Lecture : Le Vieux qui lisait des romans d'amour - Luis Sepúlveda

May 23, 2014 14:07


Littérature latino-américaine : CHECK !

"Le Vieux qui lisait des romans d'amour" de Luis Sepúlveda
roman - 120 pages
♥ ♥ ♥ ♥ ♥ 5/5



Le vieux a un nom, même si peu de gens se soucient de l'employer, il s'appelle Antonio José Bolivar. Le vieux vit au cœur de la forêt amazonienne, près du village El Idilio perdu au milieu de la brousse. Le vieux n'a pas de voisin ou presque, il n'a besoin de personne, il se suffit à lui-même depuis que son épouse est morte brûlée par la fièvre des décennies auparavant. Le vieux n'aime que la forêt et la forêt est une maitresse exclusive qui coupe ses adorateurs de toute civilisation et les condamne à une éternelle solitude. Mais la solitude ne dérange pas Antonio José Bolivar et pour combler ses heures de silence et d'isolement, il possède un remède miraculeux : les romans d'amour que lui amène chaque année le dentiste itinérant, son unique ami au village. Dans ses histoires merveilleuses où des jeunes gens souffrent, se séparent, se retrouvent et s'adorent, Antonio José Bolivar se délecte d'une humanité plus douce et plus tendre que celle crapuleuse et médiocre qui se vautre dans la crasse d’El Idilio.

Mais on ne peut vivre éternellement coupé de ses semblables et le jour où le maire du village - sardoniquement prénommé par ses administrés "La Limace" - vient frapper à la porte de sa cabane, le vieux ne peut pas l'envoyer au diable, aussi forte en soit son envie. Dans une petite pirogue partant à la dérive, les villageois viennent de découvrir le cadavre atrocement mutilé d'un homme, un de ces gringos venus en Amazonie pour ajouter quelques peaux de fauve à leur tableau de chasse. Celui a eu affaire à forte partie puisque, après avoir massacré une portée de petits jaguars, il a subi la vengeance sauvage de leur mère. La bête est toujours là. Elle rôde à quelques dizaines de kilomètres du village, ivre de rage et de douleur, magnifique et assoiffée de sang. Elle a pris goût au meurtre et nul homme ne sera en sécurité d'un bout à l'autre du fleuve, tant qu'elle n'aura pas été abattue.

Après avoir essuyé quelques petites déceptions littéraires ces derniers temps, j’ai décidé de me rabattre sur une valeur sûre en relisant « Le vieux qui lisait des romans d’amour », roman que j’avais découvert à l’adolescence et jamais rouvert depuis. Douze ans plus tard, cette poignante fable écologique a conservé toute sa magie et le personnage d’Antonio José Bolivar, solitaire pétri de sagesse et de romantisme, reste toujours aussi attendrissant. Moins manichéenne qu’on pourrait le penser, elle ne se borne pas opposer sommairement nature et culture, puisque c’est autant dans les livres, ses trésors de l’esprit humain, que dans la forêt que le vieux Bolivar vient puiser amour et réconfort contre la barbarie de ses contemporains. C’est dépaysant, profond, débordant de poésie et d’humour doux-amer : un adorable petit livre évidemment touché par la grâce et qui a amplement mérité son immense succès.

rec : roman, auteur : luis sepúlveda, bingo-livres

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