Le silence de l'absence

Feb 11, 2008 16:09


Titre : Les silences de sa défonce
Auteur : Anadyomède
Personnage : Andromeda Black, Narcissa Black
Catégorie : Croisade, Les soeurs Black  "Ma coupable indifférence"
Rating : G

Il fait très noir aujourd’hui. Mes pas silencieux me portent lentement loin de tous et quand je lève les yeux, l’étendue du ciel me fait peur. Elle porte le lourd fardeau d’un passé que je m’apprête à rayer mais cette vision obscure m’y ramène. L’air est parfumé d’odeurs légères où se mêlent cigarettes et mélancolie, et c’est une étrange sensation qui me prend à la gorge.

Je pars. Enfin, je crois. Je ne sais plus tout à coup. Où je vais, pour qui, pour quoi ?

Il fait trop noir et je réalise alors que je suis seule dans la nuit, perdue au milieu d’un jardin qui a longtemps abrité mes rêves d’enfant parmi les géraniums et les roses. Je ne suis plus une gosse maintenant, c’est fini. Mes yeux sont grands ouverts et contemple la réalité : dans quelques minutes, je ne serais plus personne et mon nom ne se rattachera plus à aucun parent.

Cette odeur me brûle le cœur. Je sais d’où elle vient, je sais de qui elle s’échappe et qui tente de la retenir. Je sais que Narcissa est en haut avec les autres mais qu’elle ne dort pas.

Ma toute petite Cissy…

Alors ça me prend subitement. Je repose mon sac par terre, mes certitudes, mes promesses envers moi-même et fais marche arrière. Le bois ancien des escaliers craque sous mes pas rapide et tandis que je rentre chez moi, je me rend compte que cette maison me happe et je doute de pouvoir un jour en sortir.

J’ai si peur qu’elle me détruise sans que je n’aie eu le temps de m’enfuir mais j’ai aussi si peur qu’elle efface mon nom de son histoire sombre.

Je ne cours pas. Les odeurs me conduisent à ma sœur, je ferme les yeux et j’aimerais croire qu’en me voyant, Narcissa se redressera et qu’une flamme s’allume au fond de ses yeux vides. Je m’arrête. J’espère. Fais un vœu, refais d’autres promesses. Est-ce que j’y crois moi-même ? Mais je me rattache à cette idée. Les cigarettes m’appellent. Le temps qui tantôt se traîne puis m’entraîne subitement dans ses rouages m’essouffle. J’ai le cœur tremblant mais les yeux secs quand j’arrive devant la petite porte en bois qui me sépare de Narcissa.

Mes doigts tremblent sur la poignée. Ils hésitent avant de l’abaisser.

Alors j’entre, doucement, et j’ai envie de dire à la petite : « Cissy, lève toi, je pars cette nuit, je pars vivre loin, viens avec moi, laisse moi chasser tes démons. On va vivre, chérie, je te le promets, on va vivre loin ! »

Mais elle ne me jette pas un regard et les mots me restent au bord des lèvres, brûlants mais vaincu par cette barrière invisible qu’est le silence dans lequel la petite est plongée. Ce silence si grave que je n’ose le briser. Il veut tout dire. Il me crie qu’il n’y a rien à dire.

Narcissa a les yeux fixés sur les moulures blanches du plafond, une cigarette dans une main, un verre à l’autre. Et ses traits délicats sont figés en la grimace habituelle que provoque cette douleur recherchée.

Je la regarde mais je n’arrive pas à faire un pas. Elle ne m’entend pas, je n’existe déjà plus depuis longtemps je crois. Alors je referme la porte, lentement, en m’imprégnant une dernière fois de la beauté acide de cette scène. La petite ressemble à une morte et ses cheveux volent au vent.

Je sais ce qu’elle prend, je connais sa façon discrète de se détruire. Ses silences laissent place à sa défonce, je ne l’aiderai pas. Je ne l’ai jamais fais : j’ai trop peur de m’y perdre avec.

Je veux partir. Pour de vrai cette fois. Les larmes troublent ma vision, je tâtonne à la recherche des escaliers, les couloirs obscurs happent mes pas et je sens sur mon dos les regards brûlant de mes ancêtres. Pourtant, ils ne disent rien. Ils pourraient crier des insultes et prévenir mes parents, mais ils se contentent de me fixer en silence, sans bouger. Ils me regardent fuir dans la nuit noir comme une voleuse, me tournant le dos à moi-même, à ma vie, à ce en quoi j’ai cru et à ce que j’ai été.

Il n’y a personne pour me retenir. Cette maison n’est plus la mienne. Elle ronge les gens qui respirent son air, dévaste l’amour et sur son plancher, je pourrais presque voir le sang qu’elle a fait couler.

Je pars, je me sauve seule. Je retrace ces chemins que j’ai déjà fais tant de fois, en m’interdisant de regarder en arrière.

Le vent frais sur mon visage fait du bien à mon cœur. Mon sac est là, il m’attend tranquillement au milieu des fleurs. Ted m’attend quelque part. Avec du bonheur dans tous les tiroirs.

En marchant, je laisse Narcissa à son destin. Je ne suis pas assez courageuse pour la sauver avec moi. Et quand je regarde mes mains, je pourrais presque voir son sang sur mes doigts.

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