2e challenge ABC - B comme Balzac

Oct 08, 2015 17:09


Balzac - Le Père Goriot (1835)
(367 pages, soit 75 km de plus pour le challenge tour du monde = 575 km, 2461 pages et 5 pays pour 8 livres)

Bienvenue à la pension Vauquer. Là, dans l'ombre studieuse de la montagne Sainte-Geneviève, si vous n'êtes pas trop regardant sur la qualité des mets et de la décoration, vous trouverez gîte et couvert à prix modique et pourrez observer à loisir les vilains travers de la petite bourgeoisie médiocre, plus ou moins prospère, plus ou moins miséreuse, qui y a élu domicile. Avec potentiellement quelques surprises à la clef.
Vous y croiserez ainsi mademoiselle Michonneau, maigre demoiselle aux charmes défraîchis dont la vertu peut encore trouver de nouveaux arguments pour se vendre. La pâle et triste Victorine, que son père richissime refuse de reconnaitre au profit d'un frère trop intéressé pour prendre son parti. Horace Bianchon, un sympathique et intègre étudiant en médecine, qu'on reverra souvent sous la plume de Balzac.
Et puis, bien sûr, le père Goriot, trop brave homme ruiné pour deux belles dames que la maisonnée railleuse refuse longtemps de reconnaitre comme ses filles. Le bientôt célèbre Eugène de Rastignac, jeune provincial sans le sou mais de bonne famille, rêvant de conquérir Paris. Et l'intrigant Vautrin, bourgeois jovial aux manières truculentes, qui cache beaucoup plus qu'il n'en dit et peut se métamorphoser en redoutable démon tentateur pour les jolis jeunes hommes ambitieux qu'il choisit de prendre sous son aile.
Vautrin a un plan aussi impeccable qu'amoral pour faire la fortune de Rastignac mais celui-ci hésite, trop belle âme encore pour manquer de scrupules. Lancé dans le monde par les bons soins de son élégante cousine, la vicomtesse de Beauséant, mais sans un sou pour y tenir son rôle, le voici partagé entre les tentations de l'ambition et de la vanité, et les élans d'une conscience encore à peu près pure. Dualité qui se retrouve toute entière dans les sentiments qui le poussent vers la baronne de Nucingen, mondaine parfaite à séduire pour s'affirmer dans le monde, fille intéressée d'un père trop aimant, épouse malheureuse, amante généreuse et attachante malgré ses défauts. Intérêt et amour, au fond, peuvent parfois faire bon ménage - mais l'argent, hélas, est  là pour tout corrompre, et le dernier sang du père Goriot ne suffira pas à acheter le bonheur à ses deux filles.

Etude sociale au vitriol où les mesquineries et les turpitudes des petites tables bourgeoises se reflètent, quasi à l'identique mais avec quelques zéros de plus et des lambris dorés, dans les salons mondains, roman d'apprentissage où se confrontent avec une virulence toute particulière les élans de la conscience et de l'ambition, drame de la paternité où l'amour excessif, s'il atteint au sublime, ne fait que corrompre son objet et causer le malheur de tous... le Père Goriot, faut-il encore le souligner ? est un roman superbe, d'un pessimisme assez implacable mais riche, complexe et vivant, non dénué de suspense et, par dessus tout, peuplé de personnages passionnants.

Si vous avez envie de (re)lire du Balzac mais ne savez trop par lequel commencer, jetez-vous donc sur ce roman-là, au carrefour de beaucoup d'autres. Et dites-moi si, la dernière page refermée, vous n'avez pas qu'une envie : suivre les aventures de Vautrin, de Rastignac, d'Horace Bianchon, de madame de Beauséant, de la duchesse de Langeais et des Nucingen à travers tous les romans qui les font réapparaitre !

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