Titre: Dodo la ninette
Auteur:
aylalaThème: Dès que le soleil se couche
Fic n°5
Fandom: Original
Disclaimer: La petite chanson à la fin appartient au folklore réunionnais.
Dodo la ninette
Le bruit des chiens, le cri des hommes…Tout se mélangeait dans la tête de Malala. Le guetteur venaient d’arriver, son souffle lui manquait mais tous avaient compris : les chasseurs arrivaient.
Immédiatement, parce que leur survie dépendait énormément de leur vitesse de réaction, les marrons du camp s’affairèrent. Ils éteignirent le feu qui pouvait les démasquer, certains prirent des armes, d’autres aidèrent les vieillards à fuir.
Malala, elle, se précipita pour attraper son bébé qui dormait sur une paillasse de fortune, et serrant sa fille contre son cœur, courut aussi vite que ses jambes le lui permettait.
Ils avaient attendu le couché du soleil, ces monstres, ces tueurs, ces Blancs.
Jamais de jour ils n’auraient retrouvé le campement, et ils étaient bien trop peureux pour s’aventurer dans la forêt la nuit. Malala savait que leur seule chance de survie était de se cacher jusqu’au moment où la nuit serait définitivement tombée.
Protégeant autant que possible la tête de sa petite fille, elle plongea dans un buisson d’épines et se nicha sous une grande fougère en espérant que les chiens passeraient loin du camp et ne pourraient pas la retrouver.
Elle était encore jeune, elle ne voulait pas retourner à la Plantation. Elle savait qu’on lui ferait payer au centuple son marronnage, si le Maitre ne décidait tout simplement pas de les tuer, elle, Lalaïna et tous ceux qu’ils captureraient.
Elle desserra l’étreinte de ses bras et se pencha sur le visage de sa fille. Les lèvres de l’enfant se mirent à trembler et le cœur de la jeune femme se serra.
- « Non ! Non bébé ! »chuchota-t-elle en la berçant « Ne pleure pas ! »
Mais déjà la petite laissait échapper sa peur par de bruyants sanglots.
- « Lalaïna ! Non ! » supplia Malala qui tendait l’oreille « On va se faire prendre ! »
Mais la petite ne comprenait pas. De toutes parts, dans les buissons et dans les arbres environnant, des voix courroucées s’élevèrent alors.
- « Tu veux nous faire tuer ! » gronda celle d’un homme
- « Fait la taire ! » ordonna celle d’une femme.
Malala était désespérée, c’était son premier enfant et elle n’avait pas l’habitude. Les aboiements des chiens se rapprochaient. Si elle ne faisait rien, elle entrainerait tous le clan à sa perte, mais se rendre était hors de question. Elle tenta de donner le sein à l’enfant mais celui-ci le refusa et se remit à pleurer.
- « Si tu ne la fait pas taire » menaça une voix non loin d’elle dans la pénombre du soleil couchant « Je me chargerais de le faire ! »
Malala, horrifiée, savait qu’aucun de ses compagnons n’hésiterait à faire du mal à son enfant plutôt que de se laisser capturer par les Chasseurs de Noirs. La jeune femme tenta alors le tout pour le tout et se mit à bercer sa fille. Puis, rapprochant sa bouche de son oreille, elle chantonna à voix basse la berceuse qu’elle avait entendue chanter maintes et maintes fois par les autres femmes marronnes.
Dodo la ninette, l’enfant de Jeannette
Lalaïna ouvrit de grands yeux ronds et ses pleurs se calmèrent. Malala poursuivit.
Si la ninette y dodo pas, chaque marron va souk a elle.
La petite fille se tut et le cœur de Malala s’apaisa un peu. Elle posa un baiser sur le front de sa fille avant de reprendre la contine, en la serrant contre son cœur et en fermant les yeux à s’en faire mal aux paupières.
Elle chanterait tant qu’elle sentirait la présence des chiens et de leurs maitres. Elle chanterait pour calmer sa fille et se donner du courage. Elle chanterait tant que le soleil ne serait pas couché.