Hey folks !
Voici un court one-shot Bruce/Dick, écrit il y a peu pour l'avant dernier Atelier de la Lanterne.
Fandom : Batman TAS
Titre/thème : Arrêtes tes jérémiades
Personnages/pairing : Batman1/Robin1
Beta :
littlecoypu Rating : PG-13
Bien sur, Dick avait de la chance. A la mort de ses parents, lui le gamin du cirque, l'étranger à la cité et au pays, le gamin sans fortune et sans famille, avait, au lieu de finir dans un des orphelinats miteux de la ville, rongés par la violence et la corruption, atterrit dans le manoir grandiose de Bruce Wayne.
Lui, l'acrobate qui n'avait jamais connu de vie ''normale'', grandit au milieu des freaks, qui avait toujours eu autant d'adrénaline que de sang dans les veines et pour qui voler était aussi essentiel que respirer, était devenu le sidekick de Batman, était resté Robin.
Lui, le môme orphelin, plein de colère et de rage, avait trouvé quelqu'un pour le comprendre, le guider dans la bonne voie, le préserver d'emprunter un chemin plus noir.
Oui, il avait de la chance. Cependant, être le Boy Wonder avait aussi un très dur revers.
Il devait satisfaire Batman, ne jamais, au grand jamais, se laisser aller dans son entrainement, toujours être parfaitement opérationnel, maitriser du bout des doigts toutes ses techniques de combat et d'acrobatie, pour ne jamais représenter un danger pour la police, les civils ou lui-même. Et bien sur, être efficace.
Et puis, il devait aussi satisfaire aux attentes de Bruce Wayne, travailler assidument en cours, apprendre parfaitement toutes ses leçons, ramener de bonnes notes, ne pas se battre avec ses ignares fils de bonne famille qu'il côtoyait toute la journée, se montrer toujours le plus poli possible, avoir des manières impeccables et être respectueux des gens qu'il rencontrait. Oh, et, bien sur, être présent aux soirées mondaines au Manoir ou ailleurs, et là encore, faire bonne figure, jouer son rôle à la perfection et supporter les hommes à gros cigares puants, les joues pincées et les femmes imposantes aux voix aiguës.
Et tout ça, c'était dur. Très dur. Ça lui demandait énormément d'énergie, de travail, tout le temps. Mais il ne se plaignait pas, non. Parce qu'il avait de la chance. Beaucoup. D'avoir Bruce et d'avoir Batman. Alors il serait les dents, faisait de son mieux. Bien sur, ce n'était pas assez, mais il avait au moins la satisfaction de faire de son mieux, et de ne jamais se plaindre.
Et ça, ça avait duré des années. Mais bien sur, il n'avait jamais pu atteindre l'idéal de perfection attendu par l'homme. L'avait toujours, au fond, déçu. Alors, inévitablement, un jour, leur collaboration avait cessé. Il avait quitté Bruce, le costume de Robin, et même la ville.
Il était devenu Nightwing, un policier et un homme indépendant. Il avait cessé tout contact avec son mentor. Du moins, directement. Il n'avait jamais pu ne serait-ce qu'envisager de ne pas donner de ses nouvelles à Alfred, bien évidemment.
Mais, au fond, rien n'avait véritablement changé. Il essayait toujours d'être irréprochable, parfait, dans tous les domaines de sa vie. Professionnelle, super-héroïque et... relationnelle.
Oui, on ne pouvait pas vraiment parler de vie personnelle. Elle s'était toujours limitée, depuis la Nuit, à ses rapports affectueux mais inévitablement emprunt de distance avec Alfred, et aux trop rares moments de complicité avec Bruce.
Oh, et, bien sûr, son histoire avec Barbara. Sa fameuse, unique, petite amie. Une histoire brève, jamais vraiment aboutie, qui avait causé sa séparation avec l'homme qui régnait sur chaque aspect de sa vie, sauf celui-ci. Batman, inexplicablement, avait tout fait pour que leur histoire ensemble ne marche pas.
Maintenant donc, il n'avait plus grand choses d'autre que les visites occasionnelles du majordome anglais, pleines de cookies, de soupe au poulet et de coups de serpillère.
Enfin ça, c'était six mois plus tôt. Avant que ce gamin, Tim, ne débarque dans sa vie et dans celle de Bruce, devant Robin après n'avoir pu convaincre Dick de le redevenir.
Après un dur moment d'adaptation à voir son rôle et le surnom donné par sa mère attribué par l'être le plus important de son existence à un autre, Dick s'était finalement rapproché de ce gamin ébouriffé, si plein de vie et d'enthousiasme, qui ne faisait finalement que se voir donner la chance dont lui même avait bénéficié plus jeune.
Et puis, il avait par la même occasion renoué avec Barbara, toujours aussi flamboyante, enthousiaste, maintenant une jeune femme épanouie. Une amie, en vérité.
Et bien sûr, inévitablement, presque malgré lui, il avait retrouvé Bruce. Batman.
Ça avait été dur, maladroit, oh combien frustrant, et, oui, il en avait pleuré, de nombreuses fois, seul dans son lit de la froide Bluedheaven, comme durant les mois après la séparation.
Puis les choses s'étaient apaisées entre eux, il en était d'ailleurs reconnaissant à l'agacent môme en rouge et noir, quelques sourires étaient réapparus.
Mais il devait bien admettre que quelque chose avait changé, quelque chose d'important. Bruce le voyait désormais comme un homme, comme un égal. Aussi, ne pouvait-il s'empêcher d'espérer. Espoir qu'il s'était interdit des années durant, dès le moment, à vrai dire, où il avait découvert la vérité. Il s'était fait violence alors. Pour réprimer cet espoir, cette idée folle, destructrice. Il se faisait à nouveau violence maintenant.
Ce qui ne faisait que rendre les choses encore plus dures à supporter qu'elles ne l'étaient déjà. Car en fait, là non plus, rien n'avait vraiment changé. Les patrouilles harassantes et dangereuses en uniforme avaient remplacé les leçons et les rédactions, le costume noir et bleu celui aux couleurs plus vives. La difficulté de concilier deux vies, deux journées, en 24 heures. L'augmentation de ses capacités physiques rattrapée par la nécessité de gérer seul Bluedheaven tout en prêtant main forte à Gotham.
Et, comme avant, il ne se plaignait pas, jamais.
Aussi, cette fin de nuit là, regardant les nuages qui déversaient sur eux leur eau se colorer à l'horizon des premières couleurs de l'aube, après une nuit harassante de patrouille et de combats, trempé jusqu'aux os, après près de 48h sans sommeil, le jeune homme fut-il choqué d'entendre répondre au juron qu'il avait lâché à la reprise de l'averse, de la voix grondante du Chevalier Noir « Arrêtes tes jérémiades. ».
Alors, choqué, Dick se leva, et, tout en fusillant l'homme du regard, lui déversa dans un flot de récriminations et d'imprécations tout ce qu'il avait gardé sur le cœur trop longtemps, ce ressentiment à l'égard de cet homme si important dans sa vie qui avait toujours attendu de lui une perfection trop dure à atteindre. Il voulait des jérémiades ? Il allait en avoir !
Le croisé masqué se leva à son tour, et le toisa durant tout l'éclat, lui laissant, sans un mot, vider son sac. Puis, avec son calme froid habituel, neutre, avec l'économie de mots et de mouvements qui le caractérisait toujours, plaqua son ancien pupille contre son torse et le fit taire en plaquant presque brutalement ses lèvres sur les siennes.
Et, avec la même application opiniâtre et la même parfaite maîtrise technique qu'il employait pour faire toutes choses, il l'embrassa.
Dick découvrit alors que dans ce domaine aussi, le plus grand détective du monde était pourvu d'un talent sans égal. Que ce baiser était à la hauteur de ses rêves d'adolescent. Il était bien moins doux, tendre ou romantique, moins magique aussi que ceux qui hantaient ses nuits. Mais il était parfait. Parce qu'il était réel.
Il se fit également la réflexion, un peu plus tard ce matin là, alors qu'il admirait les dernières lueurs de l'aube, abrité de la pluie par la grande cape noire, réchauffé à travers leurs armures respectives par la chaleur du corps de Batman, que si c'était là leurs conséquence, il devrait formuler des jérémiades plus souvent.