Anthologie: Sansornettes
Titre: Vers l'infini de nouveaux horizons
Auteurs: drakys & supaidachan
Fandom: Original > Les nouvelles aventures des Losers!
Personnages: Sanson et cie
Rating: PG
Nombre de mots : 2944 mots
Disclaimer: ironie & bas blancs (drakys & supaidachan)
Notes: Tout est
ici. Posté pour
flo-nelja dans le cadre d'
ecrirepouraider.
Il y avait un prince, un vrai de vrai prince dans sa maison ! Pas une vulgaire imitation, non, il s'agissait du vrai de vrai item original avec tout ce qu'il fallait de sang royal et de visage adorable, avec même une destinée tragique en bonus ! Un prince qui dormait à poings fermés dans son lit, qui plus est ! Ses pieds dépassaient peut-être, les couvertures étaient décidément trop courtes et il ne devait pas être installé très confortablement au fond, mais c'était clair : Sanson était plus princier que tout ce qui pouvait exister dans la Création en matière de princes nains (toujours petits, généralement gras et avec tout le tact et la délicatesse d'une brique), même dans un lit trop petit et avec un petit filet de bave aux lèvres !
Deriner ne se souvenait pas avoir connu un tel niveau de fierté depuis longtemps. Certainement pas depuis qu'elle avait, dans la même journée, vu un de ses articles publiés dans le magazine Les amis des fleurs vivaces (il était intitulé Sur le nouvelles variétés se développant en milieu sombre) et mis une claque retentissante à ce goujat de Gurgun parce qu'il avait fait remarqué, en voyant les parchemins, que le papier était de la qualité qu'il fallait pour se torcher avec.
Le hic, avec toute cette fierté qui lui étreignait la poitrine comme l'étau du premier forgeron venu, c'était qu'elle n'arrivait plus du tout à dormir. Ses pas, comme ça, sans motif ultérieur et surtout pas pour faire avancer l'histoire, décidèrent de la mener vers la Pierre de Vœux.
Elle allait lui adresser une petite prière rapide, innocente, pour la remercier d'avoir rendu à Sanson son apparence véritable. C'était très gentil de l'avoir fait, après tout les nains avaient des demandes plus simples : affûter une hache, demander une nouvelle enclume, s'assurer de la qualité de sa bière. Deriner adressa un petit salut au garde en faction, marcha rapidement jusqu'à la Pierre de Vœux et joignit les mains pour remercier sa générosité et appeler sur le jeune prince la bénédiction divine de Gadoki.
Deriner passa sans heurt l'épreuve joindre ses mains, mais sa prière lui resta coincée dans la gorge, un peu de travers.
La Pierre de Vœux avait foutu le camp. Et probablement pas toute seule, compte tenu du fait qu'elle n'avait, aux dernières nouvelles, ni jambes, ni ailes ou aucun autre moyen de locomotion.
Elle aurait pu crier. Elle aurait pu hurler au vol, à la malédiction, à la fin du monde et à d'autres évènements assez peu heureux impliquant du sang, de la violence et la mort dans d'atroces souffrances. Elle aurait pu tout simplement s'évanouir, mais Deriner avait un peu plus de sens commun que ça.
"Uh oh", préféra-t-elle commenter.
***
Le réveil fut brutal. Brutal comme une claque au visage. Ce qui était quand même plutôt logique, puisque c'était exactement ça qui avait réveillé Sanson. Massant sa joue et profitant aussi de l’instant pour se défaire de la position en boule dans laquelle il s’était endormi, il posa la question qui s’imposait :
"...Qu’est-ce qui se passe ?"
Deriner n’avait pas l’air très heureuse. Ce qui, selon les standards nains, impliquait un réarrangement minimal des muscles de son visage dans une expression faciale qui restait à peine un poil moins commode que d’habitude. Elle fourrait pèle-mêle, avec une efficacité qui n’avait d’égale que sa vitesse d’exécution, ses affaires de voyage dans son sac.
"Fais tes bagages, beau prince, on lève le camp dans cinq minutes.
- Mais", argua Sanson en se frottant les yeux et en réalisant qu’il avait fait autour plus ou moins l'équivalent d'un nid avec toutes les couvertures disponibles. "Ce n’est même pas le matin !", et il pointa dehors, où pas le moindre petit rayon de soleil venait chatouiller le ventre pansu de la terre.
"Nous sommes sous terre, ici. Tu ne saurais pas différencier la nuit du jour même si cette différence avait la bonté de venir danser toute nue devant toi !", rétorqua Deriner en haussant un sourcil (ce qui haussa aussi le second, les deux formant de toute façon un sourcil unique).
Sanson lui accorda un point, bailla et décida de se lever. Il regarda autour de lui, réalisa qu'il n'avait pas de bagages à faire : il était arrivé chez les Ouestants en étant un écureuil et il n'était pas humain depuis assez longtemps pour avoir eu le loisir de faire les boutiques. Il n'avait de toute façon pas trop envie de faire les boutiques chez les nains, leurs vêtements seraient trop petits.
"Pourquoi on doit partir, au juste ?", demanda-t-il, décidé d'aider Deriner à compléter ses bagages.
"Tu sais, cette Pierre de Vœux que tu as utilisé pour redevenir humain ?", elle inséra une pause pour l'effet, histoire de rendre sa déclaration bien dramatique : "...Elle n'est plus là."
Le prince ouvrit grand les yeux, au comble le plus ultime de l'horreur.
"Je l'ai fait disparaitre !", s'exclama-t-il, sentant son cœur se débattre dans sa poitrine et son cerveau être brisé par le poids de la culpabilité.
Comment il allait pouvoir rembourser une Pierre de Vœux ? Est-ce que c'était seulement remboursable, ce genre de truc ? Peut-être était-elle encore sous garantie ? Peut-être qu'il allait pouvoir promettre quelque chose, même s'il n'était pas certain de la valeur exacte d'une promesse d'un prince sans royaume qui essayait justement de récupérer le royaume en question.
"Mais non", le rassura Deriner en lui assenant une petite claque dans le bas du dos, faute de pouvoir atteindre plus haut. "Ce qui me chicote, c'est que Noir et Zahid sont aussi mystérieusement disparus et quelque chose me dit que si on ne se tire pas bientôt, nous ferons bientôt face à la Justice des Ouestants."
Sanson avala de travers.
"La... La J- Justice des Ouestants ?
- C'est vraiment immonde, un truc complètement innain", le réconforta assez moyennement la naine, avec un tout petit morceau de sourire au coin des lèvres. "Pour les affaires de vol, le ou les coupables sont bombardés d'œufs pourris jusqu'à ce qu'ils implorent grâce !", elle eut un petit rire.
Sanson réalisa qu'il n'était pas du tout certain si c'était une blague ou non.
***
Ils laissèrent donc assez rapidement derrière eux les sous-terraines contrées Ouestantes, pour laisser aux bons soins des autres nains la séance de choc, de rage et de colère et la poursuite du premier coupable potentiel venu à grand renfort d'outils pointus et de haches affutées qui allait certainement suivre la constatation que leur Pierre de Vœux s'était comme un peu tirée pendant la nuit. Assez rapidement aussi, ils réalisèrent qu'ils étaient complètement perdus.
"Tu n'as pas pris de carte ?", demanda Sanson, profitant de la pause pour s'asseoir par terre et examiner l'état de ses pieds.
Les traditionnelles bottes naines ne lui faisaient bien sûr pas, il avait fallu lui improviser des chaussures. La solution rapide avait été des sandales : les lanières de cuir raide lui sciaient les jambes, la semelle découpée à la hâte était rude et inconfortable. Sanson réalisait que marcher sur ses pieds était une pure torture.
"Et toi ?", rétorqua la naine, assez rouge au niveau des joues.
Ou de ce qui en était visible sous la barbe.
Après quelques heures d'errances et quelques autres à tourner en rond sans même remarquer qu'ils tournaient bêtement en rond, il parvinrent à une fourche dans la route. À cet embranchement, il y avait un étranger et surtout, une carte. La carte était entre les mains de l'étranger, qui la consultait avec attention. Sanson faillit bien courir droit à lui pour lui arracher la carte des mains en espérant qu'elle leur soit plus utile qu'à lui, mais Deriner le retint.
"Un instant, tu sais bien qu'on ne fonce pas sur les étrangers comme ça ! Tu n'es pas Noir, après tout. D'ailleurs", elle leva le nez, "regarde-le un peu, il n'a pas l'air très recommandable."
L'étranger, en effet, avec ses vêtements noirs, ses dreads désordonnés et surtout avec l'épée à son flanc, avec le fourreau qui semblait avoir connu des jours meilleurs, pouvait très bien être un assassin, ou même pire : il pouvait être collecteur d'impôts. Pile le genre de personne que Deriner préférait éviter. Sanson décida de faire preuve du plus de courage possible, ou alors de la plus grande stupidité possible, et s'approcha résolument de l'étranger qu'il préférait voir comme un sauveur.
"Excusez-moi, est-ce que-", il s'interrompit quand l'étranger tourna la tête vers lui, avec un sourire qui pouvait très certainement être qualifié de psychotique.
"Vous cherchez un guide ?", demanda-t-il et dans ses yeux, il y avait une lueur malsaine.
Sanson avisa le tatouage qui lui courrait sur les joues d'une oreille à l'autre, un long trait noir, et se dit qu'il aurait dû écouter la naine et rester sagement près d'elle ou mieux, derrière elle. En s'accroupissant, pour ne pas dépasser trop. Maintenant, il allait probablement mourir très pitoyablement, parce qu'il avait eu la folie de s'adresser à un dément. Mais l'étranger ne fit que lui tendre une main, que Sanson regarda un instant avant de se rappeler que les conventions humaines disaient qu'il devait la serrer. Il la serra aussitôt, avec enthousiasme même, parce qu'après tout, ce n'était pas à tous les croisements qu'on trouvait quelqu'un tout prêt à jouer les guides.
"Sanson.
- Sinis", se présenta l'autre voyageur. "Je suis-", il sembla hésiter. "Je suis un mercenaire", dit-il finalement, avec un sourire un peu crispé qui ne laissait pas du tout paraître qu'il mentait. "Je connais cette région comme ma poche", s'empressa-t-il d'ajouter, pour faire plus vendeur comme présentation. "Où voulez-vous que je vous accompagne ?"
***
Sanson avait dit À l'auberge la plus près ! ; Deriner avait dit Le plus loin possible d'ici ! Un peu confus entre les deux options, Sinis avait opté pour leur faire traverser la forêt, histoire de se rendre à une petite auberge de sa connaissance. Pas le grand luxe, plutôt un gîte et couvert dans ses moyens à lui, au cas où ses deux employeurs n'auraient pas la générosité de le payer pour ses services.
Il fit de très rapides détours pour leur montrer quelques-unes des attractions locales, pimentant la visite de deux ou trois histoires. Il leur pointa un arbre qui paraissait beaucoup plus vieux que les autres : sur son tronc étaient attachées des cordes épaisses, sur lesquelles pendaient de nombreux talismans protecteurs.
"C'est un des Arbres Maudits... on dit qu'il crée un passage vers le monde des morts.
-- Oui oui, c'est bien beau !", s'énerva Sanson avant qu'il les retarde d'une autre légende quelconque. "On est un peu pressés, on-
-- On se tait, Sanson. C'est ça qu'on fait", lui conseilla fermement Deriner avant qu'il parle de leurs petits soucis avec les Ouestants si jamais ils étaient rattrapés.
Sinis leur montra également une petite crique dont l'eau était toujours agréablement chaude. Sanson refusa de quitter l'endroit avant de s'y être baigné les pieds pendant une bonne heure, râlant à chaque seconde qu'être humain, ce n'était pas si bien que ça. Deriner lui rappela les côtés les plus positifs de sa vie d'écureuil, comme être chassé pour sa fourrure et cacher des noix à dix mille endroits qu'il oubliait, ce qui le calma aussitôt.
Ils n'avaient pas repris la route depuis quinze minutes que Sanson pointa devant.
"Dis-moi, Sinis, ces gobelins à l'expression sanguinaire, ils font aussi partie de ta petite visite touristique ?"
Le mercenaire tira aussitôt son épée.
"Bien sûr que si", annonça-t-il avec un sourire un brin forcé. "C'est hmm, oui, voilà, disons que c'est le volet de mise en forme du voyage."
Sanson voulut agripper l'épée à son flanc (il avait souvent vu Silent Pascal faire ce geste précis et généralement mortel dès que la lame nue fendait l'air) : il se souvint qu'il n'avait pas eu le temps de dénicher une épée. Il passa une main à sa ceinture, espérant y prendre une dague (geste qu'il avait souvent vu Pidgeonboy faire, souvent pour que le voleur échappe son arme et se réfugie derrière les femmes) : il se rappela qu'il n'avait pas eu le temps de dénicher des dagues non plus. Un gobelin lui fonça dessus ; il fit ce que des années à être un écureuil lui avait appris : il prit ses jambes à son cou en hurlant. Zigzaguant dans la mêlée, il continua à crier, espérant ne pas périr si tôt dans sa quête.
Réalisant que les cris de cochon qu'on égorgeait venait de Sanson, Sinis envoya un bon coup de pied dans le ventre d'un de ses adversaires, décapita un second d'un coup précis et il sauta en arrière avant que le troisième décide de soudainement s'améliorer. Il courut vers Sanson, l'attrapa par le collet et le tira violemment en arrière, le jetant à terre.
"Reste derrière moi !", avertit Sinis en se penchant.
Il enfonça les doigts dans la terre et avec un cri, il releva le bras. La terre suivit le mouvement, formant des pics acérés qui tinrent leurs adversaire en respect. Du bout de son épée, il traça d'abord un glyphe dans le sol et il frappa ensuite l'air : les pics qu'il avait formés suivirent le mouvement, attaquant les gobelins qui réalisèrent rapidement, malgré leur stupidité, qu'ils avaient affaire à bien plus fort qu'eux. Une fois que les gobelins furent devenus de tous petits points à l'horizon à force de fuir aussi vite que possible, Sanson le pointa, bouche grande ouverte.
"Tu- tu- tu- tu es un magicien !
- Peuh", fit Deriner, croisant les bras, faisant mine de ne pas être impressionnée du tout, même si elle avait des étoiles qui lui brillaient dans les yeux. "Comme si j'allais me laisser amadouer par le premier mage de combat venu !"
Cette fois, c'est Sinis qui pointa, bouche grande ouverte.
"Tu- tu- tu- tu sais ce que je suis ?"
La naine hurla de rire, roula littéralement par terre pendant deux bonnes minutes avant de se relever avec difficulté tellement elle tremblait encore du violent accès de rigolade. Elle soupira, essuya du revers de la main les larmes qui perlait à ses yeux et murmura pour elle-même : Ah, ces stupides humains ! S'ils n'étaient pas si mignons, ils seraient pathétiques.
"Voyons, chez qui crois-tu que les tiens ont pris la tradition de la magie de combat ? ...Quoique, c'est plutôt rare maintenant, avec les humains qui courent partout, plus moyen de mage de combater en paix et de toute façon, être forgeron est un métier tellement mieux rémunéré. Les Sudistes sont peut-être bien les seuls qui en forment encore...", ajouta-t-elle sur un ton pensif avant de secouer la tête et de pointer Sanson. "Mais toi, monsieur le prince-
- Tu- tu- tu- tu es un prince ?", s'exclama aussitôt Sinis, encore plus tué par la surprise qu'après avoir vu son emploi véritable être reconnu.
L'ex-écureuil hocha la tête et se gratta l'arrière du crâne, un peu gêné. Il n'était pas encore tout à fait habitué à ce que sa présence soit remarquée, encore moins qu'on le reconnaisse pour ce qu'il était vraiment. Être un humain, c'était vachement différent d'être un écureuil ! Ne serait-ce que pour la différence au niveau de la quantité de poil sur son corps. C'était bien de ne pas devoir se lécher partout pour faire sa toilette et de recracher ensuite des boules de poil de temps en temps.
"Ouais, enfin, si, ou euh, presque ? J'essaie comme un peu de regagner mon royaume, là.
- Alors je dois t'avouer très honnêtement un truc", put finalement continuer Deriner. "De la façon dont tu te bats, toutes les statistiques s'entendent pour pointer vers ta mort prochaine. Il va vraiment falloir remédier à ça, ou alors trouver comment les princes fantômes peuvent diriger un royaume ! ...Ça doit bien se faire de nos jours, avec toutes ses histoires d'accommodements raisonnables."
Deriner soupira et désigna l'espace devant eux d'un geste vague.
"C'est par où maintenant, monsieur le guide ?
- Oh, c'est-", Sinis s'arrêta avant de pointer.
Il baissa la tête, fronça les sourcils, releva la tête avec une expression suppliante au visage.
"Dites", demanda-t-il d'une toute petite voix, en se tapotant les index ensemble. "Vous... vous n'auriez pas besoin d'un mage de combat peut-être, par hasard, comme ça, pour vous aider dans cette histoire de récupération de royaume ?"
Deriner entama un geste de la main qui, au-delà d'être grossier, allait très clairement exprimer ce qu'elle pensait d'avoir un mage de combat, humain en plus !, collé aux basques. Elle se ravisa cependant à la toute dernière seconde et il s'afficha sur son visage rond et poilu (caractéristique raciale incontournable) une avidité surprenante.
"Tu crois que tu pourrais apprendre deux ou trois trucs pour se battre au petit prince ?
- Hé ho ! J'ai mon mot à dire !"
Un index boudiné pointé dans sa direction lui fit réaliser que non, il n'avait pas son mot à dire. Enfin, pas s'il voulait vivre.
"Puisque tu te bats comme un pied et comme si tu en avais deux gauches en plus, tu es encore très très très très", elle arrêta la répétition des très au cent quarante-troisième, juste avant que Sinis s'endorme. "Très loin de regagner ton royaume !
- Oui, mais-", argua Sanson, malheureusement sans vraiment avoir d'argument tout prêt sous la main.
Il baissa la tête. Penser à récupérer son pauvre royaume encore aux griffes de sa méchante soeur était la meilleure des motivations.
"Bon d'accord, alors !", s'exclama-t-il avec enthousiasme. "Tu veux bien te joindre à nous ?
- Vous fournissez les repas ?", demanda Sinis avec espoir et Sanson hocha la tête, un tout petit peu méchamment heureux de constater qu'il existait des gens avec des finances plus pourries que les siennes.
(11 janvier 2010)