étonnant. Deux mois bientôt qu’il n’avait manifesté aucune velléité de renouer avec eux. Quand il condescendait à s’adresser à eux, c’était séparément et rencogné derrière sa table comme derrière les murs d’un fortin. Je t’en foutrais de la chaleur amicale.

Il s’immobilisa devant leur table et brutalement :

“J’ai quelque chose à vous montrer."

C’était un peu fort.

La patience n’était pas la principale qualité d’Aramis mais il s’était efforcé à la tolérance pendant presque une demi-année. Il avait supporté le mutisme interminable, la retenue glaciale d’Athos et son indifférence ostensible sans broncher - ou peu s’en fallait. Alors, voir l’intéressé débarquer soudainement et exiger sans ambage leur coopération, cela lui hérissait légèrement le poil et à raison ! Oh, il n’envisagea pas sérieusement d’envoyer Athos au diable, mais une petite réplique aigre et bien sentie ne pouvait pas faire de mal. Il hésitait entre “Grand Dieu, nous nous parlons ?” et “Voyez-vous, mon capitaine, nous sommes un peu occupés pour le moment...” quand Porthos s’empara tranquillement des cartes posées sur la table. Il les réunit en un petit paquet rectiligne qu’il glissa dans son pourpoint, puis se leva.

“On te suit, camarade.” répondit-il.

Et tout fut dit.

Ils attendirent qu’Athos ait expédié ses derniers devoirs journaliers, puis le suivirent à travers les rues de Paris. S’ils avaient espéré des explications supplémentaires en cours de route, ils en furent pour leur frais. Les sept mots prononcés dans la cour avaient visiblement épuisé son quota de loquacité pour la soirée. D’Artagnan était nerveux, Porthos stoïque et Aramis agacé. Intrigué également, il fallait bien l’admettre. Il fallait à Athos une grande nécessité pour qu’il se soit décidé à enfin les aborder. Même dans ses bonnes périodes, leur ami avait toujours montré une répugnance marquée et quasi-pathologique à demander de l’assistance. Pour quoi que ce fût d’ailleurs. Du soutien dans un combat à quelques sous pour terminer un fin de semaine difficile, en passant par un remède maison pour soigner une grippe carabinée - Aramis en faisait d’excellents, aussi ignobles qu’efficaces. Alors, aujourd’hui, vous pensez...

Tout en remontant la chaussée ponctuée de flaques de boue grisâtres de la rue Sainte Catherine, le mousquetaire lorgnait du coin de l’oeil la physionomie d’Athos. Dure, maussade et harassée à la fois. Plutôt ordinaire à cette heure de la journée. Pourtant, il y décela quelque chose de nouveau. Une préoccupation farouche et fiévreuse, celle d’un homme si profondément obnubilé par une pensée ou un objectif qu’il en négligeait tout ce qui ne s’y rapportait pas de près ou de loin. Le bon vouloir et l’éventuelle susceptibilité de ses frères d’armes en faisaient clairement partie.

Au bout d’une vingtaine de minutes de marche, ils s’arrêtèrent devant le logis des d’Artagnan. Le gascon haussa un sourcil interrogateur. Athos eut la bonne grâce de paraître gêné, quoique très fugacement. Constance vint leur ouvrir au premier heurt. Elle paraissait elle-même fatiguée, les yeux cernés et les traits tirés par l’anxiété. Elle ne masqua pas son soulagement en les découvrant tout quatre debouts devant sa porte. Aramis ôta courtoisement son feutre. On était civil ou on ne l’était pas. La jeune femme prit à peine le temps d’embrasser un d’Artagnan perplexe et un peu perturbé avant de les guider vivement à l’intérieur de la maison.

“Entrez, dit-elle. Il finit son souper.”

Pendant le court trajet depuis la caserne, Aramis avait envisagé divers dénouements à leur petite excursion, les uns dramatiques, les autres triviaux, tous purement chimériques puisqu’il ne disposait d’aucun indice pour évaluer la suite des événements. La plupart impliquait une bonne dose de violence. S’il s’en fiait à son expérience, les expéditions mystérieuses menées à la tombée de la nuit se terminaient rarement sans plaies et bosses.

Comme quoi, on pouvait toujours être surpris… Dans la petite cuisine des d’Artagnan, pas d’escouade de malandrins ou de gardes rouges armés jusqu’aux dents, mais un petit garçon en train de terminer paisiblement assiette. L’enfant tenait un bout de pain à la main et l’utilisait pour nettoyer ses restes de ragoût. L’opération était d'importance et requérait tant son attention qu’il ne nota pas immédiatement l’entrée de la jeune femme et des trois hommes dans la pièce - Athos était resté dans la pièce à vivre. Il leva la tête à leur approche. Battit des paupières et posa son pain sur la table. Les mousquetaires fixèrent le petit garçon. Le petit garçon fixa les mousquetaires. Personne ne pipa mot. Aramis chercha les yeux de Constance, mais elle se tordait les mains, le visage tourné vers la porte restée entrouverte et qu’Athos n’avait décidément aucune intention de franchir.

Il prit sur lui de dénouer la situation. S’accroupissant devant la chaise du petit pour mettre son visage moustachu à la hauteur du sien, il lui sourit.

“Eh bien, chaton, qu’est ce que tu fais ici ? On t’a trouvé devant la cheminée ?”

Aramis s’était toujours flatté d’attirer la confiance des jeunes enfants, mais il était dit que cette soirée serait celle des déconvenues.

Le garçonnet ne daigna même pas lui sourire en retour. S’il avait fallu choisir un terme pour définir le regard qui lui renvoya, le plus pertinent aurait été dubitatif. Un regard qui proclamait que le monde était une affaire sérieuse qu’il convenait d’aborder de même. Qu’il était irresponsable, voire criminel, d’en faire autrement. Que l’insouciance était un luxe que seuls les sots et les inconscients pouvaient se permettre. Un regard qu’Aramis avait affronté bien souvent, ces sept dernières années, et qu’il connaissait aussi intimement que le gros rire de Porthos ou le froncement de sourcils de Tréville.

Il en resta bouche bée.

Dans son dos, d’Artagnan prit une courte et bruyante inspiration. Et Porthos gronda :

“Putain de bordel de Dieu.”

Aramis n’aurait pas mieux dit.


“C’est un orphelin, déclara Athos. Il n’appartient à personne.”

Aramis se demanda si son ami mesurait la cruauté de ces paroles. Probablement pas. Il connaissait Athos depuis assez longtemps pour le croire foncièrement incapable de cruauté volontaire. D'égoïsme, c’était autre chose. Rien de plus profondément égoïste que la douleur. Lui-même en savait quelque chose pour l’avoir expérimenté à quelques reprises - dont certaines encore récentes. Dès que l’on effleurait, ne serait-ce que du bout des doigts, la cause originelle de sa souffrance, Athos se roidissait. Il devenait un autre homme, presque un étranger et un étranger qu’il n’était pas bon de côtoyer. C’était désagréable et affligeant, mais tristement prévisible.

Pour la première fois depuis ce qui semblait être une éternité, ils étaient tous les quatre réunis dans une même salle et l’ambiance n’avait rien de chaleureux, ni d’amical. Un petit feu achevait de se consumer dans l’âtre de la cheminée, apportant un peu de tiédeur bienvenue à la pièce. D’Artagnan et Constance étaient assis de part et d’autre de la table, les mains de son épouse dans celles du jeune homme. Porthos et Aramis s’étaient appropriés les deux fauteuils du salon. Le mousquetaire basané avait allongé ses jambes pour appuyer ses bottes sur un tabouret bas. Athos était resté debout. Le dos appuyé contre l’une des poutres de la cheminée, les épaules carrées et rigides comme avant un assaut, il leur faisait face. Il serrait les dents. Aramis pouvait voir distinctement les tendons de ses mâchoires contractées se dessiner sous sa barbe.

“Ce n’est pas ce qu’elle semblait affirmer…” commenta Porthos.

Athos se raidit davantage.

Un exploit au vu des circonstances. Et un indéniable acte de bravoure de la part du grand mulâtre. S’il y avait un sujet que leur camarade répugnait à aborder davantage que sa possible paternité, c’était bien évidemment l’identité de la mère du petit. Il leur avait parlé du billet. Du billet, de la fleur séchée et du pensionnat. Il n’avait pu faire autrement, mais avait mis à son récit toute la passion d’un juriste débitant un acte notarial. Le ton ferme, neutre, presque didactique. Une excellente performance qu’un comédien du Marais n’aurait pas désavouée. Aucun d’entre eux n’était dupe. Athos irradiait la tension comme un phare sa lumière - une tension palpable, presque insoutenable qui vous mettait les nerfs à vif comme frottés au papier de verre. Aramis, pourtant peu impressionnable par nature, en était inquiété. À ce niveau de pression nerveuse, les hommes pliaient ou se brisaient. Il n’y avait pas de troisième issue.

Et Athos ne voulait pas plier. Peut-être en était-il incapable.

“Elle a menti.” dit-il.

Aramis prit la mesure de ses troupes d’un coup d’oeil. Pas très enthousiastes, les troupes. Le gascon était pétrifié et Constance au bord de l’épuisement. Il ne pouvait apparemment compter que sur Porthos qui semblait pour l’instant plongé dans l’examen méditatif d’une brique mal taillée du mur.

- Sans doute, concéda-t-il prudemment. Mais j’ai beau cherché, j’avoue ne pas saisir pourquoi elle aurait menti sur ce sujet en particulier…

- Elle mentait sur tout.”

Une faille, enfin.

Ils avaient tous entendu la note d’hystérie vibrer dans la voix d’Athos. Lui-même en fut conscient car il se tut aussitôt et resta pantelant, la respiration heurtée comme un coursier dont on aurait trop brutalement serré la bride. Aramis le vit tâtonner à sa ceinture et en détacher une gourde de cuir. Il la porta à ses lèvres et, sans regarder personne, en avala plusieurs lampées hâtives. La gourde frémissait dans ses mains quand il la rabaissa pour la raccrocher à son emplacement initial. Un aveux de faiblesse impensable. Athos avait souvent bu devant eux - le moyen de faire autrement ? - mais jamais avec cette intensité maladive, dérangeante. Aramis avait sincèrement pensé que tout était préférable à l’atonie morbide des derniers mois. Il n’en était plus certain.

Une pause embarrassée suivit. S'éternisa. Porthos contemplait sa brique, d’Artagnan ses pieds et Athos un point non défini quelque part au dessus de la porte de la cuisine. Quand il devint évident que ce dernier était tout à fait capable d’abandonner la discussion sans autre forme de procès, Aramis reposa ses bottes à terre. Ses talons résonnèrent bruyamment en touchant le sol. Quatre paires d’yeux se fixèrent immédiatement sur lui, dans l'expectative.

Bon. À la guerre comme à la guerre.

“Quoi qu’il en soit, conclut-t-il doctement, nous sommes maintenant responsable du petit. Nous ne pouvons le ramener dans son pensionnat, ni le confier à un orphelinat. Constance, pouvez-vous le loger et le nourrir encore quelques jours ? Le temps de prendre des dispositions plus durables ?

- Bien entendu.” répondit la jeune femme.

D'Artagnan se racla la gorge.

“Je note que personne ne me demande mon avis, souligna-t-il discrètement, mais je tiens à préciser que je suis d'accord.”

Constance lui adressa un sourire reconnaissant. L’atmosphère se détendit imperceptiblement. Une décision avait été prise et, aussi imparfaite et provisoire soit-elle, chacun en était soulagé - Athos compris, sans doute, bien qu’'il n'en montra strictement rien. Bénis soient les miracles de la temporisation. Aramis se leva et repoussa son fauteuil. Il avait grande envie d’un coup à boire, accompagné si possible d’un solide repas et des charmes faciles d’une jolie serveuse. Et les d’Artagnan avaient manifestement besoin d’un peu de temps à eux pour se retrouver et organiser les jours à venir. Il leur souhaitait bien du courage. Porthos l’imita avec un grognement sonore. Peu de paroles furent échangées ensuite. Les banalités d'usage. Juste avant de franchir le seuil, le colosse enserra le gascon et son épouse dans une étreinte rugueuse - la seconde en parut un peu étonnée mais pas franchement dérangée. Aramis embrassa la jeune femme sur la joue et tapota l’épaule de d’Artagnan.

Cinq minutes plus tard, ils étaient dans la rue et Aramis réalisait que le plus pénible restait encore à faire. Dieu merci, Porthos lui épargna un devoir déplaisant. Avec cette assurance placide qui n’appartenait qu’à lui et aux ours des montagnes, le grand mulâtre se tourna vers Athos et calmement :

“Nous savons qu’elle t’a fait du mal. Mais, qu’il soit d’elle, de toi ou de personne, rappelle-toi que le loupiot n’est coupable de rien.”

Puis il tourna les talons et s’éloigna d’un pas chaloupé.

Épatant, songea Aramis. Un sens de la théâtralité inné. Ce garçon aurait fait des merveilles sur les planches, s’il n’était encore plus doué pour briser les crânes. Le visage d’Athos était figé, un masque vide de toute expression. Aramis aurait voulu être capable d’assez d’indulgence pour le prendre davantage en compassion. De compassion, il n’en manquait pourtant pas... Mais, à cet instant précis, il avait surtout envie de lui plonger la tête dans un seau de glaçons et de l’y maintenir jusqu’à suffocation - ou, mieux encore, un miraculeux retour à la raison. Las, on ne pouvait réaliser tous ses désirs, même les plus naturels. Il effleura le bord de son chapeau dans une esquisse de salut maniéré et partit à la poursuite de Porthos, pressant le pas autant que le lui permettait sa dignité.

Il parvint à le rattraper un croisement de rue plus loin. Le colosse s’était immobilisé derrière un muret et l’attendait patiemment, appuyé d’une épaule contre la paroi d’un boutique de drapier. Il se redressa à son approche et inclina sa large tête brune sur le côté.

“Bonne sortie ? questionna-t-il.

- Splendide, approuva chaleureusement son ami.

- Bien. Tu veux en parler ?”

Aramis acquiesça. Foutre oui.

“Moi aussi. Fait frisquet, ici. On va se torcher ?”

Ce qu’ils firent et ils le firent bien.

...
Re-Blabla : Pour info, Olivier est le vrai prénom d’Athos. C’est tout à fait canon, mais je suis épatée que le fandom anglais ait réussi à dénicher cette information, puisqu’il ne figure dans aucun des tomes de la trilogie de Dumas, contrairement à ceux d’Aramis et Porthos. Il faut aller le pêcher dans le prologue de la version théâtrale des “Trois mousquetaires” écrite par le romancier. Fallait avoir la volonté et l’idée de l’y chercher… Je ne le connaissais pas moi-même et pourtant j’en ai bouffé du Dumas. Par certains côtés, les fans sont merveilleux !

theme : cape et d'épée, fanfic : the musketeers

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