Sans titre - Anonyme
Titre: Sans titre
Auteur: Aurore Moret
Rating: G
Quelques rayons de soleil jouent dans les feuillages. L’air embaume d’essences de fleurs et de
bois vert. Mathilde se presse, épiant les bruits environnants alors que seuls quelques insectes
bourdonnants semblent répondre à ses craintes. Pourvu que Quentin ne l’ait pas suivie ! Elle
avait quitté le lycée rapidement, l’évitant soigneusement au cas où une nouvelle idée lui soit
venue pour la ridiculiser en public.
Après un coup d’œil aux alentours, elle fait grincer la porte du garage, soulagée de quitter ce
temps propice au réveil de son asthme et ses idées paranoïaques. Electre et Fleur sont penchées
sur un ordinateur et l’écran projette une lueur bleutée sur leurs visages dans la pénombre.
Mathilde qui n’arrive toujours pas à chasser Quentin de ses pensées, dépose son sac avec
soulagement en lançant un salut machinal, aussitôt retourné avec enthousiasme par ses amies.
Elle masse ses épaules endolories par le poids du sac à dos et ouvre son ordinateur portable. La
machine se lance. En attendant, elle prête une oreille à la conversation qui anime les deux filles.
- Les escarpins tu les préfères roses ou verts ?
- Tu délires ! Bleu, c’est la seule couleur qui va avec sa robe !
- Oui mais rose, ça fait ressortir les mèches couleur fraise dans ses cheveux.
- C’EST PAS BIENTÔT FINI ?! explose Mathilde. Qu’est ce que ça change la couleur des
escarpins ? Non mais, peu importe le choix de chaussures alors qu’il y a des questions à intégrer,
une intelligence artificielle à remanier, de nouveaux personnages à inventer...
Sa voix chute légèrement et est recouverte par la musique d’accueil de son ordinateur. Mathilde
se concentre sur son clavier tandis que Fleur reprend :
- Ouais mais les escarp...
- Mais tais-toi, elle va finir par nous griller et ça va barder. Surtout si elle voit qu’on joue aux
Sim’s au lieu de plancher sur le look des nanas du jeu.
Fleur se renfrogne un peu mais s’exécute alors qu’Electre quitte rapidement le jeu, enregistrant
la fille aux escarpins roses. Tout de même, des escarpins bleus auraient été de meilleur goût. En
plus, Mathilde est imperturbable, concentrée sur son écran. Il ne fait aucun doute qu’elle ne
prête plus attention à ce qui l’entoure depuis quelques minutes et n’a pas entendu un traitre
mot de la fin de l’échange.
Electre a lancé l’environnement de développement du jeu de drague. Fleur, toujours à côté
d’elle passe machinalement la main dans ses cheveux. Son esprit vagabonde, peu enclin à
programmer et bercé par le son des doigts voltigeant sur les claviers.
- Les filles, venez voir !
Le ton de Mathilde étant passablement irrité, Fleur se lève immédiatement et se penche par-
dessus son épaule. Electre redresse la tête de son écran et se tourne vers elles.
- Vous avez vu cette espèce de troll sous le pseudo de Vicking_45 ? J’ai l’impression que c’est
un bot qui teste toutes les combinaisons de réponses possibles. Il est déjà au niveau 10 alors
qu’il s’est inscrit il y a 10 minutes. Faut qu’on sécurise nos algorithmes de réponse.
- Oh non c’est pas vrai, maugréé Electre. J’ai déjà passé deux heures dessus hier.
Elle soupire, se plongeant dans les lignes de code. Fleur retourne auprès de son ordinateur, et
tente de se concentrer. Quelques longues minutes passent. Fleur machouille pensivement son
stylo puis se tourne vers Mathilde.
- Eh mais au fait ça va boss ? Ca fait longtemps que tu nous as pas parlé de Quentin !
Mathilde relève la tête de son ordinateur portable, la fusille du regard et disparait derrière son
écran. Elle répond néanmoins :
- Ah tiens, tant que j’y pense, pour votre minette à accessoiriser de tout à l’heure, laissez
tomber les escarpins, il parait que les mules compensées reviennent à la mode.
- Boss, tu cherches à détourner la conversation ! Moi, j’ai entendu parler d’une déclaration
d’amour publique, exulte Fleur.
Les yeux d’Electre brillent de curiosité. Devant le mutisme de Mathilde, elle jette un regard
interrogateur à Fleur qui reprend malicieusement :
- En fait, il lui a offert une rose rouge et un poème. Quelques vers enflammés ne feraient-ils pas
succomber n’importe quel cœur féminin ?
- Fleur ! Arrête ça ! C’était une espèce de ramassis de conneries sans queue ni tête, lâche
Mathilde, exaspérée. Il a cru bon de devoir déclamer ses vers devant la cours entière, nous
couvrant tous deux de ridicule. Je suis partie avant d’en entendre la fin et lui a tenu absolument
à me suivre en continuant à s’égosiller. Je te laisse imaginer la scène.
- Et la rose ? Il te l’a donnée ? demande Electre rongée par la curiosité.
- Oui. Ce grand nigaud s’était mis en tête de m’offrir la rose avec la transcription de son poème
une fois son récital terminé. Inutile de te dire que je n’ai fait que l’éviter après la honte que j’ai
eue. Du coup, il a attendu patiemment les cours puis a profité de se trouver à la table derrière la
mienne pendant les maths pour glisser tout ça dans mon sac.
- Oh ! Fais voir ? s’approche Fleur, intriguée.
- Je me suis empressée de la jeter à la sortie. répond froidement Mathilde.
- Même le poème ?
Mathilde rougit jusqu’aux oreilles. Puis se ressaisit en jetant un coup d’œil à son sac. La main de
Fleur y a déjà plongé et ressort avec le poème.
- Naaaan, lâche ça tout de suite.
Mathilde se jette sur Fleur qui court de l’autre côté de la table.
- Attention les oreilles, je lis, jubile Fleur tandis qu’elle et Mathilde commencent un ballet
infernal de course-poursuite autour de la table.
Mathilde, ma déesse, femme fascinante,
D’allure impitoyable et malgré tout charmante.
Dans ton monde virtuel, tu es tel un Lolcat,
Rayonnante de joie, doux yeux couleur agathe.
Mais IRL, laisse moi être ton Batman
Te guider dans cette vie, moi, l’ancien profane,
Afin que nous soyons en totale symbiose.
Et en guise d’accord, accepte cette rose
Témoin de...
Mathilde, furieuse, a enfin rattrapé Fleur. Elle lui arrache le papier des mains, le déchire
rageusement et laisse tomber les morceaux au sol. Electre, déçue, contemple les vestiges du
poème.
- Oh mais on n’a pas entendu la fin. Il a raison tu es impitoyable Boss, la raille Fleur. C’est
quelle couleur une agathe d’ailleurs?
- Translucide ! Je t’avais dit qu’il était naze ce poème, râle Mathilde
- Il n’y en a pas des bleues-vertes ?
- Electre ! s’indigne tout à coup Mathilde
Electre est par terre et tente de réassembler les morceaux de papier.
- Oups, excuse boss ! répond-t-elle avec un sourire contrit
Mathilde récupère lui arrache les restes du poème des mains, s’applique à en faire de menus
confettis et les disperse dans la corbeille à papier.
- Bon et il en est où ce Vicking_45 ?
Electre retourne à sa place, contrariée de ne pas avoir pu lire les derniers vers. Ce poème n’est
pas si mal, songe-t-elle en pianotant sur son clavier. La liste des informations concernant
Vicking_45 apparait.
- Il a déjà atteint le niveau 20. Mais il a une IP1 fixe, je vais le bloquer !
Elle commence la manipulation, puis une pensée lui revient.
- D’ailleurs à propos d’adresses IP. Avec Fleur, on a analysé toutes celles qu’utilise
Virtuose_2_drague. Tu ne devineras jamais où il habite !
- Je t’ai dit que je ne voulais plus en entendre parler, je lance Mary-Sue dans deux jours, juste le
temps de quelques petits réglages.
- T’es sûre parce que...
- Arrête, cette histoire appartient déjà au passé ! Dites, on se fait un WOW avant de s’y
remettre quand les frangines arriveront ? J’ai besoin de bousiller quelques orcs pour me défouler
après la tentative de drague minable de Quentin.
**************
Note 1
IP : Internet Protocol. Il s’agit d’une sorte « d’adresse » permettant l’identification au sein d’un réseau
informatique. Les fournisseurs d’accès en attribuent aux machines accédant à internet. Elles peuvent être fixes
ou changer régulièrement (ce dernier cas est le plus courant pour un particulier sur Internet) et permettent de
récupérer de nombreuses informations sur son utilisateur (localisation, fournisseur d’accès...)
Auteur: Aurore Moret
Rating: G
Quelques rayons de soleil jouent dans les feuillages. L’air embaume d’essences de fleurs et de
bois vert. Mathilde se presse, épiant les bruits environnants alors que seuls quelques insectes
bourdonnants semblent répondre à ses craintes. Pourvu que Quentin ne l’ait pas suivie ! Elle
avait quitté le lycée rapidement, l’évitant soigneusement au cas où une nouvelle idée lui soit
venue pour la ridiculiser en public.
Après un coup d’œil aux alentours, elle fait grincer la porte du garage, soulagée de quitter ce
temps propice au réveil de son asthme et ses idées paranoïaques. Electre et Fleur sont penchées
sur un ordinateur et l’écran projette une lueur bleutée sur leurs visages dans la pénombre.
Mathilde qui n’arrive toujours pas à chasser Quentin de ses pensées, dépose son sac avec
soulagement en lançant un salut machinal, aussitôt retourné avec enthousiasme par ses amies.
Elle masse ses épaules endolories par le poids du sac à dos et ouvre son ordinateur portable. La
machine se lance. En attendant, elle prête une oreille à la conversation qui anime les deux filles.
- Les escarpins tu les préfères roses ou verts ?
- Tu délires ! Bleu, c’est la seule couleur qui va avec sa robe !
- Oui mais rose, ça fait ressortir les mèches couleur fraise dans ses cheveux.
- C’EST PAS BIENTÔT FINI ?! explose Mathilde. Qu’est ce que ça change la couleur des
escarpins ? Non mais, peu importe le choix de chaussures alors qu’il y a des questions à intégrer,
une intelligence artificielle à remanier, de nouveaux personnages à inventer...
Sa voix chute légèrement et est recouverte par la musique d’accueil de son ordinateur. Mathilde
se concentre sur son clavier tandis que Fleur reprend :
- Ouais mais les escarp...
- Mais tais-toi, elle va finir par nous griller et ça va barder. Surtout si elle voit qu’on joue aux
Sim’s au lieu de plancher sur le look des nanas du jeu.
Fleur se renfrogne un peu mais s’exécute alors qu’Electre quitte rapidement le jeu, enregistrant
la fille aux escarpins roses. Tout de même, des escarpins bleus auraient été de meilleur goût. En
plus, Mathilde est imperturbable, concentrée sur son écran. Il ne fait aucun doute qu’elle ne
prête plus attention à ce qui l’entoure depuis quelques minutes et n’a pas entendu un traitre
mot de la fin de l’échange.
Electre a lancé l’environnement de développement du jeu de drague. Fleur, toujours à côté
d’elle passe machinalement la main dans ses cheveux. Son esprit vagabonde, peu enclin à
programmer et bercé par le son des doigts voltigeant sur les claviers.
- Les filles, venez voir !
Le ton de Mathilde étant passablement irrité, Fleur se lève immédiatement et se penche par-
dessus son épaule. Electre redresse la tête de son écran et se tourne vers elles.
- Vous avez vu cette espèce de troll sous le pseudo de Vicking_45 ? J’ai l’impression que c’est
un bot qui teste toutes les combinaisons de réponses possibles. Il est déjà au niveau 10 alors
qu’il s’est inscrit il y a 10 minutes. Faut qu’on sécurise nos algorithmes de réponse.
- Oh non c’est pas vrai, maugréé Electre. J’ai déjà passé deux heures dessus hier.
Elle soupire, se plongeant dans les lignes de code. Fleur retourne auprès de son ordinateur, et
tente de se concentrer. Quelques longues minutes passent. Fleur machouille pensivement son
stylo puis se tourne vers Mathilde.
- Eh mais au fait ça va boss ? Ca fait longtemps que tu nous as pas parlé de Quentin !
Mathilde relève la tête de son ordinateur portable, la fusille du regard et disparait derrière son
écran. Elle répond néanmoins :
- Ah tiens, tant que j’y pense, pour votre minette à accessoiriser de tout à l’heure, laissez
tomber les escarpins, il parait que les mules compensées reviennent à la mode.
- Boss, tu cherches à détourner la conversation ! Moi, j’ai entendu parler d’une déclaration
d’amour publique, exulte Fleur.
Les yeux d’Electre brillent de curiosité. Devant le mutisme de Mathilde, elle jette un regard
interrogateur à Fleur qui reprend malicieusement :
- En fait, il lui a offert une rose rouge et un poème. Quelques vers enflammés ne feraient-ils pas
succomber n’importe quel cœur féminin ?
- Fleur ! Arrête ça ! C’était une espèce de ramassis de conneries sans queue ni tête, lâche
Mathilde, exaspérée. Il a cru bon de devoir déclamer ses vers devant la cours entière, nous
couvrant tous deux de ridicule. Je suis partie avant d’en entendre la fin et lui a tenu absolument
à me suivre en continuant à s’égosiller. Je te laisse imaginer la scène.
- Et la rose ? Il te l’a donnée ? demande Electre rongée par la curiosité.
- Oui. Ce grand nigaud s’était mis en tête de m’offrir la rose avec la transcription de son poème
une fois son récital terminé. Inutile de te dire que je n’ai fait que l’éviter après la honte que j’ai
eue. Du coup, il a attendu patiemment les cours puis a profité de se trouver à la table derrière la
mienne pendant les maths pour glisser tout ça dans mon sac.
- Oh ! Fais voir ? s’approche Fleur, intriguée.
- Je me suis empressée de la jeter à la sortie. répond froidement Mathilde.
- Même le poème ?
Mathilde rougit jusqu’aux oreilles. Puis se ressaisit en jetant un coup d’œil à son sac. La main de
Fleur y a déjà plongé et ressort avec le poème.
- Naaaan, lâche ça tout de suite.
Mathilde se jette sur Fleur qui court de l’autre côté de la table.
- Attention les oreilles, je lis, jubile Fleur tandis qu’elle et Mathilde commencent un ballet
infernal de course-poursuite autour de la table.
Mathilde, ma déesse, femme fascinante,
D’allure impitoyable et malgré tout charmante.
Dans ton monde virtuel, tu es tel un Lolcat,
Rayonnante de joie, doux yeux couleur agathe.
Mais IRL, laisse moi être ton Batman
Te guider dans cette vie, moi, l’ancien profane,
Afin que nous soyons en totale symbiose.
Et en guise d’accord, accepte cette rose
Témoin de...
Mathilde, furieuse, a enfin rattrapé Fleur. Elle lui arrache le papier des mains, le déchire
rageusement et laisse tomber les morceaux au sol. Electre, déçue, contemple les vestiges du
poème.
- Oh mais on n’a pas entendu la fin. Il a raison tu es impitoyable Boss, la raille Fleur. C’est
quelle couleur une agathe d’ailleurs?
- Translucide ! Je t’avais dit qu’il était naze ce poème, râle Mathilde
- Il n’y en a pas des bleues-vertes ?
- Electre ! s’indigne tout à coup Mathilde
Electre est par terre et tente de réassembler les morceaux de papier.
- Oups, excuse boss ! répond-t-elle avec un sourire contrit
Mathilde récupère lui arrache les restes du poème des mains, s’applique à en faire de menus
confettis et les disperse dans la corbeille à papier.
- Bon et il en est où ce Vicking_45 ?
Electre retourne à sa place, contrariée de ne pas avoir pu lire les derniers vers. Ce poème n’est
pas si mal, songe-t-elle en pianotant sur son clavier. La liste des informations concernant
Vicking_45 apparait.
- Il a déjà atteint le niveau 20. Mais il a une IP1 fixe, je vais le bloquer !
Elle commence la manipulation, puis une pensée lui revient.
- D’ailleurs à propos d’adresses IP. Avec Fleur, on a analysé toutes celles qu’utilise
Virtuose_2_drague. Tu ne devineras jamais où il habite !
- Je t’ai dit que je ne voulais plus en entendre parler, je lance Mary-Sue dans deux jours, juste le
temps de quelques petits réglages.
- T’es sûre parce que...
- Arrête, cette histoire appartient déjà au passé ! Dites, on se fait un WOW avant de s’y
remettre quand les frangines arriveront ? J’ai besoin de bousiller quelques orcs pour me défouler
après la tentative de drague minable de Quentin.
**************
Note 1
IP : Internet Protocol. Il s’agit d’une sorte « d’adresse » permettant l’identification au sein d’un réseau
informatique. Les fournisseurs d’accès en attribuent aux machines accédant à internet. Elles peuvent être fixes
ou changer régulièrement (ce dernier cas est le plus courant pour un particulier sur Internet) et permettent de
récupérer de nombreuses informations sur son utilisateur (localisation, fournisseur d’accès...)