[Fic] Tout a été dit, Bane Seed, Morgane+Merlin [de MoustiCat, pour Yggdrasil]

Aug 28, 2022 20:47

Titre : Tout a été dit
Auteur : MoustiCat (Participant.e 22)
Pour : Yggdrasl (Participant.e 9)
Fandom : Bane Seed
Persos/Couple : Morgane, Merlin
Rating : G
Disclaimer : Bane Seed appartient à Fanny André
Prompt : Merlin vient dans l’appart afin de voir Bane, qui est absente, et ne trouve que Morgane. Il voudra donc en profiter pour parler sérieusement avec elle mais ils se disputeront et les pouvoirs de Morgane vont disjoncter et les expédier dans un lieu isolé. Ils n’auront aucun moyen de repartir et resteront coincés ensemble pendant plusieurs heures, Merlin en profitera donc pour imposer à Morgane d’avoir une discussion sérieuse.


Une fois n’était pas coutume - ou pas -, Merlin outrepassa les règles élémentaires de politesse et se matérialisa dans le salon au lieu de la devanture extérieure du logement de Bane. Le sujet n’était pas si pressé mais il n’aimait pas attendre ni perdre son temps pour des futilités. A l’intérieur, il plissa les yeux. Le soleil se couchait et plongeait la pièce dans la pénombre. Les quelques rais de lumières soulignaient les contours des meubles et allongeaient les ombres de chaque recoin. Rien ne bougeait ni rien ne vivait. Cependant, il n’était pas seul. Des sons de chocs métalliques et d’autres ustensiles dénonçaient la présence d’une personne dans la cuisine. Il s’y dirigea. Une auréole de lumière entourait l’ouverture, confirmant ses soupçons. Quelqu’un râla. C’était une voix féminine mais pas celle de Bane. Il se douta vite de son identité et avala les derniers pas restants jusqu’à rejoindre l’encadrement de la porte. Son regard tomba sur l’occupante de la pièce.
Il s’agissait bien de Morgane. Elle s’acharnait sur une sorte de pâte lisse en maugréant, tapant parfois un bol métallique dans son mouvement vif avec son rouleau à pâtisserie. Un sourire ironique se dessina sur ses lèvres alors qu’il calait son épaule contre le chambranle. Bane allait être ravie lorsqu’elle rentrerait ; son plan de travail était un véritable charnier. S’y étalaient des bols et autres saladiers, des planches et des cuillères sales, des pots et des briques ouvertes, ponctués çà et là de trainées de farine et de taches de liquide ou de pâte claire. La jeune femme titubait un peu sur place, maladroite, aussi Merlin supposa qu’elle était un peu ivre. Une vision devenue plutôt coutumière depuis un certain nombre d’années. Ou de siècles.
Il croisa les bras tandis qu’il se perdait dans ses pensées. Combien de temps, à vrai dire ? Cela faisait plus d’un millénaire que leur relation n’était pas au beau fixe…
Était-ce le hasard ou autre chose, Merlin ne le sut jamais, mais Morgane finit par le repérer. Elle se crispa, grimaça, puis ses sourcils se froncèrent. Elle se redressa, se désintéressant de son œuvre en cours.
- Qu’est-ce que tu fous là ? grogna-t-elle, mauvaise.
Merlin fit la moue.
- Habituellement, on commence par dire bonjour, ou bonsoir.
Morgane ne releva pas, indifférente. Il retint un soupir et abandonna.
- Je venais voir Bane.
- Elle n’est pas là.
- J’ai cru remarquer. Sais-tu quand elle rentre ?
Morgane haussa les épaules et se détourna de lui pour reprendre son pétrissage. Comme Merlin ne fit pas mine de bouger, elle se força à répondre :
- Elle en a sans doute pour un moment. Plus d’une heure au moins, je dirais.
- Dorian ?
Une fois encore, elle se contenta d’un geste nonchalant en guise de réplique. Il n’insista pas. C’était sans doute le cas. Leurs sorties se faisaient plus régulières, ces derniers temps. Cela se comprenait.
Il hésita. Il était évident qu’il n’était pas le bienvenu et Morgane faisait tout pour qu’il s’en rendît bien compte. Cependant, cela le dissuadait d’obtempérer. Pas tellement par esprit de contradiction ou pour l’embêter, mais parce que cette situation que Morgane maintenait entre eux l’exaspérait. Peut-être leur faudrait-il en discuter… mais comment procéder, alors qu’elle y était si fermée ?
- Dis, tu comptes dégager un jour ?
- Pardon ?
L’intervention l’extirpa de ses réflexions. Morgane le fixait d’un œil revêche.
- Dégage, insista-t-elle sur un ton mordant. Tu n’as plus rien à faire là.
Il ne bougea pas. Elle se raidit davantage.
- En fait, si, rétorqua-t-il. Je pense que nous devrions discuter.
Un claquement sonore accueillit son affirmation. Les mains de Morgane avaient quitté l’ovoïde pâteux aux nombreux reliefs de doigts pour frapper le plan de travail dans un geste inconscient. Elles se serrèrent jusqu’à en blanchir les phalanges. Ses lèvres étaient si pincées qu’elles disparaissaient dans sa bouche.
- Cela fait des siècles que nous n’avons plus rien à nous dire, lâcha-t-elle d’une voix qui se voulait relativement neutre et maîtrisée, compte tenu de la colère qui grimpait en flèche. Maintenant, dégage.
- Non.
Elle fit volte-face, furieuse. Il contint un soupir, agacé par sa réaction. Était-ce une requête si dure à considérer ?
- Cesse de faire l’enfant, veux-tu ? Je ne parle que de discuter.
Elle ricana, d’un rire sans joie, rempli d’amertume. Il se tut aussi vite qu’il était apparu, conférant au silence qui s’ensuivit une certaine lourdeur. Cependant, ce dernier cessa vite, car Morgane pointa le mage d’un doigt rageur et cracha :
- Je fais l’enfant ? Tu ne t’es pas regardé ! Ça a toujours été la même chose, avec toi !
Sur l’instant, il s’alarma à la vue de la lumière qui commençait à luire autour des mains de la jeune femme, puis se rasséréna. La lueur était encore faible, et puis il était bien plus puissant qu’elle. Il saurait gérer en cas de dérapage.
Il n’était pas dupe, sa colère en était responsable. Il l’estima disproportionnée, compte tenu des circonstances. Il n’avait pas encore eu le temps de dire grand-chose.
- Morgane…
- Tais-toi ! hurla-t-elle, et sa magie réagit et explosa dans son exclamation en une sphère lumineuse qui enfla, jusqu’à tout faire disparaître autour d’eux.
Elle fut si forte que Merlin plissa les yeux et ramena une main devant eux pour s’en protéger. Il songea à procéder pour la dissiper mais n’en eut pas le temps ; la lumière cessa brusquement. Le duo cligna des yeux, hébété. L’obscurité était totale et les rendait aveugles, pourtant l’angoissante certitude qu’ils ne se trouvaient plus dans la cuisine de Bane grandissait en eux. Une odeur minérale imprégnait l’air, mélange d’humidité et de roche. De temps à autre, une goutte chutait dans un bruit mat ou sourd, et un faible glougloutement leur parvenait de loin. Autrement, c’était le silence. Ils pensèrent aussitôt à une grotte, ou plutôt à une cavité souterraine agrémentée d’une collection d’eau. Le sol sous leurs pieds était un peu bosselé, quoique lisse, et surtout glissant. Morgane faillit chuter mais parvint à rétablir son équilibre en redisposant ses pieds. Elle tendit le bras avec prudence jusqu’à ce que ses doigts rencontrassent une surface lisse et suintante. Elle en suivit les contours pendant quelques secondes, presque caressante. Cela semblait former une colonne de roche.
Merlin pesta.
- Un peu de lumière ne nous fera pas de mal.
Morgane se garda du moindre commentaire, agacée. Une petite sphère de lumière apparut entre eux. Douce, elle ne les éblouissait pas mais elle éclaira une surface de plusieurs mètres autour d’eux. Leur impression se vit confortée ; il s’agissait bien d’une salle souterraine aux murs aux teintes orangées, dont ils apprécièrent les dimensions lorsque Merlin envoya sa boule longer les parois pour les visualiser. Peu large mais assez longue, elle était peu haute. Une moitié était occupée par un plan d’eau obscur et tranquille, que rien ne troublait si ce n’était les quelques gouttes qui y tombaient. Un petit cours d’eau serpentait parmi des blocs de roche lisse et venait l’alimenter. Du plafond se dressait tout un assortiment de stalactites de tailles et de formes diverses ; plusieurs concrétions rejoignaient le sol pour former de véritables piliers dentelés. Une forêt de stalagmites les accompagnait. Pas d’être vivant visible ; peut-être y en avait-il dans l’eau, demeurant en profondeur, ou des êtres trop petits pour qu’ils les aperçussent dans leur observation rapide des lieux. Ils ne repérèrent qu’une seule sortie, à quelques mètres dans leur dos. Le tour effectué, la sphère revint à leurs côtés.
Morgane considéra tout cela avec une relative inquiétude, puis avec colère. Ses pouvoirs étaient si instables, et la faute à qui ! Elle se tourna vers Merlin, une grimace éloquente ornant ses lèvres. Elle détestait dépendre de lui, mais elle n’avait pas le choix. C’était cela, ou tenter une remontée à pied et à l’aveugle, sans rien connaître de la disposition des lieux. Elle avait de grandes chances de s’y perdre. Cependant, s’il réclamait en retour qu’elle le suppliât, il pourrait toujours courir ; elle préférait encore tenter sa chance. Après un bon coup dans ses bijoux de famille, histoire de, par pure satisfaction personnelle. Certaines limites ne devaient être franchies, et elles étaient très minces le concernant.
Le visage de Merlin était sombre. Cela n’augura rien de bon.
- Je ne peux pas nous téléporter.
- Pardon ?
- Quelque chose bloque ma magie.
- Alors débloque-le ! N’es-tu pas le mage le plus puissant, d’après toi-même ? ironisa-t-elle.
Merlin ne releva pas et soupira. Il avait déjà essayé, sans succès. Il détestait ce sentiment d’impuissance que cet échec produisait en lui. Cependant, il devait s’y résigner, rien ne fonctionnait. Morgane le comprit. Elle rit et le railla, moqueuse :
- Ah, il est beau, le plus grand mage de tous les temps !
Ledit mage conserva le silence, passablement vexé. Il préféra ne pas lui retourner la rhétorique. La discussion virerait sur un terrain glissant.
- Je ne peux rien y faire, en effet, reconnut-il et, ignorant le rictus goguenard de sa collègue, il poursuivit : Cependant, le sort ne durera que quelques heures. Nous pouvons attendre.
Morgane perdit son sourire et s’indigna de la suggestion.
- Attendre plusieurs heures, enfermée ici avec toi ? Plutôt mourir !
Préférait-elle réellement la mort à sa compagnie ? C’était quelque peu blessant. Il tempéra en estimant que ce n’était, sans doute, qu’un élan mélodramatique de sa part pour marquer sa frustration.
- Tu peux aussi tenter ta chance et voir si cette issue aboutit, contra-t-il en désignant l’unique sortie du doigt. Avec ton léger état d’ébriété en plus de ta méconnaissance des lieux, cela risque d’être épique.
Au fond de lui, il espérait qu’elle ne le tenterait pas. Il n’était pas optimiste quant à ses chances de succès et il était conscient qu’il n’était pas en mesure de la raisonner si elle partait sur cette idée. Ce ne serait pas sa faute, certes, mais il n’aspirait aucunement à sa mort, surtout ainsi. Pourrir dans les profondeurs de la terre, perdue dans une galerie quelconque… Il n’aspirait pas non plus à la talonner pour empêcher une telle tragédie, ni à la distance qu’il devrait appliquer pour échapper aux éventuelles récriminations à son égard. Il pria pour qu’elle fît le choix qui l’arrangeait et qu’il voyait comme le seul valable.
Morgane conserva le silence tandis qu’elle réfléchissait, un peu abrutie par l’alcool. Elle finit par acquiescer.
- Soit.
D’un mouvement malhabile et un peu tremblant, elle s’assit et entoura ses genoux de ses bras. L’eau humecta le tissu sur son fessier sans susciter la moindre réaction chez elle. Lui préféra demeurer debout. Le silence s’installa entre eux.
Il réfléchit. C’était l’occasion rêvée. Bloqués dans un endroit pendant quelques heures, soit autant de temps à mettre à profit. Qu’elle ne se fâchât pas était illusoire, mais… Il se racla la gorge.
- Puisque nous avons du temps à tuer -
- Non.
- Tu ne m’as même pas laissé le temps de parler !
- Je n’en ai pas besoin. Tu veux ‘discuter’, encore, n’est-ce pas ? Discuter !
Elle secoua la tête, agitée d’une hilarité amère. Elle lâcha ses jambes pour le considérer, peu amène.
- Qu’aurions-nous à nous dire ? Tout a déjà été dit ! Tu m’as tout pris parce que tu n’es qu’un sale égoïste vaniteux ! Me voir développer mes pouvoirs et prendre une certaine indépendance vis-à-vis de toi a blessé ton orgueil, alors tu n’as rien trouvé de mieux à faire que de me les voler !
- Je -
- Et ne me sors pas une de tes pirouettes à deux balles ! Parce que ce ne seront même pas des excuses, n’est-ce pas ? Parce que non seulement tu ne regrettes rien, mais t’excuser, ce serait trop pour un être aussi imbu de toi-même que toi !
- Morgane -
- Ferme-la ! éructa-t-elle, prise dans son élan. Tu as prétendu m’aimer mais tu ne m’as jamais considérée comme ton égale ou ta partenaire, n’est-ce pas ? Seulement comme - comme quoi, en fait ? Va savoir ! Une sorte de passe-temps, comme Viviane ou Guenièvre ?
Les traits de Merlin étaient difficiles à déchiffrer. D’une certaine façon, il paraissait impacté par ce qu’elle disait, mais elle était incapable d’en jauger la tournure. Sans doute était-il seulement vexé de la mauvaise opinion qu’elle nourrissait à son égard. Comment voulait-il qu’elle le considérât autrement, de toute façon ?
Il ouvrit les lèvres mais elle le coupa dans son élan, appuyée par un geste de la main qui balaya son effort :
- Cela n’a plus aucune importance. Tout tourne toujours autour de toi, de toute façon. Que ferais-tu, après tout, te décider à me les restituer, si cela est possible ? Nous savons tous les deux que tu n’en feras rien. Tu n’as jamais rien fait pendant des siècles, alors pourquoi changer maintenant ?
Là encore, il ne manifesta aucune réaction. Il l’observait avec sérieux, et peut-être était-ce la meilleure attitude à attendre de lui. Qu’il ne se moquât pas d’elle et de ce qu’elle ressentait, qu’il chassait habituellement d’un revers de main. Quant à y réfléchir et se remettre en question, inutile d’espérer.
- Jamais je ne pourrais te pardonner pour ce que tu m’as fait, alors garde ta salive. Pour moi, tout a été dit. Nous, ça appartient au passé, un passé que j’abhorre, cracha-t-elle, venimeuse. Fais-toi une raison et trouve-toi quelqu’un d’autre au lieu de me harceler - tu as déjà su si bien le faire, après tout - ; parce que, me concernant, tu n’es plus rien à mes yeux. Tu n’es plus rien d’autre que le type qui a ruiné ma vie.
Elle se tut et s’humecta les lèvres dans un geste nerveux. Sa tirade avait fatigué sa colère qui diminuait, pour laisser place à une certaine lassitude. Pas qu’elle en nourrît qu’auparavant moins contre son homologue, loin s’en fallait ; elle en était incapable. Cependant, alors que le silence revenait et confrontée au visage fermé de ce dernier, la vanité de sa tirade sonna comme une évidence, une évidence dont elle avait déjà connaissance. Il ne changerait jamais. Alors à quoi bon ?
Elle se détourna de lui pour fixer une paroi opposée, avec un soupir. Puis elle lâcha dans un murmure, plus pour elle-même :
- Au fond, il aurait sans doute mieux valu pour moi que je ne te rencontre jamais.
Seul le silence lui répondit.

bane seed, fic, pour:yggdrasil, auteur:mousticat

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