Loin de la foule déchaînée - Thomas Hardy

Sep 25, 2016 11:12


Thomas Hardy - Loin de la foule déchaînée (1874 / Mercure de France, 1980 d'après la traduction de 1901)
(432 pages, soit 75 km de plus pour le challenge Tour du Monde. Pays : Angleterre. Total : 7850 km, 29 592 pages et 20 pays pour 80 livres
14e titre pour le challenge XIXe siècle 2016)

Une belle jeune fille impétueuse, bien résolue à éviter le mariage et à mener seule, de main de maître, la ferme à la tête de laquelle la Fortune l'a placée, se retrouve l'objet des convoitises amoureuses de trois hommes. Un simple berger qu'elle a autrefois éconduit et qui a le bon goût de travailler pour elle sans trop évoquer ses sentiments (le gentil garçon fidèle). Un riche voisin qui perd un peu l'esprit devant la violence de ses sentiments et veut à toute force l'épouser (le boulet insistant). Un bellâtre de soldat, veule, fat et frivole, qui l'entortille en trois compliments ridicules et qu'elle épouse sur un coup de tête, parce que c'est bien connu, les belles jeunes filles volontaires, il suffit de leur dire qu'elles sont charmantes en frétillant de la moustache pour qu'elles se métamorphosent illico en gourdasses sans cervelle. Il faut dire que la petite vaniteuse se regardait dans un miroir dès le premier chapitre, elle était mal partie !
Evidemment, le mariage ne sera pas heureux et au bout de 250 pages, l'affaire commence à devenir vaguement intéressante, sans cesser de rester assez franchement agaçante.

Si ce roman a pu correspondre, autrefois, à une sensibilité tissée de puritanisme pastoral, de mièvrerie romanesque et d'aimable paternalisme misogyne, je peine en revanche à comprendre l'engouement qu'il suscite encore aujourd'hui. Certes, il y a de belles descriptions de la campagne anglaise, une présence puissante de la nature qui dépasse de très loin les simples passions humaines, mais rien, dans l'étude des personnages, ne vient donner de profondeur à ce qui pourrait être le scénario d'un mauvais roman de gare. Les personnages masculins ne dépassent guère le stéréotype, Bathsheba/Barbara aurait pu sortir du lot si l'auteur ne s'était englué au passage dans un enchevêtrement douteux de préjugés sur les femmes, d'autant plus contrariants lorsqu'une héroïne prétendue forte se révèle simple potiche. Tous, en tout cas, sont unanimement agaçants et leurs malheurs n'ont pas su me toucher une seconde.
Quant au style, je lui laisse le bénéfice du doute - la traduction que j'ai lue est ancienne, peut-être trop (ma bibliothèque n'avait que celle-là), et le résultat un peu plat, voire carrément ridicule lorsqu'on en arrive aux dialogues, entre effets d'humour ratés autour des paysans benêts et déclarations d'amour pathétiques qui font saigner les yeux.

Tout compte fait, je préférais encore l'adaptation de Vinterberg, vue l'an dernier au cinéma, qui avait le mérite de donner plus de poids au personnage de Bathsheba/Barbara et d'offrir au spectateur de très belles images.
Je sens que je ne vais pas redonner sa chance à Thomas Hardy de sitôt...

challenge tour du monde, bouquins, challenge 19e siècle : critiques

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