Bingo Livres 2, step 14 : L'évangile Cannibale

Aug 15, 2014 12:07

14 : Un livre sorti il y a moins d'un an


L'évangile cannibale - Fabien Clavel (Actu SF, 2014)

Dans l'exquise maison de retraite des Mûriers, de la non moins exquise cité de Nanterre, un vieil emmerdeur finit de mûrir en attendant de mourir, avec pour unique objectif d'emmerder le monde autant qu'il peut dans l'intervalle. Mais ne voilà-t-il pas que la doyenne des lieux a soudain la vision de la Fin ? Pas leur fin à eux, non, hautement prévisible, mais la Fin dont le grand F englobe l'humanité entière. Et le fait est qu'on leur cache des choses, aux Mûriers...
Après quarante jours et quarante nuits de réclusion volontaire, un petit groupe d'irréductibles déboule en fauteuils roulants dans la capitale étrangement désertée. Désertée ? Pas tant que ça, en fait. Il y a quelques cadavres dans les coins, et des cadavres pas si inertes qu'un cadavre est censé l'être. Et il faut bien reconnaître qu'à 90 berges passées, on a un sérieux handicap dans la baston contre morts-vivants. Ce qui n'empêchera pas Mathieu, notre emmerdeur, de se battre jusqu'au bout, armé d'une détermination farouche et d'une paranoïa très inspirée.

Détournement burlesque de la littérature de zombis, détournement horrifique des Saintes-Écritures, l’Évangile Cannibale joue des genres avec un talent désinvolte, et oscille constamment entre le déjanté savoureux et le glauque absolu.
La situation absurde, la débauche de gore, le second degré, l'humour noir corrosif pourraient être les ingrédients d'une bonne série Z, bien ficelée, originale et drôle. Mais l'extrême réalisme du récit, projeté dans un futur tout proche du nôtre, parfaitement plausible et semé d'éléments familiers, le jeu de parallèles, plus subtil qu'il n'y parait, entre la déliquescence des morts-vivants et celle des vieillards, la folie qui délite les esprits aussi sûrement que la mort délite les chairs, la dénonciation très explicite d'une société qui se dévore elle-même à force de poursuivre la jeunesse éternelle, teintent le rire de malaise et rendent le récit, au fond, assez glaçant.
Il est évident que l'histoire m'aurait sans doute moins touchée si elle ne se passait pas pour ainsi dire chez moi, dans des lieux que je connais par coeur et qui prennent soudain une toute autre dimension. Les zombis et tout le barda, c'est quand même vachement moins flippant dans une lointaine banlieue américaine que devant le panneau "Rueil-Malmaison" du tunnel de Neuilly. Veulent pas venir faire une surprise party thème asticots à la maison, non, pendant qu'ils y sont ?!

lecture : sf - fantasy - fantastique, bouquins, challenge bingo livres

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