La main d'Ecthelion montait et descendait doucement autour du bras de son écuyer.
"C'est étonnant... La vitesse à laquelle vos muscles se sont développés. Et ils ont tellement pris en volume. Est-ce une particularité des Humains ?"
"J'n'sais point messire, ça ne s'arrête pas d'grossir en ce moment, c'est comme mes poils sur l'torse."
Ecthelion haussa les sourcils
"Pourtant j'fais juste les entraînements d'la caserne."
"Je ne comprends pas", dit amèrement l'elfe. "J'en fais plus que vous et pourtant les miens ne grossissent pas comme ça..."
Belin n'en crut pas ses oreilles. Pour la première fois depuis qu'il le connaissait, il avait l'impression qu'Ecthelion ressentait à son égard de l'envie et de la jalousie. Il y avait aussi autre chose dans ses yeux alors qu'il lui touchait le biceps, mais il ne savait pas quoi.
"Y'a bien Glorfindel et Rog qui ont des gros muscles messire."
"Oui mais eux ils sont vieux. Est-ce que je vais devoir attendre mille ans pour ressembler à autre chose qu'une crevette ?"
"Glorfindel a mille ans ?", s'étouffa Belin.
"Je ne sais pas vraiment... Enfin, dans ces eaux-là, je suppose..."
"Vous êtes très bien comme vous êtes messire. Vous r'ssemblez à une statue. Sur vous des muscles comme moi ça n'irait point."
"Faites voir l'autre bras... Je trouve ça joli quand même", dit-il, en faisant descendre sa main de l'épaule jusqu'au coude.
Belin rougit.
"Faut point m'toucher comme ça messire..."
"Pourquoi ?"
L'humain ne répondit pas, mais Ecthelion comprit en voyant son pantalon.
"Non mais c'est pas vrai ! Vous êtes excité même quand on vous touche le bras ?!"
Le jeune homme baissa la tête, penaud.
"Ce n'est point d'ma faute. J'le contrôlons point."
L'elfe grogna.
"Vous vous avez vraiment besoin d'une fille..."
Quelques temps plus tard, quand ils furent aux thermes, Ecthelion s'aperçut que Belin n'avait plus aucun poil sur le torse.
"Qu'est-il advenu de vos poils ?", demanda-t-il à son écuyer.
"J'les ai fait épiler messire. J'me sentais point bien avec."
"Mais pourquoi ?"
"Presque tous les elfes sont imberbes de c't'endroit, alors j'pensois qu'c'n'était point chose qui plaît aux femmes."
"Mais moi je les aimais bien vos poils."
Belin tourna la tête lentement vers son maître.
"Je veux dire", reprit l'elfe, "ils vous rendent au contraire encore plus unique, alors pourquoi vouloir les ôter ? En outre, je ne l'ai jamais vu, mais on dit que le Vala de la guerre, Tulkas, est blond et barbu. Et ne parle-t-on pas, dans les poèmes épiques, de Tulkas au torse chevelu ?"
"Je ne sais point mon seigneur, j'connais point les poèmes qui piquent."