Esprit d'hiver - Laura Kasischke
Esprit d'Hiver - Laura Kasischke (2013 / Christian Bourgois, 2013)
(312 pages, soit 75 km de plus pour le challenge Tour du Monde. Total : 3200 km et 13 pays pour 37 livres)
Treize ans plus tôt, Eric et Holly, couple d'américains moyens en apparence sans histoires, sont partis en Sibérie pour adopter un bébé - un merveilleux bébé aux grands yeux sombres et aux longs cheveux noir de jais, une petite princesse russe arrachée aux orphelinats de la misère, qu'ils ont choisi de baptiser Tatiana. Tout s'est merveilleusement passé avec cette enfant, d'une gentillesse exquise... jusqu'à ce matin de Noël où Holly se réveille beaucoup trop tard avec cette étrange certitude : quelque chose les a suivis depuis la Sibérie.
Son mari parti en catastrophe récupérer ses parents à l'aéroport, la neige se met à tomber, tourne au blizzard, impénétrable. Les invités ne viendront pas et entre la mère et la fille, désormais adolescente, le tête à tête devient huis-clos. Etrange. Glaçant. Mais d'ailleurs, lorsqu'on y repense, tout a-t-il toujours été si merveilleux avec cette enfant ? Depuis le début les indices se sont multipliés, accidents domestiques bénins et pourtant bizarres, dont le souvenir laisse un lourd sentiment de malaise, dont l'accumulation semble prouver que quelque chose ne va pas. Ce bizarre jour de Noël, au fond, n'est que l'aboutissement très logique de tout le reste...
Si ce roman ne m'avait pas été offert par une amie de bon conseil, si je n'avais pas lu auparavant En un monde parfait, qui commence aussi de manière assez plate pour devenir parfaitement fascinant, j'aurais très vraisemblablement abandonné ma lecture en cours de route. L'histoire est bien lente à se mettre en place, péniblement redondante, et surtout centrée sur un personnage que je trouve aussi horripilant que pathétique, sur des considérations maternelles qui m'inspirent à peu près autant d'empathie que le respect des cadavres à un vautour.
Je me suis donc malgré tout accrochée (heureusement, le livre n'est pas bien long !) et peu à peu, assez d'éléments intrigants se sont profilés pour me donner envie de savoir où tout cela pouvait bien mener. Les dernières pages se sont même vues avaler avec une indéniable impatience, jusqu'à cette fin brillante qui retourne toute l'histoire comme peau de saucisson, et rend assez implacable tout ce qui était jusqu'alors surtout agaçant. Ce genre de fin que j'aime tant, qui laisse osciller la balance entre un potentiel élément fantastique et la simple folie d'une femme qui a dû refouler trop d'horreurs et se laisse anéantir par la dernière.
Fin extrêmement intéressante, qui rattrape le reste et donne presque envie de le relire d'un oeil neuf, sans faire tout à fait oublier le peu d'intérêt qu'il a d'abord suscité. La sensibilité sur laquelle se fonde l'histoire m'est à la fois trop étrangère et trop peu sympathique pour vraiment me parler. Elle n'en reste pas moins très habile, et je doute qu'elle se laisse rapidement oublier !