Titre : Cauchemar monochrome
Auteur : Lilou Black
Type : Fanfiction
Genre : Angst
Fandom : le Dahlia noir
Personnages : Dwight (Bucky) Bleichert, mention de Madeleine Sprague, Elizabeth Short et Kay Lake
Défi : Couleur
Rating : PG-13
Disclaimer : Propriété de mon Maître James Ellroy... devant lequel je me fais toute petite.
Note : Si quelqu'un lit et commente en connaissance de cause (en ayant lu le bouquin et oubliez le film, bon sang !), il aura droit à... une icon avec des cookies dessus XD
Leurs deux visages si étrangement semblables se superposaient dans mon esprit pour n’en donner qu’un seul. Madeleine jouait son rôle aussi parfaitement que son petit jeu était rodé. Quelque chose en moi me disait que la ressemblance n’était pas parfaite, se limitait au physique, à l’imitation de la coiffure - barrette jaune retenant les cheveux sombres -, à la robe noire moulante et à l’attitude dragouilleuse de fille à soldats. Peut-être était-ce parce que Madeleine était la petite chérie gâtée pourrie d’Emett Sprague tandis qu’Elizabeth, elle, n’avait été que négligée et rabaissée par son paternel, cet espèce d’alcoolique sur lequel Lee avait tellement eu envie de se faire les poings.
Néanmoins, dans mon état d’intense fatigue due à mes surveillances nocturnes, Madeleine était Betty. Que voulait-elle prouver en l’imitant, je n’en savais rien, ses soupirants abrutis d’alcool étant incapable de me fournir la moindre information qui tienne la route. La troisième nuit, ne voulant pas rentrer à la maison retrouver Kay et notre vie commune factice, je m’endormis dans ma voiture et elle surgit, à l’orée de mes rêves.
Laquelle était-ce, je l’ignorais. Maddy ou Betty, cela n’avait guère d’importance. Pas plus que l’une soit bien vivante et l’autre morte depuis deux ans. C’était elle, le Dahlia Noir, la femme bousillée, l’actrice ratée, qui vivait sa vie en jouant des rôles comme dans les films en noir et blanc pour lesquels elle n’avait pas été retenue.
C’était la longue robe noire en soie, moulante, décolletée, provocante, qui valorisait la pâleur du teint. C’était la longue chevelure, noire également, d’une teinte presque factice tellement elle était sombre, même les filles Jap n’avaient pas des cheveux pareils.
C’était le visage à la blancheur rehaussée par un abus de maquillage qui détonnait dans le noir, la robe, les cheveux et l’obscurité d’une pièce qui ne pouvait être qu’une chambre même si je ne voyais rien.
Je ne parvenais pas à m’approcher d’elle pour la voir de plus près. Je voulais saisir dans toute sa profondeur cette femme aussi insaisissable que son tueur et qui restait, malgré deux années d’enquête, un véritable mystère. J’avançais dans le noir et elle était toujours aussi lointaine avec son visage trop pâle et cette robe qui la collait comme une seconde peau.
Je sentais le désespoir s’emparer de moi tandis que le noir menaçait de m’écraser. L’obscurité de la pièce, la robe et la chevelure de Betty/Madeleine, tout était trop noir, trop sinistre, pourtant j’en avais vu d’autres dans ma vie, même le rouge du sang m’angoissait moins que cette absence totale de couleur, puisque d’après Kay qui avait suivi des cours de dessin, c’était là l’origine du noir.
L’absence de couleur.
Comme l’absence de vie.
Comme la mort.
La vision en noir et blanc, curieusement toujours changeante, se figea. Je pus m’approcher et je constatai que c’était bien le visage de Madeleine que j’avais devant les yeux. Ma petite fille de riches qui se glissait dans la peau d’une morte et qui s’encanaillait pour tromper l’ennui.
Des mains, aussi noires que le reste, se posèrent sur ce minois que j’avais vu de si près tout le temps où elle avait été ma maîtresse et, à l’obscurité de la pièce et au blanc de son visage se mêla le rouge.
Le rouge du sang de Madeleine tandis que ces mains noires tranchait les commissures de sa bouche comme pour accentuer cette ressemblance… jusqu’au macabre.
Je m’éveillai en sueur et, avant de quitter les alentours du motel que la fille d’Emett Sprague avait quitté pendant que je dormais, j’eus une pensée pour elle.
Petite, je ne sais pas ce que tu fais mais tu risques de payer pour tes caprices.
Fin.