[Fic] Cinquante-deux jours, Hercule Poirot, Poirot/Hastings [de Palmette, pour Sally Ride]

Aug 26, 2020 18:13

Titre : Cinquante-deux jours.
Auteur : Palmette (Participant 8)
Pour : Sally Ride (Participant 6)
Fandom : Agatha Christie
Persos/Couple : Poirot/Hasting
Rating : PG
Disclaimer : Poirot & consort appartiennent à qui détient les droits des œuvres d’Agatha Christie.
Prompt : Ils sont deux messieurs bien comme il faut, alors ils font tout pour que ni George, ni Miss Lemon ne sachent rien de leur relation. Sauf qu'on peut être le meilleur détective au monde, cela ne veut pas dire qu'on soit le meilleur cachotier au monde.



Cinquante-deux.
Voici le nombre de jours depuis le premier baiser, un baiser qui resta hésitant trois secondes et sept dixième de secondes très précisement avant que des années de sentiments réprimés le transforment en un baiser de cinéma pour adultes.
Cinquante-deux jours depuis qu’Hastings a jugé une situation de la façon la plus rocambolesque et fausse qui soit. Ce que son cher Poirot prétend, faussement bien sûr, être une charmante habitude de son meilleur ami.
« Je ne veux pas vous voir mourir sans vous dire la vérité ! » Le cher Hastings en question avait tonné et Poirot lui-même, Poirot que ses petites cellules grises et une longue habitude de la nature humaine, d’abord comme policier belge puis comme détective privé londonien, Poirot qui se croyait à l’abri de la surprise, a une fois de plus été surpris par Hastings et ses déductions complètement abracadabrantesques.
« Mais mourir de quoi ?! » s’était-il exclamé, avant d’appliquer tout son intellect et son art de la déduction à démêler le vrai du faux des idées de ce pauvre Hastings, et d’en conclure que l’autre homme avait mal jugé les efforts de Poirot pour protéger ses sensibilités anglaises des désirs de son ami.
Il y avait eu ensuite une longue autre séance de questions et de réponses où Poirot avait mis enfin le doigt sur la vérité qu’Hastings voulait avouer à un Poirot pas mourant du tout.
Une vérité que le moustachu détective avait trouvée très à son goût.
Avait suivi une autre longue séance de questions et de réponses sur laquelle un voile pudique sera jeté, vu qu’elle fut consacrée par le puissant intellect belge à la découverte du meilleur moyen de faire perdre à Hastings jusqu’au souvenir de toutes les demoiselles en détresse pour lesquelles il a successivement soupiré. Et des demoiselles en détresse, il y a eu beaucoup dans la carrière commune précédant ces cinquante-deux jours, car la profession de Poirot est une profession pleine de malheureux, et de malheureuses, ayant besoin de secours, et le cœur du cher Hastings est capable de contenir des multitudes.
Avec le recul, Poirot se doit d’admettre : le fait que jamais le fier Capitaine n’ait éprouvé le besoin de garder le contact avec l’une de ces donzelles une fois les affaires en question résolues aurait dû, et depuis longtemps, lui faire comprendre que les sentiments qu’il croyait ne jamais être partagés l’étaient déjà.
Cinquante-deux jours remplis de leurs habituelles enquêtes, car dans ces cinquante-deux jours, Poirot a retrouvé un jeune héritier disparu, élucidé la soi-disant mort d’un aristocrate ruiné, retrouvé très vivant dans les jupes d’une danseuse de cabaret allemande, et mis la main sur les plans révolutionnaire d’un ingénieur bolivien ayant croisé le mauvais côté du Mauser d’un espion turc.
L’habituel pour les deux hommes.
Cinquante-deux soirées côte à côte dans le salon de Poirot, Hastings avec ses mots-croisés et Poirot occupé la plupart du temps à travailler, épluchant la presse internationale et mettant à jours ses dossiers. Les petites cellules grises seules seraient inutiles si elles ne se voyaient fournir le matériel nécessaire à leur fonctionnement, et à leurs déductions. L’illustre détective reçoit les principaux quotidiens mondiaux dans les langues qu’il pratique et entretient une correspondance avec de nombreux policiers ou autres ambassadeurs rencontrés au cours des années et qui lui fournissent d’importants renseignements des quatre coins du monde. Jamais la plus riche fortune australienne n’aurait été sauvée d’un vil empoisonnement par un sien cousin sans Poirot, et ceci bien qu’il n’ait jamais mis les pieds en Australie. Et jamais la moindre intention d’y mettre les pieds, si les commentaires qu’il a offert sur la poussière, la faune, la poussière, la flore, la poussière et les habitants de ce pays, sans compter la poussière, sont à croire.
Cinquante-deux matinées que Miss Lemon a passé, entre autres, à classer les fiches préparées par son patron selon le complexe système que seuls elle et lui sont capables de comprendre.
Cinquante-deux nuits….
Non, les nuits ne sont que pour eux. Pour que Poirot parfois lui-même soit surpris. Pour qu’Hastings comprenne mieux certaines réactions qu’il a eues au fil des années, comprenne que parfois, non, ce n’était pas de l’inquiétude que Poirot envoie une jeune et jolie femme, certainement innocente, derrière les barreaux, qui l’avait motivé, mais une inquiétude que Poirot s’intéresse trop à la jeune et jolie femme en question. Pour admettre, oui, pour admettre, que le plus gros cerveau d’Europe est plus qu’un intellect, et que la gourmandise n’est pas la seule demande du corps devant laquelle il est prêt à céder.
Cinquante-deux jours qu’ils gardent pour eux le plus délicieux secret, un secret qui hélas pourrait leur valoir tous les ennuis du monde avec la justice anglaise. Sans parler du scandale, un scandale qui leur vaudrait l’ostracisme, voire la prison, et empêcherait Poirot d’exercer, verrait Hastings obligé à l’exil, Poirot réduit à exercer à l’autre bout du monde, dans un pays loin de ce qu’il estime être un minimum de civilisation, un pays que la nouvelle du scandale impliquant le plus célèbre des détectives n’aurait pas réussi à atteindre.
Cinquante-deux jours que ce douloureux et délicieux secret, ce secret de draps froissés et de plaisirs à apprendre, ensemble, patiemment, et parfois impatiemment, n’est qu’à eux…croient-ils.
Cinquante-deux jours que Miss Lemon et George se jettent des regards en coin.
Cinquante-deux jours que la plus dévouée des secrétaires et le plus zélé des valets distraient de façon appropriée les officiers de police, les membres du Foreign Office, les différents ambassadeurs, richissimes magnats des médias, de l’acier ou du nickel et autres désespérés venus réclamer l’aide du grand homme.
Cinquante-deux jours de satisfaction de voir deux âmes qui ont fait tant de bien autour d’eux d’enquêtes en enquêtes, de justice rendue aux morts en vies sauvées, de voir ces deux âmes trouver à leur tour un peu de bonheur à eux, au lieu de simplement préserver celui d’autrui.
« Ils sont tellement émouvants, » murmure Miss Lemon, tapotant le coin d’un œil avec un mouchoir parfaitement amidonné brodé à ses initiales, tandis qu’ils les regardent par la fenêtre, s’éloigner sous le crachin anglais en compagnie d’un jeune inspecteur écossais venu demander leur aide pour retrouver une rarissime miniature persane. Le temps, anglais, très très anglais, a failli convaincre Poirot de refuser l’affaire, mais l’histoire de la miniature, pleine de sang, de malédictions séculaires et de princesses en exil, a tellement titillé la fibre romantique d’Hastings que le détective n’a rien pu faire d’autre que de décrocher son chapeau de la patère et partir sur les traces des voleurs.
Techniquement, partir vers l’un des salons d’un des plus chics hôtels londoniens où il interrogera, bien au chaud, les principaux suspects, parce qu’aller examiner des traces de pas sur le tapis et renifler les cendres de cigarettes, c’est bon pour les romans, mais….oui, Poirot est en chasse.
« Je commencerai par les traces laissées dans la chambre de Monsieur, » répond simplement George.
« Et moi, le bureau. » décide la secrétaire, avant d’ajouter : « Pouvez-vous les accompagner à Edinbourg la semaine prochaine ? » 
« Ils ne restent que trois jours, le temps d’interroger Lord Oliver ! »
« Cela sera sans doute suffisant pour manquer de se faire prendre. »
Ils échangent un regard amusé. L’amour qui doit se cacher à l’extérieur a besoin d’un endroit où s’exprimer, et le valet et la secrétaire le savent, les indices laissés par les amants ne le sont que parce qu’ici, dans l’appartement de Poirot, ils se sentent en sécurité.
« Ah, l’amour, » Miss Lemon murmure d’une voix que son patron ne lui connaît pas, une voix qui laisse percevoir le soulagement d’avoir vu cette danse durant depuis des années trouver enfin un épilogue heureux.
Cinquante-deux jours.
Miss Lemon a su, dès le lendemain, et George encore bien avant.
Cinquante-deux jours.
Et avec la bienveillante surveillance derrière le rideau de deux amis dévoués, encore bien des jours, des années à venir.

agatha christie, auteur:palmette, fic, pour:sally ride

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