Rouge aux joues - Vampire Hunter D - n°2

Jan 06, 2007 11:31

Titre: Existences
Auteur: drakys
Thème: Rouge aux joues
Fic n°2
Fandom: vampire hunter d
Personnage/Couple: d
Rating: G
Disclaimer: hideyuki kikuchi


Si un des satellites lancés dans le ciel par la Noblesse avant leur déclin avait tourné vers la Terre son regard articiel, peut-être aurait-il remarqué un point noir sur l'étendue blanche. Des centaines de kilomètres sous ces yeux invisibles dont personne ne se servait plus, la tache obscure se révélait être un homme qui avançait dans la neige.

Il portait une scelle sur l'épaule, ce qui laissait présager que sa monture avait rencontré une fin malheureuse. Le reste de son bagage ne semblait être constitué que de l'épée longue dans son fourreau de cuir foncé fixé à son dos. Le voyageur semblait être tissé à même les ténèbres, avec ses vêtements et sa cape foncés et le chapeau aux larges bords qui dissimulait ses traits. Sur ses épaules et son dos tombaient en cascade ses cheveux couleur d'ébène.

Le voyageur solitaire s'immobilisa et quiconque aurait connu ce jeune homme aurait compris qu'il n'était pas dans son état normal. Sa pause dura dix secondes à peine et pourtant, sous l'ombre du chapeau et sur le visage trop beau pour être vraiment humain flotta fugitivement une expression de lassitude inhabituelle.

"Hé D, je t'avais dit de contourner cette satanée montagne!", s'énerva une voix qui n'appartenait apparemment à personne.

Le plus curieux était qu'elle semblait provenir de la taille de l'interpellé, qui ne fit pas grand cas de cette étrangeté. Il continua simplement à avancer, son pas sûr trahissant qu'il avait une destination précise. La voix ne sembla par contre pas prompte à le laisser tranquille.

"Ça fait combien de temps depuis la dernière fois? Tu n'as certainement pas changé depuis!", l'harangua durement la voix. "Toujours aussi entêté et plus borné encore, quand vas-tu accepter ta natu-

- Tais-toi", vint enfin la réponse du voyageur.

"Oh oh, enfin tu me fais l'honneur d'un semblant de conversation!", et un rire nasillard retentit. "Tu m'en vois ravi! Parce que comme tu es en pleine crise du syndrome diurne, je croyais-

- Tais-toi", répéta D en titubant cette fois d'une façon perceptible.

Cette fois, il s'arrêta et comme il essayait de contenir le tremblement de sa main droite, il alla la porter à son front. Sa main était froide, mais son propre visage lui sembla brûlant. Il retira ses doigts aussitôt. Presque un gémissement lui échappa et il se força à avancer à nouveau. Il fit à peine deux pas qu'il tomba sur un genou.

Le syndrome diurne n'affectait que les créatures comme lui.

À moitié humain et à moitié Noble, les dhampirs héritaient de la majorité des caractéristiques de leur parent vampire. Autant étaient-ils forts et vivaient-ils longtemps, autant le jour avait tendance à les affecter. Contrairement à la Noblesse, les dhampirs pouvaient toutefois évoluer le jour, bien que le plein soleil les dérobe de leur force et de leurs réflexes surhumains.

Souvent condamnés à devenir Chasseur, les dhampirs n'étaient acceptés ni par les humains qui en avaient peur, ni par la Noblesse qui méprisait leur infériorité. Leur malédiction frappait souvent aux six mois, les forçant à se retirer dans le secret le plus complet pour dormir pendant une semaine complète, ou jusqu'à ce que la torpeur mortelle de leur condition les quitte.

D n'avait pas souffert du syndrome diurne depuis plus de trois ans.

"Bouillant de fièvre et le regard qui se brouille, n'est-ce pas?", taquina la voix. "Ça explique ces couleurs inhabituelles sur ton visage!"

La voix éclata d'un rire franc et D grogna pour toute réponse. Abandonnant sa selle à son côté, il fouilla dans une des sacoches. Une dague apparut bientôt à sa main et il se mit à creuser la neige avec acharnement. Sa contenance avait perdu de sa majesté habituelle. L'endroit était mal choisi, mais le contact de la terre lui permettrait de reprendre des forces.

"Non, pas ici, pauvre imbécile!", l'arrêta brusquement la voix en oubliant soudain toutes ses velléités de se moquer de lui. "Tu gratteras cent ans que tu ne trouveras pas un carré de terre propice! Il va falloir que tu marches encore, si tu m'avais écouté-

- Le détour m'aurait pris trop de temps", soupira presque le jeune homme en soulevant sa scelle avec un effort visible.

"Trop de temps! Trop de temps, ha!", répliqua la voix avec irritation. "Tu sais bien qu'il t'attendra, s'il veut te faire damner un peu plus! Pourquoi tu persistes à croire qu'il te laisserait tranquille? Tu joues si bien son jeu, à te laisser tourmenter, jamais il ne se lassera de toi!"

Cette fois D ne répondit rien, mais ses traits se durcirent presque imperceptiblement. Un éclair de colère brilla une seconde dans ses yeux devenus rouge sang. Son expression redevint froide et parfaitement neutre en un moment et progressant lentement, il continua à avancer comme si chaque pas lui pesait.

"Dis-moi quand", finit-il par demander.

Il y eut un silence et un étrange bruit d'inspiration.

"Deux kilomètres à l'est, les neiges se raréfient et il y a quelques arbres chétifs. La terre est gelée en surface, mais tu devras pouvoir t'y creuser un trou."

D changea péniblement de direction, traînant son corps meurtri vers ce nouvel objectif. Il y eut un rire étouffé et les sourcils du beau Chasseur se froncèrent légèrement. Contrôlant aussitôt cette rare manifestation d'émotion, son expression redevint impassible.

"Oh, n'essaie pas de le cacher, dhampir", l'harcela la voix. "Même s'il est un peu tard pour t'entendre admettre que j'avais raison, il me serait doux si tu pouvais te résoudre à me le dire!"

Un éclat de rire suivit cette déclaration et D serra son poing gauche jusqu'à ce que l'hilarité soit réduite à un gémissement pitoyable. Le visage grotesque dans sa paume disparut sous la surface de la peau avec une plainte irritée.

"Si tu n'étais pas un si bon hôte, je t'aurais laissé crever depuis longtemps!", siffla la voix, étouffée et furieuse.

Le Chasseur ne lui répondit rien et il continua à avancer dans la neige, chaque pas lui demandant un effort autant considérable qu'inaccoutumé. Des centaines de kilomètres au-dessus de sa tête, les satellites poursuivirent leurs révolutions. Les images qu'ils envoyaient n'étaient plus regardées par personne dans les postes de contrôle abandonnées et pourtant, ils continuaient de les diffuser.

Comme la Noblesse qui se raccrochait à son existence maudite, les satellites survivaient comme eux sans personne pour mettre fin à leur règne sur l'infinité du ciel. Et comme eux, D continuait d'avancer sans espérer se fixer quelque part, parce que les chemins étaient le seul endroit qu'il pourrait jamais appeler sa maison.

(6 janvier 2007)

theme : rouge aux joues, fandom : vampire hunter d

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