Les cinq premières minutes- Défi "C'est pour un cliché!"

Dec 30, 2008 23:46



Titre : Les cinq premières minutes

Défi- C’est pour un cliché !

Prompt n°36 : Playboy et sa voisine/employée la plus sérieuse.

Pairing n°46: Cornelius Warrington/Padma Patil.

Genre : Romance, Humour

Rating : G


On sous-estime trop l’importance de faire bonne impression dès les premières minutes d’une rencontre. Avant même que vous n’ayez ouvert la bouche pour dire bonjour, mille petits signaux indirects ont été captés et analysés par votre interlocuteur : votre allure, votre style vestimentaire, votre sourire.

De la poignée de main- ferme ou molle- au ton de votre voix- assuré ou hésitant- lorsque vous enchaînerez les salutations d’usage, tout conspire à vous trahir, révélant les défauts que vous tenez à cacher et dissimulant les qualités que vous cherchez à étaler.

Bien entendu, vous aurez toujours l’occasion de vous rattraper lors de vos prochaines interactions. Mais qu’il est difficile de rectifier les premières impressions que l’on a eu de vous un jour que vous n’étiez pas au meilleur de votre forme !

Retenez mon conseil et soyez vigilants, car chaque seconde compte ! Cinq minutes, cinq minuscules minutes…

Tout se joue au cours des cinq premières minutes !

Au milieu de l’assemblée somnolente,  Cornelius Cassius Britannicus Warrington se distinguait par son assiduité, prenant des notes avec une application digne d’éloges. Ce fait en lui-même était remarquable, car les vertes années de Cornelius n’avaient pas été studieuses, loin s’en fallait. Adolescent, il avait préféré consacrer son énergie et son temps libre à la pratique du Quidditch, et avait l’habitude fâcheuse de récupérer durant les heures de cours- être batteur pour l’équipe de Serpentard, sous la férule de Marcus Flint, capitaine à la rigueur impitoyable, tendait à épuiser son homme.

Cependant, les recommandations de l’orateur n’étaient pas tombées dans l’oreille d’un sourd.
Jamais Cornelius Warrington n’oublia les leçons retenues de ce séminaire intitulé « Maîtriser son image publique », et encore moins la règle des cinq premières minutes.

C’était son premier jour à Elixcorp, et chacun sait que les premières impressions sont cruciales. Le soin apporté à sa toilette fut donc encore plus méticuleux que de coutume, et le grand miroir de plain pied en hêtre cérusé antique fut consulté avec toute l’anxiété qui sied à un jeune homme coquet.

Lorsque tous ces apprêts s’achevèrent, Cornelius jeta un dernier regard à son reflet. Ce qu’il y vit le satisfit assez, mais le perfectionniste qu’il était ne put résister au besoin d’y apporter quelques retouches. Il boucla sa ceinture, prit soin de sortir sa chemise d’un blanc immaculé de son pantalon et en déboutonna le premier bouton  afin d’obtenir un effet semi-négligé mais pas trop.  Enfin, il ajusta sa veste en cuir de dragon de Roumanie et appliqua un soupçon de gel dans ses cheveux de jais, juste ce qu’il fallait pour leur donner un volume aussi naturel que possible.

-Comment suis-je ? demanda-t-il à son miroir.

-Epatant ! répondit ce dernier avec un enthousiasme sincère.

Cornelius secoua la tête :

-Non, sourit-il en positionnant l’accessoire ultime sur son nez droit. Cornelius avait le souci du détail.

Derrière les verres teintés de ses lunettes de soleil,  ses yeux noirs lancèrent des éclairs ravageurs à faire défaillir les mortelles les plus farouches.

-Non, je ne suis pas épatant. Je suis mieux que ça, corrigea modestement Cornelius, ou, comme il préférait qu’on l’appelât, CCB.

Padma Patil observa une dernière fois son apparence. Un tailleur de coupe stricte, une chemise boutonnée jusqu’au col, pas de bijoux fantaisie.

Elle allait rencontrer son nouveau patron dans une heure et elle tenait à faire bonne impression. L’image qu’elle projetait lui convenait tout à fait : calme, courtoise, professionnelle. Parvati aurait poussé des hurlements de désespoir en la voyant ainsi, dépourvue de tout ornement et aussi peu maquillée. Mais Padma cherchait à tout prix à faire oublier son jeune âge et sa beauté. Dans le milieu où elle travaillait, ces deux éléments nuisaient à sa crédibilité. Or, Padma était déterminée à prouver qu’elle n’était pas une jeune évaporée.

Elle rassembla ses longs cheveux en un chignon qui n’était pas sans évoquer la coiffure de Minerva McGobagall, puis quitta son domicile, prête à affronter le nouvel acquéreur d’Elixcorp, un certain Cornelius Warrington.

Cornelius prenait possession de ses quartiers, à savoir un bureau flamboyant neuf, quand on frappa à la porte.

-Entrez !

Et elle apparut.

-Bonjour, Monsieur Warrington. Je suis Padma Patil. Nous avons rendez-vous, dit la jeune femme.

Elle possédait une assurance tranquille qui troubla Cornelius. Il se leva de son fauteuil à roulettes pour venir à sa rencontre, la main tendue et le sourire avenant.

Sa poignée de main était ferme et vue de près, elle était aussi belle qu’entr’aperçue de derrière son imposant bureau de chêne. Cornelius sut alors qu’il devait faire un sans faute- la règle des cinq minutes s’imposa à son esprit.

La première impression qu’il avait de Padma était plus que favorable. Même les habits démodés qu’elle portait ne pouvaient, aux yeux d’un connaisseur tel que Cornelius, entacher sa beauté. Et puis, un je-ne-sais-quoi dans son maintien digne et gracieux le captivait.

Padma n’éprouvait rien de tout cela. Sa première impression de Cornelius était beaucoup moins flatteuse. Par où commencer ? Il portait des lunettes de soleil à l’intérieur des locaux d’Elixcorp- sans compter que la pluie battante, au dehors, n’incitait guère à arborer ce type d’accessoires-, sa tenue faisait scandaleusement négligée sur un lieu de travail ; bref, il avait l’air d’un playboy en goguette et elle restait estomaquée à l’idée qu’un individu de sa trempe fût désormais à la tête d’une entreprise pharmaceutique aussi prestigieuse qu’Elixcorp.

Le jeune homme retint sa main dans la sienne quelques secondes de plus que les convenances exigeaient.

-Enchanté, Padma, commença-t-il.

-Miss Patil, coupa aussitôt Padma, mal à l’aise.

Il parut désarçonné, mais fut prompt à dissimuler sa surprise.

-Comme vous le désirez, Miss Patil. Mon intention n’était pas de vous offenser. Mon style de management est plutôt informel, mais si vous voulez être appelée par votre nom de famille…

-Monsieur Warrington…

-Appelez-moi CCB.

-Monsieur Warrington, reprit Padma avec toute la courtoisie dont elle était capable, j’ai été habituée à un style de management beaucoup plus formel…

-Il en sera selon vos désirs, s’empressa-t-il de déclarer, soucieux de lui complaire.

Une minute écoulée…

-Bien, passons aux choses sérieuses. Mon père vous a sans doute briefée sur ce que j’attends de vous ?

-Votre père ? répéta Padma, interloquée.

-Je dois reconnaître que pour une fois, je suis satisfait de son choix.

Cornelius eut une grimace involontaire en songeant à ses précédentes secrétaires. Pour des raisons incompréhensibles, son père insistait pour lui envoyer des dragons femelles terrifiantes d’efficacité à la cinquantaine bien sonnée.

-Je crains toutefois que votre tâche ne sera pas aisée. Je suis un piètre organisateur, c’est pour cette raison que j’ai besoin qu’on me tienne par la main. Etre mon assistante ne sera pas de tout repos, plaisanta-t-il.

Il savait par expérience que confesser ses faiblesses attendrissait les plus rétives à son charme. Mais Padma Patil ne semblait pas du tout attendrie. C’était même tout le contraire.

D’une voix que la colère faisait trembler, elle résuma :

-Si je comprends bien, vous pensez que je suis votre nouvelle secrétaire ?

-Assistante, corrigea machinalement Cornelius, avant d’être frappé par une pensée subite.

-Comment ! Alors vous n’êtes pas ma nouvelle…

-Non, siffla Padma.

A y réfléchir, cela aurait été bien trop généreux de la part de son paternel, songea Cornelius.

-Oups, fut tout ce qu’il trouva à dire.

Deux minutes et quarante secondes…

-Ainsi, lorsque vous voyez une femme de vingt-quatre ans, la première chose qui vous vient à l’esprit est : ce doit être ma nouvelle secrétaire !

A vrai dire, ce n’était pas la première chose qui était venue à l’esprit de Cornelius, mais comment expliquer sans s’enfoncer qu’il avait pris ses désirs pour des réalités ?

-Parce qu’il est inconcevable qu’une de vos employées soit bonne à autre chose que nouer votre cravate…

-Je n’en porte jamais, sauf pour des réceptions formelles, glissa Cornelius.

-…rédiger votre courrier, répondre aux hiboux qu’on vous envoie et faire votre café !

Cornelius eut une illumination :

-Excusez-moi, Miss Patil, mais qui êtes-vous ?

Cinq minutes. Time out.

Il se trouva que Miss Patil appartenait au contingent de chercheurs qui élaborait sans relâche de nouvelles potions commercialisables par Elixcorp ; plus tard, lorsqu’il consulta son dossier, Cornelius apprit en outre qu’elle était considérée par ses prédécesseurs comme un « haut potentiel » que plusieurs compagnies rivales avaient déjà tenté de débaucher ; bref, il venait de commettre une bourde en froissant un élément brillant qui pouvait fort bien, si le cœur lui en disait, aller voir ailleurs.

A la fin de leur entrevue- fin plutôt abrupte, si l’on considérait la sortie de Padma Patil qui l’avait traité de « cancrelat sexiste »-, Cornelius se retrouva bien embêté.

A l’issue de ces cinq minutes, Padma Patil lui avait fait une forte impression. Quelle fougue, quel feu dans ses yeux bruns quand elle l’avait taillé en pièces, quelle délicieuse nuance de carmin avait teinté ses joues sous le coup de l’animation ! Il devait la revoir.

Hélas, quelque chose lui soufflait que le sentiment n’était pas réciproque. Il avait du pain sur la planche pour effacer auprès de Padma l’impression désastreuse qu’il lui avait faite.

-Monsieur Warrington ?

Une dame d’âge et d’allure respectable le toisait derrière son pince-nez.

-Irma Prism. Je suis votre nouvelle assistante.

Warrington Sr avait encore frappé.

Tactique n°1- Flatter son corps de métier

Alors qu’il montait sur l’estrade et prenait sa place derrière le pupitre, il la vit dans la foule des employés, bras croisés (ce qui démontrait une attitude clairement peu réceptive au message qu’il tenterait de faire passer) et expression dubitative. Mais Cornelius ne se laissa pas démonter. Parler en public ne lui faisait pas peur. Il était également très bon en improvisation, une aptitude qui donnait des sueurs froides au vénérable Tiberius Warrington, qui suppliait son rejeton de ne pas trop s’écarter des discours amoureusement dactylographiés qu’on lui préparait.

« En tant que PDG de Warrington Industries, je ne peux que me réjouir de l’acquisition d’Elixcorp. Je m’engage à préserver le souci de la qualité qui caractérise cette entreprise, tout en y apportant la contribution et l’expertise de Warrington Industries dans la fonction commerciale et de distribution. Les synergies que nous pourrons développer sont nombreuses… »

Il nota le sourcil levé de Padma au mot « synergies ». Sans doute se demandait-elle s’il savait de quoi il parlait.

« Je voudrais saluer le travail des chercheurs, et les assurer que leur avis sera pris en compte durant cette période de transition. »

Il aperçut des sorciers aux robes un brin élimées et aux épaules voûtées se redresser un peu, l’air agréablement surpris. Les chercheurs étaient aisément repérables dans la salle : tous donnaient l’impression de vouloir être dans leur laboratoire plutôt que dans l’auditorium d’Elixcorp.

Padma pencha la tête de côté. Ravi d’avoir capturé son attention, Cornelius se lança sans filet- au plus grand dam de Tiberius Warrington :

« Leur travail est grandement apprécié. Ils ont tout mon soutien pour continuer de chercher, chercher… du moment qu’ils finissent par trouver ! ».

Cornelius partit d’un grand éclat de rire communicatif et que l’assemblée docile suivit…excepté les chercheurs. Sa petite plaisanterie ne passait pas très bien auprès de ce corps de métier, à en juger par la mine sévère de Padma.

Impressionner cette demoiselle requerrait d’autres efforts.

Tactique n°2- Lui prêter une oreille attentive

Dans son laboratoire, penchée au-dessus de chaudrons dans une brume de fumées grisâtres, Padma expliquait à un Cornelius silencieux la procédure qu’elle avait suivie jusqu’à présent.

-Regardez l’échantillon 4D ?  Il y a eu oxydation !

Cornelius hocha la tête d’un air concerné. Padma soupira.

-Depuis une demi-heure que je parle, vous n’avez rien compris, n’est-ce pas ?

Cornelius ne nia pas.

Tactique n°3- Parler son langage

Contrairement à ce que ses anciens professeurs croyaient, Cornelius n’avait rien contre l’apprentissage en lui-même. Le problème était son impatience. Il voulait tout savoir, vite et bien. D’où la méthode ludique et rapide qu’il choisit pour communiquer ses intentions à Padma.

Cette dernière marchait d’un pas rapide, absorbée par les résultats d’une expérience qu’elle conduisait depuis deux mois. Toute à ses réflexions, elle entra en collision avec…

CCB en personne. Galant, il l’aida à ramasser ses papiers. Elle le remercia.

-Pas de problème. Main hoon na (1), pour vous servir.

Padma en resta bouche bée. Puis :

-Vous parlez hindi ?

C’était le moment ou jamais ! Cornelius ouvrit la bouche, mais Padma le fixait avec curiosité, et elle était ravissante ainsi, et son cœur battit plus vite qu’il ne l’avait escompté :

-Crazy kiya re (2), laissa-t-il échapper.

Padma ouvrit de grands yeux :

-Pardon ? demanda-t-elle d’une voix un tantinet aigue.

-Tum se hi sab baatein ab se (3), poursuivit-il d’une voix enflammée.

-Monsieur Warrington, reprenez-vous ! s’exclama Padma, inquiète, car Cornelius paraissait aussi choqué qu’elle de ce qu’il disait. Comme une déferlante, ses sentiments coulèrent, débordèrent, emportant dans leur sillage sa dignité.

-Yeh dil kho gaya (4). Mujhe ho gaya hai py…

Horrifié par ce qu’il réalisait, Cornelius couvrit sa bouche des deux mains et battit en retraite dans son bureau.

-ar (5) ? acheva Padma.

La tête lui tournait un peu. Ce n’était pas tous les jours que votre patron vous faisait en hindi des déclarations d’amour brûlantes (et terriblement sirupeuses).

Quant à Cornelius, mortifié, il prit la décision de ralentir sur le visionnage de romances  bollywoodiennes.

(1) Je suis là.

(2) Tu me rends fou.

(3) Je ne pense plus qu’à toi.

(4) J’ai perdu mon cœur.

(5) Je suis tombé amoureux.

Tactique n°4- Parler son langage bis

Pour leur santé mentale à tous deux, Cornelius et Padma mirent de côté l’incident.

Cependant, la jeune femme ne manifesta pas un ravissement excessif lorsqu’il lui rendit à nouveau visite dans son laboratoire, sous couvert de s’intéresser à ses recherches.

Une heure plus tard, elle changeait d’avis.

-Je commence à comprendre, dit Cornelius, une pointe d’admiration dans la voix. Votre potion serait une nette amélioration par rapport à l’aconit actuel utilisé par les loups-garous.

-Exactement ! J’attends les ingrédients importés de Hongrie pour poursuivre mes expériences…

Cornelius comprit à demi-mot.

-Je ferai accélérer le processus, cela ne devrait pas être trop compliqué. Du moment que vous ne demandez pas racines d’asphodèle (6).

Padma rit. C’était la première fois qu’une plaisanterie de son cru la faisait rire. C’était sa première victoire.

Terry Boot, as des Potions et chercheur d’Elixcorp, avait bien mérité cette semaine de congés tous frais payés aux Seychelles. Son coaching intensif en « Rudiments de Potions- Niveau débutant et intermédiaire » avait porté ses fruits.

(6)- ingrédients traditionnellement associés à des potions peu recommandables, comme la Goutte du Mort-Vivant.

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