[Fic] "Fausse interprétation", légendes arthuriennes, pour servanissime (arthur/lancelot, PG)

Sep 17, 2006 12:09

Titre: Fausse interprétation
Auteur: drakys
Fandom: légendes arthuriennes
Personnages: arthur/lancelot avec une touche de guenièvre dans le tas
Rating: PG
Disclaimer: c'est du domaine public (…non?)
Notes: ça fait des années que je n'ai pas potassé ces mythes et légendes, alors c'est peut-être un peu off. j'espère que ça te plaira quand même, même si c'est particulièrement kitsch et que la narration que j'ai utilisé n'est franchement pas extra.
Demandé par: servanissime, ici


Lancelot du Lac, à l'éducation parfaite, connaissait les arts et les lettres et possédait par celle éthérée qui lui avait soufflé son nom à l'oreille et qui l'avait élevé d'un rudiment de courage et d'un rien de sagesse qui devait le servir toujours une fois ces deux qualités ayant bourgeonnés. Encore jeune et déjà beau, son regard pur et clair se ternirait rapidement sous le poids du péché qui lui concéderait plus tard une demi-victoire amère sur le Graal.

Lancelot du Lac, courtois, noble et poli, fut présenté à la cour du roi Arthur pour y être fait chevalier et pour être consacré à la vie aventureuse de cet état. Le jeune homme, touchant à peine l'âge adulte, n'avait jamais posé son regard encore naïf sur une beauté telle que celle pâle et mélancolique de la reine d'Arthur. Sa royale et noble aînée lui présenta son épée de ses mains douces aux doigts gracieux et son amour sans partage dans ses yeux réchauffés de la passion qu'Arthur n'avait jamais pu y mettre; Lancelot prit l'objet avec reconnaissance et l'amour, il ne pouvait l'ignorer.

Arthur, sans surprendre les regards égarés et les sourires perdus, savait tout ou croyait tout savoir du feu qui brûlait entre sa belle et ce nouveau-venu, ce Lancelot venu du Lac au regard brillant et au cœur jeune, passionné et envoûtant qui refermait sur ceux des autres sa poigne intrigante. Le roi n'avait nul besoin des murmures du vent qui lui soufflaient les rumeurs dont on étouffait les braises encore vives en sa présence.

Arthur ne pouvait rien y changer. L'amour ne pouvait être arrêté, pas une fois placé dans le cœur froid dont il n'avait jamais eu que le respect; pas une fois placé dans le cœur bouillant du premier de ses chevaliers. Pas une fois dans le sien, divisé et hagard entre son devoir de roi et son désir d'homme. Arthur n'était pas dupe et il ne craignait pas encore de fermer les yeux sur leurs regards qui se détournaient quand ils croisaient le sien. Sa couche ne lui avait pas encore donné d'héritier et s'il n'avait besoin que de fermer les yeux…

Lancelot du Lac mourrait lentement loin de la pureté qu'il avait connu; il ne savait quel démon sournois se terrait pesant sur son cœur, mais chaque jour il désirait un peu plus ce qu'il ne pouvait avoir. Un jour de grisaille, gris comme la pierre du château froid dans l'hiver naissant et sombre comme ses pensées, Arthur vint à lui les yeux lourds de questions. Il les lut une à une avant que les lèvres du roi les énoncent, alourdi par la culpabilité.

"Je sais", dit simplement Arthur en plongeant son regard dans celui du chevalier, assez profondément pour penser lire son cœur.

Le visage du jeune homme resta de marbre à ses mots: le démon avec son cœur dans les griffes lui souffla à l'oreille qu'il valait mieux ainsi et qu'il pouvait enfin céder. Si le roi savait, le roi voulait aussi disait-il et si le roi voulait, Lancelot n'avait qu'à s'avancer et effleurer ses lèvres pour prendre son cœur dans un sortilège que nul ne pourrait briser. Lancelot du Lac ignora les paroles tentatrices qui voulaient le perdre et resta debout et droit, empli de doute et il ne retrouva sa voix que pour demander avec révérence:

"Que savez-vous, mon roi?

- Je sais pour Guenièvre et toi, pour ce qui unit vos cœurs", murmura d'une voix lasse Arthur, son regard se perdant dans les ombres de la pièce.

Les ombres lui renvoyaient les images chimériques qui rendaient ses traits sévères de la douleur dont il ne parlait pas: Lancelot et Guenièvre s'enlaçant, Guenièvre et Lancelot enlacés et sa propre solitude dans leur amour. Arthur retourna son regard au soleil qui brillait dans les yeux de l'autre homme et les mots qu'il avait préparé le cœur lourd goûtèrent la cendre.

"Aussi, j'ai une faveur à demander de toi."

Lancelot du Lac supporta le regard et sa prière et s'approcha d'un pas raide et puis d'un autre. Il tomba à genoux devant l'autre homme et lui prit la main dans un élan passionné, prêt à promettre la lune, le soleil et tous les astres scintillants au ciel dans cet emportement fougueux de la jeunesse.

"Demandez de moi ma vie ou mon âme!"

L'un comme l'autre Lancelot du Lac aurait donné sans regret, mais le regard triste qu'il reçut en retour d'Arthur il ne put supporter et voulut promettre plus sans trouver rien à lui pouvoir offrir de mieux. Le roi retira sa main qui alla effleurer le visage de son chevalier, légère et la seconde que ce contact dura toute une éternité dans leurs regards mêlés.

"Elle t'aime", murmura Arthur et l'aveu laissa sur sa langue un goût amer. "Elle t'aime comme tu l'aimes et tout ce dont je te supplie, c'est un fils pour elle, que j'appellerai mien et que je chérirai comme mien. Va à mon lit, que personne ne puisse dire que cet enfant n'a pas été conçu dans ma couche."

Lancelot du Lac enfin vit ce que Arthur croyait sur les regards qu'il avait surpris, comprit la méprise qui le perdait et il ne trouva de réponse à lui donner qui ferait comprendre au roi la vérité. Il se releva, l'effort terrible et coûteux pour se soulever avec son âme lourde et il hocha la tête une fois, l'air grave tellement la promesse demandée lui pesait.

Lancelot du Lac retint les dénégations qui voulaient pleuvoir de ses lèvres en devinant qu'il ne pourrait en retenir le flot si elles venaient à tomber de sa bouche. Il voulait avec véhémence nier aimer la reine, sans pouvoir avouer que ses regards dérobés étaient pour Arthur et non pas pour elle, jamais pour elle, aussi belle soit-elle.

Arthur voulut le remercier, mais sa gorge était nouée de le pousser de la sorte dans des bras autres que les siens et il baissa la tête en homme vaincu, lui sur lequel veillait autrement l'ange de la victoire. Il releva le regard quand une main hésitante, tremblante tellement elle était retenue se posa contre sa joue.

Lancelot du Lac lui jeta un regard et il ne sut jamais si c'était le démon qui avait parlé ou s'il l'avait fait de son propre vouloir.

"Mon roi, jamais je n'oserai monter dans votre couche sans que vous y soyez également."

(17 septembre 2006)

légendes arthuriennes, fic

Previous post Next post
Up