Old Fashion

Jan 12, 2010 22:15

Titre : Old Fashion
Auteur : Angelene
Fandom : Doctor Who
Personnages : Ten et Rose
Genre : Fluff, un petit peu de flirt innocent entre les deux personnages principaux mais pas vraiment de romance
Rating : G
Disclaimer : Tout appartient à Russell T Davies, Terry Nation, la BBC et des tas de gens probablement tous anglais.
Note : Ce one shot se situe quelque part dans la saison 2, post-Age of Steel, mais pas de spoiler. Spoiler aussi sur Castrovalva, le premier épisode de Five dans Old School Doctor Who



OLD FASHION (Des Robes Impraticables et Traditions Vestimentaires Interplanétaires)

Troisième tentative. Rose prit une grande inspiration, son courage à deux mains (à la fois au sens figuré et littéral du terme), plissa les yeux comme pour ne pas voir l'affreux spectacle qui allait se dérouler, et saisit l'instrument de torture.

« Un ... Deux ... Trois ! »

Un zip triomphant et quelques froissements de tissus plus tard, son corset était enfin, et presque par miracle, ajusté sur ses formes généreuses. Elle jeta un rapide coup d'œil vers le miroir, et à part le fait que son regard lançait des éclairs de rage, elle était absolument ravissante. L'effort qu'elle avait subi _ effort n'était pas le bon mot ... supplice ? torture ? travail herculéen ? _ pour enfiler le corset avait même légèrement rosi ses joues, lui donnant un joli teint.

Oui elle était adorable. Malheureusement, elle n'eut pas le luxe de laisser cet agréable constat faire prise sur elle et calmer ses nerfs en pelote, car deux tocs tocs impatients retentirent soudain dans le ronronnement familier du TARDIS.

« Rose, voyons, combien de temps te faut-il pour mettre une robe ? »

Sans prendre le temps d'achever les finitions et d'être totalement décente, la jeune femme ouvrit la porte de sa chambre d'une volée.

« As-tu seulement idée de ce que c'est d'enfiler un corset ? »

Le Doctor la regarda stupidement (expression il fallait le dire qu'on trouvait assez rarement sur son jeune visage), sourit, ouvrit et ferma la bouche à plusieurs reprises, puis se tira le lobe de l'oreille machinalement comme il le faisait lorsqu'il était nerveux.

« A vrai dire ... Oui. Mais j'aimerais ne pas entrer dans les détails si ça ne te dérange pas. »

Exaspérée, Rose se retira dans sa chambre et lui claqua la porte au nez.

« ... Rose ? »

***

Paris 1889. L’Exposition Universelle, la Tour Eiffel, les Impressionnistes, les pittoresques rues pavées et les cochers, les grands magasins flambant neufs richement décorés, les hommes bien habillés levant leur chapeau sur son passage … Rose était ravie. Enchantée, même, au point qu'elle en oublia momentanément qu'elle ne pouvait pas respirer dans sa robe impraticable.

Le Doctor et elle se promenaient dans les rues de Paris, leurs mains se balançant de façon inconfortable le long du corps, puisqu’il n’était apparemment pas approprié de se tenir la main en public à l’époque. Rose avait déjà vécu cela lorsqu’ils avaient visité l’Angleterre victorienne ou celle de la Régence, mais cette pudeur la surprenait un peu, de la part des français.

Cela ne semblait pas cependant perturber le Doctor qui foulait les trottoirs bondés avec aisance en continuant à parler cent kilomètres à l’heure. Cette version de lui ne semblait jamais vouloir cesser de parler, ce dont Rose ne se plaignait pas vraiment. Auparavant, elle aurait fui n’importe quel homme se révélant être un moulin à paroles, mais pour une raison qu’elle ne s’expliquait pas, elle aimait l’écouter parler, et même quand elle ne comprenait qu’une phrase sur deux.

L’inconvénient était que lorsque le Doctor était lancé sur un sujet avec animation, il avait tendance à prêter peu attention à ce qu’il se passait autour de lui. En quelques virements mal négociés et mouvements de foule inattendus, Rose s’était laissée submergée par le flot de passants se pressant dans les rues pour l’Exposition, et se retrouvait à la traîne.

Le Doctor naturellement ne s’en était pas aperçu et continuait à avancer droit devant lui, parlant avec insouciance, à … plus personne en particulier. Ce fut seulement en plein milieu d'un monologue sur telle planète de la Galaxie Troxioide, qui avait volé une réplique de la Tour Eiffel (mais l'Agence du Temps découvrit qu'en réalité ils avaient volé l’originale et remplacé par une copie) qu’il remarqua la difficulté accrue de se mouvoir dans la marée humaine et saisit la main de Rose à l’aveuglette.

Et de s’arrêter, perplexe. La main de la jeune femme ne semblait pas tenir dans la sienne de la même façon que d’ordinaire. Elle semblait plus large, plus froide et moins douce. Et plus surprenant, elle était gantée.

« Qu'est-il arrivé à ta main ? » éclata-t-il devant l’absurdité de cette main étrangère, et assez nettement comme s’il s’agissait de la faute de la jeune femme.

Il eut à peine le temps de découvrir le visage horrifié et indigné d’une vieille bourgeoise française n’étant manifestement pas Rose, qu’il reçut une gifle d’une autre main gantée, et trop large et trop froide et trop rêche.

« Oh » dit-il, réalisant son erreur.

Puis : « Quelle incivilité ! s’exclama-t-il avec indignation. C’était une erreur de bonne foi ! Et on dit que je suis irrévérencieux et impoli tout le temps … »

Alors qu’il commençait à se quereller avec la vieille française, Rose le rejoignit enfin et arriva à sa rescousse, calmant l’offensée, et l'excusa, prétextant que son « cousin » était un peu lent. Rose eut toutes les difficultés du monde à ne pas sourire de ses deux pitoyables mensonges, surtout sous le regard amusé du Doctor qui semblait souligner le ridicule d’appeler un extra-terrestre son cousin et de qualifier un génie de lenteur.

Finalement, la bourgeoise non sans maugréer encore à une ou deux reprises, accepta leurs excuses et s’éloigna, se parant de sa dignité. Le Doctor et Rose échangèrent un regard complice, la jeune femme prit sa main et lui offrit son plus beau sourire.

« C'est mieux comme ça ? »

Le Doctor haussa les épaules.

« Au Diable la bienséance. On est en France après tout ! »

Il lui adressa un clin d’œil charmant (du pur flirt), puis leur « moment » disparut aussi vite qu’il était arrivé, et il commença à se plaindre qu’elle ne tenait pas la distance.

« Ce n’est pas à ce rythme qu’on verra quoi que ce soit de l’Exposition. Plus généralement, tu perds un temps inconsidéré à t’occuper de tes robes et de tes cheveux et de tes peintures de guerre sur le visage, alors qu’il y a tellement de choses à voir et si peu de temps ! Tu ne veux pas que ce voyage finisse comme celui d’Erdefelgher ? On n’a même pas pu regarder les Montagnes Assassinées qu’il fallait rejoindre le Tardis illico presto … Oh. J’aime bien cette expression moi. Illico Presto. Je devrais utiliser le latin plus souvent. »

« Je suis désolée, parvint enfin à l’interrompre Rose après avoir écouté son soliloque offensée, mais Erdefelgher ? Totalement de ta faute. Je buvais tranquillement un Kotchalak avec cette gentille dame à la peau rouge, je ne demandais rien à personne. Si tu ne t’étais pas empressé de faire mumuse avec ton bizarromètre … »

« Retrospectromètre Hexadimensionnel. » précisa-t-il aussitôt.

« Ce que je voulais dire, reprit-elle, ignorant son interruption, c’était que sans mon guide officiel avec moi, je ne pouvais pas deviner qu’accepter une boisson d’une native de l’Erdefelgher Continental était un délit. »

« Je t’ai toujours dit de te méfier quand on t’offre de te sustenter gratuitement dans les systèmes bi-solaires, ça cache toujours des motifs inavouables. »

« Tu ne m’as jamais dit ça. »

« Bien sûr que si. »

« Non. Tu m’as toujours dit d’être amicale, de ne pas fixer des yeux les humanoïdes à pigmentation voyante et d’accepter tout signe d’hospitalité. »

« Il y a une différence entre être amicale et être trop … avenante. Tu fais ça sans même t’en rendre compte, c’est agaçant. Vraiment, avec ton expérience maintenant, tu devrais savoir à quoi t’en tenir. »

« De toute façon, poursuivit Rose après avoir reniflé de façon peu élégante, j’arrivais très bien à m’expliquer avec la police locale et il a fallu que tu jettes de l’huile sur le feu. C’est à cause de toi qu’on a dû fuir en courant ! »

Rose lança au Doctor un regard triomphant, sa langue dardant au coin de ses lèvres, quand elle le vit changer de tactique et arborer un air subitement enthousiaste. Il ne voulait vraiment pas perdre.

« Les planètes qu'on quitte en courant sont les meilleures, admets-le ! » lâcha-t-il d’un ton tentateur, presque séducteur.

Rose soupira intérieurement et rendit les armes. Rien ne la dérangeait vraiment quand il lui parlait de cette façon. Elle lui sourit avec adoration, puis passa sa main sur sa robe doucement de haut en bas. Souhaitant quitter ce terrain dangereux, elle changea de sujet.

« C’est ridicule à quel point il est difficile de bouger normalement dans ce type de robe. »

Quand elle leva les yeux vers le Doctor, il regarda aussitôt ailleurs et elle aurait pu jurer que l’instant d’avant, il la dévisageait. Probablement une illusion d'optique.

« C’est peut-être que tu devrais ralentir un peu sur les frites. »

« Oh ! Mais quelle mauvaise foi ! s’écria-t-elle avec une fausse indignation. On croirait entendre Mickey. »

Elle eut une pensée pour son ami, à présent loin d’elle et vivant une vie totalement différente dont elle n’entendrait jamais parler. Elle retint son souffle, par réflexe, puis le relâcha doucement, se rendant compte que cela ne faisait plus vraiment mal. Mickey aurait probablement ri de la remarque du Doctor et avec un manque total de tact, lui aurait donné un coup de coude et fait remarquer que le Doctor n’était finalement pas si différent des hommes qu’elle connaissait.

Il avait eu raison sur ce point d'ailleurs, Mickey. Aussi extraordinaire et insensé que pouvait être le Doctor, il avait parfois des réactions typiques de mâle. Peut-être qu'il avait toujours été comme cela mais le cachait mieux dans sa précédente forme. Ne voulant pas avoir de moment nostalgique dans cette belle journée en se remémorant son premier Doctor, elle reprit le fil de la conversation, qu’elle avait laissé au Doctor expliquant ad vitam aeternam les multiples raisons pour lesquelles elle ne devrait jamais plus jamais à l’avenir le comparer à Mickey.

« Il n’y a aucun problème avec ma ligne, le coupa-t-elle pour en revenir aux faits. Surtout avec les kilomètres que tu me fais courir sans arrêt : je pourrais carrément gagner le marathon. Ou au moins le cent mètres. »

« Tu serais très mignonne avec une médaille olympique autour du cou. » approuva-t-il.

« Parfaitement. Ce sont ces robes qui sont des instruments de torture, manifestement inventés par les hommes. Et puis … J’ai toujours été ... voluptueuse. »

Cette fois-ci, il ne dit rien mais émit un large sourire.

« Quoi ? »

« Rose la Voluptueuse. » se moqua-t-il.

« Oh la ferme ! »

Rose se retrancha alors derrière une de leurs disputes récurrentes : pourquoi devait-elle toujours mettre des robes de torture tandis que lui portait systématiquement le même costume.

« Je croyais que tu aimais mon costume ? » bouda-t-il aussitôt.

« J'adore ton costume, ton costume est merveilleux, ton costume ferait pleurer les angelots dans les fresques des peintres italiens … »

« … Oh tu te rappelles de Bronzino ? Quel garçon charmant … »

« … Je ne vois juste pas pourquoi tu ne te changes jamais tandis que je dois me plier à toutes les coutumes vestimentaires locales. Un corset, c'est inconfortable mais passe encore. Alors quand je dois enfiler un pantalon électronique, un uniforme de la Confédération Intergalactique _ et ces vestes ont un milliard de boutons au moins _ ou pire, pratiquement rien comme sur Hyatola … »

« Oh oui, ça c’était, er, balbutia-t-il, je ne savais pas que c’était la saison des amours quand on s’est matérialisés, je te le promets. »

« Quand on est à Rome on fait comme les Romains … » s’amusa Rose devant son embarras.

A l’époque elle avait trouvé l’affaire beaucoup moins amusante, mais elle ne pouvait pas résister à l’occasion que lui procuraient ses grimaces gênées et en profita pour enfoncer le clou.

« Je n’aurais jamais cru qu’il était physiquement possible d’être invité à autant d’orgies en un si court laps de temps … »

« Er, oui, er, je, hum, enfin … »

Rose éclata de rire et décida d’abréger ses souffrances.

« Je peux me plier à certaines coutumes aliens étranges, mais toi jamais. Pourquoi tu es tout le temps dispensé ? Où est l’égalité ? Et ce n’est pas seulement parce que tu es borné, les locaux ne te font jamais la moindre remarque. »

« Charisme de Seigneur du Temps. En gros je voyage dans le temps et l'espace depuis tellement longtemps que mes habitudes d’intégration font partie de moi. C’est presque de la suggestion. J’ai une telle assurance que cela empêche les gens de questionner ma présence ou mes manières. Ca me fait gagner du temps. »

« Quoi c'est ... Quelque chose de psychique ? Comme le papier ? »

« C'est un peu ça. Oh. Et il y a aussi le fait que neuf fois sur dix j'atterris en pleines catastrophes ou fins de monde imminentes qui font que les gens ont rarement le temps ou la présence d'esprit de se poser des questions sur mes tenues vestimentaires. »

« C'est aussi le cas pour moi. »

« Je croyais que tu aimais ça ... » finit-il par soupirer, la lippe boudeuse et franchement indigne pour un Seigneur du Temps de neuf cents ans.

Typique. Alors Rose lui prit le bras et cogna doucement son épaule contre la sienne.

« Tu sais que j'adore tout dans nos voyages. »

Elle fut récompensée par l’un de ses extraordinaires sourires inconditionnels, elle sut que le sujet était clos et le lui rendit.

« Alors, ça te dit d'être l'une des premières personnes au monde à monter dans la Tour Eiffel ? »

Son expression plaisante disparut aussitôt du visage de Rose.

« Sans ascenseur ? Dans cette robe ? »

***

Naturellement, il s’avéra qu’un groupe de mercenaires de la planète Alkator avait cloné Gustave Eiffel pour que sa copie insère dans les matériaux de construction de sa gigantesque tour de métal du fligaton liquide, devant transformer le monument en gigantesque détonateur et la planète Terre en bombe à retardement. Rien de vraiment nouveau en somme.

Comme d'habitude, le Doctor et Rose sauvèrent le monde de façon assez spectaculaire, encore une fois, libérèrent le cher Gustave (un homme par ailleurs fort charmant), le Doctor échangea avec lui des anecdotes sur l’élévation de la Statue de la Liberté et la robe de Rose était fichue. Adieu instrument de torture. C'était quand même sympa de t'avoir connu.

Leur voyage de retour vers le Tardis se fit paisiblement, bien qu’en quatrième vitesse considérant leur aspect débraillé (et surtout le tissu déchiré en multiples endroits que portait Rose) qui leur valait de nombreux regards courroucés. Ils pressèrent le pas, leurs mains solidement ancrées l’une à l’autre, et riant de leur dernière aventure. Rose ne perdit pas de temps à lambiner dans la salle de contrôle et se précipita dans ses quartiers pour se changer tandis que le Doctor les dématérialisait dans le Vortex.

Une fois libérée de l’étouffant corset et des jupons en lambeaux de son autrefois très belle et très inconfortable robe d’époque, Rose enfila sa traditionnelle combinaison jean/hoodie et tout de suite se sentit revivre. Puis elle partit à la recherche du Doctor, celui-ci ne se trouvant pas près du Rotor du Temps. Finalement, elle le surprit à faire les cents pas dans la gigantesque garde-robe de son vaisseau. A sa connaissance, il n’avait jamais remis les pieds dans cette partie du Tardis depuis sa régénération.

« Vous ici ? » s’exclama-t-elle, l’interrompant dans ses pensées.

Comme toujours son visage s’illumina en la voyant. Elle remarqua qu’il tenait dans ses deux mains une gigantesque écharpe multicolore, qui même en l’enroulant plusieurs fois autour du cou, devait très certainement traîner sur le sol si quelqu’un voulait la porter.

« Qu’est-ce que c’est que ça ? Un foulard pour géant ? »

« Huuum non. Oh mais ce serait un cadeau intéressant si jamais je devais faire une visite diplomatique sur Zergovia. Les Zergoviens sont très friands de cadeaux de nature vestimentaire, ils voient ça comme un grand honneur. Sauf pour les chapeaux. C’est une grave offense ne serait-ce que de porter un chapeau devant un Zergovien. Mais une écharpe, ils aimeraient. Bien que je ne m’en séparerai jamais. Trop de souvenirs. »

« Tu veux dire que tu l’as déjà portée ? » sourit Rose en s’approchant suffisamment pour prendre un bout de la très longue écharpe et sentir sa laine sous ses doigts.

« Un autre moi. Il ne s’en séparait jamais. C’est assez ironique de penser que mon moi suivant en plein délire post-régénératif s’est empressé de la détricoter entièrement. Oh il avait ses raisons, il ne retrouvait pas son chemin dans le Tardis et s’en est servi de fil d’Ariane, mais c’était tout de même assez cavalier de sa part. »

« Tu t’es déjà perdu dans le Tardis ? » s’étonna Rose, retenant l’information la plus incongrue à ses yeux de sa déclaration.

« Bien sûr que non, je viens de dire que j’étais en délire post-régénératif. »

« Mais tu t’es quand même perdu ? » le taquina Rose.

« J’avais une très bonne excuse. Et même si c’était le cas, je ne vois pas où serait le problème. Tu te perds tout le temps dans le Tardis. »

« Ce n’est pas mon vaisseau ! » protesta-t-elle.

« Et moi j’ai mieux à faire que d’essayer de mémoriser tous les couloirs et étages, ici, c’est gigantesque et l’Univers n’attend pas. »

Sans cérémonie, le Doctor fourra dans les bras de Rose son encombrante écharpe et entreprit d’examiner un à un divers costumes étendus dans les rayons de sa garde-robe, manifestement à la recherche de quelque chose en particulier. La jeune femme le laissa faire et s’amusa avec l’écharpe, l’enroulant au moins une demi-douzaine de fois autour de sa nuque puis tourna sur elle-même, la faisant voler au-dessus du sol.

« Tu l’as retricotée ? » demanda-t-elle au bout de quelques instants.

« Pardon ? » s’écria-t-il d’un air ahuri tandis qu’il se débattait avec une redingote.

« Elle est en parfait état, développa Rose en pointant l’écharpe, et tu m’as dit qu’un de tes anciens toi l’avait détricotée. »

« Ah oui. Je l’ai emmenée un jour à réparer, sur un coup de tête, chez les Tisseuses de la Cité d’Erpasie dans la Galaxie des Ombres. Elles sont réputées dans les quatre coins de l’Univers. Et je ne sais pas pourquoi j’utilise cette expression, l’Univers n’a aucun coin, certainement pas quatre. Toujours est-il que l’écharpe est comme neuve depuis, même si je ne la porte plus. J’étais assez sentimental à l’époque. Presque naïf. Quand je pense que c’est lui qui … Pendant la Guerre … »

Le Doctor perdit progressivement ses mots, ce qui était assez rare chez lui, et son regard devint soudain grave et fixé dans le vague. Depuis qu’il s’était régénéré, il était évident que le traumatisme de la Guerre à laquelle il avait survécu s’était un peu atténué, mais il continuait à être hanté par ses souvenirs. Rose aimait à penser que sa présence aidait un peu, alors elle s’avança tout à côté de lui, le frôlant pour le sortir de ses pensées, et chercha à la distraire.

« Et tu as déjà porté ça ? » demanda-t-elle avec incrédulité, en lui montrant une veste multicolore qui semblait tout droit sortir de l’attirail d’un clown.

Le Doctor cligna des yeux à plusieurs reprises, jeta un regard horrifié tour à tour sur le costume et sur la jeune femme, et se passa la main dans les cheveux nerveusement.

« Bien sûr que non. La plupart de ces costumes sont là pour mes invités et … » mentit-il avec assez peu de talent.

« Oh si ! Tu l’as porté ! Tu l’as porté ! » l’interrompit Rose, riant ouvertement de lui.

« Cette version de moi avait des goûts douteux, se justifia-t-il avec mauvaise grâce, en plus d’une personnalité difficilement réconciliable … Il vaut mieux ne pas s’attarder sur lui.  … Rose, arrête de rire. »

« Mais à quoi tu pensais ? s’enquit-elle entre deux gloussements. Et ça, tu l’as porté ? »

Elle lui montra un costume de toréador et pour toute réponse il leva les yeux au ciel.

« On ne sait jamais ! Au fait, on peut savoir ce que tu cherches ici ? Je croyais que tu ne voulais pas te séparer de ton costume à rayures ? Et franchement en voyant tes anciens looks je te comprends mieux. »

« Rose, il y a une question de contexte et de personnalité entourant chacun de mes choix passés et ... AH AH ! » cria-t-il soudain triomphalement.

« Quoi ? »

Le Doctor ne répondit rien et entreprit de retirer sa cravate, puis sa veste en quelques mouvements d’épaules avant de les confier à Rose, qui de façon assez stupide ne vit pas venir ce qui l’attendait et manqua de pousser un cri aigu et indigne lorsqu’elle réalisa qu’il s’apprêtait également à retirer sa chemise.

« Oh Boy … murmura-t-elle en se retournant, tellement brusquement qu’elle se prit le pied dans l’écharpe multicolore et trébucha peu gracieusement. Er ... Qu’est-ce … »

Elle ne put finir sa phrase et s’étrangla lorsqu’elle reçut sur la tête la chemise du Doctor, qui manifestement la prenait pour un porte-manteau humain.

« Qu’est-ce que tu fais ? » s’écria-t-elle d’une voix trop haut perchée.

« Je me change, répondit-il sur le ton de l’évidence, comme si elle était une jeune enfant particulièrement lente. J’ai reçu un signal de détresse de l’Ambassade d’Argoulade. Ravissante planète, avec des plages de sable noir interminables. Tu adorerais. »

« Ah ? » put seulement dire Rose tandis que les Converse du Doctor volaient relativement près d’elle et qu’elle arrangeait tant bien que mal sans trop les friper en tas les vêtements qu’il lui lançait au fur et à mesure.

« Société matriarcale, Argoulade, expliqua le Doctor avec enthousiasme sans noter l’inconfort de sa Compagne. Les femmes ont tous les pouvoirs suite à la Révolte de l’Année des Helgarades. Tu ne peux pas t’imaginer ce que la normalisation de la reproduction par clonage peut modifier dans une société. Enfin si, tu peux, dans le cas d’Argoulade, elle est devenue matriarcale. »

« Oh … ? » marmonna-t-elle pour bonne mesure en tentant d’ignorer du mieux qu’elle le pouvait qu’il venait de lui confier son pantalon.

« Si bien que les hommes sont rarement admis dans les hautes sphères Argouladaises. Pour m’y rendre, je suis contraint d’enfiler le costume cérémonial attribué aux hommes. Dans le cas contraire, je serais refoulé à l’entrée ce qui serait handicapant si la planète était en sévère besoin d’assistance. »

Le Doctor fit alors une pause dubitative.

« Tu sais quoi ? Je comprends mieux pourquoi tu te plains à chaque fois que je te force à te changer avant de visiter un nouvel endroit. C’est à vrai dire assez humiliant, quand on y pense … Mais hey ! La bonne nouvelle, c’est que toi, tu pourrais te balader en costume de ballerine si ça te chantais, que ça leur serait complètement égal, donc pas de contrainte vestimentaire sur ce coup-là. »

« Yay. » lâcha Rose sans prendre la peine de feindre la joie.

« Bon, qu’est-ce que tu en penses ? dit-il après un instant de silence où Rose ne percevait plus que le son du froissement de tissu. Personnellement, je préfère mon costume. »

Rose se tourna et son malaise disparut aussitôt au profit d’un rire étouffé. Le Doctor, tout grand et maigrichon qu’il était, arborait de façon maladroite un ample tissu gris anthracite à mi-chemin entre une toge et une soutane et se parachevant d’un capuchon qui aplatissait sa d’ordinaire glorieuse chevelure.

« On dirait le Seigneur Sith Palpatine. » diagnostiqua-t-elle après un soigneux examen.

« Parfait ! s’excita-t-il avec un sourire radieux. C’était l’idée ! »

***

Le capuchon glissa de la tête du Doctor lorsqu’il dut lever les mains en signe de reddition devant la demi-douzaine de revolvers lasers braqués sur lui et Rose. Finalement, Argoulade n’était plus une société matriarcale, et son accoutrement était considéré comme une grande humiliation tandis que celui de Rose était qualifié d’obscène.

« Humm non … maugréa-t-il. Changer de costume ? Ce n'était pas une si bonne idée que cela finalement ... »

« Doctor ... »

« COURS ! »

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