Artiste :
flo_neljaTitre : Le bois enchanté
Fandom : Originale
Rating : R, avec vocabulaire fleuri
Genre : Conte grivois, humour, het
Nombre de mots : ~2500
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frudule Il était une fois une jeune fille de riche famille. La maison de son père était grande et luxueuse, et son fiancé, un ami de ses frères, lui en avait promis autant. Elle ne pouvait passer une heure sans que des servantes, veillant à son bien-être, s'attachent à ses pas.
Pourtant, ce jour-là, alors qu'elle revêtait une bien jolie robe, elle eut le malheur de jeter un oeil par la fenêtre entrouverte, et il lui sembla que le ciel bleu l'appelait.
Elle porta sa chaise près de la fenêtre, grimpa dessus, posa d'un pas hésitant son joli soulier sur l'appui. Ce fut beaucoup plus simple qu'elle l'aurait imaginé ; et en quelques instants elle fut dehors, ivre de la liberté de marcher seule.
Elle partit sans direction précise ; mais elle comprit bientôt que ses pas la dirigeaient vers le bois sacré.
C'est bien logique, pensa-t-elle. Nul n'est autorisé à y entrer, donc je suis certaine de n'y rencontrer ni mes frères, ni mon père, ni mon fiancé, ni quelqu'autre personne qui me ferait honte et me ramènerait chez moi ! Les paysans frustes n'osent pas y aller non plus, non plus que les voleurs rusés et les criminels sanglants. Je serai en sécurité là-bas, seule enfin ; et même si j'y croise quelqu'un d'autre, il verra que je suis, comme lui, libre et courageuse. Allons-y !
On disait, dans la ville, que ce bosquet était peuplé de légendes et de magie. Mais la demoiselle avait eu les meilleurs maîtres, esprits forts ou bons chrétiens, et pensait que tout ceci n'était que superstition. Ou peut-être, au fond de son coeur, aspirait-elle à rencontrer un charmant esprit de la forêt, en ce jour où tout semblait possible.
Pas de barrière pour garder le bosquet sacré, autre qu'un cercle de sel, que bien évidemment elle franchit sans peine.
Elle rampa sous la haie dispersée qui dissimulait le lieu sacré au regard, et rit quand elle s'y érafla le bras. Elle courut au milieu d'un champ de fleurs chatoyantes et s'y coucha, embrassant couleurs et parfums. Elle sauta à cloche-pieds par le guet de la rivière, se mouillant les pieds, et but dans l'eau fraîche. Elle entra dans un bois, suivit les sentiers, posa la main sur un arbre plus fort et plus vénérable que les autres, usé par les ans. Elle n'arrivait plus à se rappeler la dernière fois qu'elle avait touché un arbre.
Je suis sûre que si on interdit de venir ici, c'est parce que l'endroit est trop beau, pensa-t-elle. Soit parce qu'ils veulent se le garder pour eux, soit juste parce qu'ils aiment priver les gens des beautés de la nature !
Elle n'avait aucune idée de l'identité des "ils" dont elle parlait, mais cela lui plaisait de rejeter sur quelqu'un son propre regret de n'être jamais venue ici avant cette fois.
Enfin, elle fut fatiguée de gambader, et s'assit sur une touffe d'herbes qui lui sembla juste faite pour elle, douce et confortable. Elle s'étira, offrant au soleil sa gorge et ses bras blancs. Puis elle arrangea sa coiffure, qui avait bien souffert, et commença à y tresser des fleurs. Elle était jolie. Elle le savait.
Derrière elle, elle entendit un bruissement de feuilles. Par curiosité, elle se retourna ; puis elle poussa un hurlement.
Il n'était même pas à deux mètres d'elle. Comment avait-il fait, rêvait-elle donc tant pour qu'il puisse être venu si proche sans qu'elle entende rien ? Et cette odeur de musc, pouvait-elle donc être couverte sous le parfum des fleurs ?
Il était grand, ses jambes étaient velues comme celles d'une bête, sa tête coiffée de deux cornes semblables à celles du démon, son corps maigre et musclé, son sexe, oh...
En un instant, elle fut sur ses pieds et courut de toute ses forces. Dans la direction opposée, évidemment.
"Reviens, ma fraîche colombe !" entendit-elle clamer dans le vent. "Ma queue se dresse déjà rien qu'en voyant voler tes cheveux, en contemplant la blanche peau de tes seins ! Oh, je te donnerais bien du plaisir, ma belle ! Mes mains sont habiles, mon dard est un guerrier imposant et vaillant qui n'a jamais failli ! Comme il te besognera, longuement, vivement..."
Furieuse de s'être laissée déranger dans sa retraite champêtre, la jouvencelle se retourna, voulut lancer "Tu dis ça comme si c'était une bonne chose !"
Malheureusement, l'être monstrueux crut peut-être qu'elle avait changé d'avis. Ou, au contraire, il comprit enfin qu'elle ne reviendrait pas. En tout cas, il se lança à la poursuite de la jeune fille, et ce n'étaient pas ses jambes de bouc qui le retardaient, bien au contraire.
Poussant un cri, elle partit plus vite encore que la dernière fois. Comment pouvait-il insister de façon si inconvenante ? Les chevilles de la demoiselle se tordirent, une douleur lui transperça le côté, elle crut que ses poumons allaient exploser. Arrivée au grand arbre, elle s'effondra, entre deux racines.
Il est suffisamment large, pensa-t-elle, désespérée. Il faut que je me cache derrière, et que je tourne autour dans l'autre sens quand cette créature passera là... Elle n'avait pas totalement confiance dans ce plan, voire pas du tout, mais il était le seul auquel elle pouvait penser qui lui permettait d'arrêter de courir, aussi elle n'avait pas vraiment le choix.
"Ah, si cet arbre pouvait me dissimuler suffisamment bien..." soupira-t-elle à voix très basse.
"En es-tu sûre ?"
Elle sursauta d'horreur. L'avait-il retrouvée ? Non, ce n'était pas la même voix, plus grave encore, plus lente... Peut-être était-ce de l'aide potentielle ?
"Qui êtes-vous ?" murmura-t-elle.
"Je suis l'arbre, bien sûr. N'est-ce pas sur moi que tu comptais."
"Si, si !" s'exclama-t-elle, délirante de joie, et rangeant pour plus tard dans un coin de son esprit le fait avéré qu'un arbre n'avait pas de bouche, ni aucun autre moyen de communiquer.
"Et je m'étonnais de ce choix. Après tout, ma fille, son phallus est délectable, volumineux et expérimenté. Moi-même, si, hélas, les trous dans mon tronc n'étaient pas si vieux et moisis..."
Espèce de vieil arbre pervers, avant envie de s'exclamer la jeune fille. Mais elle avait en elle du bon sens et de l'hypocrisie, aussi sa voix ne sonnait-elle presque pas énervée quand elle répondit "Je sais. Il m'a déjà expliqué. Toujours est-il, messire l'arbre, que je suis fiancée et j'ai d'autres projets ; m'aiderez-vous ?"
"Si tu le désires, ma fille."
La jeune fille aurait embrassé l'arbre si elle n'avait pas eu des doutes quant à sa pureté.
"Je te ferai don de mes feuilles ; elles voleront autour de toi et te déroberont à sa vue."
Cela semblait très peu plausible ; même si, grâce à ce déguisement, il ne la reconnaissait pas, l'être serait probablement intrigué par un amas de feuilles volantes. Mais après tout, s'il fallait s'en tenir aux raisonnements logiques, les arbres qui parlaient étaient très improbables aussi. Notre héroïne remercia donc vivement et continua son chemin, sans courir, elle avait donné, mais en marchant tout de même le plus vite possible.
Elle commençait à se rassurer, quand elle entendit, pas derrière elle, non, pas tout à fait devant elle non plus, une voix qu'elle connaissait.
"Ma toute pulpeuse, où es-tu ? Je ne te vois plus, et pourtant, j'entends ton souffle coquin, et le bruit de tes pas ! Ô, comme avec joie je me laisserais piétiner par ces petits pieds-là, puis mes mains remonteraient le long des cuisses, jusqu'à la caverne des délices... rien que d'y penser, mon braquemart en frétille ! N'aie pas de craintes, car des multiples jeunes filles ou femmes qui l'ont connu, chacune l'a aimé comme on aime le ciel."
La jeune fille pâlit. Ah, il trouvait ses pieds petits, pensa-t-elle ! Elle allait lui montrer qu'ils étaient plus légers qu'il pouvait le penser, et que d'ailleurs elle n'avait pas du tout envie de lui marcher... enfin si, mais pas du tout comme il l'imaginait !
Elle avança donc à tout petits pas, sur la pointe des pieds ; et quand il passait trop près, elle s'immobilisait totalement. Plusieurs fois, elle l'aperçut sur le chemin, à travers les feuilles fines et effectivement il ne la voyait pas, grâce à la bénédiction de l'arbre. Mais la jouvencelle n'en était pas moins vivement effrayée. De si près, elle pouvait voir le sexe maintenant pleinement dressé de la créature - un faune, se rappela-t-elle, faisant orgueil à son maître de mythologie classique en pouvant étaler un savoir inutile en toutes circonstances. Et si on pouvait lui reprocher beaucoup de choses, en premier lieu de n'avoir aucune courtoisie envers les jeunes filles, au moins il n'avait pas menti sur un certain point particulier...
Enfin, il s'éloignait, et elle reprenait sa route. La vue de la rivière lui fit d'abord plaisir ; cela voulait dire qu'elle ne s'était pas encore perdue, et qu'elle allait pouvoir rafraîchir ses lèvres desséchées.
Cependant, une fois la première joie passée, penchée au-dessus de l'eau, elle réalisa son nouveau problème.
"Jamais je ne pourrai passer cette rivière sans faire gicler l'eau..." soupira-t-elle. "Il m'entendra forcément, et il viendra en courant ! Ah, si l'eau pouvait taire mon passage."
"Cela doit pouvoir se faire, ma soeur." lui répondit une voix douce et cristalline ; et la jeune fille commençait à comprendre le principe. Elle se tut cependant un instant, le temps d'être certaine que c'était bien la rivière qui lui parlait, et non quelque poisson en train de prendre son bain. La confusion aurait été horriblement embarrassante.
"Dame rivière, dit-elle avec juste un peu plus de respect qu'elle en ressentait effectivement, "je vous serais éternellement reconnaissante si vous pouviez m'aider à fuir cet être vulgaire !"
"Est-ce vraiment ton souhait, ma soeur ? Tu me sembles pleine de vitalité. Moi-même, je ne m'estimerais pas souillée si sa semence parfumée se mêlait à mon eau pure..."
La jeune fille retint à la fois un long soupir de désespoir et une exclamation d'horreur ; parce qu'elle ne voulait pas être entendue, et aussi parce que cela aurait pu vexer la rivière. Ele n'en pensait pas moins, ceci dit.
"Mais moi," expliqua-t-elle d'une très petite voix, "je ne m'intéresse pas à ce genre d'activités, et n'aviez-vous pas mentionné un moyen de m'aider à fuir ?"
"Ma soeur, je te ferai don du bruit de l'onde ; en couvrant tes pas et les battements de ton jeune coeur, il empêchera ton poursuivant de t'entendre.
La jouvencelle n'était pas assurée que l'entourer d'un bruit persistant, (qui en plus ne semblerait pas très naturel dès qu'elle se se serait éloignée de la rivière, c'est-à-dire pendant la plus grande partie du chemin) soit la meilleure façon de la soustraire aux oreilles pointues du faune ; mais après tout, le coup des feuilles mortes avait marché, ou à peu près, alors qui était-elle pour faire un commentaire ? Ce n'était pas comme si elle pouvait avoir un autre choix, de toute façon...
Elle se confondit en remerciements, et traversa effectivement la rivière sans encombre. Puis, le coeur plus léger, elle poursuivit son chemin jusqu'à l'endroit par lequel elle était entrée dans le bois interdit.
Cependant, alors qu'elle avançait d'un bon pas à travers le champ de fleurs, elle se figea en entendant une voix familière.
"Ma tendre agnelle apeurée, montre-toi ! Je ne te vois pas, je ne t'entends pas, et pourtant, je sens l'odeur de ton coquillage d'amour, gonflé d'elixirs intimes, doux comme le plus juteux des fruits ! Rassure-toi, je saurai le traiter avec la ferveur et la dévotion qui lui conviennent, je le comblerai, et il le sait bien, il m'appelle ! Ne fuis plus la félicité, cède à ton désir !"
"Je ne désire rien du tout !" s'exclama la jeune fille rougissante et furieuse ; puis elle posa la main sur la bouche, horrifiée. Heureusement, le bruit de l'onde la protégeait toujours, ce qui empêcha le faune d'en rien entendre.
C'est alors qu'elle entendit les fleurs tout autour d'elle lui parler. "En es-tu certaine, tantine ?"
Ca y est, maintenant, elle était leur tante. Etait-elle si vieille que ça ? Enfin, cela aurait pu être pire, elles ne l'avaient pas appelée mère, au moins. Et puis, avec un peu de chance, elles essayaient d'aider, elles aussi...
"Oui, j'en suis sûre." répondit-elle, la voix aussi ferme qu'elle pouvait. "J'ai l'intention de rentrer chez moi le plus vite possible, sans avoir eu le moindre commerce avec cet importun."
"Pourtant, tantine," continuèrent les fleurs, "il est si grand et si fort, et il sent bon ! S'il voulait nous écraser de son corps, nous ne refuserions assurément pas !"
Mais pourquoi tous les habitants de ce bois étaient-ils des pervers ? Et surtout, pourquoi voulaient-ils tous la marier avec le pervers numéro un ? N'étaient-ils pas capable de voir le problème ? Les problèmes ? Elle ne savait pas bien lesquels, mais elle était sûre qu'il y en avait plusieurs.
"Ecoutez," essaya-t-elle d'expliquer calmement et patiemment, "il a des jambes de... il est de la famile des chèvres ! Qui vous mangent !"
"Mais ce n'est pas une chèvre." expliqua l'une d'entre elle, avec tout autant de calme et de patience - qu'elle trouva assez condescendants, sur le coup.
"Peut-être !" s'exclama-t-elle, perdue. "Je ne sais pas ! Tout ce que je sais, c'est que si cela continue, il va sentir mon odeur, il va finir par me trouver, et... et je préfère ne pas savoir, ensuite."
"Alors, tantine," dirent les fleurs, "nous te donnerons notre parfum, pour qu'il t'accompagne, te protège, et cache l'odeur de ton envie !"
L'odeur de quoi ? voulut-elle protester. Mais elle avait autre chose à penser ; si les fleurs, malgré leur discours enfantin, étaient aussi efficaces que l'avaient été l'arbre et la rivière, elle pouvait maintenant rentrer chez elle en parfaite sûreté.
Elle retrouva la haie par laquelle elle était venue ; le faune, maintenant, semblait totalement perdu, et se lamentait d'une voix qui parvenait faible à ses oreilles.
"Où donc as-tu disparu, ma beauté aux formes divines. Ah, comme mon coeur et mon bâton d'amour s'enflent quand je pense à toi ! Comme il me plairait de prendre tes seins dans mes mains pour t'enseigner les joies des corps !"
Puis elle marcha enfin à travers les poignées de sel jetées en travers du chemin ; à cet instant, les feuilles cessèrent de tourbillonner autour d'elle, le bruit du ruisseau de la suivre. Peut-être sentait-elle encore un tout petit peu les fleurs, pour s'être roulée dedans.
Elle rentra chez elle en hâte. En chemin, elle aperçut son fiancé, et se mordit les lèvres de gêne, même si cela aurait pu être pire : cela aurait pu être son père ou ses frères.
Très poli, très distant, il s'inquiéta pour ce qui pouvait arriver à une jeune fille seule, et offrit de la raccompagner chez elle, sans lui poser de questions.
Avait-il déjà entendu parler des joies des corps ? se demanda-t-elle. Dans les détails ? S'y connaissait-il en félicités et en ce genre de choses ? Evidemment, le lui demander aurait été faire preuve d'autant d'impudeur que le... que toutes les créatures de ce bosquet.
Elle se prit à penser au jour où elle l'apprendrait, avec une impatience nouvelle, et, à bien y penser, un peu d'inquiétude et même un brin de regret.