Une fic charmante, fraîche et adorable, avec de petites touches d'humour irrésistibles là où il faut!
Tu recevra un LEVEL 02 dédicacé !
Titre : Défions-nous de l'amour
Auteur : Berylia
Rating : G
Dire que la situation était inconfortable était un euphémisme des plus osés. Mathilde l’ignorait de toutes ses forces, Estelle n’arrêtait pas de leur jeter de petits regards peinés, quant à lui il avait la gorge sèche et rien à dire, moralité il était obligé de faire semblant d’écouter toutes les bêtises qui échappaient de la bouche de Quentin, car la seule personne à ne pas se rendre compte de la tension qui régnait était bien sûr le primate aux piercings. Trop occupé à s’écouter babiller et baigner dans sa propre magnificence Lensmann ne prêtait pas attention aux regards gênés et aux longs silences dans la queue du cinéma.
Comme à chaque fois que ce crétin de Lensmann était impliqué, Baptiste se retrouvait à souhaiter qu’il n’ait pas quitté ce matin la sécurité de sa demeure, ce qui lui aurait évité de se faire alpaguer par la bête de foire qui semblait ne pas avoir conscience qu’un rendez-vous amoureux à deux c’était mieux et qu’on ne dansait pas le tango à trois ! Bref, s’il n’était pas allé à la librairie pour prendre ce nouveau livre sur les guerres napoléoniennes qu’il avait commandé, il aurait évité de tomber sur Quentin, Estelle et Mathilde et de se retrouver plus ou moins forcé de les accompagner au ciné.
- Aïe…
Baptiste cessa de s’apitoyer sur lui-même pour se tourner vers Estelle qui se dandinait bizarrement.
- Un problème, ma princesse ?
Estelle s’empourpra tandis que Quentin lui dédiait son sourire le plus brillant.
- Mes escarpins me font mal aux pieds.
- Ils sont neufs ?
Estelle hocha la tête.
- Baptiste, file-moi ton sac plastique.
- Eh ?
- Ton sac plastique.
Se refusant à comprendre ce qui pouvait passer dans la tête du décoloré, Baptiste reprit son livre et son ticket de caisse et tendit le sac brun.
Quentin posa genou en terre et posa le sac sur le sol.
- Tiens ma princesse, retire tes chaussures et pose tes pieds sur le sac pour qu’ils ne se salissent pas.
Estelle lui renvoya un sourire radieux et Baptiste sentit quelque chose se serrer dans sa poitrine. Il regarda Mathilde. Elle était plus pâle qu’un linge puis elle croisa son regard et détourna immédiatement les yeux.
- Eh, j’avais pas remarqué que tes escarpins étaient assortis à ton sac et à ton chouchou. J’aime les filles qui savent accessoiriser.
Baptiste se demanda s’il ne faisait pas de la tachycardie, parce qu’il y avait clairement quelque chose qui n’allait pas dans sa poitrine.
- Elle pourrait pas avancer un peu cette fichue queue !
Mathilde était furieuse, ça s’entendait dans sa voix, ça se voyait à ses épaules qui tremblaient légèrement, aux reflets sur ses lunettes qui cachaient ses yeux.
Baptiste posa sa main sur son bras.
Mathilde fit un bond comme s’il l’avait brûlé et dans ses yeux il vit des larmes avant qu’elle ne baisse le regard soudain passionnée par ses vieilles tennis.
- Je…
A dire vrai, il ne savait pas quoi lui dire… Ils étaient sensé sortir ensemble, mais seulement sur la toile et…
- Eh, vous allez rire… je me suis gouré de file. On est dans celle pour Harry Potter et le Vampire Joyeux, ce qui explique le monde…
Sans même se consulter, Mathilde et lui fulminèrent Quentin du regard, ce qui leur permit d’échapper à leur inconfortable conversation à une voix.
Quentin laissa leur regard courroucé lui glisser dessus et préféra se remettre à genou devant Estelle pour lui chausser ses escarpins.
Baptiste aurait voulu détourner les yeux de ce moment Cendrillon, il aurait voulu parler à Mathilde, la forcer à le voir lui plutôt que l’autre singe galant, mais il resta à contempler les mains de Quentin sur les pieds nus et blancs d’Estelle, ses doigts qui se posaient sur sa cheville tandis qu’elle glissait à nouveau dans la chaussure rose. Il ne savait pas pourquoi mais ses joues s’empourprèrent et il réussit enfin à se tourner et à s’éloigner.
Franchement, il devrait cesser de fréquenter cet australopithèque. Depuis qu’il le connaissait il se retrouvait sans cesse fourré dans des situations embarrassantes et insupportables. C’était mauvais pour sa santé, pour ses études et plus que tout pour son intellect. Très franchement, à part des bimbos au cerveau décoloré, qui avait envie de passer du temps avec ce lolcat fait adolescent ? Cet imbécile à la face stupide et mignonne qui passait son temps à écorcher la langue française qui semblait avoir vendu ses capacités de réflexion en échange d’un cheeseburger ?
- Eh Baptiste, te goure pas de queue, on veut pas aller voir un film qui s’appelle : I love you man !
- Laisse-moi deviner, Lensmann, on va voir Tequila et Testostérone ?
- Non Baptistounet, on va voir Le retour des zombis ninja anthropophages. Il paraît que c’est une tuerie !
Baptiste sentit tout son sang quitter son visage.
***
- Tu me tiens le popcorn ? Bien installée ma princesse ? Ouais donc comme je te disais ma mère a presque fini mon costume de viking… attends, je te reprends ça… donc on sera prêts dans les temps. Enfin, si t’as bouclé le tien… Eh, Baptichou, t’es vachement muet, ça va ?
Baptiste émit le plus viril des grognements et regarda droit devant lui alors que les lumières baissaient dans la salle. Il survivrait à cette épreuve, il y arriverait. Il était hors de question de flancher ! Surtout que Mathilde était là. Bon okay, elle était assise à trois sièges de lui à côté d’Estelle mais elle était là, et elle était sa petite amie… virtuellement, mais bon, ça n’empêchait pas qu’il ne devait pas craquer devant elle. De toute façon ce n’était que de la fiction et il savait pertinemment que les zombies n’existaient pas.
Okay, il avait triché la fois où il avait emmené Mathilde au ciné et l’avait convaincue de retourner voir Batman The Dark Knight plutôt que Bienvenue à Zombieland, mais ça ne voulait pas dire qu’il ne réussirait pas à garder son calme. D’ailleurs le film était en train de commencer et il était parfaitement calme et il respirait tout à fait normalement, lentement et profondément, on inspire on expire…
- Dis-moi Baptiste…
Il réussit à étouffer son cri de pucelle effarée mais pas le sursaut quand le visage de Quentin surgit à quelques centimètres du sien comme un foutu zombi ninja !
- Juste une impression comme ça, mec, t’aurais pas les chocottes par hasard ?
- Jamais !
Okay, sa voix était sortie un peu aigue mais au moins il avait réussit à ne pas se rater sur la prononciation et à ne pas trembler comme une feuille.
- Okay, parce que sinon on aurait été regarder le film de Dora l’exploratrice pour que tu ne t’évanouisses pas.
- Très drôle Lensmann !
L’idiot s’amusait à ses dépends ! Et en plus il faisait ce truc débile avec ses sourcils qui se soulevaient alternativement. Franchement, il ferait mieux de rentrer chez lui… Mais ce serait comme avouer que l’autre débile avait raison et qu’il avait peur d’un stupide film au titre tellement stupide qu’il mériterait de faire partie des films interdits pour cause de titre nul !
Il entendit un ricanement s’échapper de la bouche de son voisin.
La fureur raidit tous es muscles. S’il avait été un primate plutôt qu’un être humain il aurait volontiers mis son poing dans le visage de l’autre. Mais comme il était un être évolué et civilisé il se contenterait de l’ignorer ostensiblement.
Fort de sa résolution Baptiste se tourna vers l’écran et regarda un zombi déchiqueter la chair morte qui se trouvait sur un bras encore couvert d’un pull mauvâtre. Il ne tressaillit même pas, il ne fit pas un bruit, sa mâchoire coincée sur une moue déterminée. Il allait voir ce film et il ne fermerait pas les yeux et il ne crierait pas et il ne tremblerait pas et ce soir il n’aurait pas de cauchemars parce qu’il était un garçon intelligent et capable de faire la part entre la réalité et la fiction !
Le temps passait avec une lenteur insupportable, tous ses muscles étaient crispés et les zombis n’en finissaient pas de se relever encore et encore et d’apparaître aux pires moments et il devait être en train d’éventrer le rembourrage du fauteuil avec ses ongles. Il avait du mal à respirer et il sentait qu’il allait bientôt faire un malaise mais il n’arrivait même plus à se calmer assez pour sortir de la salle et il aurait l’air totalement ridicule devant Quentin et mon dieu est-ce que ces zombis allaient finir par crever une fois pour toutes !
- Hé…
Il poussa un cri strident tandis que son corps était pris de spasmes.
Heureusement pour les spectateurs une main avait été posée sur sa bouche et son cri n’avait fait que résonner entre ses deux oreilles.
- Purée Baptiste calme-toi !
Son corps était parcouru de tremblements tandis qu’il se tournait vers son voisin. Il n’allait pas tenir, il n’allait pas tenir !
- Eh, tu sais si tu veux tu peux partir, je dirai aux filles que tu avais oublié un rendez-vous ou que tu avais mal au ventre… J’en parlerai à personne, mec, juré.
La voix de Quentin était douce et sa main qui avait quitté sa bouche était maintenant posée sur son bras, chaude et vivante, contrairement à celles qui s’agitaient à l’écran entre les mâchoires des zombis.
- Je… je peux plus bouger mes jambes…
- Sans dec’ !
- Quentin !
- Okay, okay, ya pas de problème, mec.
Il le tira contre lui et prit sa main dans la sienne.
- Je suis là, et vu que je suis trop un bôgoss tu peux me serrer la main tant que tu veux tu me feras pas mal.
Baptiste leva un regard incrédule sur l’autre, mais Quentin se contenta de lui octroyer son sourire de débile qu’il croyait incroyablement séducteur et il se sentit sourire un peu.
Lentement il laissa son visage retourner vers l’écran mais contre son épaule et sous sa main il sentait la rassurante chaleur de Quentin.
Les zombis continuaient à déferler et il tremblait toujours un peu, mais la peur était comme tenue éloignée par la présence de ce corps contre le sien.
- Eh, tu trouves pas que ça sent la fraise ? demanda-t-il alors que l’héroïne aux couettes se saisissait de la tronçonneuse.
- Oh, c’est juste mon baume à lèvres. Tu veux du popcorn ?