Jun 27, 2008 12:46
La mort du rossignol
Titre : La mort du rossignol
Auteur : MargauxR
Personnages : Blaise Zabini, Padma Patil
Catégorie : Essai
Rating : K (?)
Notes de l'auteur : Voici donc la deuxième partie de mon OS. J'ai mis du temps à poster, je savais plus comment faire =D Donc bonne lecture à vous.
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La mort du rossignol
Deuxième partie
-x-
Sa tête dodeline contre le mur glacial et ses lèvres tremblent de froid. Tu ne m'avais pas tout dit, Ron. Elle somnole, la gorge serrée, les yeux brûlants. Elle sent la fièvre qui monte doucement comme un serpent dans son corps.
La porte s’ouvre mais elle n’a pas la force de relever la tête.
- Debout, Patil.
Sa tête est lourde mais elle le regarde de ses yeux cernés de noir. Blaise la fixe sans un mot. Elle ne bouge pas. Alors avec un soupir, il fait un pas et la saisit par le bras. Il la relève et elle n’oppose aucune résistance.
Padma s’adosse contre le mur et s’accroche à un crochet qui en dépasse, les jambes flageolantes. Blaise lui attrape les épaules et commence à la fouiller, à tâter ses vêtements. Sur le coup, elle ne réagit pas mais quand ses mains à lui passent sur ses fesses, elle reprend ses esprits et le repousse.
Il l’ignore et continue.
- Dégage, dit-elle d’une voix faible.
Il descend jusqu’à ses jambes et lui enlève ses bottes pour y trouver une quelconque arme dissimulée. Il ne trouve rien. Agacé, il se place devant elle et empoigne son visage dans sa main.
- Qu’est-ce que tu fais ? Murmure-t-elle ne plantant ses yeux dans les siens.
- Comment comptais-tu t’échapper ?
Elle cille mais ne dit rien.
- Comment comptais-tu t’échapper ? Répète-t-il, en détachant bien ses mots. Parle !
Elle secoue la tête. Alors, la colère le prend et il la gifle. Il remarque bien les larmes au coin de ses yeux.
- Ne m’oblige pas à te torturer, menace-t-il.
- Tu l’as déjà fait….
- C’était pas ma baguette, Princesse.
- C’était sur ton ordre….
- Tu croyais quoi ? Que j’allais t’aider à t’enfuir ? Peine perdue, chérie, je ne suis pas Drago.
- Je m’en fous.
Il la jette sur le sol et il entend sa mâchoire claquer contre les pierres. Elle pousse une plainte rauque mais garde la tête baissée.
- De quelle façon comptais-tu t’enfuir ?
Elle ne bouge pas. Tu m’emmerdes, Patil. Il se baisse et l’empoigne par les cheveux. Il la tire vers lui et murmure au creux de son oreille.
- Dis le moi, Patil et je te promets que tu mourras rapidement, demain matin….
Elle frémit et ferme les yeux. Alors il la lâche et la regarde ramper difficilement dans un coin, où elle se recroqueville.
- Je veux pas mourir, gémit-elle, dans le noir. Je t’en… supplie….
Il secoue la tête d’un geste brusque et émet un grognement. Puis, sans un mot sort du cachot.
- Je reviens dans une heure, Patil.
La porte claque et le noir prend place.
-x-
Quand il est arrivé, elle dormait. Il s’est adossé à la porte et a allumé une cigarette. Il la regarde dormir, et elle ressemble à une vieille poupée de chiffon abandonnée par une enfant. Il ne se souvenait pas que sa peau était aussi foncée, que ses mains étaient si fines.
Il ferme les yeux et il la revoit au bal de Noël lors de leur Quatrième Année. Tellement jolie dans sa robe indienne, avec ses cheveux noirs brillants et longs, terriblement longs. L’idiote était accompagnée par ce méprisable Weasley. C’était triste de voir une fille aussi jolie tenir le bras d’un crétin de Gryffondor.
Avec ses bracelets en or qui cliquetaient, ses ongles soignés, ses yeux mis en valeur par du noir, elle ressemblait à sa sœur Parvati, celle qui avait toujours les garçons à ses pieds. Mais pour Blaise, la plus jolie restait Padma. Il ne savait pas pourquoi, c’était ainsi. Pas qu’il soit un jour tombé amoureux d’elle, ou qu’ils étaient été amis, mais il avait toujours trouvé Parvati, stupide avec ses gloussements de basse-cour et son amie accrochée à son bras.
Et puis, il n’aime pas les Gryffondor. Trop con, trop prétentieux et téméraires. Quand on est intelligent, on choisit toujours la prudence à la bravoure, la ruse à la naïveté, Serpentard à Gryffondor.
Blaise avait toujours mis un point d’honneur à humilier les Gryffondor, à se moquer des Poufsouffle et à respecter les Serdaigle. Surtout cette Serdaigle là. Il se souviendrait toujours de ce jour à la bibliothèque où il lui avait dit qu’elle était jolie. Elle avait rougi et il en avait été fier. Par la suite, il avait appris par Pansy qu’elle se nommait Padma Patil et était originaire d’une des plus grande famille de Sang-Pur d’Inde.
Quand ils s’étaient retrouvés à travailler ensemble en Cinquième Année, sur un projet de Sortilège, ils s’étaient souvent reparlés mais rien dans l’attitude de la studieuse Serdaigle ne laissait penser qu’elle se souvenait de lui et de sa déclaration de petit garçon. Il repensa soudain à l’AD, le groupe interdit qu’avait crée Potter. Saint Potter…. Connard de Survivant. Tu pourrais pas claquer, histoire de faire cesser la guerre ?
Drago, son ami, son bon ami lui avait demandé, ordonné plutôt de faire parti de la Brigade. Il avait accepté bien sûr. Ça faisait genre de porter l’insigne sur sa cape, de voir les Gryffondor le regarder avec mépris et de pouvoir leur enlever des quantités de points. Oui, il avait été salaud, et injuste et tout ce que vous voudrez. Mais quand on a le pouvoir, et qu’on le sait éphémère, on profite un maximum. C’est compréhensible, c’est humain.
Padma bouge et relève lentement la tête. Elle sursaute en l’apercevant dans la pénombre, le bout de sa cigarette brillant comme un petit soleil. Elle remue et entrouvre les lèvres, gercées par le froid et le manque d’eau. Il remarque soudain, sa mâchoires mise en bouillie, et se demande si elle est prête à le supplier de la soigner, si sa foutue fierté de celle qui se bat pour une cause qu’elle croit juste va le lui permettre.
- Tu viens me faire parler ? Demande-t-elle, d’une voix tellement faible….
- J’en déduis que tu ne le feras pas de ton plein gré ?
- Tu peux crever….
Il s’ébroue. Il pleut dehors, les gosses pleurnichent en disant que c’est l’Apocalypse, qu’ils vont tous mourir et qu’ils veulent pas, parce qu’ils sont trop jeunes et que c’est pas leur guerre. Les plus âgés, les chefs de section les font taire, à coups de bottes dans les côtes. « Vos gueules, les mouflets ! » Mais Blaise ne peut s’empêcher de se dire que peut-être, les gamins ont raison et qu’il se prépare un truc, quelque part, chez les divins ou même l’ennemi.
Il éternue et renifle, d’un air sinistre.
- J’ai pas envie de te cogner, Patil.
- Tu as peur de te salir ?
- Entre autre. T’es vraiment pitoyable, tu sais ?
Elle amorce un mouvement pour hausser les épaules, mais une grimace tord son visage poussiéreux, où les larmes ont tracé des sillons plus clairs. Il soupire, sort sa baguette et s’approche d’elle. Elle se tend et frémit, attendant visiblement le Doloris qui ne vient pas. Il pointe sa baguette sur son visage et murmure un charme.
Une douce chaleur enveloppe son menton et elle sent dans un craquement, sa mâchoire se remettre en place. Il se recule, insondable et elle passe fébrilement sa main à l’endroit soigné. Puis, elle replie ses jambes contre son ventre et y pose son menton.
- Me dis pas merci, Princesse.
- Je suppose que tu as fait ça pour que je puisse te répondre quand tu me tortureras. Alors, je ne vois pas pourquoi je remercierais mon futur bourreau.
- Tu as failli devenir ma femme, tu sais ?
Elle s’étouffe et le regarde, ahurie, choquée qu’il lui dise ça sur ce ton désinvolte, ce ton indifférent, alors qu’ils sont en guerre et qu’il va bientôt la torturer.
- Tu racontes des conneries ! S’écrie-t-elle, d’une voix rauque.
- Le dernier mari de ma mère me cherchait une épouse parmi les Sang-Pur. Pas chez les anglais, parce que c’est bien connu qu’ils sont tous liés plus ou moins par un oncle ou une cousine et que chemin faisant, dans une dizaine d’années, il seront tous décérébrés. Pas en Espagne parce que mon père était espagnol, ni au Portugal, parce que les espagnols n’aiment pas les portugais, ni même en France, parce que ma mère trouve les français trop pâles et trop arriérés. Elle a toujours voulu avoir des petits-enfants à la peau foncée, mate et pas cette chose transparente qui faisait la fierté des Malefoy. Il ne restait que l’Italie, mais la famille de ma mère en a été bannie, il y a plus d’un demi-siècle pour des raisons que je connais pas tout à fait.
- Viens en au fait….
- Ma mère a beaucoup réfléchit et c’est quand, elle a vu dans la Gazette le nom de Parvati Patil, cavalière de Harry Potter au bal, qu’elle a enfin réagi.
Et il s’en souvenait comme si c’était hier. Il était entre dans le bureau de sa mère, où elle l’attendait, magnifique dans son fauteuil. Il avait pris place face à elle, les mains posées sur les genoux, le dos très droit. « Tu connais les sœurs Patil, mon chéri ? » Il avait dit oui et sa mère avait souri, satisfaite. « Ce sont bien les filles de Saïnathan et Âtralarasi Patil ? Les Princesses d’Orient ? »
Il avait de nouveau hoché la tête, sans savoir que dans leur pays d’origine, la presse les surnommait bien ainsi. Les Princesses d’Orient. Par leur sang pur, leur famille et leur palais, elles avaient tout l’air de princesses. « Et dis moi, Blaise…. Laquelle est la plus jolie ? » A cet instant, il avait compris. Il avait compris que sa mère comptait lui faire épouser une des jumelles indiennes.
« Elles se ressemblent comme deux gouttes d’eau, vous savez, Mère. » Elle avait grimacé et insisté. « Parvati est de Gryffondor et Padma de Serdaigle. » Un large sourire avait éclairé le visage de sa mère. C’était donc réglé. Il ne restait plus qu’à contacter Saïnathan Patil en Inde et le mariage serait célébré en août de leur fin d’étude.
Blaise s’était levé. Ariela Zabini l’avait regardé saluer et sortir. Elle l’avait rappelé juste avant qu’il passe la porte. « Et pour toi, mon chéri…. Quelle est la plus jolie ? » Il lui avait tiré la langue et s’était éclipsé, accompagné du rire moqueur et tendre de sa mère.
Il la regarde et lui raconte. Padma écarquille les yeux et refuse de le croire.
- Tais-toi, gémit-elle. Laisse moi.
- Jte laisserais pas Princesse. N’oublie pas que c’est la guerre.
Ses yeux s’embuent de larmes. Ca faisait longtemps qu’elle n’avait pas autant pleuré. La dernière fois, c’était pour Ron, la fois d’avant pour sa sœur, disparue depuis plus de treize heures, encore avant… pour Ron. Un fou rire la prend malgré ses larmes et la voilà qui se tort sur le sol, les joues mouillées. Ron aussi est un Sang-Pur ! Elle rit. Fort, de plus en plus fort. Le visage de Blaise se décompose et il l’empoigne violemment.
Ses omoplates cognent contre le mur et elle s’étrangle, ravale ses rires et ses larmes. Elle le fixe, plus effrayée qu’elle ne le voudrait.
- Tu crois que je mens, Patil ? Gronde-t-il, les yeux plissés. Je n’aime pas que l’on se moque de moi. Surtout quand je dis la vérité.
- Jveux pas t’épouser, gémit-elle.
- Oh, mais aucun problème Princesse, chuchote-t-il, en se penchant vers son oreille et son corps l’effleure. Tu vas mourir demain.
Elle frissonne et ferme les yeux. Le souffle de Blaise la caresse, et c’est chaud, ça chatouille et elle déteste ça. Elle recule la tête et grimace. Blaise la regarde mais ne dit rien, se contente de sourire, de se moquer d’elle.
- Je viens te chercher demain, Patil, dit-il, en la lâchant lentement. Je te montrerais la salle de torture. Le Lord a des moyens très efficaces de faire parler les prisonniers.
- Non….
- Non quoi, Princesse ? Demande-t-il, avec son sourire railleur.
- Me torture pas, supplie-t-elle.
- Et pourquoi, Princesse ? Tu refuses de parler. C’est un choix. Du coup, demain…. On va rire.
Il se détourne d’elle et pose sa main sur la poignée. Trois, deux, un….
- Y avait qu’Hermione qui pouvait s’enfuir.
Il se fige, fait semblant de ne pas entendre. Sa voix est faible, tellement faible qu’il tend l’oreille pour saisir sa phrase. Y avait qu’Hermione qui pouvait s’enfuir…. Et toi, alors ?
- J’ai accepté de venir. J’aurais pas dû. Je regrette…. Je regrette, dit Padma, avec comme un sanglot dans la voix. Ron me l’a demandé. Jpouvais pas refuser. Je pouvais pas, répète-t-elle. Tu comprends, Zabini ? Il allait si mal. Il ne pensait qu’à Hermione, tout le temps, tout le temps. Et Harry qui avait ordonné de cesser les recherches. Ron le lui reprochait !
- C’était stupide de venir, Patil, fait-il remarquer sans se retourner. C’était stupide.
- Je sais, lance-t-elle, d’une voix lasse. Je sais bien. Ron est venu me trouver, il y a… deux jours ? Trois ?
- Tu es ici depuis deux nuits.
- Ah. Trois jours alors. J’étais… je ne peux pas te le dire…. Il est arrivé et il m’a regardée… travailler. Et il m’a demandé. Si j’étais prête. Si j’étais prête à aller chercher Hermione.
- Pourquoi toi ?
Elle ne répond pas. Alors, lentement, il se retourne et la regarde. Elle a la tête baissée, et ses cheveux, tellement beaux dans son souvenir, tellement brillants, pendent devant son visage creusé par les privations, par la guerre. Elle relève doucement les yeux et croise son regard.
- Tu étais amoureuse de lui.
Elle sourit. C’est douloureux, ça poignarde, parce que c’est pas un vrai sourire, c’est juste l’effort d’une gosse, d’une gosse parmi tant d’autre, qui fait semblant.
- Parvati m’avait dit d’apprendre à dire non. J’ai pas réussi. Et je savais….
Elle agite la tête, ses poignets maigres enserrent sa tête et elle crie, désespérée.
- Je le savais que j’allais mourir ! Ron me l’avait fait comprendre ! Je savais…. Je savais.
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Silence angoissant, nuit avortée. Murmures.
- Tu as trouvé un moyen de me faire sortir après ?
Regard désarmant de sincérité.
- Non.
Hochement de tête. Je comprends. Jvais mourir, alors ? Mais pas un mot n’est dit. Elle s’empare de la carte qui marque l’emplacement de la Cité noire, lieu où niche Lord Voldemort et sort dans la rue de derrière. La nuit l’engloutit et elle n’a plus que les souvenirs pour l’accompagner.
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Il ne fait pas un geste et continue de la fixer, attendant patiemment qu’elle poursuive. Elle va tout lâcher. Elle va tout raconter, parce que la pauvre est emplie de rancoeurs, parce que celui qu’elle aime l’a balancée chez l’ennemi, sans aucun remords et que son cœur est brisé. Elle lui en veut au Weasley. Terriblement.
- Il s’était plongé dans les livres, tu sais. Pour Hermione. Il avait trouvé le moyen de la faire revenir. Mais il fallait sacrifier. Et il a demandé à la première conne qui est passée…. Et c’était moi, cette conne….
- Quel était ce moyen ?
On dirait qu’elle sort d’une transe. Elle cligne plusieurs fois des yeux, le regarde, comme horrifiée et se laisse glisser sur le sol.
- Qu’est-ce que je fais… murmure-t-elle, pour elle-même. Qu’est-ce que je fais….
Blaise reprend un masque froid et coupe, tranchant, méchant.
- Alors ? Ce putain de moyen ?
- Jte dirais rien.
- Pardon ? Grogne-t-il.
- Jte dirais rien ! Hurle-t-elle, les traits tirés de colère. Va crever ! Jdirais rien !
Blaise commence à perdre son sang-froid. Il sent son bras trembler d’envie d’empoigner sa baguette. Il préfère le Doloris aux coups. Plus excitant. Plus amusant. Il inspire et expire avec calme. Les nouveaux sanglots étouffés de Padma ne l’aide pas.
- Jdirais rien, répète-t-elle. Je balancerais pas…. Jsuis pas comme ça….
Elle a entouré ses genoux de ses bras et se balance d’avant en arrière, les yeux clos. Blaise la dévisage. Son nez coule. C’est moche. Ce n’est plus la jolie fille des couloirs de Poudlard, avec ses livres, son sourire poli et ses étoiles plein les yeux. Là, c’est une gosse, avec des larmes grossières, de la poussière sur les joues, des cernes noires sous les yeux. C’est laid. C’est repoussant.
- Tu es cinglée, murmure-t-il.
Et il comprend, bien sûr qu’on puisse devenir fou. Il se souvient lui, quand il était enfermé à Princeton, dans l’unité de Smith. Les cris dans sa tête, les brûlures dans son corps et cette haine, si forte, qui montait comme une fièvre, qui incendiait tout, qui l’empêchait de réfléchir. La souffrance, les rires des Phénix, leurs cigarettes à la bouche. Ces clopes qu’ils collaient tout contre sa peau et ses hurlements à lui, ses trous noirs quand il s’évanouissait.
Il est devenu fou, lui aussi…. Il a tout cassé en sortant. Le crâne de Smith n’était plus que bouilli quand il est rentré à la Cité. Et sa fureur n’était toujours pas partie….
- Tu es cinglée, dit-il encore. Tu protéges Weasley alors qu’il t’a envoyée te faire tuer.
- Et toi tu sers Voldemort, alors qu’ils vous envoient tous crever ! Crache-t-elle, en relevant brutalement la tête. Tu crois que c’est mieux, hein ?! Moi, j’ai accepté, par amitié, parce que j’aime ce con de Weasley ! Tu peux pas comprendre. J’étais volontaire. Ose me dire que tu l’es quand tu vas tuer les miens et que tu reviens avec douze mômes en moins dans ton équipe !
Silence. La tension est montée telle une flèche. Elle le défit du regard, hautaine comme il ne l’a jamais vue. Ses yeux ont retrouvé un curieux éclat, détermination ou ferveur, il ne saurait le dire. Elle a légèrement redressé les épaules et lui fait face, les yeux brillants.
Elle a de jolis yeux d’ailleurs. Il se souvient avant, elle mettait un peu de noir autour de ses yeux, tellement peu, parce qu’avec sa peau déjà foncée et ses cheveux noirs, il n’y en avait pas tellement besoin. Ils ont une drôle de teinte vert eau qui l’avait surpris la première fois qu’il l’avait vue. Il avait juste croisé son regard anxieux à la Cérémonie de Répartition et c’est seulement deux ans plus tard, qu’il avait osé lui parler. « Tu es très jolie. » Il avait eu envie de rajouter « Tes yeux sont magnifiques. » Mais il avait eu peur qu’elle se moque. Il n’avait que douze ans…. Il en a dix huit, maintenant.
- Tu as de très beaux yeux, dit-il avec sérieux.
Et justement ils s’écarquillent, ces yeux. Elle ouvre légèrement la bouche et le fixe. Un frémissement parcourt sa joue et elle se met à sourire, timidement, inconsciemment. Il la regarde et Merlin qu’il la trouve jolie, avec ses grands yeux fatigués, ses muscles tendus, ses fossettes creusées.
Il lui sourit en retour, et c’est tendre, c’est beau. On oublie la guerre, et le froid, les privations, la haine, les autres. Ils se sourient comme deux ados, qui cherchent à s’amuser, qui cherchent le regard des autres, les yeux enflammés de désir, de rire, de sous entendus que seuls les jeunes comprennent parce que c’est de leur âge.
Ils ont dix huit ans et ils sont comme les autres.
Mais la guerre gronde, l’orage éclate et c’est comme une bulle qui se fissure et ils tombent, redescendent brutalement sur terre. Elle, sur le sol, comme un chien et lui, le maître, le supérieur, qui la domine de son ombre immense.
Padma est la première à détourner la tête. Et dans la tête de Blaise, son sang bat à toute vitesse, alors qu’il baisse les yeux pour tenter de retrouver les siens, de se perdre dans son vert pâle, son vert amer de jeune princesse brisée et perdue.
- Aide moi à sortir, Blaise, murmure-t-elle, sans le regarder.
- Je peux pas.
- Tu ne veux pas surtout….
Il hausse les épaules. Crois ce que tu veux Patil. Rien à foutre de tes rêves, Princesse. Elle se met à trembler.
- Arrête de pleurer, soupire-t-il.
Elle ne dit rien mais semble se calmer. Elle renifle discrètement et relève la tête.
- Blaise…. Demain… Tu me tueras, pas vrai ?
- C’est pas moi qui décide Princesse.
- Jvoudrais que ce soit toi. Qui me tue.
- C’est pas moi qui décide, répète-t-il, alors que son ventre se tord, comme attaqué par l’acide.
- Ais le courage de le faire.
Le courage…. Jsuis pas un Gryffondor, tu sais…. De nouveau, elle se détourne et il a beau la scruter, chercher ses yeux, son visage, il ne voit rien, elle reste obstinément tournée vers le mur, ses cheveux cachant son visage. Une nouvelle vague de colère déferle dans sa tête et mu par une soudaine violence, se penche à deux centimètres de sa tête.
- Tu n’as toujours pas dit comment tu comptais filer avec la Sang-de-Bourbe ! Siffle-t-il, furieux.
- Je pensais que tu avais oublié, Zabini, réplique-t-elle, en plantant ses yeux dans les siens. A me faire les yeux doux et des compliments, on aurait presque dit que tu flirtais !
- Pour mieux te soutirer des informations, ma Princesse, souffle-t-il, en remettant une mèche derrière son oreille.
Elle se fige. Une nouvelle fois, il ne sait plus quoi faire. Sa main est à quelques millimètres de sa peau, de sa joue, suspendue dans l’air, hésitante. Le souffle de Padma caresse ses doigts, il frémit et ferme à demi les yeux.
Un temps qui parait infiniment long, un silence, les cris au loin, tellement loin qu’ils semblent irréels. Puis, lentement, sans le quitter des yeux, Padma lève le bras et referme sa main sur la sienne toujours immobile. Le contact est brutal, comme une brûlure, une gifle qui fait mal. Ils se regardent, tous les deux, leur main refermée l’une sur l’autre. Puis, doucement, elle l’écarte. Il sent le froid mordre de nouveau sa peau, loin de la chaleur que dégage son visage à elle.
Elle lâche sa main et se recroqueville contre le mur.
- Dégage.
Il sursaute, secoue la tête et se lève, bondit en arrière plutôt. Il recule jusqu’à la porte qu’il ouvre et sort, sans un mot, sans un regard.
Y a juste cette chose qui remue dans son ventre, qui ricane face à son air perdu et qui mord, qui arrache son cœur.
-x-
Elle sent une main qui passe sur son front, une main rugueuse qui lui pince la joue. Elle sursaute dans un cri et ouvre les yeux. Elle ne voit rien, hormis ce noir glacial qui l’entoure.
- Allons ma jolie, renifle une voix. C’est l’heure.
Elle décolle du sol, on la porte sans aucune douceur et elle est sûre d’être comme un sac grossier, un poids mort dans les bras de l’homme qui s’en va la tuer. Elle se raccroche à sa chemise, sa chemise qui pue la sueur, la poussière et le sang.
Alors c’est plus fort qu’elle. Elle vomit. Pas grand-chose, puisqu’elle n’a pas mangé depuis ce qu’il semble être des lustres. L’autre jure et la lâche brutalement. Elle s’écrase par terre dans un gémissement et se recroqueville.
- Salope ! Tu m’as gerbé dessus ! Va crever, raclure !
Un coup dans l’estomac qui lui remue tripes et boyaux. Un hoquet qui passe le barrage de ses lèvres serrées. La main lui attrape les cheveux et tire de toutes ces forces. Elle crie avec le peu de voix qui lui reste.
- Arrêtez, souffle-t-elle, de sa voix faible et enrouée. Arrêtez.
Un coup encore, et son nez qui craque, le flot de sang qui se déverse et qui macule son visage. C’est chaud. L’autre s’acharne sur elle. Elle hoquette, elle supplie mais il continue, il continue. Et soudain, le bruit sourd d’un corps qui tombe, un grognement « Connard » et puis, une ombre qui se penche sur elle.
- Oh ! Patil !
Les bras l’enveloppent, elle tente de se dégager mais il est plus fort. Il passe une main sous sa nuque et la soulève. Elle entrouvre les yeux mais un filet de sang vient obscurcir sa vue. Elle a juste eu le temps de voir ses lèvres remuer.
- Blaise, bredouille-t-elle.
Il passe sa main sur son visage et essuie le sang qui la macule.
- Allez, viens Princesse.
Elle voudrait refuser, se débattre, s‘enfuir en courant mais Blaise la soulève et elle quitte le sol. Elle s’accroche à son vêtement, sa cape noire et il referme ses bras sur elle. Jveux pas mourir. Il marche à grandes enjambées, dépassant les couloirs, ne rencontrant personne. D’un coup d’épaule, il pousse une porte et ils se retrouvent dehors, sous la pluie battante.
- Qu’est-ce que tu fais ? Murmure-t-elle, le nez enfoui dans le pan de sa cape.
Elle entend son cœur qui bat fort dans sa poitrine, qui résonne douloureusement dans sa tête. Un Mangemort, ça a un cœur ? On dirait que oui. Blaise sursaute et se plaque contre le mur. Et son cœur fait une embardé. Elle sourit, tout contre lui, écoutant le concert de leurs deux cœurs.
- Transplane, Princesse.
C’est à elle de sursauter. La voix de Blaise contre son oreille n’est pas un rêve.
- Q… Quoi ? Chuchote-t-elle, fébrile.
- Dégage de là. Je vais dire au Seigneur que Slytwin t’a laissée t’enfuir.
Il la fait glisser et la pose sur ses jambes. Elle vacille et se colle contre lui.
- Quoi… répète-t-elle, du bout des lèvres.
Il attrape son menton et la force à croiser son regard. Leurs cheveux à tout deux sont plaqués sur leur front. Padma sent le sang s’enfuir à cause de la pluie qui coule sur son visage. Sa vue se brouille une nouvelle fois et sa tête tourne. Ses jambes se dérobent sous elle. Blaise la retient et la porte. Il traverse la cour rapidement, Padma dans ses bras. Padma qui se sent obligée de dire :
- Tu sais, Hermione devait rentrer. Pas moi.
- De quoi tu parles ? Demande-t-il, en la serrant étroitement.
- Ron avait trouvé un moyen de la faire revenir. Une sorte de Portoloin…. Il était invisible, n’existait même pas. Il fallait juste que je trouve Hermione. Elle devait dire un mot, un seul et le Portoloin se serait activé, pour l’envoyer jusqu’à Ron.
Elle étouffe un sanglot et mord le tissu de la cape de Blaise. Elle sent ses mains à lui, la serrer, sur son dos, sous ses jambes. Elle a chaud. La pluie dégouline, emportant poussière et sang.
- C’est un salaud, chuchote-t-elle, contre le cœur de Blaise. Il voulait juste Hermione. Je pouvais crever, il aurait rien fait….
- Granger est amoureuse de Drago, dit la voix lointaine de Blaise.
- Tant mieux…. Tant mieux. Il fallait que je trouve Hermione. Il fallait que je la trouve…. Ron m’avait demandé. J’ai dit oui. Tu comprends ? J’aimais Ron…. Et Harry ne pensait qu’à sa meilleure amie. Je devais le faire…. Hermione est un pion important pour l’Ordre. L’âme pensante. Elle seule peut obliger Harry ou Ron à faire quelque chose. On ne dirait pas, mais Harry serait prêt à tout, si Hermione lui disait que c’est essentiel pour mettre fin à la guerre.
- Il l’aime lui aussi ?
- C’est sa sœur…. Rien qu’une sœur.
Elle éternue. Blaise s’est engagé dans un nouveau couloir. Il marche de plus en plus vite. Et elle se sent perdre pied avec la réalité. Elle se noie dans sa fièvre, elle délire, elle balance.
- Tu es chaud….
Le cœur de Blaise fait une nouvelle embardée. Elle sourit, les yeux clos. Elle se sent partir. La main de Blaise qui effleure sa joue la fait sortir de sa torpeur.
- T’endors pas, merde !
Une porte de passée, un escalier de dévalé. Ils sont dehors. Il la tient debout, ses pieds nus dans les flaques. Il la regarde. Elle est trempée, elle frissonne. Elle a froid. Il l’éloigne de lui et des spasmes secouent son corps.
- Blaise…..
Ses lèvres contre les siennes la réveillent. Elle rouvre brusquement les yeux. Il la regarde, sa bouche se presse contre ses lèvres. Elles sont rudes, sèches, gercées. Elle empoigne les pans de sa cape et répond avec ferveur à son baiser. J’ai froid. J’ai si froid. Et ton cœur, Blaise….
- C’est un secret, murmure Blaise. Un secret, Princesse…. Ajoute-t-il et son souffle sur sa joue, ses doigts qui caressent son dos. Un secret, répète-t-il, avant d’effleurer ses lèvres une nouvelle fois.
Un crochet la happe au niveau du nombril. Elle crie de surprise et se sent projeté en arrière, loin du corps brûlant du Mangemort. Elle sent juste le froid glacial l’envelopper et le noir se mettre à régner.
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Le béton mouillé du trottoir contre sa joue, ses dents qui claquent, ses doigts qui se crispent sur les quelques brins d’herbes survivants. La peur ardente qui lui dévore les entrailles et la pluie qui fracasse le sol, le vent qui hurle dans les arbres nus, l’orage qui éclate. Et elle, étendue sur le par terre, les yeux clos, se demandant où elle est, comment, pourquoi….
Et la sensation d’un crochet qui lui arrache la peau du ventre, qui lui broie le cœur lui revient en mémoire et elle comprend, enfin. Le Portoloin. Mais vers où ?
Dans un long sanglot, elle inspire de toutes ses forces et l’odeur mouillée de la terre lui soulève l’estomac. Des cris soudain, des pas pesants qui se ruent sur elle. Le bois froid d’une baguette collé contre sa tempe. Elle ouvre difficilement les yeux, et le gris du ciel au dessus d’elle lui vrille les prunelles. Une silhouette la surplombe, haute, menaçante, le visage dissimulé derrière le large capuchon.
- Mangemort ? Demande-t-il, d’une voix grondante.
- Je ne crois pas, s’exclame quelqu’un d’autre, un peu en retrait. Elle n’a ni chaussures, ni l’habit Mangemort.
- Harry, murmure-t-elle. Ron…. L’Ordre….
Une main glacée soulève ses cheveux et regardent son oreille, puis sa main, à la recherche du tatouage qui la classe.
- Sang-Pur ou résistante ?
- Les deux, souffle-t-elle, les mains posées sur son ventre endolori. Les deux, par Merlin….
On lui attrape le menton et elle pousse un cri. Un voile s’abat sur ses yeux et elle s’évanouit encore.
-x-
Un cœur qui bat en écho au sien. Un torse contre elle, une main dans son dos. Blaise ? Non. La voix est aigue, désagréable. « C’est une membre de l’Ordre. » La phrase est reprise en écho par une dizaine d’autres et monte dans les étages. On la soulève, on la balade et ses jambes cognent contre les murs, ses bras désordonnés frôlent la rambarde d’un escalier.
La tête renversée en arrière, l’esprit vide et brûlant, elle se laisse emporter. Elle sent dans l’atmosphère la fébrilité engendrée par son arrivée. Qui est cette fille, si sale et puante, débarquée par magie dans une rue, près de Princeton ?
Princeton qui a été rasé il y a plusieurs mois et où les quelques rares survivants ont réussi à se cacher du Lord et de ses troupes. On a envoyé des messages pourtant, des messages qu’on a espéré être transmis aux supérieurs, à Harry Potter que personne ne voit jamais parce que trop pris par la guerre et les tactiques à adopter.
On la jette dans un lit, les ressorts grincent et elle hoquette encore parce qu’elle a mal partout. On grogne un « Episkey ! » pour réparer son nez. Une main rude l’attire à elle et la force à avaler un bouillon infâme. « Allons, petite…. Il faut manger ! »
Une voix cassée de mère, qui ne veut que le bien. Alors Padma boit, tousse et se brûle la langue. C’est dégueulasse mais elle n’a pas mangé depuis des lustres, alors elle avale. On la pousse contre les oreillers, la couvre de couvertures informes et on la laisse dormir.
-x-
Plus tard, c’est un hurlement déchirant qui la réveille en sursaut. Terrifiée, elle se redresse, la vision floue, la bouche amère. Une main fébrile qui sent bon passe sur son visage, effleure sa peau, pour y essuyer le sang que personne n’a pris la peine de faire disparaître. Une meute qui débarque dans la chambre minuscule, les personnes qu’elle entend sans reconnaître qui se pressent à son chevet.
Et cette main qui ne la lâche plus, les questions qui flottent dans l’air. Tu es de retour, Padma ! Merlin, tu vas bien ? Apportez de quoi boire, immédiatement ! Et Hermione, Padma ? Tu l’as vue Hermione ?
Ca c’est Ron. Elle ouvre douloureusement les yeux. Ils sont tous là, à la regarder, anxieux, terrifiés par son état. La crinière rousse de Ron les surplombe tous, l’air inquiet de Harry, dont les yeux brillent malgré le capuchon et les larmes de Parvati qui la serre contre elle.
- Elle s’est enfuie, arrive-t-elle à articuler. Malefoy. Le… Prince Charmant….
On ne lui en demande pas plus. Le visage de Ron reflète incompréhension, avec ses sourcils froncés, mais pas le soulagement de la revoir en vie. Elle se remet à pleurer. Les doigts propres de sa sœur caresse ses cheveux sales et gras, elle a posé son menton sur son crâne coagulé de sang, et garde son visage contre sa poitrine. Parvati sanglote et la serre contre elle. Padma s’accroche avec désespoir au cou de sa sœur. Ses larmes coulent dans son cou et elle entend le cœur de sa jumelle. Tu n’es pas Blaise….
- Pleure pas, petite sœur…. Articule Parvati en séchant ses larmes.
Et dans un hoquet entre le rire et la plainte, Padma rétorque de cette voix faible et cassée qu’elle craint de garder toute sa vie :
- Jsuis l’aînée, Paty….
Le visage sérieux de Parvati se penche sur elle et ses doigts tracent le contour de sa joue.
- Pas aujourd’hui, Padma….
Puis, d’une voix autoritaire qu’on ne lui connaît pas, elle se retourne vers les autres et ordonne, avec calme mais sur un ton qui ne souffre aucune réplique.
- On dégage d’ici. J’embarque Padma chez nous.
- Chez vous ? Répète Ron, toujours ébranlé du retour de Padma et de la fuite d’Hermione.
- En Inde, approuve Parvati en se levant, emportant Padma contre elle. C’est fini vos conneries. Tu as fini d’envoyer ma sœur se faire tuer, Ron. Lavande ne t’a pas suffi peut-être ?
Les oreilles de Ron virent au rouge, et il fait un pas en avant, furieux, haineux.
- J’ai envoyé personne se faire tuer, Parvati ! Aboie Ron. Lavande s’est faite tuer parce qu’elle n’a pas été assez prudente et ta sœur a….
- Te fous pas de ma gueule, coupe Padma, furieuse. Tu as demandé à Lavande mener une mission suicide ! Et tu envoies ma jumelle crever chez Voldemort !
Ron s’apprête à répliquer, à dire que non, Padma s’est faite attraper toute seule, qu’il n’y est pour rien mais Harry lève une main, silencieux et on s’arrête, les souffles haletants.
- On retourne au QG, dit-il. Donne la moi.
Parvati semble hésiter mais que peut-il arriver à sa petite soeur chérie, dans les bras du Survivant ? Harry la prend contre lui, fraternel, brûlant d’envie de la remercier d’avoir été cherché Hermione, même si elle ne l’a pas retrouvée.
Padma se débat, tente de le griffer, elle veut dormir, qu’on la laisse enfin, loin de la guerre et de ses soucis. Elle ne fait pas le poids. On la soulève. Parvati ne lâche pas sa main. On l’enveloppe dans une grande couverture grise, vieille mais qui tient chaud. Harry passe un bras sous ses jambes, l’autre dans son dos et la porte, comme une princesse. Comme Blaise un peu plus tôt.
- Comment es-tu revenue ? Questionne Harry, alors qu’ils descendent l’escalier.
- Jme souviens plus….
Elle ne va rien lui dire. Elle ne balance pas, de toute manière, à aucun des deux camps, dont elle ne veut pas faire parti. Elle ne veut plus être mêlée à la guerre, juste partir, s’envoler jusqu’à leur palais en Inde, où les gens sourient de leurs dents blanches, de leurs yeux sombres et rieurs.
Elle ne dira pas que Blaise l’a aidée, qu’il lui a fabriqué un Portoloin en direction de Princeton où il était sûr de trouver des membres de l’Ordre. Elle ne dira pas non plus que c’est à cause de Ron qu’elle s’est faite attraper par les Mangemorts et que ce n’est pas une erreur de débutante, que les Mangemorts n’ont pas été plus malins que d’habitude.
Harry n’insiste pas. Le pseudo guérisseur qui a passé sa main sur son front, qui lui a refilé des cachets infâmes de Moldus, a dit « Etat de choc » et on ne plaisante pas avec ça, même s’il a balancé ça au hasard, sans vraiment savoir de quoi il parle. Harry s’engouffre dans la cheminée et crie « 12, Square Grimmaur ! ».
Le tourbillon qui la fait vomir, la chaleur qui lui monte à la tête, plus forte que la fièvre. Parvati arrive juste après et se précipite sur elle, pour attraper sa main. Harry l’ignore et quitte la cuisine, à grands pas, son capuchon rejeté en arrière.
Padma gémit, malmenée, souffrante, le dos en compote, le nez douloureux et son cœur… qui hurle et qui pleure, qui appelle celui de Blaise. Elle frissonne, violemment, Harry la serre plus fort et elle s’accroche à sa chemise.
Blaise ?.... Chut, Princesse, murmure la voix rauque de Blaise contre son oreille. C’est un secret, n’oublie pas….
Elle ferme les yeux, entend simplement les suppliques de Parvati qui lui demande de ne pas mourir, le souffle saccadé de Harry contre sa joue, alors qu’il monte quatre à quatre les escaliers. Dors, Padma….
-x-
Soixante douze heures plus tard, elle regarde défiler les paysages enneigés de Russie. La joue contre la fenêtre glacée, les yeux vides et cernés et Parvati, endormie sur son épaule, son bras qui la serre un peu mollement, maintenant qu’elle dort.
Le Magicotrain, un dérivé du Magicobus pour les grandes distances, s’arrête encore dans un petit village mort, où seules les colonnes de fumées sortant des cheminées prouvent qu’il y a encore de la vie. Parvati remue, Padma lui jette un regard, désintéressée, vide, sans aucune émotion.
En face d’elle, elle regarde une mère qui discute avec ses enfants. Elle se redresse, douloureuse. Vêtue de haillons, la femme chantonne une berceuse au petit garçon serré contre elle. Sa fille, la tête sur ses genoux se tait et écoute silencieusement, presque religieusement la voix tendre de sa mère.
Padma rencontre soudain les yeux bruns de la gamine, délicieusement vides sur son visage barbouillé de crasse. Vous fuyez la guerre vous aussi ? Mais elle ne demande pas, ça ne la regarde pas. Alors elle se remet bien et regarde par la fenêtre. Ils ont changé de paysage, un climat plus chaud. L’Inde ? Déjà ?
La tête de Parvati glisse sur sa poitrine et elle soupire de contentement en rencontrant les battements de son cœur. Padma l’oublie déjà, ses pensées s’éloignent. Elle repense à l’arrivée d’Hermione, le lendemain de son retour à elle. A la limite de l’hystérie, apparaissant comme ça dans la grande cuisine du QG de l’Ordre, où des dizaines de baguettes étaient tournées vers elle, Drago Malefoy collé contre elle, hagard, perdu. Elle l’agrippait comme si sa vie en dépendait.
Et au fond, Padma la comprenait. Harry est arrivé, Ron sur ses talons. Il a exigé la venue des quelques vrais guérisseurs à son service, alors que Ron s’élançait vers elle, le visage tiré douloureusement. Hermione l’a serré, en pleurs, la poitrine secouée de spasmes, sans pour autant lâcher Malefoy. Padma les a regardés s’étreindre, le duel visuel de Malefoy et Ron et elle a eu envie que Ron perde, qu’il s’écrase enfin et laisse Hermione vivre.
Elle s’est levée, toujours vacillante et Parvati s’est précipitée pour la retenir au cas où elle tomberait. « Je veux aller dormir. » Sa sœur l’a accompagnée, l’a aidée à se mettre au lit. Elle lui a doucement caressé le front et chuchoté « Tu ne me diras rien, pas vrai, Padma ? Tu ne me diras pas comment tu as fini chez les Mangemorts, ni le nom de celui qui t’a brisée. » Padma a planté ses yeux malades dans ceux de sa sœur et a soufflé tout doucement « Jamais. » Et Parvati est sortie, peut-être secrètement blessée du peu de confiance que sa jumelle lui portait.
Jte balancerais pas Blaise. C’est le moins qu’elle puisse faire. Ces quelques jours, seule et terrifiée dans une grande cellule noire l’ont changée. Après tout ne dit-on pas qu’Azkaban change un homme ? Elle n’avait peut-être pas les Détraqueurs pour la surveiller, mais pour elle c’était tout comme. Après tout, elle connaissait Blaise. Elle le connaissait depuis sept ans et il n’a pas hésité pourtant à la frapper, à lui faire du mal.
Elle lui en veut, au fond, parce que maintenant qu’elle a rejoint les siens, sa sœur chérie qu’elle aime tant, elle se dit que peut-être elle aurait été mieux morte, loin du calvaire de la guerre. Parce que sa sœur a toujours été la plus futile, la plus coquette, la délaissant pour Lavande et que maintenant que sa meilleure amie n’est plus là, ce sera elle, Padma, la victime, la poupée à coiffer, à maquiller avec laquelle on gloussera devant les garçons.
Elle renifle, se serre d’avantage contre la fenêtre, loin de la chaleur que dégage le corps de sa sœur.
De longues heures passent et l’Inde n’apparaît toujours pas. Ils traversent le Kazakhstan, l’Ouzbékistan, et tous ces autres pays que si peu connaissent, dont les noms s’emmêlent dans la tête des Occidentaux. Parvati baille, grogne et finit par ouvrir les yeux. Elle se redresse, ensommeillée et adresse un tendre sourire à sa sœur.
- Tu as dormi ?
- Oui.
Elle ment bien sûr. Comment pourrait-elle retrouver le sommeil ? Devant elle, la gamine a toujours les yeux grands ouverts et Padma se demande ce qui peut la laisser ainsi éveillée, quelles horreurs la hantent encore.
- J’ai prévenu nos parents de notre retour. Ils sont si heureux.
Padma lui sourit mais s’abstient de répondre. Parvati continue de parler, toute seule, les yeux illuminés. Padma l’aime sa sœur, avec ses défauts et ses qualités. Même quand, elle lui demande avec cette curiosité mal placée, que Padma déteste et qui faisait de Parvati une de ces poules qui savent tout sur tout et sur tout le monde :
- Dis, Padma…. Tu es toujours amoureuse de Ron ?
- Non.
- Tu fais bien. C’est un imbécile.
- Oui.
Elle ne dit pas que c’est pour Ron qu’elle s’est laissée attraper, que sa capture n’était pas un hasard, ni même un accident. Parce qu’elle déteste Ron, elle a envie de le laisser culpabiliser quand les autres parleront de la pauvre Padma qui s’est faite torturer par les Mangemorts, cette si jolie Serdaigle pourtant prudente qui n’a pas vu les loups venir.
Et dans les yeux de Ron, il y aura cette lumière coupable qui lui donnera envie de rire aux éclats.
Notes de l'auteur : J'espère que ça vous aura plu =) Bonne journée à vous.
essai,
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blaise zabini,
fic