Lecture : Une histoire des haines d'écrivains - Etienne Kern et Anne Boquel

Jan 22, 2018 16:46


"Une histoire des haines d'écrivains" de Etienne Kern et Anne Boquel
essai - 336 pages
♥ ♥ ♥ ♥ ♥ 5/5



« le succès des autres me gêne, mais beaucoup moins que s'il était mérité » déclare sournoisement Jules Renard. Les autres ? Quels autres ? Chateaubriant ? « Un matamore de tragédie » ! Musset ? « Un foetus conservé dans l'alcool » ! Zola ? « Un ressemeleur en littérature » ! Hugo ? Dumas ? Lamartine ? Sand ? Pouah, n'en parlons pas !

Qui a dit que les grands écrivains étaient des gens courtois et mesurés ? Les écrivains sont de sales bêtes vindicatives et orgueilleuses, pétris de méchanceté et de jalousie. Personne ne hait avec autant d'enthousiasme et de constance qu'un écrivain et, si une partie de leur vindicte tombe sur les critiques littéraires, les éditeurs et les directeurs de théâtre, c'est principalement leurs pairs qui sont les cibles de leurs ires. Quand on lui demande s'il a des ennemis, Eugène Sue répond avec ravissement : « Oh ! Très biens, parfaits et en quantité. » Car s'il est bon d'avoir des alliés dans la petite guerre de tranchées que se livrent les auteurs du XIXe siècle, il est encore meilleur d'avoir des ennemis. Un bon ennemi, ça vous pose un homme, ça vous donne de la prestance, de la profondeur, surtout quand celui-ci est prestigieux. Qui n'a pas rêvé de se déclarer l'ennemi personnel de Victor Hugo ? La némésis d'Emile Zola ?

Mais les écrivains ne sont pas seulement des querelleurs chroniques, ce sont aussi des hommes d'esprit. Bienvenu au festival de la vacherie ingénieuse organisé par Etienne Kern et Anne Boquel ! Amateurs de traits d'esprit féroces, de mauvaise foi crasse et de verve satirique, vous allez vous régaler avec cet excellent petit essai, « Un histoire des haines d'écrivains ». Mensonges, ruses, calomnies, ragots… Nos grands hommes ne reculent devant rien pour esquinter leurs adversaires et faire reluire un peu plus leurs propres piédestaux et ceci pour le plus vif plaisir des heureux lecteurs que nous sommes. Oh, on le sait bien, se moquer de ses petits camarades, c'est mal, mais c'est tellement marrant aussi ! Et de toute façon, les autres vous le rendent bien et à coups de truelle en plus.

Eh oui, des sales bêtes, ces écrivains, mais personnes ne leur a pas demandé d'être des saints, juste des génies. Et un poil de mesquinerie, doublé d'un soupçon d'orgueil et de fiel, ça vous rend tout de suite un bonhomme plus sympathique, non ?

coup de coeur, rec : essai

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