TECHNICOLOR - CHAPITRE 4 (Partie 1)
Genre : UA, angst, fluff…
Fandom : Queer as folk US
Date : Mai 2007-Novembre 2007
Censure : NC-17 pour ce chapitre
Mots : 8 367 mots
Personnages : Brian/Justin + guest stars
Résumé : Saison 1-Episode 20: Brian a obtenu un poste au sein de la très prestigieuse agence de publicité Kennedy&Collins. Il est parti sans un regard en arrière. Cinq ans plus tard, il est associé dans l'entreprise et tout se passe plutôt bien. Il rentre pour la première fois à Pittsburgh pour une brève visite avant de retourner à sa petit vie new-yorkaise. Mais des fois, la vie réserve des surprises.
Disclaimers : Queer as folk est la propriété de Cowlip et Showtime. Je ne fais que jouer avec.
Notes : Merci à
calliopel pour sa bétalecture. Cette fic a fait partie de mon NaNoWriMo 2007.
≈ New York Juin 2008 ≈
Brian fusilla du regard le panneau d’interdiction de fumer à l’entrée du terminal. Il termina sa cigarette et jeta le mégot. Qu’est-ce que les gens étaient censés faire en attendant les avions seul ? Si encore il y avait de quoi baiser aux alentours, et même comme ça...
Il chercha des yeux le bon vol et se dirigea vers la bonne porte. C’était bientôt l’heure. Il ne le montrerait pas, mais il avait hâte. Les voyageurs commencèrent à débarquer et il ne put empêcher un sourire d’effleurer ses lèvres.
Ca faisait dix jours maintenant qu’il était seul au loft. L’emménagement de Justin avait été épique. Déménager en plein centre de New York n’était pas chose facile. Le loft avait gagné un nouvel occupant, une bibliothèque, une table à dessin dans le bureau, et les placards un tas de nourriture que Brian ne mangeait que parce que Justin l’y forçait - et il nierait toutes autres explications.
Il remercia encore le fait que Justin ait gardé son appartement, il n’y aurait pas de bataille quand au lit. Même si celui de Justin était très correct, il n’y avait rien de mieux que son « king » size.
En l’espace de quatre mois, la vie de Brian n’avait pas tant changé que ça. Il y avait eu des clashs, rien de majeur et même dans ces moments-là, Justin n’avait disparu que quelques heures. Les réunions étaient toujours aussi explosives.
Brian devait bien avouer qu’il se frittait de temps en temps rien que pour le sexe qui s’en suivait, et pourtant ils n’avaient vraiment pas besoin de ça pour pimenter leur vie sexuelle.
La nouvelle avait été moins facile à encaisser pour tous les autres. Brian vivant avec quelqu’un était aussi probable que Bush devenant intelligent. Ils avaient fini par s’y faire. Gus venait régulièrement et adorait prendre l’avion seul.
Il était venu passer quelques week-ends durant ses quatre derniers mois. Après que la décision de Brian ait prise effet, il ne lui fallut que quelques semaines pour mettre en place les nouvelles rénovations du loft.
Justin avait maintenant son espace et lui le sien. Il y avait des bouquins d’art et des dessins un peu partout. Brian adorait récupérer les gribouillis que Justin faisait pour se détendre et les mettre sur le frigo avec ceux de Gus : ça rendait Justin dingue.
Il passa une main dans ses cheveux et remarqua immédiatement la tête blonde se diriger vers le hall. Brian s’approcha, Justin lui fit un sourire. Il avait les traits tirés et Brian grimaça.
-Seigneur ! Mais ils ne t’ont pas nourri dans ce bon dieu de pays ? fit-il.
Justin lui sourit et Brian vit la fatigue sur son visage. Il avait maigri, assez pour qu’il le remarque.
-Bonjour Justin. Oh mon amour, tu m’as manqué, j’ai cru devenir dingue sans toi, commença Justin.
Brian le prit dans ses bras et l’embrassa non sans une claque sur les fesses.
-Mieux, et si tu avais vu leur marché, toi aussi tu aurais refusé leur nourriture sans savoir ce qu’il y avait dedans.
-Je me souviens de très bons restaurants chics dans cet hôtel de luxe.
-Brian, je ne suis pas partenaire dans la boîte. Je ne vais pas dans les hôtels de luxe. Qui plus est, c’est très surfait.
-Tu ne chantais pas la même chanson à Paris.
-Johannesburg n’est pas Paris et qui plus est, ce n’était pas des vacances Brian mais du travail.
-Tu es en retard.
-Et toi tu es encore habillé. Tu vois on ne peut pas tout avoir, répondit Justin. Si on rentrait ? On pourra remédier à ton problème et au mien par la même occasion.
-Pas envie de tester les toilettes de l’aéroport ?
-Brian, on a probablement fait tous les toilettes de l’aéroport depuis le temps. Puis je suis fatigué.
-Et affamé ?
-Même pas.
Brian l’embrassa sur le front, prit la valise de Justin, se dirigea vers le parking, le bras fermement autour des épaules de son amant. La vie allait de nouveau pouvoir reprendre son cours normal.
***
Brian retomba sur le lit en rebondissant presque. A bout de souffle, il se tourna vers Justin. Le sourire était grand, la respiration encore plus erratique que la sienne. Vu les performances de son amant, Brian estimait que c’était un bon témoin de leur état respectif. Dieu que ça lui avait manqué.
Le sexe « retrouvailles » était toujours très bon. Meilleur peut-être après une engueulade mais pas forcément. Ils n’avaient de toutes façons jamais eu aucun problème du coté sexuel de leur relation.
Justin clamait qu’il se sentait lésé avec les trop rares occasions qu’il avait de le prendre. Brian se contentait de rire à chaque fois. Il n’y était quand même pour rien si Justin était une slut et était toujours le premier à s’empaler sur lui.
Brian se retourna sur le coté et l’embrassa sur la joue, dans le cou, sur l’épaule. Il sourit quand Justin suivit le mouvement et ils s’embrassèrent tendrement plusieurs fois, du bout des lèvres, puis de plus en plus appuyé, caressant leur peau jusqu’à ce qu’ils soient de nouveau prêt à recommencer.
-Tu vas m’épuiser, plaisanta Brian quand Justin s’assit à califourchon sur son corps.
Brian n’était quand même pas loin de la vérité. Ils étaient là depuis des heures, il ne comptait plus le nombre de fois où ils s’étaient envoyé en l’air depuis l’aéroport.
-Hm… Moi qui pensait que ton endurance était la même qu’à nos débuts. Tu vieillis. Tsss. Je vais devoir échanger de modèle.
Brian le retourna d’un geste. Justin jouait avec lui et il le savait mais son âge restait toujours un point sensible qu’il n’aimait pas qu’on vienne titiller. Il l’embrassa langoureusement, réduisant Justin à un simple besoin instinctif.
-Vieux hein ?
Justin lui sourit.
-Ne t’en fais pas, je te prendrais toujours quand tes fesses seront flasques, dit Justin, à bout de souffle.
Justin se désincarcéra vivement de sa prise et partit en courant vers le salon.
-Flasques ?! Tu vas voir. Reviens ici !
-Trop vieux pour m’attraper ? entendit-il crier.
Brian sourit et partit à sa poursuite. Oui, il lui avait plus que manqué.
***
Le réveil sonna et Brian grogna en aplatissant sa main dessus pour l’éteindre. Il n’avait vraiment pas envie de se lever. Il se tourna et regarda Justin dormir. Il y avait toujours quelque chose d’apaisant quand il l’observait dormir.
Sauf ce matin-là. Emmêlé dans les draps, Justin avait les sourcils froncés et transpirait anormalement. Brian posa sa main sur son épaule et grimaça. Justin gémit et s’écarta comme il put.
-Justin. Justin !
Les deux yeux bleus s’ouvrirent lentement.
-Hey.
-Hey, répondit la voix rauque de sommeil.
-Cauchemar ? demanda Brian.
-Peut-être. Je ne suis pas sûr.
-Vu comment tu t’es enroulé dans les draps, je me demande comment tu n’es pas déjà mort de chaud.
-Désolé, s’excusa Justin en lui rendant un bout de drap.
-Le décalage horaire fait des victimes dans toutes les tranches d’âge.
-Dégage, rit Justin en le repoussant sans grande conviction.
-Tu devrais peut-être te redormir. Cette vieille ruine de Carlton comprendra très bien.
-Brian ! réprimanda vaguement son amant. Ça va aller. Rien qu’une douche et un peu de sexe ne peuvent dissiper, finit-il en souriant.
Brian avait un doute. Justin avait l’air exténué. Il haussa les épaules et se leva. Justin connaissait ses limites. Il alluma le café et Justin vint prendre une bouteille d’eau dans le frigo. Devant le corps nu et excité de Justin, Brian oublia tout le reste.
Ils seraient probablement en retard ce matin encore.
***
-Putain de climatisation, entendit-il au milieu d’une quinte de toux.
-De bonne humeur à ce que je vois.
Brian le vit sursauter et sourit. Effet réussi. Deux jours après son retour, Justin avait repris le contrôle de ses contrats en cours et tout marchait de nouveau correctement. Même si Carlton était très compétent, il ne s’occupait généralement pas des petits problèmes et autres soucis de son équipe, qui était bien trop terrifiée de faire preuve d’un manque de connaissances pour aller le voir en l’absence de Justin.
Justin souriait, était agréable, savait écouter et savait les faire se sentir minables en quelques mots et sans élever le ton s’il le fallait. Ils avaient vraiment bien fait de l’engager.
Brian s’approcha et l’embrassa sur le front.
-Brian.
-Quoi ?
-Pas au bureau.
-Au cas où tu ne l’aurais pas remarqué, il n’y a plus personne.
-Quelle heure est-il ?
-21h30.
-Merde.
Justin toussa encore.
-Malade ?
-Je vais dire à la maintenance de me désactiver cette saloperie. Je ne supporte pas la clim.
-Je les appellerais à la première heure, demain matin. Est-ce que ça veut dire que tu ne va pas me sucer en rentrant. ?
-Sauf si tu veux que je te morde en toussant.
-Je vais laisser passer.
Justin lui sourit.
-Et si on rentrait ?
-Bonne idée. J’éteins mon poste et je te rejoins.
-Il doit rester de quoi faire un peu de bouillon.
-Le grand Brian Kinney se dévouerait-il pour se mettre aux fourneaux ? Jésus, la fin du monde est proche.
Brian lui pinça les fesses en guise de punition et sortit du bureau. Il pouvait bien faire l’effort de mettre un cube dans de l’eau avec des vermicelles si cela pouvait lui garantir une gâterie de première classe au réveil le lendemain.
***
Brian était en plein milieu d’une relecture attentive de l’accord qu’il venait de signer quand le téléphone sonna. Tellement pris dans son travail il ne se rendit compte de l’appel que quand Justin sortit de la chambre et lui lança son portable qui sonnait encore.
-Kinney. Linds. Non. Ok… Mais c’est vraiment parce que… Non pas parce que c’est toi. Parce que je m’en voudrais de laisser voir de telles horreurs à mon fils. Ouais.
-Problèmes à LesboLand ?
Il se retourna vers Justin avec le sourire. Cette expression était d’habitude la sienne.
-Il semblerait que ce soit la période rouge pour les si douces mamans et que JR vomisse ses tripes en faisant ses dents.
-Définitivement trop d’informations.
-Donc Gus va venir passer le week-end ici.
-Enfin une bonne nouvelle. Je n’en pouvais plus de vivre avec cette espèce de vieux ronfleur. Enfin un peu de jeunesse.
-Et vu que je viens de signer un nouveau contrat avec LEVI’S, c’est toi qui va gérer le reste, conclut Brian satisfait.
-Gus et moi sommes parfaitement capables de vivre sans toi, répondit Justin nonchalamment.
Brian passa ses bras autour de Justin.
-J’essayerai de ne pas rentrer trop tard.
-Fais ce que tu as à faire. Gus comprend et de toute façon, il m’aime plus que toi donc tout ira bien.
Brian lui claqua les fesses. Justin plaisantait mais Brian était prêt à parier qu’il n’était pas très loin de la vérité. Gus avait cette espèce d’admiration pour Justin qui à une époque aurait pu le rendre jaloux. Mais il s'était aperçu avec le temps que Gus le regardait de la même manière. C’était relativement effrayant de voir à quel point ce petit bout d’homme pouvait l’aimer et Brian mettait un point d’honneur à le lui rendre au centuple.
Brian se pencha un peu et embrassa le front de Justin.
-Tu es encore un peu chaud.
-Je suis toujours chaud quand tu me touches, flirta Justin.
-Sans aucun doute. Retourne te coucher. Il te faudra toutes tes forces pour faire face au petit monstre qui débarque demain à l’aéroport.
-A quelle heure ?
-Je passerai te prendre et on ira le chercher. Lindsay doit m’envoyer les détails de son vol ce soir.
-Je peux y aller.
-Je peux prendre une demi-journée pour profiter de mon fils quand il arrive.
-Je disais juste ça pour t’aider.
-Je sais et moi pour t’emmerder. Maintenant retourne au pieu.
-Tu viens ?
-Tu comptes faire autre chose que dormir ?
-Peut-être bien.
-Dans ce cas…
Et Brian le suivit.
***
-Brian ?
Brian leva les yeux de son rapport. Il y avait encore beaucoup de choses à développer et à changer sur ce contrat. Les membres du département Art n’y étaient pour rien pour une fois et il en était d’ailleurs très surpris.
Ils avaient peut-être enfin appris leur leçon. Levi’s lui avait laissé carte blanche mais le premier briefing était dans quelques jours et il ne pouvait pas se permettre de laisser passer ça. Il devait marquer un grand coup pour que le projet glisse tout seul par la suite.
Il arriverait peut-être à dégager quelques précieuses heures pour profiter de Gus. Heureusement que Justin avait pris une semaine de congés. Il n’aurait pas accepté de l’accueillir si ça n’avait pas été le cas.
Brian espérait juste que Gus n’était pas trop hyperactif en journée. Il pouvait être ingérable parfois mais une fois encore Justin avait l’habitude avec ses nombreux babysittings par le passé.
Il secoua la tête et revint sur le sujet principal de toute cette réflexion : l’interruption.
-Je croyais avoir dit que je n’étais là pour personne.
-Je suis désolé mais Kennedy et Collins veulent te voir.
-Dis-leur que j’arrive tout de suite.
Brian grimaça. Une réunion impromptue n’était pas bon signe. Quoiqu’il se passe, c’était gros. Il ferma la session de son ordinateur et enfila la veste de son costume. Rien de ce qui pouvait se passer ne pourrait l’affecter de toute façon, il était associé dans l’entreprise.
Il entra dans la salle de réunion et se dit que ce n’était définitivement pas bon, sachant que Lyons participait aussi à l’interaction.
-Joseph. Matthew. Adam, salua-t-il platement.
-Brian, asseyez vous. Merci d’être venu malgré votre travail.
-Si nous pouvions être brefs. J’ai une conférence téléphonique dans une heure.
-Bien entendu, comprit Joseph Kennedy.
-Nous avons reçu un appel de Kingston de Johannesburg.
Brian grinça des dents. Il comprenait mieux maintenant.
-Kingston a complété le rapport de Taylor sur le contrat.
Justin ne lui avait rien dit au sujet de son voyage.
-Il a été élogieux, bien au delà des mots.
-Je ne vois pas en quoi cela me concerne.
-Il me semble que Carlton l’y a envoyé selon vos recommandations.
-Carlton devait rester à New York pour superviser le contrat avec LowCo Television. Il était évident qu’il ne pouvait pas quitter son poste. LowCo nous rapporte le décuple de Kingston Corporation.
-Nous en sommes bien conscient.
Brian savait que Justin était compétent, très compétent, l’un des meilleurs mais s’il avait fait une connerie, il n’avait pas grand chose qu’il puisse faire.
-Adam nous a aussi éclairé sur certains points, compléta Matthew Collins.
Brian ne put empêcher son corps de se tendre brusquement. Ils ne faisaient aucun secret de leur vie privée mais c’est ce qu’elle était. Privée. Justin et lui vivaient ensemble, ne s’envoyaient pas en l’air au bureau, ne se suçaient pas à la photocopieuse et ne partageaient aucune information non nécessaire sur les contrats sur lesquels ils ne travaillaient pas ensemble.
Définitivement pas bon signe.
-C’est pourquoi, aux vues de ses dernières informations, nous souhaiterions…
S’ils voulaient écarter Justin ou lui de l’entreprise à cause de ça, Brian allait les réduire en miettes.
-… lui offrir une promotion.
Il s’attendait à tout sauf à ça.
-Pardon ?
-Il est évident que Taylor est bon.
-Le contrat avec Dolce&Gabbana n’aurait pas pu se conclure aussi fructueusement sans sa collaboration, expliqua Lyons.
-Kingston Corporation a signé pour cinq ans avec nous pour un total de 34 millions, renchérit Kennedy.
Ce petit con ne lui avait rien dit du tout ! Il allait y avoir des fesses rouges ce soir.
-Carlton nous a fait part de son désir de se retirer prématurément de la profession vers la fin de l’année et nous souhaiterions avoir votre avis quand à l’attribution de ce poste à Taylor, conclut Collins.
-Nous voudrions un avis impartial, Brian. Sans prendre en compte votre vie privée.
-Nous sommes des professionnels, notre vie privée n’entre pas dans ce cadre.
-Vous n’avez donc en aucun cas, aidé Taylor sur ses contrats.
-Taylor était bon avant que je n’entre dans le tableau et le sera encore bien après que j’en sois sorti. Je n’étais même pas au courant du contrat avec Kingston Corporation avant que vous n’abordiez le sujet.
-Il est doué.
-Je pense que malgré sa jeunesse Taylor est un très bon élément. Le département artistique fonctionne bien mieux quand il est là pour les guider. Les clients l’apprécient pour son franc-parler, sa diplomatie et son talent. Il semblerait d’après vos conclusions qu’il nous rapporte également beaucoup d’argent. La seule raison pour laquelle Taylor ne mériterait pas ce poste serait éventuellement si quelqu’un de meilleur entrait dans l’équation.
-Merci Brian de votre honnêteté.
-C’est une des choses pour lesquels vous m’avez engagé.
-Nous allons encore réfléchir avant de faire une déclaration officielle. Carlton ne prendra pas sa retraite avant la fin de l’année, sourit Kennedy.
-Bien entendu Brian, votre discrétion est essentielle. Taylor ne doit pas en entendre parler avant que nous abordions le sujet.
-Je ne suis pas un idiot.
-Loin de moi l’idée pour vous faire ressentir le contraire, mais je sais que j’aurai du mal à retenir une nouvelle d’une telle importance si ma femme était concernée, plaisanta Collins.
-Évidemment. Si vous voulez bien m’excuser, je dois retourner faire ce pourquoi vous me payez, conclut Brian.
-Oui bien sûr, merci de votre temps.
Brian les salua et referma la porte derrière lui. Il repartit à son bureau en souriant légèrement, il ne fit guère attention aux regards effrayés autour de lui. Son sourire avait tendance à provoquer ce genre de réaction chez les personnes qu’il aimait torturer. Quand Cynthia entra quelques temps après, elle referma la porte derrière elle et lui fit un immense sourire.
-J’y crois pas.
-De quoi tu parles ?
-Oh bon sang, Brian ! De Justin ! De la promotion.
-Oh ?
-Brian ! Si tu ne souriais pas comme un débile depuis dix minutes, j’arriverai peut-être à croire que tu n’es pas au courant.
Brian sourit encore un peu plus. Il était fier. Bien plus encore que le jour où Justin avait envoyé chier son père à la sortie du Babylon. Que le jour où il avait été suspendu pour avoir tenu tête à son prof, que la fois où toutes ses toiles aient été vendues avant même que l’exposition n’aie ouverte.
Il sourit encore et Cynthia partit du bureau sans demander son reste. Brian l’appréciait pour ça aussi.
***
Il eut à peine le temps de franchir la porte que son fils accourait déjà pour se jeter autour de ses jambes. Brian posa sa mallette dans l’entrée et souleva Gus dans ses bras.
-Papa ! Papa !
-Oui, oui. C’est moi. On peut savoir ce que tu fais à moitié habillé.
-J’essayais de le mettre dans la baignoire sans ruiner ta salle de bain hors de prix, expliqua Justin en les rejoignant.
-Je ne veux pas prendre un bain ! déclara Gus.
La moue déterminé, presque hautaine le fit sourire, Brian ne pouvait pas le renier, c’était bien son fils. Justin soupira et embrassa Brian sur la joue.
-Peut-être que tu auras plus de chances que moi « papa ».
-Hey ! Tu as accepté le deal, rappela Brian.
-Papa ! C’est vrai ? Tu viens prendre le bain avec moi ?
-La baignoire est trop petite.
Justin éclata de rire avant de s’étouffer sur une quinte de toux. Brian fronça les sourcils. Il savait que la baignoire n’était pas trop petite vu qu’il avait baisé Justin dedans il y a quelques semaines de ça. Mais prendre le bain avec son fils était une chose bien trop parentale.
-Je reste avec toi dans la salle de bain et tu aides Justin à mettre la table.
-Ca marche ! accepta Gus en courant vers la salle de bain.
-Ne cours pas pieds nus ! Gus ! essaya Justin.
Brian se mit à rire. Il y avait quelque chose d’amusant dans l’excès de responsabilité de Justin, qui courait dans l’appartement que ce soit nu ou juste pieds nus.
-Mais moi je sais que c’est ma faute si je glisse et que je me plante. Ton fils aime jouer au petit roi quand il se coupe avec une feuille de papier. Définitivement le tien, ça on ne peut pas en douter.
Brian fronça les sourcils.
-Puisque c’est comme ça tu vas aller prendre ton bain toi aussi !
Brian passa Justin sur une épaule et le traîna à la salle de bain avant de le jeter dans l’eau.
-Moi aussi, dans l’eau avec mes habits !
-Gus ! Non, commença Justin en recrachant de l’eau.
Mais c’était trop tard. Brian se retint d’éclater de rire.
-Ah oui ? Viens par là !
Il n’eut pas le temps de comprendre qu’on le tira en avant. Sa chemise Armani trempée et de la mousse plein les cheveux, Brian se dit qu’il allait faire payer à Justin les surprises de la journée au décuple.
-Papa ! T’es un menteur ! On rentre dans la baignoire !
-C’était pour te tester, fils ! Maintenant pousses-toi que je noie Justin.
-Yeah !!
-Brian, pas devant …
Mais c’était trop tard.
***
-Brian, tu…
Coupé dans son élan par une quinte de toux, Justin lui frappa l’épaule. Finalement, cela n’avait pas été une très bonne idée. Brian posa les assiettes vides sur le comptoir de la cuisine et fit signe à Justin de le suivre au salon.
Il s’assit et prit le verre de whisky que lui tendit Justin avec plaisir. Il le connaissait décidément bien. Brian l’attira contre lui et l’embrassa. Il s’écarta au bout de quelques minutes, les laissant encore un peu essoufflé. Il posa sa main sur le cou chaud de Justin et le regarda. Il repensait à cette histoire de promotion, aux contrats qu’il avait réussi à négocier, à sa capacité impressionnante à devenir parental quand il fallait, malgré ses vingt-quatre ans.
Dieu que Justin était jeune. Malgré tout, Brian était fier et heureux de l’avoir avec lui. Il avait bien changé en l’espace de quelques années. Il ne s’y serait pas attendu. Michael avait dû bien rire en en faisant le constat inévitable, entouré qu’il était par Ben, Hunter et Jenny.
-Brian ?
Justin avait l’air curieux, un peu inquiet. Brian lui sourit légèrement pour le rassurer et l’embrassa encore. Il fallait qu’il trouve quelque chose de fabuleux pour célébrer cette promotion quand le temps serait venu.
Il lui fit un petit signe de tête désignant la chambre et Justin lui sourit. Brian le regarda prendre les verres vides, les poser sur la table basse et lui tendre la main pour l’aider à se lever.
Brian accepta et se dit qu’il allait d’abord commencer par le prendre lentement et profondément.
***
Brian sourit à ses clients. Pour l’instant, les représentants de Levi’s avait l’air d’accrocher. Il fallait qu’il les achève. Brian fit signe au stagiaire d’amener les planches des visuels. Il y eut des « aaahh », des « ooohhh ».
-Avec cette campagne, la cible sait que Levi’s est le produit incontournable pour elle. Levi’s apporte le succès, Levi’s apporte le confort, la qualité, le sexe. On marque le mannequin. Levi’s, c’est la seconde peau qui emmène au nirvana. La sensualité, l’ambiance, tout est mis en œuvre pour attirer et garder l’œil du consommateur. C’est ce qu’il lui faut et il le lui faut absolument plus que n’importe quoi d’autre.
-Tout ceci est très bien mais pourquoi toutes ses versions.
-Pour toucher un large panel de gens. De l’hétérosexuel coincé, à la jeune fille excitée, en passant par l’actif, le travailleur, l’homosexuel refoulé ou affirmé. Tous les horizons.
Et maintenant l’achèvement par les dollars.
-La part de marché est ainsi décuplé et le chiffre d’affaire pourra doubler sur une durée de trois ans grand minimum, si la campagne est lancée et diffusée à…
La porte s’ouvrit à la volée, l’interrompant brusquement, faisant sursauter les clients et les assistants.
-Brian !
Il bouillonnait de rage. Il se tourna vers Cynthia avec un regard furieux. Le visage de son assistante était décomposé. Elle ne l’interrompait jamais en réunion. Il sentit sa colère s’évaporer brusquement. Il la suivit sans un regard en arrière.
-Bordel mais qu’est-ce qui se passe ?!
-Je ne savais pas quoi faire… je…
Elle lui tendit le téléphone, livide.
-Allo !
-PAPA !PAPA ! PAPA ! J’arrive pas ! J’arrive pas ! PAPA ! PAPA ! AU SECOURS ! REVIENS PAPA !
Brian se décomposa, ses jambes se mirent à trembler à chaque cri sanglotant de Gus.
-Calme-toi Sonny Boy ! J’arrive ! Où es-tu ?
-A la maison ! Papa ! S’il te plaît ! pleurait son fils.
-J’arrive tout de suite ! Ne bouge pas.
Il jeta le combiné sur le bureau et prit ses clés de voiture. Il dévala les escaliers. Il n’avait jamais entendu Gus si effrayé, si paniqué. Ce n’était pas possible. Où était Justin ?!! Il avait dit la veille qu’il devait passer à la banque mais pourquoi laisser Gus ? Il allait le tuer. Pourvu que ce ne soit rien, pourvu que Gus n’ait rien, pourvu qu’il arrive à temps.
Il démarra en trombes et conduit aussi vite qu’il put, grillant le feu rouge sur le chemin, se garant sur le trottoir face à leur immeuble. Il claqua la portière et se précipita dans l’ascenseur sans prêter la moindre attention au reste du monde autour de lui. Pourvu que ce ne soit rien, pourvu que Gus n’ait rien, pourvu qu’il arrive à temps.
Il n’attendit pas que les portes s’ouvrent complètement, se faufilant entre elles comme il le pouvait. Pourvu que ce ne soit rien, pourvu que Gus n’ait rien, pourvu qu’il arrive à temps.
Le gardien se leva, occupé qu’il était avec la serrure de sa porte d’entrée.
-Mr Kinney ! J’essaye d’ouvrir la porte depuis cinq minutes ! Les voisins…
Brian ne lui prêta plus attention, il n’attendait que les cris de Gus à travers la porte. Il écarta l’homme brutalement, enfonça la clé dans la serrure, tremblant, maudissant sa maladresse.
-GUS ! cria-t-il en ouvrant la porte.
-PAPA !PAPA !
Gus était par terre, agenouillé, pleurant, criant. Couché sur le corps de Justin. Brian sentit son sang se figer dans ses veines. Il courut vers eux et Gus se jeta dans ses bras.
-J’appelle une ambulance ! lui dit le gardien.
-Justin ! appela Brian.
Justin était allongé sur le coté, du sang par terre, au bord des lèvres. Brian essaya son pouls, son cœur battait la chamade. Il ne savait pas quoi faire, Gus était accroché à sa poitrine et Justin, inconscient, ne respirait presque pas.
-Papa ! Papa ! J’arrive pas à le réveiller ! J’arrive pas le réveiller ! J’ai essayé ! Je te jure que j’ai essayé ! Mais ! Mais ! Papaaaa !
Brian serra son fils avec un bras contre lui et de l’autre, souleva la tête de Justin pour la poser sur ses genoux. Pourvu qu’il aille bien. S’il vous plaît, pourvu qu’il aille bien.
-Je sais, Gus. Je sais. Ce n’est pas ta faute. Ca va aller.
Au loin, il entendait les sirènes hurler. Il ne sursauta pas en voyant les ambulanciers entrer, n’en resserra que plus sa prise autour de ses garçons.
-Monsieur ! Poussez-vous qu’on l’examine.
Brian obéit et souleva Gus qui continuait de pleurer dans son giron.
-Que s’est-il passé ? Monsieur ?demanda la femme.
-Il s’appelle Justin, répondit Brian.
-Monsieur ! que s’est-il passé ? Pressa-t-elle
-Je ne sais pas. Je…
-Pouls faible, état préoccupant, il respire à peine. On le ballonne avant de le perdre ! s’exclama l’homme. AMENEZ LE BRANCARD !
Brusquement le monde autour de lui vacilla.
-Monsieur !
-Je ne sais pas ! Justin et mon fils étaient seuls ici et Gus m’a appelé. Justin… Justin était déjà dans cet état quand je suis arrivé ! expliqua-t-il Brian au bord de l’hystérie.
-Papa ! Je veux que Justin se réveille !
-Je sais, Sonny Boy.
L’homme et la femme sanglèrent Justin.
-Monsieur, vous devriez venir avec nous.
-Evidemment que je viens ! cingla-t-il.
Brian les suivit, ses bras fermement cramponnés autour de Gus. Brian s’installa dans l’ambulance, le regard fixe sur le corps blême de Justin.
-Monsieur, nous avons besoin de savoir ce qui est arrivé.
Brian secoua la tête et desserra sa prise sur son fils. Gus le regarda, le visage trempé de larmes.
-Gus, explique-moi ce qui s’est passé.
-Papa, je te jure j’ai essayé de le réveiller.
-Je sais, Gus. Je sais. Ce n’était pas de ta faute. Dis-moi comment Justin s’est… endormi. C’est très important.
-Je… Justin a dit qu’il allait nous faire des pancakes aux myrtilles, parce que c’était meilleur et qu’il fallait qu’on soit en forme pour le zoo. Puis Justin a pris les œufs dans le frigo et… y toussait et je lui ai dit de boire du lait et du miel parce que maman dit que ça guérit toujours la gorge.
-Ensuite ? pressa la jeune femme.
Brian la fusilla du regard et Gus se recroquevilla contre son père.
-Il a rigolé et a dit que c’était une bonne idée. Puis qu’il devait prendre son médicament. Il est allé au salon en toussant et puis je l’ai entendu respirer fort et toussait fort et puis il est tombé et… j’ai essayé…
-C’est fini, Gus. C’est fini. On va soigner Justin, chuchota-t-il à son oreille.
Brian ne savait pas pourquoi il disait ça. Il était mort d’inquiétude. Il aurait dû être là. Il aurait pu faire quelque chose pour empêcher ça.
Ils arrivèrent à l’hôpital peu de temps après. Il suivit les ambulanciers dans l’hôpital. Deux internes se précipitèrent vers eux.
-Jeune homme, la vingtaine, victime d’un malaise. Détresse respiratoire, pouls rapide et irrégulier, possibilité d’hémoptysie. Le patient…
-Justin ! Il s’appelle Justin ! cria Brian.
Un médecin les rejoignit rapidement, désignant une salle. Un interne pressa contre la poitrine de Brian pour l’empêcher d’avancer.
-Je vis avec lui.
-Vous ne pouvez pas entrer pendant que nous le traitons.
-Mais enfin.
La porte se referma devant lui. Soudain, l’impuissance retomba sur ses épaules avec une violence qui le fit trembler tandis que l’équipe médicale se pressait autour du corps de Justin. Il avait l’air mort. Ses lèvres étaient presque bleues. Bon sang, il fallait qu’ils le réchauffent, qu’ils fassent quelque chose. Vite.
-Papa… murmura Gus dans ses bras.
Brian prit une grande inspiration, caressa doucement le dos de son fils.
-Ca va aller. Ca va aller.
Tout allait bien se passer. Tout irait bien. Ils iraient au zoo demain, ils rentrerait à Pittsburgh la semaine prochaine et iraient tous les deux danser au Babylon après s’être gavés chez Debbie. Tout allait bien se passer.
Après de longues minutes qui parurent durer des heures, un médecin s’approcha de lui. Brian jeta un dernier coup d’œil à Gus, endormi sur une chaise de la salle d’attente.
-Alors ?
-Quel est son nom ?
-Taylor. Justin Taylor. Est-ce qu’il…
-Age ?
-24 ans mais il…
-Quel est votre affiliation ?
-On vit ensemble, on…
-A-t-il déjà eu des antécédents de détresse respiratoire ?
-Je… pas à ma connaissance mais je ne…
-Maladies héréditaires ?
A chaque question, Brian était de plus en plus perdu, de plus en plus paniqué. Le docteur n’avait pas une fois levé le nez de sa feuille, ne l’avait même pas regardé.
-Non plus je ne…
-Prend-t-il un traitement particulier ?
-Non… De l’aspirine à cause de son rhume mais…
-Allergies ?
-Pénicilline, Tylenol… le pollen… et… j’en sais rien. J’en sais rien ! Il… Il a toujours une liste de ses allergies avec lui ! Mais est-ce que vous allez enfin me dire…
-J’ai besoin de connaître tous les détails de ses derniers jours. Quelque chose d’inhabituel ?
-OUI ! BORDEL ! IL EST DANS VOTRE HOPITAL ! MERDE ! DITES-MOI CE QU’IL SE PASSE!! hurla-t-il.
Le médecin fit un pas en arrière. La sécurité s’approcha et les bruits autour de lui cessèrent. Il voulait savoir. Il avait besoin de savoir. Le docteur fit signe à la sécurité de repartir.
-Monsieur…
-Kinney.
-Mr Kinney. Mr Taylor est pour le moment toujours inconscient. Nous l’avons intubé pour l’aider à respirer. Pour l’instant, nous faisons des analyses pour nous permettre de savoir ce qui a causé son état actuel.
-Je peux le voir ?
-Malheureusement non. Pour le moment, il serait prématuré de vous donner un diagnostic précis. Néanmoins, les analyses devraient nous en dire plus dans quelques heures.
-Je veux être immédiatement prévenu s’il se passe quoique ce soit. S’il se réveille, s’il vous envoie chier ou s’il a besoin d’une transfusion, c’est clair.
Le médecin hocha la tête avec une grimace. Brian était furieux. Il les tuerait à la moindre erreur. Il se retourna et Gus le regardait avec de grands yeux tristes. Il le prit dans ses bras et passa sa main dans ses cheveux.
-Gus. Je dois téléphoner. Tu viens avec moi dehors ?
-Mais on doit pas laisser Justin !
-Justin se repose pour le moment. Il est avec les docteurs.
Gus lui parut sceptique mais le petit garçon le suivit. Brian lui prit la main et ne la lâcha plus.
-Je suis devant pour téléphoner, pourriez-vous me prévenir s’il y a quoique ce soit ? demanda-t-il à l’infirmière de l’accueil.
Elle lui sourit et hocha la tête. Brian la remercia. Il valait mieux gagner des points avec les infirmières. Un médecin était remplaçable, les infirmières étaient partout et indispensables.
Il serra la main de Gus et sortit son téléphone dès qu’ils atteignirent l’entrée de l’hôpital.
-Cynthia ?
-Boss ! Qu’est-ce qu’il se passe ? J’ai essayé de te joindre une bonne centaine de fois.
-Je ne pourrai pas revenir avant ce soir. Excuse-moi auprès de Levi’s et dis à Lyons de prendre la relève. J’ai besoin que tu me passes Kennedy.
-Pas avant que tu ne m’ais expliqué ça ! Gus avait l’air terrifié et…
-Je suis à l’hôpital. Justin… Justin a fait un malaise. Je n’en sais pas plus.
-Jésus ! Je viendrais dès que possible.
-Cyn…
-La ferme. Je te passe Kennedy.
-Merci.
-Kinney ! Qu’est-ce que c’est que ce…
-Joseph, je suis désolé de cette situation. Justin a eu un malaise et je suis à l’hôpital avec mon fils, je ne pourrai pas assurer la fin du briefing.
-Je comprends. C’est grave ?
-Je n’en sais rien. Ces abrutis préfèrent me harceler de questions sans intérêt plutôt que de me dire ce qu’il se passe.
-Quel hôpital ?
-Mont Sinaï.
-J’appelle immédiatement le directeur Lincoln. Il veillera à ce qu’il soit traité avec toute l’attention nécessaire.
-Merci Joseph.
-Taylor est de la famille aussi. Il faut bien qu’on prenne soin des nôtres. Je veillerai à ce que vos rendez-vous de la semaine soient dispatchés ou reprogrammés selon si vos clients veulent traiter spécialement avec vous. Nous prenons les choses en main. Tenez-moi au courant de son état, d’accord ? Et s’il y a quoique ce soit que je puisse faire, n’hésitez pas.
-Merci, Joseph.
-Bon courage.
Il respira un grand coup. Kennedy comprenait. Brian lui avait assuré les soins d’un éminent spécialiste des os qu’il s’était envoyé quand sa femme était tombée malade et depuis Kennedy était devenu un ami plus qu’un collègue.
-Papa ? Je veux voir Justin. On peut retourner dedans ? S’il te plaît ?
-Oui, on va rentrer.
Gus tira sur sa main et Brian le suivit jusque dans la salle d’attente. Brian s’assit sur l’une des chaises et installa Gus sur ses genoux. Il lui caressa les cheveux pendant un moment.
-Brian ?
Il se leva les yeux à l’appel de son nom. Il secoua la tête. Il lui avait dit de ne pas venir.
Cynthia s’approcha d’eux, encore en tailleur et chaussures à talons.
-Des nouvelles ?
-Pas depuis une demi-heure. Je croyais t’avoir dit…
-Brian, si tu coupais court à ton petit discours et qu’on passait directement à la partie où tu vas me chercher un café pour me remercier ?
Brian se serait presque mis à rire, si Gus ne l’avait pas distrait.
-C’est la dame qui travaille avec toi.
-Bonsoir Gus. Tu te souviens de moi ?
Gus hocha la tête. Cynthia sourit et Brian la regarda s’asseoir à coté d’eux.
-Oui, vous m’avez donné des bonbons.
Brian haussa un sourcil et Cynthia hocha les épaules en souriant.
-Hey Gus. Tu veux bien rester un peu avec Cynthia ? Je vais chercher du café, tu veux quelque chose ?
-Je peux ?
-Oui mais je vais acheter ça ici donc ne t’attends pas à quelque chose de bon.
-Je veux bien du jus de fruits.
-Ca marche. Cyn ?
-Café, ce sera parfait. Pourquoi ne vas-tu pas fumer une cigarette ? Tu dois en avoir besoin. Je viendrais te chercher s’il y a quoique ce soit.
-Qu’est-ce que je ferais sans toi ?
-Probablement rien, Boss.
-Papa, tu reviens pas vrai? Tu me laisses pas tout seul hein ?
-Promis.
Brian l’embrassa sur le front et se dirigea vers l’entrée de l’hôpital. Caféine et nicotine lui permettraient peut-être de calmer ses nerfs.
***
-Brian !
Il ouvrit les yeux brusquement. Comment avait-il pu s’endormir ? Ce n’était vraiment pas le moment. Cynthia s’écarta de lui. Gus dormait toujours. Elle avait bien fait de le réveiller. Il ne pouvait pas se le permettre.
-Désolée mais ton portable sonne depuis un moment.
Brian regarda l’identité de l’appelant et fronça les sourcils. Il n’avait pas le temps de discuter avec la famille. Il regarda l’heure et fronça les sourcils, cela faisait bientôt six heures qu’ils étaient là.
-Maintenant y en a marre.
Il se leva brusquement avec l’intention de briser ce médecin s’il ne lui donnait aucune réponse. Mais c’est une chose qu’il n’eut pas le temps de faire. Déjà le médecin se précipitait vers lui. Le remord sans doute.
-Mr Kinney. Veuillez nous suivre.
-C’est hors de question.
Pour qui se prenait-il ce docteur de merde ?
-Écoutez, vous et votre fils devaient venir avec moi.
-Que se passe-t-il ? Comment va Justin ? Vous avez intérêt à me répondre si vous tenez à garder vos couilles assez longtemps pour procréer.
Brian n’avait aucunement l’intention de bouger tant qu’il n’en savait pas plus. Il fit signe à Cynthia de s’approcher. Gus sursauta et se précipita vers lui, apeuré. Le médecin soupira.
-Suivez-moi.
***
Brian regarda Justin derrière la vitre. Il était si pâle et le respirateur sur son visage empêchait Brian de bien le voir. Il voulait rentrer. Il voulait le toucher, sentir la chaleur, sentir qu’il était encore vivant.
-Papa ! Je veux voir Justin ! Je veux voir Justin.
Brian souleva son fils dans ses bras. Le médecin attira son attention.
-Mr Kinney. Mr Taylor souffre actuellement d’une tuberculose pulmonaire bilatérale à un stade avancé. Nous devons vous faire des tests.
-Mais nous sommes vaccinés contre ça.
-Il se trouve que le BCG n’empêche pas la contraction de la maladie mais simplement son évolution vers la forme mortelle de la maladie. Y aurait-il des raisons particulières qui auraient mis Mr Taylor en contact avec le bacille ?
-Je ne sais pas. Nous travaillons ensemble, nous vivons ensemble, nous couchons ensemble. Ce qu’il a attrapé, je l’ai aussi.
-Mr Kinney, vous nous avez signifié que Mr Taylor était sujet à des allergies avec notamment des manifestations pulmonaires s’approchant de l’asthme en tant que réactions. Il se peut que le système immunitaire de votre compagnon ait été affaibli à cause d’une réaction allergique et qu’il est donc été sensible à une infection. Il faudrait pourtant pour cela qu’il ait été soumis à des conditions déplorables de salubrité ou qu’il ait été en contact avec de nombreuses personnes atteintes et contagieuses.
Brian sentit ses genoux faiblir.
-Il… Il est allé… en Afrique du Sud, il y a quelques semaines, pendant une longue période.
-Ca expliquerait les causes de contamination. Cependant, avez-vous ressenti chez vous ou votre fils des symptômes de fièvre ? De toux aiguë ? Douleurs thoraciques ? Sueurs nocturnes ? Un amaigrissement ?
-Non, non. Enfin…
Il aurait dû voir tout ça. Il aurait savoir qu’il y avait quelque chose d’anormal. Il aurait dû voir ça. C’était trop gros pour passer à coté d’un truc pareil. Il…
-Mr Kinney, nous allons vous admettre vous et votre fils pour quelques examens. Nous devons absolument écarter tous risques éventuels d’épidémies. Nous devons aussi contacter toutes les personnes avec qui il a été en contact proche dans le cercle privé comme professionnel. Nous devons les tester.
Brian s’appuya fort le dos contre la vitre. Pourquoi n’avait-il donc rien vu ? Pourquoi était-il parti ce jour-là ? Pourquoi avait-il donc recommandé Justin pour ce contrat avec Kingston ?
-Cynthia… la femme qui était avec nous, est mon assistante, elle déjeune avec Justin quand nous travaillons. Elle… Elle pourra prévenir l’entreprise pour laquelle nous travaillons avant de faire les tests pour elle.
-Bien je vais la faire prévenir par une infirmière.
-Est-ce qu’on peut voir Justin, s’il vous plaît ? demanda Gus.
-Je suis désolé mais il est en quarantaine pour les 20 prochains jours. Nous avons commencé à la traiter mais pour le moment son état reste très sérieux.
-Pourquoi est-il encore inconscient ?
-Sa respiration est très difficile. Il a eu un épisode d’hémoptysie important. Les lésions pulmonaires sont plus importantes que dans un stade premier de contamination c’est pourquoi il est inconscient. Le sang que nous avons retrouvé à votre appartement nous a permis de faire un diagnostique rapide et efficace. Sans son hémoptysie, cela aurait pris plus de temps.
-Il va s’en sortir ?
-Je ferai tout pour qu’il s’en sorte le mieux possible. Nous sommes dans un service restreint, je vous serais gré de ne pas en sortir avant que nous ayons une confirmation de votre bonne santé à tous les deux. Il y a un téléphone dans la chambre que nous vous avons attribué. Vous devriez prévenir vos familles.
Le médecin fit signe à une infirmière de les y conduire. Brian regarda encore Justin longuement avant d’obtempérer.
***
Brian n’aurait jamais pensé que le test Mantoux soit si contraignant et désagréable. Heureusement qu’il était proche de Gus. Il avait insisté et grâce aux contacts qu’avait Kennedy avec le directeur de l’hôpital, sa requête avait été acceptée sans aucune autre forme de protestations.
Finalement, il avait fait la paix avec le médecin qui l’avait fait enrager. Il sursauta quand le téléphone sonna. Une boule au fond de sa gorge se forma immédiatement. Cela faisait maintenant trois jours qu’ils étaient là. Leurs résultats tardaient à revenir. Cynthia était déjà partie, sans aucune trace du bacille dans son organisme.
Justin, par contre, était une toute autre histoire. Son état de santé étant très sérieux, on l'avait placé en quarantaine. Tout contact avec Justin lui était impossible car pour la durée des test Brian et Gus avaient aussi été mis en isolement.
La première chose que Justin avait réussi à expirer avait été le prénom de Gus. Le médecin et les infirmières avaient été obligés de le mettre sous sédatif. La panique aggravait sa difficulté à respirer.
Brian expira un soupir tremblant. C’était probablement l’un des pires moments de sa vie. Incapable de bouger, de travailler, de faire quoique ce soit pour aider et de penser à autre chose que ce foutu hôpital et cette foutue maladie, il désespérait de fumer une cigarette et de sortir de cet endroit.
Mais le pire moment était celui-là. Il décrocha et se calma du mieux qu’il put.
-Hey.
-Hey.
La voix à l’autre bout du fil était sifflante et quasi inaudible.
-Ca va ?
C’était la même question débile que Justin lui expirait à chaque fois. Comme si son état avait une quelconque importance ! Pour le moment, celui qui agonisait ce n’était pas lui. Il passa nerveusement sa main dans ses cheveux et s’appuya un peu plus contre le montant du lit inconfortable de sa chambre aseptisée.
-Parfaitement. Et toi ?
-Ca irait mieux si je n’étais pas là.
La toux qui entrecoupait la phrase le fit frissonner. Être ailleurs, être ailleurs. Il fallait qu’il arrête de penser à ça.
-Ces beaux infirmiers ne cèdent pas à tes avances ?
-Ils me laissent à bout de souffle, n’entends-tu pas ?
Il ne pouvait pas rater cet état de fait.
-Comment ça se passe ? demanda Justin.
Le pire moment.
-Bien. Ils pensent que me monopoliser me fera oublier à quel point je tuerais pour une cigarette.
Une toux rauque et une autre bizarre. Probablement un rire.
-Je comprends mieux pourquoi tu n’es pas encore venu.
Brian serra son poing, accueillant la douleur lancinante de ses ongles plantés dans sa chair. Il ne pouvait pas lui répondre. Il ne pouvait pas. Il ne lui mentait pas mais pourtant il se sentait comme le pire des enfoirés.
-Justin…
-Je sais, coupa Justin avant de repartir dans une quinte de toux plus violente que les précédente.
Il y eut un silence et brusquement Brian eut envie de jeter le téléphone au travers de la pièce pour qu’il éclate contre le mur.
-Je sais. Gus a besoin de toi aussi. Il est là ?
Brian se tourna vers son fils, endormi sur son lit blanc.
-Il dort.
-Ok.
-Dors. On reparlera dans quelques heures si tu veux. Tu as besoin de repos. Je ne prends pas les zombies.
Un autre rire de cancéreux pulmonaire au dernier stade et Brian en bénit presque le moment où Justin lui murmura un « plus tard » presque silencieux. Il soupira et ferma les yeux. Pourquoi est-ce que ça lui arrivait ? Quelles étaient les chances pour ça se passe comme ça ? Bordel il n’avait pas demandé ça !
-Mr Kinney ?
Brian se redressa brusquement sur le matelas et tourna son visage vers le médecin. Il savait qu’il avait l’air de rien. On pouvait difficilement avoir l’air en bonne forme quand une infirmière le réveillait tous les quatre heures pour prendre sa tension.
-Nous avons les résultats de vos tests. Vous et votre fils êtes sains. C’est rare de voir quelqu’un avec un système immunitaire si performant.
-Des années de drogues et d’alcool peuvent faire ça à un corps, lança Brian plein de sarcasme.
-C’est vraisemblablement génétique. Quoiqu’il en soit, vous pouvez sortir.
-Et Justin ?
-Je crains qu’il n’ait mal réagi à la streptomycine lors des premières heures traitements. Il est plus affaibli. Le nouveau traitement fait bien effet pour le moment. Nous le surveillons avec attention. Il semblerait qu’il ait déjà eu des antécédents d’asthme dû à des réactions allergiques selon le dossier médical qui nous a été transmis. Nous ne voulons prendre aucun risque.
-Nous pouvons le voir ?
-Pas aujourd’hui je le crains. Mais revenez demain, je donnerai des instructions pour que vous ayez l’accès.
-Je sais qu’il dort. Nous ne pouvons pas partir sans l’avoir aperçu, Gus est persuadé qu’il a fait quelque chose de mal et que Justin est mort ou je ne sais quel scénario il s’est inventé.
-Bien mais une poignée de minutes. Je ne peux vous accorder plus.
-Merci.
Le médecin hocha la tête et sortit. Brian retomba sur le lit. S’il avait pu, il en aurait pleuré. Gus allait bien. Il ne savait pourquoi lui avait été épargné, il n’y avait aucune raison. Il n’y avait probablement aucune justice non plus. Justin ne méritait pas ça.
Il soupira et décrocha le téléphone. Il aurait déjà dû passer ce coup de fil des jours auparavant.
-Brian ?
-Linds.
-Tu as une voix horrible. Il y a un problème ?
-Je suis désolé…
-De quoi ?interrompit Lindsay
-J’ai besoin que tu viennes chercher Gus le plus vite possible.
-Brian, tu me fais peur. Dis-moi ce qu’il se passe.
-Je suis à l’hôpital et…
-Pourquoi ?
Il pouvait déjà entendre la voix commençait à paniquer.
-Justin a fait un malaise avant-hier.
-Seigneur, il…
-Je n’étais pas là Linds.
-Pourquoi est-ce que tu ne m’appelles que maintenant ? Merde Brian !
-Justin a une tuberculose. Gus et moi avons été admis pour faire des examens et vérifier que nous ne l’ayons pas aussi. Rassure-toi, Gus va bien.
-Justin… A l’hôpital ? Une… Brian… La tuberculose… répondit Lindsay sous le choc.
-C’est plutôt sérieux. Ecoute, j’ai vraiment besoin que tu viennes.
Il ne voulait pas sembler si dépendant, si suppliant.
-Je prendrais le premier avion.
-Ne dis rien aux autres Linds. Je n’ai pas du tout envie de tous vous voir débarquer. Je n’autoriserai rien qui causerait un stress supplémentaire à son état.
-Bien entendu, mais je dois prévenir Mel.
-Elle va me tuer.
-Arrêtes de dire des conneries Brian. Je serai là dans la soirée.
-Merci.
Il raccrocha le téléphone et se leva. Il s’assit sur le lit de son fils et le pris dans ses bras.
-Papa ?
-Hey Sonny Boy ?
-Papa, je veux rentrer à la maison. Je veux voir Justin.
-Je sais. Nous allons rentrer. Maman va venir te chercher.
-Je veux pas Maman ! Je veux Justin !
Il fallait qu’il se calme.
-Il doit se reposer. Mais le docteur a dit qu’on pouvait le regarder dormir un tout petit peu par la fenêtre de sa chambre. Ca te va ?
-Je veux voir Justin.
-Habille-toi et on va aller le voir.
Gus hocha la tête et sauta du lit pour chercher des vêtements propres que Cynthia leur avait porté. Brian ferma les yeux. Peut-être que s’il les fermait assez fort, tout allait disparaître et redevenir comme avant. Mais il en doutait fortement.
***
Brian se tenait devant la vitre de la chambre, Gus dans les bras. Justin avait l’air de se fondre dans les draps blanc tellement il était pâle. Brian ne le voyait pas très bien mais savait que les lèvres devaient être plus bleues que rosés.
Brian sentit la main de Gus se resserrer autour de sa chemise.
-Papa ? Il fait que dormir hein ?
-Oui bien sûr.
-Donc si je vais le voir, j’arriverai à le réveiller ?
-Oui Gus. Cette fois il se réveillera mais on ne peut pas aller le voir.
-Pourquoi ? C’est pas juste, c’est notre Justin. Ils ont pas le droit de le garder pour eux.
Brian était d’accord. Il ferma les yeux un moment pour reprendre un peu plus de contrôle.
-Justin a une maladie contagieuse.
-Comme Stacey avec la varicelle à l’école ?
-Un peu ça mais la varicelle, ce n’est pas très grave c’est juste moche et embêtant. Justin ne doit pas donner sa maladie à des gens qui ne sont pas forts comme lui, ça pourrait être plus grave.
-D’accord.
-On rentre à la maison ?
-T’es sûr qu’on peut le laisser tout seul hein ?
-Je viendrais moi-même botter le cul des docteurs s’ils lui font du mal.
-Papa ! T’as dit un vilain mot, rit son fils.
-Oui mais ta mère n’est pas là pour le savoir, lui répondit Brian avec un clin d’œil.
-Si je lui fais des dessins, tu lui amèneras ?
-Oui.
-Alors on peut rentrer.
Brian hocha la tête et se tourna vers la vitre.
-A plus tard, Sunshine.
ROUGE -
JAUNE -
NOIR - BLEU : Partie 1,
Partie 2 -
EPILOGUE