Monsieur Doge,
Vous vous demandez certainement la raison de cette missive,
après notre dernière prise de bec et le fait que nous ne nous aimions guère, ni l'un ni l'autre. À vrai dire, j'en ignore moi-même la raison profonde, puisque la logique seule nous dicterait soigneusement de nous éviter. Le fait que vous soyez l'unique interlocuteur neutre de mon entourage, le seul être encore pur, non-impliqué dans les diverses intrigues et complots qui sévissent de nos jours pourrait être invoqué, ou encore l'animosité et la méfiance que vous entretenez soigneusement à mon sujet.
Cette animosité me plait, allez savoir pourquoi.
Peut-être suis-je un peu masochiste. Ou sadique de vous imposer ma présence constante, allez savoir... les deux, probablement. Pour ma part, je ne m'en soucie guère, le fait étant que j'ai cette envie étrange de prendre la plume et de vous écrire. Ce que je fais donc.
Vous ne m'avez pas répondu pour la partie d'échecs que je vous proposais... j'invoquerai à votre avantage la distraction des préparatifs du voyage, plutôt que la simple volonté de ne pas me répondre. D'ailleurs, je dois dire que j'attends toujours votre arrivée à Poudlard avec impatience afin que vous puissiez constater de vos propres yeux que "l'âme d'un mage aguerri" se trouve bien en moi malgré mon absence apparente de magie.
Dites-moi, très cher, vous est-il déjà arrivé de devoir sevrer un compagnon de votre présence afin de préparer quelque chose de la plus haute importance pour lui (ou elle, que sais-je) ? Que feriez-vous si ce compagnon vous reprochais votre absence, mais que dans son intérêt, vous deviez garder pour vous les informations concernant votre activité et qu'il vous était impossible de vous dérober à l'un comme à l'autre ? Je m'interroge...
Intrigué,
Moritz Morgenschnee