DCU : Neuf cent soixante-sept jours

Jun 23, 2010 12:12

Neuf cent soixante-sept jours
Personnages/Couples : Kon/Tim (Cassie, Bart, Dick, Damian, Clark…)
Monde : Inven-Terre
Genre : flangst, avec plus de fluff que d’angst, CWC (Canon ? What Canon ?)
Censure : PG-13/T
Résumé : Conner a plusieurs révélations.
Disclaimer : Je ne prends au DC que ce qui m’arrange :D
Nombre de mots : 11 000 et quelques
Date : mars 2010-juin 2010

Quelques avertissements : J’ai pas mal fait joujou avec le canon, à savoir entre autres : Bart n’est jamais mort et Dick et Damian n’ont pas quitté le manoir :D

C’est coupé parce que LJ fait suer, mais c’est un one-shot, hein :|



La première fois, ils faisaient encore partie de Young Justice. Conner (enfin, tout le monde l’appelait Kon à l’époque) avait perdu ses pouvoirs et Tim, dont personne ne connaissait encore la véritable identité, avait complètement pété les plombs à cette idée.
« Tu ne sais rien faire sans tes pouvoirs et tout le monde sait que tu es Superboy, tu te rends compte du danger que tu coures ?
- J’ai mon brassard amélioré ! Regarde, je peux voler, me protéger, me…
- Et si tu le perds ? »
Robin et ses pires scénarios possibles…
« Si tu me bats sans ton brassard, je te laisse tranquille. »
Autant dire que Kon s’était fait éclater.

Robin était un entraîneur sans pitié, pour ne pas dire franchement insupportable.
« Protège ta gauche ! Ça ne veut pas dire que tu te rends vulnérable ! N’anticipe pas ! Anticipe ! Là tu serais mort ! »
Zen, Kon El, zen. ZEN.
Les rares fois où Kon réussissait à plaquer Robin au sol en se servant de sa masse plus grande, Robin le retournait comme une crêpe.
« Tu ne peux pas compter que sur tes muscles, Kon ! »
Ok, donc, se jeter sur Robin et tenter de lui mettre son poing dans la figure ne marchait définitivement pas. Heureusement que l’entraînement se faisait à huis clos ou sa fierté en aurait pris un sacré coup.
« Arrête de jouer les Batman…
- Batman ? On n’est même pas au quart de ce que Batman te ferait subir. Si Nightwing t’entraînait tu ne serais pas capable de sortir de cette pièce debout, alors Batman ! »
Le problème, c’était que Robin était physiquement bien plus petit que Kon et ce dernier, malgré tout, avait un mal de chien à frapper de toutes ses forces.
Ce qui énervait Robin.
« Tu crois que le Joker retient ses coups ?
- Oui, enfin, c’est pas mon modèle dans la vie non plus ! Si je te touche, je peux te faire vachement mal !
- Pour ça il faudrait que tu me touches, et t’es loin d’y être ! »
Robin, Kon s’en rendit vite compte, prenait vraiment cette histoire d’entraînement au sérieux et il n’y avait rien de mieux pour le faire exploser que de venir littéralement les mains dans les poches.
Tout comme il n’y avait rien de plus satisfaisant que de voir Robin mouliner des bras et se mettre à hurler sa frustration. Il ne devait pas y avoir grand-monde qui réussissait à lui faire perdre son calme et Kon prenait un plaisir particulier à en faire partie.
Le problème, c’était qu’à force de pousser Robin à bout, il finit par le toucher plus loin qu’il ne le pensait.
« Kon, c’est ta vie qui est en jeu ! J’ai mieux à faire que de passer mon temps à t’inculquer un minimum d’instinct de survie, tu n’étais déjà pas Superman, là tu l’es encore moins, qu’est-ce qu’il faut que je fasse pour que tu prennes ça au sérieux ? J’aurais cru que de voir mourir quelqu’un à qui tu tiens t’aurais… »
Et là, Kon aurait dû exploser à son tour, parce qu’utiliser la mort de Tana c’était un coup bas. C’était plus qu’un coup bas, c’était purement et simplement inacceptable.
Mais peut-être parce que Robin ne l’utilisait pas comme un coup bas, peut-être parce qu’il avait l’air sincèrement remonté…
Kon l’embrassa.
Là, comme ça, spontanément, il lui prit le visage entre les mains et… ouais.
Ça ne dura pas longtemps. Robin s’était raidi net et le cerveau de Kon reprit le dessus sur… quoique ce soit qui l’avait possédé un instant. Il s’écarta brutalement, les yeux aussi écarquillés que ceux de Robin.
Ce dernier ouvrit la bouche, la referma, puis l’ouvrit à nouveau et tout ce qui en sortit fut :
« MAIS. QUOI. HEIN.
- J’EN SAIS RIEN ! » cria Kon d’une voix légèrement hystérique.
Il avait embrassé Robin ! Il avait le droit de partir dans les aigus !
« Ça paraissait une bonne idée sur le coup ! »
Tim le regarda avec une expression d’horrification absolument indéfinissable et d’une voix qui réussissait à être à la fois mécanique et paniqué, il lâcha :
« JE NE VEUX PLUS JAMAIS QU’ON EN PARLE. »
Puis il sortit de la pièce d’un pas raide.
Le premier choc passé, Kon se sentit d’abord horriblement vexé. Il était Superboy, ses baisers devaient au moins rendre n’importe quel garçon bi, si ce n’était gay ! Bon, d’accord, ç’avait été court et il ne s’y attendait pas et c’était la seule raison pour laquelle Robin n’en redemandait pas !
Pas qu’il voulait que Robin en redemande.
Pas vraiment.

Ce n’était pas vraiment le moment d’avoir une crise d’identité sexuelle. Il sortait à peine d’une crise d’identité tout court ! Et puis, il n’avait jamais été intéressé par les garçons, il aimait les filles, lui ! Les filles avaient de la poitrine, quoi ! Des seins ! Et d’accord, Tim était bien foutu, et sérieusement mignon, mais c’était tout. Enfin, c’était vrai que Kyle était pas mal. Et il y avait Nightwing, et ouais, Nightwing, quoi, mais c’était impossible de ne pas un peu désirer Nightwing ! C’était dans l’ordre des choses ! Et à la limite, Arsenal n’était pas trop mal…
Kon ferma les yeux très fort. Il était peut-être temps qu’il rende visite à son vieux pote Hero Cruz.

Kon et Hero s’étaient rencontrés alors qu’ils faisaient tous les deux partie du groupe des Ravers. Après la dissolution de l’équipe, Kon avait gardé contact avec eux de loin. Tout le monde était très occupé dans son coin et se réunir était devenu difficile après la crise que Sparx avait piquée quand elle avait appris l’homosexualité de Hero. Surtout une fois qu’il s’était mis en couple avec Leander, un alien rencontré au cours de leurs aventures.
Hero se révéla assez content de voir Kon ; ils parlèrent du bon vieux temps, échangèrent des nouvelles des autres, puis Kon attaqua le sujet qui le perturbait, à savoir, comment on déterminait son homosexualité, voire sa bisexualité, parce que Kon ne se voyait pas abandonner les filles. Tim avait peut-être un beau petit cul, mais Cassie était tout aussi bien roulée, dans un autre genre. Le genre avec de la poitrine.
Hero le regarda avec des yeux de merlans frits.
« Sérieusement ? Tu es sûr que ce n’est pas, juste de la curiosité ?
- Bien sûr que c’est de la curiosité ! J’ai spontanément embrassé Ro… un pote, et un pote qui m’énerve, mais alors qui m’énerve, alors oui, je suis curieux de savoir d’où ça vient et de voir si c’est passager ou pas !
- Excuse-moi, j’ai simplement du mal à intégrer. Superboy qui vire sa cuti, c’est probablement l’un des signes de l’Apocalypse ! Et… tu irais vers quel genre de mec ? »
Kon n’aurait jamais un jour imaginé discuter de ce genre de chose avec Hero, ou avec qui que ce soit d’ailleurs. Une fois qu’ils avaient établi les bases (« Nightwing ? » « Tout le monde veut Nightwing ! » « On a dit qu’on couvrait les bases… »), il fut établi que si, sans surprise vu la tête de son petit ami, Hero tapait dans le très exotique (« Si j’avais pas Leander, j’avoue que Beast Boy… »), Kon était plutôt dans le classique, voire narcissique. Nightwing, Robin, Kyle.... Bart n’éveillait Dieu merci rien chez lui (« Je sais pas, Bart c’est comme… mon petit frère hyperactif, quoi ! ») et la plupart des autres mecs ne lui paraissaient intéressants que sur un plan purement esthétique. Ce qui était déjà pas mal.
« Ben, je ne sais pas quoi te dire, dit enfin Hero. Après… c’est comme les filles, j’imagine, il faut que tu fasses tes expériences… »
Ce qui signifiait : direction San Francisco !
Pour la première fois de sa vie, Kon éprouva le besoin de se déguiser un minimum ; il avait besoin de réfléchir à ce qui lui arrivait, pas de se voir à la télé en train de draguer un garçon et ainsi provoquer une nouvelle polémique alors que Young Justice se sortait à peine d’un gros bazar médiatique (Robin et Cassie le tueraient). Il se teignit les cheveux, jugea que c’était suffisant, et se jeta à l’aventure.
Draguer un mec demandait un peu plus de subtilité qu’avec une fille (quoiqu’il en dise, Kon ne pouvait pas être automatiquement certain qu’il lui tomberait dans les bras), mais l’un dans l’autre, une fois qu’il avait établi l’intérêt de la personne en face, c’était vachement plus facile. Peut-être un peu trop, d’ailleurs : Kon se rendit compte à cette occasion, et avec un peu de consternation, qu’il avait beau adorer flirter, il aimait bien avoir quelqu’un de sérieux, quelqu’un à choyer et à aimer plus que n’importe qui d’autre.
Toutefois, Kon mit peu de temps à confirmer qu’il y avait plus que de la curiosité et qu’il avait une préférence nette pour les petits bruns à fort caractère.
L’idée que toute cette tension entre Robin et lui pouvait être d’ordre sexuel le perturba au plus haut point. Il envisagea un instant de tenter sa chance, mais n’était pas du tout certain que le mal de crâne en vaudrait la peine, et puis de toute façon Robin n’avait pas eu l’air extrêmement réceptif si son « JE NE VEUX PLUS JAMAIS QU’ON EN PARLE. » était d’aucune indication. Et il avait prouvé qu’il pouvait largement rétamer Kon.
Il y avait sûrement des petits bruns bien foutus et moins teigneux de par le monde, et en attendant il se cantonnerait aux filles.

Kon retrouva ses pouvoirs peu après, mais les événements s’enchaînèrent, et surtout, il y eut le fiasco Apokolips. Il avait accusé Tim de les avoir trahis, il lui avait craché à la figure qu’il n’avait pas confiance en lui.
Et Robin avait beau le rendre dingue (pas de façon agréable) et Kon avait beau ne pas le comprendre les trois-quarts du temps, il restait son meilleur ami. Celui vers qui il allait quand il se sentait mal, celui qui le laissait faire l’abruti et se contentait de lever les yeux au ciel. Celui sur qui il avait toujours pu compter.
Le pire, dans l’histoire, c’était que Tim ne revint jamais dessus. Il fit comme si de rien n’était et Kon choisit de respecter sa décision de ne plus en parler, de laisser ça derrière eux…
En vérité il s’était dégonflé. Il avait eu l’intention de s’excuser, vraiment. Mais. Il avait perdu tout courage lorsqu’il avait revu Tim. Robin.
Terrifié de savoir à quel point il l’avait blessé.

¤

La deuxième fois, le père de Tim venait de mourir.
Tim avait fini par le dire officiellement au reste des Teen Titans. Ils l’avaient écouté parler de son père, puis Tim s’était excusé avant de partir se réfugier dans sa chambre.
« Il a envie d’être seul », leur dit Raven.
Cassie se mordit les lèvres, s’empêchant probablement de courir serrer à nouveau Tim dans ses bras. Bart s’agrippait au canapé. Conner garda le silence.
Vers minuit, ce soir-là, il sortit de sa chambre, parcourut les quelques mètres qui le séparaient de celle de Tim et y pénétra en silence. Il ferma la porte derrière lui.
La lueur de l’écran de l’ordinateur, en veille, éclairait légèrement la pièce. Tim était allongé sur son lit, dos à la porte, immobile. Un peu trop pour quelqu’un qui dormait. Comme si Tim, de toute façon, était capable de s’endormir avant trois heures du matin. Sans hésiter, Conner marcha jusqu’au lit. Il s’assit sur le bord et comme Tim ne bougeait pas, il souleva le drap et se glissa dessous. Se mettant sur le côté, il passa un bras autour de Tim et l’attira vers lui, sans se formaliser de la raideur soudaine de son corps.
Un temps s’écoula, puis Tim se retourna soudain vers lui, agrippa son t-shirt et cacha le visage dedans. Conner acheva de le serrer contre lui ; il eut à peine le temps de passer une main apaisante dans son dos que Tim était secoué d’un sanglot silencieux.
Déchiré par la douleur de son ami, Conner le laissa pleurer tout son soûl en silence, la joue contre ses cheveux, jusqu’à ce que les spasmes s’arrêtent, jusqu’à ce que les doigts de Tim se relâchent, que les battements de son cœur ralentissent.
Il continua quelques instants à lui caresser le dos, puis avec autant de délicatesse que possible, il se servit de sa télékinésie pour les placer tous les deux plus confortablement. Il s’installa à nouveau sur le côté, le visage à la hauteur de celui de Tim.
Il sentit quelque chose lui pincer le ventre.
Trop occupé à reconstruire leur amitié, cela faisait longtemps qu’il n’avait pas pris le temps de remarquer à quel point Tim l’attirait.
Il avait envie de le toucher. De suivre les contours de son visage du bout du doigt. De sentir son souffle sur ses lèvres.
Il s’était rapproché sans s’en rendre compte, sa bouche à quelques centimètres à peine de celle de Tim. Il l’embrassa. Doucement. À peine. Un baiser bien plus léger que celui qui datait d’un an déjà, mais…
Si Tim s’était réveillé, si Tim avait répondu à cet instant, tellement de choses auraient été différentes.
Mais Tim ne réagit pas. Le lendemain matin, lorsque Conner ouvrit les yeux, il était seul. Ils ne parlèrent pas de cette nuit-là. Quelques jours plus tard, Cassie lui proposa d’une voix nerveuse d’aller boire un verre avec elle dans San Francisco. Ça faisait un an qu’ils tournaient autour du pot. Conner accepta.

¤

La troisième fois, Conner venait de ressusciter.
Enfin « venait » n’était pas tout à fait vrai. D’abord il avait eu toute une période où le moindre pas lui demandait toute son énergie. Ma se restreignait pour ne pas le nourrir à la cuillère et Clark s’était installé à la ferme, chassant d’un souffle tous les nuages qui pourraient empêcher Conner d’absorber les rayons de soleil nécessaires à le remettre sur pied. Quand Conner était dehors, il montait la garde de façon un peu obsessionnelle, convaincu que Doomsday ou Metallo guettait la moindre occasion de venir le tuer à nouveau. Krypto semblait persuadé de la même chose, ce foutu clebs avait complètement pété un plomb lorsqu’il avait vu Conner et ne le lâchait plus d’une semelle. Il allait jusqu’à pleurer à la porte des toilettes quand Conner s’y enfermait (il ne la cassait plus, Ma avait poussé une telle gueulante la première fois que les voisins de la ferme suivante avaient dû l’entendre).
Toutefois, dès les premières 48h, il reçut de nombreuses visites. Kara, en bonne membre de cette famille de paranos, campait à ses côtés dès qu’elle avait cinq minutes, Bart passait son temps à faire l’aller-retour. Conner vit défiler toute sa vie : Dubbilex, Hero, Sparx, Guardian, Roxie. Les Titans qu’il connaissait.
Cassie.
Leurs retrouvailles se firent dans une ambiance de malaise. Conner se souvenait de sa dernière nuit sur Terre comme si elle datait d’hier, sa dernière nuit sur Terre et leur première nuit ensemble ; Cassie, elle, avait eu plus d’une année pour avancer sans lui. Il n’osait pas la toucher, elle se tenait à distance.
Elle finit par éclater en sanglots et s’enfuir par la fenêtre et Conner, encore faible, ne pouvait même pas rêver de la rattraper.
« Elle a fait son deuil, lui dit Kara. Et elle a eu beaucoup de mal, alors… je crois qu’elle va avoir besoin d’un peu de temps. »
Oui, apparemment.
Au milieu de tous ces gens, l’absence de Tim était un gouffre. Clark lui avait raconté ce qu’il s’était passé, la mort de Batman et ses conséquences, mais… Conner s’était attendu, quand même, à ce que son meilleur ami soit l’un des premiers, sinon le premier à se trouver à son chevet.
Cassie finit par revenir, s’excusa et lui demanda du temps. Encore. Conner commençait à se douter que cette période de transition allait durer un bon moment.
Quand il lui demanda des nouvelles de Tim, elle garda le silence quelques secondes.
« Bart le cherche pour toi, finit-elle par dire, les yeux baissés. Mais, Conner…
- Je sais, ça a été dur pour vous. »
Elle prit l’air coupable.
« Pour Tim et moi, dit-elle, particulièrement. »
Et donc, sa copine et son meilleur ami avaient cherché du réconfort l’un dans les bras de l’autre. D’accord il pouvait comprendre, même si c’était complètement… Enfin, Cassie était impulsive et Tim était tordu dans le meilleur des cas… Honnêtement il ne savait pas comment prendre le fait que Tim l’avait « cherché » auprès de Cassie.
Ça lui pinçait bizarrement le ventre.
« Tim cherchait à te ressusciter bien après que moi j’avais… accepté. »
Tim, sa petite chauve-souris obsessionnelle. Conner eut un sourire involontaire qui mourut rapidement.
« Alors pourquoi il ne vient pas me voir ? »
Cassie détourna les yeux.
« Je pense qu’il a peur de te perdre à nouveau, dit-elle d’une voix fragile. Alors ce doit être plus facile pour lui de faire comme si tu n’étais pas revenu. »
La gorge serrée, Conner tendit la main vers elle, lui caressa la joue. Elle lui offrit un sourire tremblotant mais finit doucement par s’écarter. Il n’insista pas.

¤

La quête de Bart s’acheva sur un échec.
« Il a disparu de la surface de la planète ! Je suis allé partout ! Et le métro de Paris est vraiment crade ! Personne ne l’a vu ! Et j’arrive pas à mettre la main sur Nightwing non plus ! Enfin, Batman. Et Wallymeditrien ! Ilfautleretrouver ! Tim, pas Nightwing ! Et le dernier Robin est hyperdésagréable ! »
Ça commençait à bien faire.
Conner réussit à convaincre Clark qu’une promenade ne le tuerait pas, puis, accompagné de Krypto, il partit à la recherche de Tim. Bart avait parcouru tous les endroits où « Red Robin » avait été aperçu. Conner irait là où Tim Drake avait des liens. Ou plutôt Tim Wayne, puisque le PDG de Wayne Enterprises l’avait adopté.
Bruce Wayne et Tim Drake, ça faisait peur rien que d’y penser… Il se demanda ce qui était passé par la tête de Tim quand il avait accepté. Ce qui était arrivé. Le besoin de stabilité ? L’éventualité d’hériter de l’une des plus grosses entreprises du monde et de pouvoir ainsi satisfaire son besoin compulsif de contrôler son environnement ?
Qui savait à quoi pensait Tim.
Conner se présenta au manoir Wayne un samedi en fin de matinée. Il sonna à la grille, et une voix distinguée lui répondit :
« Manoir Wayne.
- Heu, je m’appelle Conner, monsieur, Conner Kent. Je suis un ami de Tim Dra, heu, Tim Wayne et je suis revenu dans…
- Je vous ouvre. »
Conner cligna des yeux, il y eut un clic et les battants du portail s’écartèrent tous seuls.
Ooook…
Il suivit l’allée qui longeait d’immenses pelouses au bout desquelles il apercevait des arbres. Krypto regardait l’herbe coupée impeccablement d’un air terriblement intéressé et Conner pria pour que l’inquiétude du chien à l’idée de le laisser serait plus grande que l’envie d’aller creuser des trous. Le manoir était immense, sans surprise. Plus glauque que ce à quoi il s’attendait, du moins vu de l’extérieur. Un haut perron menait à la porte.
« Krypto, assis. Tu m’attends là. »
Le chien lui jeta un regard trahi et gémit mais Conner tint bon.
« Si j’ai le moindre problème, je t’appelle, ok ? »
Une caresse ; Krypto mit le derrière par terre avec une attitude parfaitement désapprobatrice mais le laissa monter les marches du perron.
Il arrivait à peine à la porte qu’elle s’ouvrait devant un vieil homme à l’air terriblement distingué, cheveux blancs et petite moustache, dans un costume à queue de pie.
Un majordome, quoi, il y a un MAJORDOME !
Il savait qu’avant leur ruine, les Drake avaient été une famille influente de Gotham. Peut-être était-ce ça qui avait poussé Wayne à adopter Tim ? Et ce dernier à accepter, il se sentait peut-être chez lui dans cette maison immense qui avait un majordome.
« Monsieur Kent, dit-il. Mon nom est Alfred Pennyworth, et je…
- Alfred ? fit une voix masculine. Il est là ? »
Et soudain, au détour du couloir, un canon. Mais alors, un canon ! Vingt-cinq ans ou un peu plus, un brun à yeux bleu intense comme Conner les aimait ; son jean moulant mettait en valeur ses longues jambes de façon presque indécente et la chemise, pas tout à fait boutonnée jusqu’en bas, d’un blanc qui ressortait sur la peau mate achevait à la perfection le tableau.
Et puis le sourire ! Le sourire !
Le seul défaut, c’était les cernes sous ses yeux. Mais c’était un détail.
Le dieu grec s’arrêta brutalement à un mètre de Conner, les deux bras dans le dos, les épaules en avant, comme s’il s’empêchait d’aller plus loin. Puis soudain il tendit la main ; Conner la prit automatiquement.
« Bonjour, Conner. Je suis Dick Grayson. »
Grayson. Dick Grayson. Il connaissait. C’était une information de Cadmus, un élément de culture générale qui avait été implanté dans son cerveau. Il identifiait toujours ce type de connaissances, elles étaient plus claires, plus nettes que les autres, des certitudes inébranlables. Dick Grayson faisait partie des Flying Graysons, une famille de célèbres acrobates-voltigeurs. Ses parents étaient morts dans un terrible accident au cours d’une représentation, le laissant orphelin. Cela avait fait la une des journaux de la côte Est, à l’époque.
Il y avait un autre élément, beaucoup plus flou : la chambre de Tim, dans l’appartement de son père. Un poster sur le mur : Haly Circus /Venez voir les fantastiques Flying Graysons ! Le jeune Dick exécute le quadruple saut de la Mort !
… Qu’est-ce que Dick Grayson fichait chez Tim ? Ou plutôt chez Bruce Wayne ? Ou était-ce un homonyme ?
Il y avait quelque chose, quelque chose qui lui disait d’y regarder de plus près, de réfléchir plus fort, mais il n’arrivait pas à connecter les éléments. Le regard chaleureux, le sourire et la poigne presque caressante de Dick ne l’aidaient aucunement.
« Bonjour », dit-il d’une voix interrogatrice.
Interrogatrice de quoi, il n’en était pas certain. De tout. Qu’est-ce que Dick Grayson faisait ici, quel était son lien avec Tim, pourquoi Conner avait-il cette sensation que quelque chose d’évident lui échappait ?
Dick lui lâcha la main et son sourire se fit plus… secret.
« Tu viens voir Tim.
- Je… il est bien ici ? » demanda Conner pour qui plus rien d’autre n’avait d’importance.
Dick hocha la tête.
« Tu arrives au bon moment. Il est revenu d’Europe tard dans la nuit, alors il dort encore. On va aller le réveiller. »
Conner ouvrit la bouche pour protester, dire que ce n’était pas la peine, il fallait le laisser dormir. Mais l’envie de le voir fut la plus forte. Tim n’aurait qu’à faire une sieste plus tard.
Tim n’avait qu’à être venu le voir plus tôt.
« Merci », dit-il seulement.
Le regard de Dick se fit soudain pressant.
« Tu resteras bien déjeuner avec nous ? »
Pris de court, Conner mit un instant à répondre.
« Heu. Je… je n’ai pas prévenu ma famille… »
Et Clark risquait de débarquer sans préavis. Mais surtout, il ne voulait pas s’imposer à Tim. Il voulait d’abord lui parler. D’abord l’entendre. D’abord…
« Si tu changes d’avis, tu es le bienvenu.
- Maître Richard, non pas que notre entrée ne soit pas confortable, mais vous pourriez peut-être proposer au jeune monsieur Conner de passer au petit salon.
- Oh ! »
Conner vit avec fascination une rougeur embarrassée envahir les joues de Dick. Il émit un petit rire.
« Mon éducation désespère Alfred, dit-il sur le ton de la confidence, et c’est lui qui en est pour plus de la moitié responsable. »
…Hein ?
« Suis-moi, Tim nous rejoindra.
- Je vais immédiatement le réveiller et lui faire part de votre localisation, déclara Alfred avant de partir.
Conner suivit Dick jusqu’au « petit salon », qui se révéla être une pièce pas si petite que ça, comprenant une bibliothèque, un sofa et trois fauteuils, ainsi qu’une cheminée. Au fond de la pièce, un bowindow donnait sur l’arrière du parc. Conner s’y dirigea automatiquement, en partie pour admirer la vue, en partie pour vérifier que Krypto ne massacrait pas la pelouse.
« Tu veux boire quelque chose ? » demanda Dick, une main sur la poignée de la porte.
Dos aux larges vitres, Conner secoua la tête.
« Non merci. Je peux vous poser une question ?
- Tu peux me dire “ tu ”, signala Dick immédiatement. Et, oui, bien sûr. »
Il le regardait d’un air attentif mais Conner eut un instant de blanc. Comment demandiez-vous à quelqu’un s’il était bien le petit garçon qui avait vu ses parents s’écraser sous un chapiteau ?
« Vous… tu es Dick Grayson des Flying Graysons ?
- Oui, répondit ce dernier tranquillement. Bruce m’a recueilli après la mort de mes parents.
- Oh… »
Tim n’était donc pas le premier, et si les Drake avaient évolué dans les mêmes sphères que Bruce Wayne, ce dernier avait pu vouloir offrir un toit à leur fils orphelin. Et ruiné. Quant à la décision de Tim, les arguments déjà cités restaient valables, sans compter la présence de Dick Grayson ici et sur le poster qui ajoutait un élément que Conner n’arrivait pas tout à fait à éclairer.
« Tim avait une affiche des Flying Graysons dans sa chambre », remarqua-t-il.
À ces mots, quelque chose s’éclaira dans le regard de l’acrobate. Il ouvrait la bouche pour répondre lorsqu’une voix familière émit un « Diiiiick » plaintif. Conner se raidit, Dick se tourna vers la porte ; Tim passa soudain le seuil du salon, l’expression ensommeillée, les cheveux ébouriffés (longs, remarqua Conner), pieds nus, dans un jean délavé et un vieux t-shirt trop grand pour lui. En un pas purement instinctif, il atterrit dans les bras de Dick qui le réceptionna sans une hésitation. Il referma les bras sur Tim qui avait appuyé le front sur son épaule. Conner ne voyait plus dépasser qu’une touffe de cheveux.
« Eh, c’est mon t-shirt, petite tête.
- Mgnoooon », répondit Tim d’un ton grognon.
Conner réalisa soudain qu’il était parti une année entière. Une vie.
Parce que ce garçon, ce Tim qui se jetait sans hésiter dans les bras de cet inconnu, confiant, affectueux, il ne le connaissait pas.
Conner était mort une année et tout le monde autour de lui avait continué d’avancer. Cassie n’avait de toute évidence plus très envie de le voir et Tim… Tim avait quelqu’un d’autre dans les bras de qui pleurer.
Conner se sentit soudain très seul.
Avec une tendresse immense, Grayson glissa une main dans les cheveux de Tim.
« Hé, Timmy. Tu as de la visite. »
Et ce fut terminé, l’abandon, la détente ; d’un coup Tim se raidit et s’écarta, et c’était Robin qui parcourait la pièce du regard, à la recherche de la source du dérangement. Conner s’avança pour sortir du contrejour. Les yeux de Tim s’arrêtèrent sur lui, l’expression de son visage se figea.
« Salut, Tim », dit-il d’une voix un peu faible.
Il y eut un silence.
Comme venu de très loin, Conner entendit le bruit de la porte qui se refermait. Grayson les avait laissés seuls. Il mit les mains dans les poches sans lâcher Tim du regard. Le silence se prolongeait et, n’en pouvant plus, Conner se résolut à le briser :
« Tim…
- Je suis sorti avec Cassie et j’ai essayé de te cloner.
- Ok. »
Conner fit un pas en avant. Tim fit un pas en arrière.
Mmmh.
Conner orienta son pas suivant avec précaution. Pour l’éviter, Tim dut modifier sa trajectoire et s’éloigner de la porte, ce qui convenait beaucoup mieux à Conner.
« J’ai cherché à te ressusciter avec un Puits de Lazare, continua Tim en le fixant avec des yeux immenses.
- Ouch, fit Conner sans cesser d’avancer. T’aurais eu un second Prime sur les bras, intelligent ça.
- Conner… »
Tim faillit trébucher sur un fauteuil, mais c’était Tim alors il se rattrapa et réussit à donner l’impression qu’il avait toujours su que ce fauteuil était sur son chemin. Il perdit toutefois suffisamment de temps pour que Conner se retrouve juste devant lui lorsqu’il releva la tête.
« Salut, Tim », répéta-t-il.
Il vit Tim avaler sa salive puis d’une main manquant singulièrement d’assurance, il lui attrapa la manche.
« Salut, Conner », répondit-il tout bas.
Il se mordit la lèvre et Conner le serra dans ses bras. Tim ne lui rendit pas l’étreinte mais la main sur sa manche était presque prise de convulsions.
« Tu m’as manqué, dit Conner.
- Va te faire foutre, répondit Tim d’une voix étranglée, quelque part au niveau de son épaule.
- Quand il n’y que ton meilleur ami d’absent à ton lit de résurrection, ça fait un peu tâche. »
Le coup de poing ne lui fit pas mal, mais lorsque les bras de Tim l’entourèrent, lorsqu’il sentit ses doigts s’enfoncer dans son dos comme pour s’agripper, Conner sentit quelque chose se relâcher dans sa poitrine.
« Si tu meurs encore, lui dit Tim, je veux plus jamais te revoir.
- T’es dur.
- Plus jamais. »
Conner lui donna un petit coup de tête. Tim redressa le visage. Il avait les yeux rougis et les lèvres pincées.
« Promis, lui dit Conner, je meurs plus. »
Tim pinça encore plus les lèvres et sans réfléchir, Conner se pencha et y déposa un baiser.
Tim le regarda sans rien dire. Conner haussa les sourcils.
« Un jour, tu vas rester coincé comme ça, tout grognon et personne ne verra la différence. »
Tim allait rétorquer lorsque la porte s’ouvrit à nouveau, brutalement, suivie d’une voix indignée et relativement suraigüe :
« Graysoooooon ! Drake est dans le salon avec Superboy !
- Ferme-la, Damian ! »
S’ensuivit une sorte de chaos organisé où Tim et donc Damian (une espèce de petite teigne aux allures de mini-ninja colérique) tentaient de s’assassiner à coups de répliques haineuses tandis que Grayson, revenu dans la foulée, essayait de calmer tout le monde ; et quelque part au milieu de tout ça, la lumière fut :
« Nightwing ! s’exclama Conner, ce qui eut le mérite de faire taire tout le monde. Tu es Nightwing ! »
Et ça expliquait des tas de trucs et aussi pourquoi Tim était si à l’aise avec lui ! Dick Grayson lui décocha un sourire dévastateur, et Damian corrigea d’une voix qui réussissait à être à la fois dédaigneuse et véhémente :
« Non, c’est Batman, espèce de paysan !
- Damian, la politesse ce n’est pas un concept abstrait », répliqua Dick.
Sur ces mots Alfred Pennyworth entra pour dire que le déjeuner était servi et demander s’il rajoutait une place pour Conner.
Tim lui tenait à nouveau le t-shirt, à la taille cette fois, et ne semblait pas décidé à le lâcher, ce qui convenait tout à fait à Conner.
« Je vais appeler Clark pour le prévenir », déclara Dick.
Juste avant de tourner les talons, il serra brièvement Conner dans ses bras.
« Heureux que tu sois de retour. »
Il avait disparu avant que Conner se soit remis du choc. Lorsqu’il jeta un coup d’œil à Tim, ce dernier avait un petit sourire en coin moqueur.
« La ferme, marmonna Conner. On n’a pas tous l’habitude que Nightwing… bref. »
Si le regard de Damian avait été de kryptonite, Conner serait de retour six pieds sous terre.

¤

« Alors… Bruce Wayne était Batman ? » demanda Conner plus tard après le déjeuner, alors qu’il était assis dans le parc avec Tim, les yeux sur Krypto qui marquait tous les arbres du parc.
Tim hocha la tête sans vraiment le regarder. Il avait les doigts enfoncés dans la terre et massacrait l’herbe à portée de sa main de façon terriblement méthodique. Conner lui toucha le genou avec le sien.
« Wow, dit-il. Ça, je crois que personne l’aurait jamais deviné.
- Il est vivant », déclara Tim sans le regarder.
Hum, pensa Conner.
« J’en suis sûr. J’ai des preuves.
- Ok. »
Tim tourna enfin la tête vers lui. Il y avait quelque chose d’incertain dans son regard.
« Dick ne veut pas me croire. »
Conner haussa les sourcils.
« Si tu as des preuves… »
Une motte de terre vint avec une poignée d’herbes.
« Elles ne sont pas assez tangibles. » Tim se mit à suivre Krypto des yeux. « Après mon arrivée, la nuit dernière… On a beaucoup discuté. Et Dick m’a dit que tant que je n’ai pas quelque chose de solide, il ne veut pas le savoir. Que Bruce est mort et c’est tout. »
Conner se rappela soudain l’expression de Dick lorsque leur regard s’était croisé la première fois, la force de son étreinte, aussi courte avait-elle été. Que devait-il représenter, lui, revenu d’entre les morts ?
Pourquoi moi et pas un autre ?
Un frisson lui parcourut l’échine et il chassa résolument ces pensées.
« Je ne comprenais pas, continua Tim. Il a toujours cru en Bruce, de façon presque insensée. La moindre rumeur qu’il est en vie aurait dû le faire bondir. »
Conner garda religieusement le silence, retint même son souffle de peur que la moindre perturbation rappelle à Tim qu’il était en train de s’exprimer.
Ce dernier fronça les sourcils et un air mécontent passa sur son visage.
« C’est Damian qui m’a fait comprendre. »
La pelouse en prit à nouveau un coup.
« Damian corrige toujours tout le monde. Alliés. Ennemis. Dick est Batman. »
Conner comprit tout de suite.
« Tu ne peux pas être un bon Superman si tu crois que Superman va revenir. »
Tim ne répondit rien, mais lorsque Conner appuya son épaule contre la sienne, il se laissa soutenir.

Suite

dcu - couple : tim/kon, dcu : inven-terre, dcu

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