Замечательный, очень трогательный рассказ
Марианны Гончаровой . Далее мой перевод. Проба французского лит. пера... Ой-ой..
Мама с папой уехали в Ленинград в свадебное путешествие, когда-то давно отложенное на потом. Они долго не могли туда поехать. Сначала учились. Потом папа сдавал государственный экзамен по коню и брусьям. (Папа мой - гимнаст) Мама должна была сдавать теорграмматику, а тут и я - здрасте вам, явилась-не запылилась, ребенок по кличке Мыша. Мыша - потому что маленькое, писклявое и девочка. А дальше пошло - поехало. Un petit récit littéraire très émouvant, de
Marianna Gontcharova qui m’a beaucoup plu. Ici ma traduction. Le premier essai de plume dans ce genre...
Maman et Papa partirent pour Léningrad pour un voyage de noces qu’ils avaient remis il y a bien longtemps. Ils n’avaient pas pu y aller avant. Ils avaient d'abord fait leurs études. A cette époque, Papa préparait son examen d’Etat au cheval d'arçon et à la poutre (il était gymnaste) et Maman devait passer un examen de grammaire théorique, mais c'est à ce moment que je vins au monde : bonjour, me voilà ! Veuillez accueillir votre Souricelle. Ainsi surnomma-t-on la petite fille piailleuse que j’étais. Et voilà qu’il en découla toute une histoire.
Ma mère et moi passons un examen de communisme scientifique. Maman est dans la salle de cours, et moi, je reste dans mon landau dans la cour de l’université. Papa part pour la spartakiade* des peuples soviétiques.
- Mais... notre voyage de noces ? - demande ma mère.
- Et la spartakiade ? Les peuples de l’URSS ? Comment veux-tu qu’ils se passent de moi ? Je suis l’un d’eux, de nos peuples, - rétorque Papa raisonnablement. Et il y va.
Il a bien fait. Il en a apporté un tas de choses : une liasse de médailles tintantes, une pile de diplômes, un album à colorier pour moi, de petits souliers pour maman et un bras dans le plâtre. Le sien. Bienvenu. Sa participation ayant rendu heureux les peuples de l’URSS, il a bien fait d’y être allé.
Ainsi, le voyage était reporté aux calendes grecques. Or, un jour, notre grand-mère sagace tapa du pied: - Chut !!! Allez ouste, mes enfants ! Partez en voyage de noces sans tarder ! Tout de suite !
Et mes parents partirent. Qu’ils étaient coquets tous les deux en se promenant dans les rues. Maman parée d’une jupe somptueuse en forme de cloche à grosses fleurs et d’une chemisette noire en velours fin; Papa, les cheveux crépus, en costume « Droujba »** de tussor blanc fabriqué par nos amis chinois et en chaussures blanches, fier de flâner à Léningrad bras dessus, bras dessous avec une telle beauté. D’autant plus que ce fut leur dernière chance cette année-là. Parce que le cadeau que j’avais sollicité pour mon anniversaire, ma soeur Tanya, allait venir au monde. C’est ce que Maman m’avait dit: si j’étais sage, j’aurais un frère ou une soeur. J’ai répondu : un frère, à quoi bon, je ferai de mon mieux, je serai très très sage, mais que ce soit une soeur Tanya. Et je me mis à criailler que je voulais une soeur Tanya.
- Chut, Souricelle, ouste ! A la grâce de Dieu, - dit notre grand-mère sagace et ajouta, - Ce sera soit un frère, soit une soeur. A la rigueur, tous les deux.
Je m’inquiétais terriblement : si la petite Tanya venait au monde pendant que Maman et Papa étaient toujours à Léningrad, qu’allions-nous faire, seules, sans Maman...
Or, mes parents étant partis, je m’installai sur le plancher aussi confortablement que je pus et commençai à hurler. Que pouvais-je faire d’autre? Si je supportais l’absence de Papa encore, en serrant mes quenottes, je devais toujours tenir Maman par la main ou bien, au moins, par le pan de sa robe de chambre. Et quand on me menait à l’école maternelle quelques jours (je vous dirai aussitôt que cela n’a pas marché, et puis, on a embauché une nounou Pauline), je prenais avec moi une jupe de Maman en cachette pour m’y tenir. A la maternelle, je m’égosillais toute la journée ne voulant pas lâcher sa jupe.
Donc, je me mis à me lamenter de la sorte : Pourquoi m’avez-vous abandonné-é-é-é, la pauvre Souricelle, on m’a laissé-é-é-é-é toute seule, juste avec Mé-é-mé-ééée et la nounou Pauliiiiiine !
- Chut, Souricelle, ouste ! - tapa du pied notre grand-mère sagace. Elle décrocha un portrait de Hemingway du mur et le remplaça par une robe de chambre d'indienne de maman en le fixant sur le clou libre. En cessant de sangloter, je me précipitai vers la robe, et, tous les dix jours de l’absence de mes parents, presque sans arrêter, sauf pour dormir, je restais debout en la serrant contre moi, en murmurant : Maman... Maman...
Ma grand-mère hochait la tête en soupirant, sans tout de même taper du pied et sans dire « Chut !».
Des années passèrent. Beaucoup d’années. Des siècles entiers passèrent, s’envolèrent ! On m’a proposé de faire des études et de travailler en Grande-Bretagne. J’hésitais longtemps. Jusqu’à ce que ma grand-mère sagace tape du pied à sa manière qui n'avait pas changé malgré son âge:
- Chut !!! Allez ouste, Souricelle ! Fais tes valises et pars en Angleterre sans tarder ! Tout de suite !
Et alors ? Evidemment. Je me suis mise à faire mes valises.
Avant le départ, en passant chez mes parents pour leur dire au revoir, j’y ai oublié ma veste de sports... Et puis, je suis partie. Loin. Pour longtemps. Et ma petite veste est restée là, suspendue au dos de la chaise… Plus tard, ma grand-mère m’a raconté que Maman et Papa s'en approchaient, la caressaient en murmurant :
- Souricelle… Souricelle...
Ma grand-mère hochait la tête en soupirant, sans tout de même taper du pied et sans dire « Chut !».
Et ma mère m’a raconté que ma grand-mère aussi carressait ma veste en cachette en chuchotant :
- Souricelle… Souricelle...
Voilà comment elle est… La vie, non ?
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Spartakiade (en russe : Спартакиада Spartakiada) est originellement le nom d'un évenement sportif international que l'Union Soviétique avait créé en oppositions aux Jeux Olympiques. Le nom qui est censé représenter l'Internationalisme prolétarien est un dérivé du nom du leader rebel esclave Spartacus. Les premières Spartakiades eurent lieu en août 1928 à Moscou. ** « Droujba » - « Amitié »