(no subject)

Nov 02, 2007 19:54

 

Grindelwald savait que Voldemort viendrait un jour, et qu’il le tuerait. Quand exactement, il n’en avait aucune idée, et de toute façon il s’en fichait. Il n’avait pas peur de mourir, plus maintenant, même s’il n’avait pas vraiment prévu que les choses se passeraient ainsi. Il pensait que la grande Faucheuse viendrait lui rendre visite bien plus tôt. Il avait vite compris cependant que parier sur la ponctualité de cette vieille amie était futile.

Au tout début, quand était née en lui cette haine des Moldus, il avait envisagé de mourir en martyr. C’est une belle fin quand on est jeune, et quand la cause est juste, on finit dans les livres d’histoires. Or sa cause était plus que juste. Se sacrifier pour un noble combat, c’est la meilleure manière d’être immortalisé. Mourir, mais pas vraiment. Ainsi, il n’avait plus de raison de craindre le grand voyage : il ferait un beau pied de nez à Cerbère en traversant l’Achéron. Seulement, il s’était vite rendu compte à quel point cette façon de pensée était puérile. Même les livres d’histoires vieillissent et se perdent, les statues s’écroulent et sont remplacées par de nouvelles. Cela lui laisserait un délai, mais il finirait par disparaître quand même, sans aucun espoir de retour, et Hadès rirait bien de sa témérité.

Sa mort, il l’avait donc reportée à jamais. On n’est jamais mieux servi que par soi-même : puisque les autres, historiens et artistes, ne pouvaient pas lui accorder l’immortalité, il s’en chargerait lui-même. L’infini ne devait pas être si inaccessible que cela, puisqu’il l’entourait depuis toujours. L’infiniment grand de l’univers l’englobait entièrement, l’infiniment petit des particules le constituait intégralement. Sa vie devrait donc pouvoir tendre vers cette éternité sans problème. N’était-il pas le plus doué des sorciers de sa génération ? Il avait exhumé les vieux grimoires de magies noires, et il avait trouvé ce qu’il cherchait : la pierre philosophale, les Horcruxes…  L’une d’elles lui paraissait particulièrement séduisante : les Reliques de la Mort, les réunir suffirait à le rendre maître de cet élément qui le fascinait et le terrorisait également.

Il avait essayé, et cette quête lui avait révélé sa propre fragilité dans toute sa terrifiante profondeur. Le choc avait été brutal. Rechercher l’immortalité était mortel, au sens propre du terme. Certes, l’aventure en elle-même était risquée : il n’était pas le seul à la poursuite des Reliques. Mais surtout, cette recherche était inutile : à chaque fois qu’il frôlait la mort en cherchant ces sources de jouvence, il comprenait un peu plus qu’on ne peut repousser indéfiniment notre trépas. Rien, ni personne n’en est capable. Sa propre disparition était inévitable, et sa recherche vaine. Rien n’était éternel, pas même l’amour qui pouvait unir deux personnes. C’était Albus en personne qui l’avait battu : il n’y avait pas de meilleure preuve qu’une partie de sa vie venait de mourir et posséder la Baguette de Sureau ne l’en avait pas prémuni. Toute chose, concrète ou abstraite, est éphémère, et il n’y a aucun moyen d’en réchapper. Les hommes et leur mémoire, tout finit par retourner à la poussière.

Les années passées enfermé à Nurmengard l’avaient presque rendu fou à force de ressasser cette évidence. Il ne serait ni martyr, ni immortel, ni même un héros. Il crevait sur pied, comme le dernier pouilleux qui puisse exister, et non pas comme un grand sorcier craint ou adoré. Finalement, la mort n’aurait pas grand-chose à emporter. Au moins, il avait réussi à la priver du plaisir de l’arracher à la vie, si tant est qu’il en eut jamais une. Il avait même rit au nez de son envoyé. Et alors ? Le Seigneur des Ténèbres lui-même craignait cette bête tapie dans notre ombre, qui nous suit depuis notre naissance, qui ne se laisse jamais oublier,  à moins que cela ne soit pour frapper plus violemment quand on ne s’y attend plus ?

Et il riait encore. Tout cela était ridicule. Tellement ridicule. C’était sans doute cela la démence. Cette mort qu’il avait tant fui, maintenant elle se faisait désirer. Absurde. Il n’existe déjà plus, il n’est qu’une mâchoire édentée qui s’esclaffe à l’infini.

« Vas-y, tue-moi ! Mais cela ne t’apportera pas ce que tu cherches ! La Baguette ne sera jamais tienne ! »

Non, un homme qui a peur de la mort ne pourra jamais en devenir le maître. Lui, il a choisit de se soumettre. Adieu grandeur et rêve de gloire ! Le jet de lumière verte le frappe en pleine poitrine. Il voudrait faire un geste. Pas pour se protéger : pour l’accueillir. Mais son corps sans vie a déjà traversé le mur pour s’élancer à toute vitesse contre le sol, quelques dizaines de mètres plus bas.

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