Your Voice 3/3

Oct 31, 2014 10:13





Your voice.



Les jours passèrent et Jim et moi ne nous quittions plus un seul instant. Mes amis semblaient surpris des changements que Jim provoquait en moi mais avouaient les apprécier. Les gens qui m’aimaient moins ne rataient pas une occasion de railler mes nouvelles habitudes d’homme amoureux mais pour une fois, les critiques et les insultes glissèrent sur moi comme une goutte d’eau sur du papier de soie.

Début Janvier, Ethan réussit à faire faire deux passeports. C’était décidé, ils s’envoleraient pour la Californie le 13 Janvier 2115. Alors, à partir de là, Jim et moi ne quittèrent plus que très rarement ma chambre de bonne. J’aimais lui faire l’amour doucement, langoureusement mais aussi plus bestialement. J’aimais tout avec lui, jamais rassasié de son corps, je le tenais serré contre moi des heures durant, écoutant son cœur battre contre dans poitrine.

Arriva le Vendredi 10 Janvier. Cette date restera à jamais gravée dans mon esprit. Ce jour-là, il faisait beau, un grand soleil brillait dans le ciel.

Nous marchions côte à côte dans Camden, pas trop près l’un de l’autre pour n’éveiller aucun soupçon. Nous passâmes devant la boutique d’un chapelier. Sur le trottoir étaient installé un étal de chapeaux. Jim en prit un pour l’essayer. Il me demanda ce que j’en pensais et je lui répondis qu’il lui allait à merveille. Il afficha alors le plus beau sourire que je ne lui avais jamais connu, comme si je lui avais offert le plus beau des cadeaux. Ne pouvant m’en empêcher, j’approchai mes lèvres de sa joue rougie par le froid sec et l’embrassa rapidement.

Alors que je pensais être à l’abri de tout regard extérieur, le chapelier surgit de derrière son étal.

« Allez faire ça ailleurs, tarés ! »

Alors que je m’apprêtais à riposter, j’aperçus Jim prendre une grande bouffée d’air. Il souffla calmement et me regarda droit dans les yeux.

« Tu avais raison sur toute la ligne. On n’a pas à baisser les yeux. » Me dit-il d’un air grave en serrant les poings. Puis, il se retourna vers l’homme qui venait de nous insulter.

« C’est nous que vous traitez de tarés Monsieur ? » Commença-t-il d’une voix sèche et froide, d’une haine retenue et sans affects.

« Ouais, vous. Allez faire vos saletés ailleurs sales pervers.

-Mais Monsieur nous ne faisons rien de mal.

-Écoutez, je ne tiens pas à discuter avec…

-Non c’est vous qui allez m’écouter ! » S’emporta-t-il.

« Si il y a un taré ici c’est vous ! Vous et vous seul ! La tare que vous portez, là, tout au fond de vous, elle vous étouffe ! Cette tare qui vous ferme l’esprit et vous empêche de reconnaitre le bonheur de quelqu’un différent de vous !

-Espèce de malade…

-Malade ? Moi ? Ouais peut-être ! Et je suis heureux de l’être ! Vous êtes sain vous peut-être ? Ah oui, tout ce qu’il y a de plus sain ! Vous ne vous rendez même pas compte que vos désirs que vous essayez lamentablement de cacher pour plaire aux puissants, ils sont là tout au fond de vous ! Et à force de les nier, vous ne vous rendez que plus salaud que vous l’êtes au naturel ! »

C’est là que la situation commença à dégénérer gravement. Le chapelier, tout rouge de colère, décrocha une violente droite sur la joue de Jim. Ce dernier tomba à terre et je me précipitai aussitôt sur ce connard, je lui donnai un remarquable coup de poing quand Jim se releva vivement et me fit basculer en arrière.

« Je vous plains Monsieur, je vous plains grandement ! » Cria-t-il alors qu’il s’apprêtait à frapper l’homme à son tour. Un peu étourdi, je relevai la tête et aperçus de l’autre côté de la rue quatre policiers courir vers nous. Il fallait déguerpir et vite. Se battre avec un chapelier était une chose, se faire arrêter par cette police injuste et violente en était une autre.

« Jim. Jim ! » Il ne m’entendit pas tout de suite, tout occupé qu’il était avec le vendeur de chapeaux.

« Jim putain y’a les flics ! » Il se retourna mais malheureusement il était trop tard et les hommes en uniformes nous saisirent brusquement.

Nous nous débattîmes comme de beaux diables, comme des désespérés craignant le pire si les policiers venaient à nous maîtriser. Au bout d’une lutte acharnée, je réussis à me libérer de la poigne des deux gorilles qui étaient sur moi. J’entendis Jim me crier qu’il me suivait. Alors, confiant, je me mis à courir à perdre haleine à travers les vieilles ruelles sombres de Camden borough. Fier et soulagé qu’on leur ait échappé tous les deux, je me mis à rire comme un fou. Ce n’est que trois ou quatre minute plus tard, n’entendant plus les flics derrière nous, que je m’arrêtai. Je repris mon souffle en m’écroulant sur un mur humide. Je me retournai. J’étais seul. Jim n’était pas là, il n’était pas avec moi. Le souffle coupé, je rebroussai chemin à la hâte, pensant qu’il devait s’être arrêté plus tôt. Je sentis la panique m’envahir quand, mètres après mètres, je ne retrouvai nulle trace de Jim. Ces ruelles sales me semblèrent tout à coup bien hostiles. Les sanglots me montèrent à la gorge et les larmes envahirent mes yeux. Je criai son nom mais n’entendis en retour que les cris de chats errants.

Enfin je le retrouvai. Je revins près de la boutique du chapelier. Jim était toujours là, totalement maîtrisé par les quatre gorilles qui semblaient le serrer plus fort que de raison. Tenu en joug par deux matraques et deux révolvers, Jim ne bougeait plus, les yeux rivés au sol.

M’empêchant de hurler ou de courir prendre sa défense, je les vis s’éloigner lentement et enfourner Jim dans leur camion.

Rongé par l’inquiétude et la haine, je n’en devenais pas fou pour autant et était conscient que seul et impulsif, je n’avais strictement aucune chance face à eux.

Aussitôt je téléphonai à Oliver, Muhammed et tous les autres. Il nous fallait organiser quelque chose au plus vite. Je savais la police capable de tout, capable des pire infamies, la peur commença à me ronger les entrailles. Il fallait sortir Jim de là.

Par malheur, les choses ne se passent pas toujours comme on le prévoit. On a beau y mettre tout notre cœur et l’énergie de notre jeunesse, il est difficile d’affronter les instances qui nous dépassent de toute leur puissance.

Deux heures plus tard, après de longues minutes de branlebas de combats, il fut décidé que quelques-uns d’entre nous seraient envoyés en éclaireurs au poste de police de Camden. Nous avions l’habitude de faire cela, nous connaissions un endroit où l’on pouvait avoir accès à la cour du bâtiment. Les détenus n’ayant généralement même pas le droit de rester au chaud, ils étaient gardés dehors, dans la cour.

Oliver et moi avions choisis de prendre deux des plus costauds de la ligue, Jack et Noham. Arrivés devant les grands murs de la Police, Oliver se jucha sur les épaules de Jack, quant à moi je me dressai sur celles d’Oliver. De là, je pouvais voir ce qui se passait dans la cour. J’aperçu Jim.

C’est allé très vite. Il était encadré de deux policiers. Sur une estrade. Devant eux se tenaient une vingtaine d’hommes en uniformes, hilares comme devant un one man show. Le plus gros sortit un petite feuille froissée de son pantalon. Il lut une condamnation à mort, une sentence. Et là, mon ami, mon amant… Ils l’ont fait déshabiller. Déshabillé, entièrement à poil. Ils lui ont mis un seau, un seau en fer blanc sur la tête. On ne voyait plus que son corps. Son corps magnifique. Et ils ont lâché les chiens du commissariat sur lui. Ils ont fait ça ces salauds. Jim a été dévoré par les chiens. Un des policiers tenait dans ses mains de petites enceintes qui diffusaient un tube à la mode. Cette musique couvrait en partie les cris. Les cris qui eux même étaient déjà couverts par le seau qui par moments amplifiait le bruit, ça faisait comme une sonorisation.

Le reste, je n’en sais rien. Je me souviens juste avoir hurlé, hurlé à la mort d’un cri qui me déchira la gorge puis je m’évanouis.

Les jours, les mois qui s’en suivirent me paraissent flous à présent. Ethan, effondré, repartit en Californie le 13 Janvier comme c’était prévu. Quant à moi je m’enterrai chez moi un long moment, deux ans. Incapable de surmonter cette perte, détruit de l’intérieur.

Puis, le monde continuant à tourner, un petit instinct de survie me rattrapa au moment où j’allais définitivement sombrer. Cette très chère colère revint tintinnabuler à mes oreilles. Alors, avec je ne sais quelle force, je la saisis. Je repris la lutte. Je m’investis plus que jamais au sein de la Ligue. Guidé par une nouvelle colère, plus saine, plus mature, induite par la simple pensée de Jim. Les années défilèrent. Aux quatre coins de l’Occident des révolutions naquirent. Les régimes fascistes s’effondrèrent les uns après les autres faisant éclater dans leurs chutes de bien sombres et cruelles révélations.

Moi, après ces années d’effervescence à outrance, je me retrouvai sans rien. Je fis tout de même le choix de rester au sein de la Ligue dans laquelle je pris peu à peu du jalon jusqu’à en devenir le directeur. Je fus heureux malgré tout. Je me suis marié à un homme fabuleux nommé Liam. Liam est décédé à présent, il s’est éteint de sa belle mort il y a peu.

Au creux de l’aine, je me suis fait tatouer trois petits noms ; « James Joseph Parsons ». Ce tatouage, c’est lui. Ca fait maintenant 60 ans que je vieillis. Et j’ai de plus en plus besoin de penser, de sentir, de me dire pourvu que sa dernière pensée fut pour moi. Je ne peux pas m’empêcher de penser à lui. Je ne peux pas, je ne peux pas, c’est impossible. Alors le soir, dans mon lit de mon bel appartement du quartier de Pimlico, je touche son nom et je rêve de lui, de ses yeux, de ses cris, de sa voix.

FIN.

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