On ne joue pas avec
Univers :
L’autre côté des ombres Prompt :
tipitina - « J'existe depuis plus de 1986 ans, gamin. Il va falloir trouver autre chose. » (
marathon_prompt)
Censure : K+
Date : samedi 24 mai 2008
Le fait d’être un exorciste itinérant avait ses avantages et ses inconvénients. D’un côté, Owin ne pouvait rêver mieux pour accumuler expériences et nouvelles connaissances, d’un autre il devait s’occuper de vraiment tout ce qui se trouvait sur son chemin, y compris les vampires.
Et s’il y avait bien une catégorie de créatures à laquelle il préférait ne pas avoir affaire…
D’abord, il ne pouvait pas utiliser ses craies. Sans elles il avait toujours l’impression, erronée, de perdre la moitié de ses capacités.
Ensuite, tuer un vampire signifiait le signaler aux autorités compétentes, que le suceur soit enregistré ou pas. Il y avait des papiers à remplir et des raisons à donner, même si le nom de famille d’Owin suffisait à justifier toutes ses actions, aussi sanglantes soient-elles, même si son oncle était à la tête de l’Organisme d’Identification et de Protection des Créatures Surnaturelles.
Enfin, Owin avait toujours des scrupules à se débarrasser purement et simplement des vampires, sauf peut-être ceux qui s’amusaient à décimer des villages. Probablement à cause d’Augustin. Il se demandait souvent ce qu’il se passerait si Augustin perdait la tête à son tour, se laissait contrôler par sa Frénésie. Sans même parler d’Orphée, comment quiconque dans leur famille pourrait se résoudre à le tuer ? C’était ridicule, il était encore jeune, n’avait même pas fêté son premier siècle. Les Frénésistes étaient soit dans leurs toutes premières années et orphelins de Sire pour une raison quelconque, soit au moins proches de leur premier millénaire, comme si après des années de sagesse et de contrôle, quelque chose se brisait en eux.
Certains reprenaient conscience, parfois. D’autres y prenaient simplement goût. Mais Owin ne pouvait s’empêcher de se demander s’il était possible de les sauver, alors son premier réflexe était toujours de les capturer. Et ça ne facilitait pas les choses.
« J’existe depuis plus de 1986 ans, gamin ! gronda Aldéric en traversant les couronnes d’aubépine. Il va falloir trouver autre chose ! »
Il aurait essayé.
Owin attendit que le vampire se rapproche encore. Aldéric était un chasseur, il aimait jouer avec sa proie. Il n’avait pas encore compris que les rôles s’étaient inversés dès l’instant où Owin avait décidé de partir à sa recherche.
Il sortit son petit poignard pour s’entailler le pouce gauche. Aussitôt, il vit les narines du vampire frissonner, son regard se focaliser un peu plus sur lui.
« Ce pouvoir… »
Aurait-il pris le temps de réfléchir un peu, il aurait su. Mais obsédé par la promesse du sang d’Owin, trop sûr de lui, il ne se méfia pas.
Le sigil du feu était le plus simple à tracer, le plus dur à contrôler et le plus épuisant à utiliser.
Owin ne le ratait jamais. Plus jamais.
Les flammes jaillirent de nulle part, Owin écarta les bras, rejoignit et croisa lentement ses doigts jusqu’à ce qu’elles encerclent Aldéric, volatiles, prêtes à consumer tout à leur portée. De la sueur sur le front, les mains moites, Owin pinça les lèvres et maintint le cercle de ses bras malgré la sensation de brûlure qui courait de ses paumes au creux de ses coudes.
Aldéric laissa la Frénésie emporter toute sa raison, espérant peut-être se sauver par le mariage de la puissance et de la folie pure, mais Owin avait eu le temps de focaliser le sort et le sigil ornait désormais le front du vampire.
Il disparut en fumée dans un glapissement suraigu ; Owin ramena le creux de ses mains contre son cœur jusqu’à ce que le brasier s’éteigne, puis se laissa tomber par terre, la gorge sèche, le souffle court et la poitrine brûlante.
Un sourire sur ses lèvres craquelées, il attendit que l’euphorie magique cesse de faire battre son cœur comme un tambour furieux. Il allait falloir se lever, ramasser les couronnes d’aubépines (dommage qu’il ne puisse pas les garder, c’était si ennuyeux de les tresser) et rentrer au village pour confirmer l’éradication d’Aldéric, se faire payer, informer l’Organisme…
Mais d’abord, il avait vu un lac sur le chemin, et il allait y plonger jusqu’à ce que le goût de cendre dans sa bouche ne soit plus qu’un souvenir.
(fin)
688 mots