Quand j'ai passé mon bac l'été dernier, je me suis retrouvé face à mon problème habituel. Je finissait la plupart de mes épreuves une heure trop tôt. En plus, je n'aime pas sortir la première de la salle d'examen, alors pour m'occuper, j'ai écrit quelques textes en utilisant des mots des sujets. Donc en voici certain. Les personnages sont à moi, evidement.
Le Cha :
Un monde de paix, voilà le rêve du Cha. Mais le Cha est vieux, mourant même, et ses fils se disputent les morceaux de son Empire vacillant. Ah, il est loin, le temps où tous les peuples au sud de la grande Bleue étaient unis sous la même bannière ! Aussi loin que la jeunesse du Cha. Ce ne sont plus que des souvenirs, vieux lambeaux d’un rêve qui parait à présent aussi brillant qu’illusoire. Un rêve qui meurt, qui meurt avec le Cha.
La Paix est morte. Vive la Guerre !
Mia et Lac :
Il y a des choses qu’il ne faut jamais dire, pensa la petite. Dix ans et déjà prête à tout, Mia savait faire la différence entre hommes de bien et hommes de pouvoir. Elle savait que c’était aux basques de ces derniers qu’il fallait s’accrocher, et elle connaissait diverses façons de s’attacher leurs affections. Contrairement, semblait-il, à son nouveau collègue. Elle ne tressaillit même pas lorsque celui-ci s’effondra à côté d’elle, la gorge tranchée. Elle resta droite, le visage impavide. Mia survivait, et c’est tout ce qui comptait. Dix ans et déjà un cœur de pierre. Mais un cœur qui battait encore.
Le couteau passait et repassait sur la pierre à aiguiser, dans un mouvement quasi-hypnotique, tandis qu’il tournait les pages. Mia, installée dans un coin de la pièce, même si elle paraissait toute à sa tache régulière, ne quittait pas des yeux son employeur. Elle ne paraissait pas remarquer la présence des gardes, anxieux, qui gardaient la porte. Là-dessus, elle calquait son attitude sur celle de Lac.
Elle se redressa au bout d’un moment, et fit quelques pas, comme pour s’étirer. Elle tenait encore le couteau dans main, mais sa prise était lâche, détendue. La jeune fille paraissait assez inoffensive pour que les gardes s’y laissent prendre. Mais pas Lac, qui pourtant, absorbé par les finances du Seigneur Sang, ne réagit pas à son mouvement. Elle se pencha sur son épaule, comme pour voir ce qu’il lisait, et elle lui murmura à l’oreille :
« Toi, tu te noies dans les nombres, dans les comptes. Lorsque que tu traque les fraudes, tu oublies le reste du monde. C’est dangereux, mais quel beau sourire tu as quand tu touches au but. Je devrais te tuer durant l’un de tes instants de triomphe, pour que tu restes aussi radieux dans la mort. »
Lac sourit en accordant une caresse à Mia, comme on flatte un animal aussi terrible qu’intelligent. Mia lui sourit en retour.
L’expression de Mia était dure, comme si ses traits étaient de pierre. Jeune courrier sur le champ de bataille, enfant des rues ou âme damnée du prince Lac, elle ne pouvait en aucun cas se permettre d’afficher son désarroi au su de tous. Elle devait traverser les charniers où agonisaient encore certains soldats pour transmettre des ordres qui en conduiraient encore d’autres à la mort. Il était loin alors, ce temps où l’Armée, une, indivisible, présentait au monde des rangs étincelants de propreté et de vigueur. Là il ne restait plus que la crasse et la mort et le sang et les lamentations et les cris des mourants… Mais Mia ne pensait qu’à la lettre et à la couse de sa monture.
L’Armée te bloque la route. Bel alignement d’hommes et d’armes, chacun à leur place. Tout y est carré, droit, et tout ce qui en dépasse est coupé sans remord, c’est l’Armée qui permet l’expansion de l’Empire, et en machine de guerre bien rodée, les remords lui sont étrangers.
Et toi, tu lui fais face, et tu sais que tes chances sont maigres. Qu’est-ce qu’un seul contre la toute-puissance de l’Armée ? Tu n’es même pas un obstacle, même pas une gêne. Ils t’écraseront. Pourtant, tu restes immobile. L’Armée te bloque la route. Mais tu lui rends la pareille.