Terreur - Dan Simmons (2007 / Robert Laffont, 2008)
1848. La banquise se referme sur les deux navires de l'expédition Franklin, partie trois ans plus tôt à la recherche du mythique passage du Nord-Ouest. Des cent vingt-neuf hommes embarqués, pas un seul ne reviendra. Pas un seul bout d'épave ne sera retrouvé par les nombreuses expéditions de secours envoyées à sa recherche, des années durant, sur l'initiative de la Royal Navy et de Lady Jane Franklin, fermement décidée à connaître le sort de son époux.
Rien - que quelques objets tombés aux mains des inuits, un dernier message annonçant l'abandon des bateaux, quelques squelettes marqués de traces étranges, qui firent penser à des actes cannibales.
Aujourd'hui encore, le sort du Terror et de l'Erebus, le destin de leurs équipages, fait l'objet de nombreuses recherches, hypothèses et interprétations, sans qu'aucune réponse définitive ait pu être avancée.
De ce mystère bien réel, Dan Simmons a tiré un roman fleuve, où le fantastique se mêle à l'aventure.
Aux erreurs et aux faiblesses humaines, à la puissance démesurée des éléments, s'ajoute une créature bien plus terrible encore - un monstre blanc à l'appétit énorme, à l'intelligence redoutable, à la cruauté terrible. Un démon des glaces qui semble l'émanation même de la banquise, l'incarnation de toutes les forces hostiles acharnées à la perte de cette poignée d'Anglais égarée au royaume du froid.
Si cette créature est indubitablement fascinante, c'est dans un ancrage très réaliste que ce roman trouve toute sa puissance. Dans la mise en scène du conflit entre l'homme moderne et la nature la plus sauvage, la plus terrible qui soit, où il n'a pas sa place et ne sait que périr. Dans les rapports humains qu'exacerbe l'expérience de l'horreur, jusqu'aux abords de la folie. Dans un véritable talent pour saisir l'esprit d'une époque et pour modeler, touche à touche, des personnages remarquablement justes. Le tout relevé d'un formidable travail de documentation - historique, géographique, technique et ethnologique - dont se nourrit une belle puissance imaginaire.
Comme dans Drood, il y a quelques longueurs - tout particulièrement dans le dernier tiers du récit, lequel aurait sans doute gagné à une narration un poil plus concentrée. Mais comme dans Drood, cela ne gâche pas grand chose au plaisir d'un roman rigoureusement addictif qu'on a bien du mal à reposer, le soir, pour se forcer à dormir !
L'expédition Franklin, je sens, n'a pas fini de me fasciner, comme elle fascina et continue de fasciner pas mal de monde. Notamment Dickens et Wilkie Collins, qui écrivirent une pièce de théâtre sur le sujet,
The Frozen Deep. (Vous vouliez un autre lien avec Drood ? Voilà XD)
Personnages principaux
Francis Crozier - capitaine du Terror / Sir John Franklin - capitaine de l'Erebus
James Fitzjames - commandant de l'Erebus / Dr Harry Goodsir - assistant chirurgien de l'Erebus
Et
un lien où trouver les portraits d'autres officiers de l'expédition.
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Le dernier message, retrouvé dans un cairn de l'île du Roi-Guillaume
(Ou plus exactement les deux derniers messages, l'un daté de 1847 "Sir John Franklin commanding the expedition. All well.",
et un autre postérieur, rédigé d'une autre main, annonçant la mort de Franklin, l'abandon des bateaux et le départ des survivants vers le sud.
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Et trois tableaux inspirés du désastre - qui illustrent à merveille le bouquin :
They forged the last link with their lives: HMS Erebus and Terror, 1849-50 - Thomas W. Smith (1895)
The Icebergs - Frederic Edwin Church (1861)
Man Proposes, God Disposes - Edwin Landseer (1864)
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