Dans la grande catégorie, tous les livres dont je dois vous parler , commençons par un dont je n'avais parlé que sur
babel_ouedset qui fait partie de mes derniers coups de coeur
Armadale, de Wilkie Collins.
Armadale est le premier livre que je découvre de cet auteur. Commençons par dire que cela ne sera point le dernier, tant il m'a plue, ravie, emportée, enthousiasmée. D'ailleurs, malgré les quelques 900 pages, j'ai été un peu déçue d'arriver au bout...
Armadale est l'histoire de deux jeunes gens homonymes, on pourrait presque dire de quatre: les pères homonymes au destin tragique ont chacun transmis à leurs fils leur nom et, peut-être, une étrange malédiction où ils seraient destinés à causer leur malheur l'un l'autre.
C'est un peu dire de faire une critique objective de quelque chose qui vous enthousiasme. Commençons par l'humour: délicat, pince sans rire, élégamment tourné, cynique et sarcastique. Un bonheur.
Les personnages, ensuite. Les deux principaux protagonistes, qui partagent donc le même nom, Alan Armadale, fait inconnu d'un des deux qui rencontre celui qui deviendra son meilleur ami alors qu'il se cache sous un faux nom, sont attachants, chacun dans leur genre, j'ai aimé leur amitié, la façon dont deux individus si différents prennent vie sous sa plume et partagent un attachement si fort, mais je dois dire que ma préférence va à Miss Gwilt.
Ce qui pourrait sembler à première vue un personnage mille fois vu d'arriviste sans scrupule manipulant les hommes se révèle finalement doté de tellement de nuances que j'ai adoré le personnage et qu'elle m'a peinée... Les extraits de son journal intime sont un exemple du genre, on jurerait qu'ils sont réellement dus à une plume féminine.
Et la galerie des personnages secondaires est à la hauteur des principaux, des avoués à l’ecclésiastique en passant par la mère Oldershaw, un modèle dans le genre de la vieille dame indigne!
L'histoire en elle-même repose donc sur une homonymie, mais ce serait lui rendre bien peu justice de dire qu'elle se contente de cela. Cela vous a un petit côté tragédie grecque et destin en marche, le tout rendu dans une Angleterre engoncée dans ses principes.... La façon dont l'un des deux Armadale réussit à se mettre tous ses voisins à dos d'un coup en ne respectant pas ce qu'une petite ville de province estime être convenable est un modèle de narration.
C'est vraiment un excellent roman qui m'a donné très envie d'en découvrir d'autres du même auteur et que je recommande avec enthousiasme.
En avant, route de Alix de Saint André
Le récit des trois pèlerinages qu'a fait l'auteur à Compostelle est à conseiller aussi bien aux croyants qu'aux athées complets, aux marcheurs qu'aux amateurs de canapé, à ceux qui sont tentés de prendre ce chemin qu'à ceux à qui ça n'a jamais traversé l'esprit.
Avec beaucoup d'humour, elle raconte les rencontres, la beauté ou la laideur des lieux traversés, les gens loufoques, les heures de découragement, mille petites anecdotes qui font de ce livre une lecture très plaisante, sans aucune complaisance pour elle-même ou pour autrui, tant le chemin semble révéler aux gens ce qu'ils cherchaient, ou même ce qu'ils ne savaient pas chercher.
Ceux qui y cherchent des débats théologiques devront passer leur chemin mais tous les autres devraient y trouver leur compte.
C'est drôle, souvent léger et parfois triste quand même, et risque de donner envie à tous les lecteurs de tenter à leur tour cette expérience.
L'affaire Charles Dexter Ward de Lovecraft
Ce que j'ai le plus apprécié dans cette oeuvre, c'est la richesse de l'univers. Les personnages en eux-même tiennent un peu du prétexte, mais l'univers... Là où d'autres auteurs auraient une idée et l'exploiteraient jusqu'à la dernière goutte, l'auteur multiplie tant et tant d'horreurs qu'il y aurait matière à 40 romans.
De découvertes en suspicion, de courriers louches en bruits étranges, l'horreur et le suspens montent de concert jusqu'au final. Et celui-ci est la hauteur du reste, un fait que je trouve assez rare pour être signalé dans ce genre littéraire.
Un excellent moment de lecture.
Limonov de Emmanuel Carrère
Ce livre a bien du mal à supporter les étiquettes: difficile de dire s'il s'agit d'un livre d'histoire, d'un roman, d'une biographie... Il y a tout dedans, de l'aventure à l'histoire, des histoires de guerres presque tribales et des élections truquées, des complots et des meurtres et des destins finissant en queue de poisson, le tout dans une époque assez récente pour qu'il soit épouvantablement difficile de porter le moindre jugement plus ou moins clair.
A moins d'avoir une licence d'histoire russe moderne, il y a parfois des moments où pour être un lecteur attentif, une encyclopédie se fait nécessaire, cependant l'auteur sait être assez précis pour éviter que cela doive être systématique, le tout sans être trop disert, un exploit vu le sujet.
L'écriture a des tonalités qui vous emportent, très facile à lire, entraînante, plaisante, malgré une manie de commencer parfois les phrases par Mais qui m'a toujours crispée chez un écrivain...L'auteur ne prétend pas non plus avoir toutes les réponses, interpelle carrément le lecteur en lui donnant le résultat de ses questionnements sur cette figure d'homme complexe, salaud et héros roulé dans une seule enveloppe...Un très bon roman.
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Après une pause flemme-manque d'organisation, voici la suite de la traduction de Car l'amour est fort comme la mort. Au rythme où je traduis, il va falloir trois siècles, au moins, aux deux anges pour récupérer la moindre plume...
-"Ha, je viens juste de réaliser," fit le démon en pouffant de rire. "Cela ressemble au début d'une blague de mauvais gout : un Ange déchu, un dieu païen et un mort entrent dans un bar...""Est-ce que tu peux arrêter de me faire passer pour une sorte de zombie?"..........