20'079 / 50'000 et c'est toujours grâce aux prompts de hier soir. J'espère que je vais réussir à me débloquer un peu parce que si je finis le nano comme ça, ça va être coton -_-
Olive a répondu présent pour plusieurs d'entre eux! Merci Olive!
meanne77 : "Membre fantôme"
Les bois étaient tombés et la sensation était étrange. Elle était légèreté pour commencer, il avait l'impression de flotter par-dessus les feuilles mortes plutôt que de marcher dedans et sa tête semblait vouloir s'envoler de ses épaules. Elle était pratique également : il passait bien plus facilement dans les broussailles et entre les sapins qui recouvraient les flancs de sa montagne.
Mais la sensation était aussi désagréable. Il tentait régulièrement de les frotter contre l'écorce d'un arbre. Il n'avait pas autant conscience du nombre de fois qu'il les touchait de la main que lorsqu'ils n'étaient pas là. Et, surtout, il se sentait nu - alors qu'objectivement parlant il l'était toute l'année.
Ses bois étaient tombés et Olive les tenait dans ses mains. Lourds, massifs, acérés à force de les aiguiser contre des arbres. Inutiles, morts, tout juste bon à décorer le linteau d'une cheminée.
Il les déposa gravement dans le trou creusé à cet effet et repoussa la terre par-dessus. Puis il éparpilla des feuilles mortes et quelques brindilles sur le monticule, caricature de la mise en terre d'un être cher. Les primevères qu'il avait déplacées avaient recouverts les mottes de l'année passée.
C'était idiot, c'était sentimental, c'était humain. Mais Olive s'y accrochait. Pendant ces quelques mois sans bois, il n'était pas simplement un cerf dépourvu de son caractère sexuel principal ; il redevenait un humain que rien ne distinguait des autres.
little_bakemono : pluie, automne, marron
L'automne était bien là. Il pleuvait, il faisait froid et les marronniers de la cour d'école avaient perdu presque toutes leurs feuilles. Indifférent à la pluie, un gamin farfouillait dans les tas de feuilles du bout des baskets.
« Olive ! » appela l'institutrice.
Tous les enfants étaient déjà rentrés et regardaient dehors avec le soulagement de ceux qui profitaient d'être au sec.
« Olive ! La cloche a sonné, qu'est-ce que tu fais !
- Je ramasse des marrons ! » cria-t-il en exhibant ses pleines poignées de marrons, avant de retourner à son occupation.
L'institutrice eut un soupir agacé. Olive avait changé du tout au tout depuis l'année passée. À la rentrée en septembre elle avait retrouvé un gamin aux antipodes de celui qu'elle avait quitté au mois de juin. Constamment dans la lune, il ne jouait pratiquement plus avec ses camarades, s'était même déjà battu avec des plus grands et répondait parfois aux enseignants. Ses résultats scolaires n'avaient jamais été ceux d'un excellent élève mais il avait toujours eu de la volonté à revendre. Il semblait maintenant ne plus se sentir concernée par la moindre leçon ; seuls les mathématiques l'intéressaient encore, mais elle sentait que c'était plus par défi et par amour d'une certaine logique qu'autre chose.
Elle laissa les autres enfants entrer en classe avec le concierge pour les surveiller et ouvrit son parapluie pour retourner dans la cour chercher le récalcitrant. Elle ne savait plus comment le prendre : elle avait d'abord supposé des soucis à la maison, mais sa mère, enceinte depuis peu et fraîchement mariée, transpirait le bonheur et lui avait répondu avec un grand sourire qu'il n'y avait aucun problème. Apparemment il ne lui était pas venu à l'esprit qu'Olive pouvait se sentir rejeté par son mariage et la venue prochaine d'un petit frère ou d'une petite sœur. D'autant plus qu'il avait passé quasiment tout l'été chez ses grands-parents ; il n'en fallait pas forcément plus pour qu'un enfant s'imagine que sa mère ne voulait plus de lui.
Mais, après discussion, Olive lui avait assuré que non, il n'y avait aucun problème avec sa maman.
« Bon, ça suffit maintenant ! Olive, quand la cloche sonne on rentre, on ne reste pas sous la pluie à fouiller dans les feuilles mortes ! Regarde un peu l'état de ton pantalon et de tes chaussures...
- C'est pas grave, fit le gamin en haussant les épaules. Je vais chez mamie ce soir, elle dit que c'est normal de salir ses vêtements sinon ça sert à rien d'en mettre.
- Mais avant d'aller chez ta mamie tu vas revenir en classe, puis prendre la voiture et tu vas tout salir. Tu as pensé à ça ?
- Ben je peux rester dehors ? »
Pour ce qui était de faire une mine de chien battu, Olive était doué. Mais elle avait appris depuis longtemps à y résister.
« Non, Olive. Tu vas faire comme tout le monde, rentrer et te mettre au travail. Tu n'avais pas assez de la récréation pour remplir tes poches de marrons ? Qu'est-ce que tu vas faire de tout ça ? »
Ce disant elle le prit doucement par l'épaule pour l'entrainer vers le bâtiments. Par les fenêtres, tous les petits camarades de classe d'Olive les fixaient, collés à la vitre comme des moucherons.
« C'est des munitions, lança-t-il en ramassant un marrons de plus qui se trouvait sur son chemin.
- Des munitions ? Tu as l'intention d'attaquer qui avec ça, au juste ? demanda-t-elle sévèrement.
- Les fées, ce week-end, dans la forêt. Les fées sont méchantes, tu sais, maîtresse, fit-il sur le ton de l'évidence. Et chez mamie et papy, il n'y a que des châtaigniers. Les châtaignes sont pas très rondes, c'est moins facile de viser avec. Et on les mange, en plus. »
Ce jour-là, l'institutrice décida qu'elle n'avait pas envie de savoir.
little_bakemono : miroir
(Un beau spoiler comme on les aime, mais bon... je sais pas quand j'écrirai cette partie et finalement elle ne révèle pas tant de choses (et génère pas mal de questions je pense ;p))
Il s'était bien douté que ça n'allait pas vraiment lui plaire. Il savait bien que l'image qu'allait lui renvoyer le miroir lui ferait violence. Il ne savait pas vraiment à quoi il s'était attendu et se demandait encore si c'était pire ou mieux que ce qu'il avait vaguement imaginé. Après toutes ces années passées sans se voir dans une glace, pouvait-il avoir oublié à quoi il ressemblait ? Ou avait-il à ce point changé ?
Il s'appuya davantage sur le rebord du lavabo pour soulager sa jambe blessée. La douleur était lancinante et tapait jusqu'à l'aine ; ç'aurait été une bonne idée de retourner s'allonger, mais maintenant que son regard s'était accroché à celui de l'homme qui le regardait dans le miroir, il ne parvenait plus à l'en détacher.
Il fronçait les yeux dans la lueur crue du néon, ce qui faisait apparaître un pli sur son front. Il y avait des pattes de mouches aux coins de ses yeux et sa peau était patinée par la vie en extérieur. Il semblait avoir pris dix ans.
Mais peut-être était-ce le cas... il n'arrivait pas à se souvenir, à compter. Tous les hivers, tous les étés passés se ressemblaient. Plus de deux ans, de cela il en était sûr. Mais dix ?
Demander à Arnaud Chillier était hors de question. Parler était déjà une chose difficile et Chillier n'avait pas reconnu Olive Duschène en lui ; il comprenait d'ailleurs mieux pourquoi en observant son reflet. Les cheveux étaient longs, emmêlés en dreads de tailles et d'épaisseurs variables. Des feuilles mortes et des brindilles étaient prises dans la plupart, rehaussant l'effet sauvage de son apparence. Sa barbe avait poussé et n'était pas en meilleur état que ses cheveux.
Et puis, il y avait les bois. Il porta machinalement une main vers eux, ou plutôt vers ce qui en restait. Trop encombrants, trop larges et volumineux... pour pouvoir le soigner et le manipuler sans risque, Chillier et le docteur Robert avaient dû les couper. Heureusement ils n'avaient pas scié trop court : le pivot était intact, ils repousseraient au printemps prochain.
« Oh, vous êtes là ! »
Il tourna légèrement la tête, juste assez pour deviner la silhouette de Colette dans l'embrasure de la porte. Légèrement essoufflée, elle devait avoir trouvé le canapé vide et se demander où il était passé. Vu l'état de sa jambe, avait-il envie de dire, il était peu probable qu'il dépasse le jardin.
« Vous... avez besoin d'aide ? » demanda la femme d'Arnaud en désignant la cuvette des toilettes du regard.
Il secoua la tête pour toute réponse et se replongea dans l'étude de son reflet. Mais elle resta là, immobile, ne pouvant s'empêcher de le dévisager. Elle savait surtout qu'il n'arriverait pas à retourner jusqu'au salon sans son aide.
« Des ciseaux », prononça-t-il en portant une main à la masse de ses cheveux.
Colette cligna des yeux deux ou trois fois, surprise sans doute d'entendre le son de sa voix. Lui-même ne la reconnaissait pas à son oreille mais il s'y était attendu.
« Non », fit-elle, finalement.
Il tourna la tête vers elle, les sourcils légèrement froncé.
« Vous retournez vous allonger. Quand votre jambe ira mieux ce n'est de toute façon pas d'une paire de ciseau dont vous aurez besoin, mais d'un bain anti-puce et d'une tondeuse à gazon. Je m'en occuperai, vous avez ma parole. »
Il eut un reniflement moqueur. Soudain, il était très facile de comprendre pourquoi Arnaud Chillier avait quitté sa Bretagne natale pour elle. Il accepta son épaule pour retourner au canapé, après un dernier regard au miroir.
Se réapproprier son image, prononcer un mot... peut-être était-ce le début d'une nouvelle manière de vivre sa drôle de vie.
Je me fais pas d'illusion pour demain, mais j'espère que ça ira mieux ce week-end. En fait je crêve de trouille rien qu'à regarder la liste des travaux que j'ai à faire pour la HEP et qui s'allongent de jour en jour!! o_O