Le meilleur sandwich du monde

Aug 22, 2010 19:51

 Il y a longtemps que j'avais envie de raconter l'histoire du meilleur sandwich au monde. La voici donc.

Il y a bientôt 2 ans, à deux ou trois semaines près, j'avais été convoquée à une entrevue dans un cégep à plusieurs heures de route de Montréal. Je venais à peine de terminer la rédaction de mon mémoire, processus très long et pénible, pour des raisons si peu intrinsèques en vérité, processus qui s'était terminé par une année cauchemardesque à plusieurs égards, et qui ne se conclut que plusieurs mois après le dépôt de mon mémoire. Lorsque l'annonce de cette entrevue survint, j'étais donc partagée entre le sentiment que cela venait trop à point, que je ne pouvais passer à côté de cette occasion, et le sentiment que j'étais si épuisée et si peu prête à m'éloigner de ma bien-aimée que cela était pourtant impossible.

Poussée par le sentiment du devoir, je décidai que je ne pouvais rater cette occasion et j'embarquai avec Amélie dans une auto quelques jours plus tard, avec quelques bagages et livres, ainsi qu'une glacière que nous avions achetée pour l'occasion, remplie de victuailles préparées par mon amoureuse dévouée. C'est donc à la fois excitée par cette aventure (c'était notre premier road trip!), angoissée et le coeur un peu lourd -- puisque si j'étais en compagnie de mon amoureuse, je laissais pourtant derrière quelqu'un qui m'était déjà très cher -- que nous prîmes la route vers le nord. Tout en roulant, je relisais le coeur battant Prochain Épisode sur lequel devait porter la leçon que je préparais pour cette entrevue.

Notre premier arrêt était dans une petite auberge, à peu près à mi-chemin, dans le coin de Mont-Laurier. C'était en plein milieu du bois, nous devions prendre un chemin de terre pour nous y rendre. Nous nous perdîmes en cours de route et appelâmes, désespérées, à l'auberge. Après quelques détours, nous finîmes par trouver notre auberge. Il était tard et il faisait déjà très noir alors nous ne vîmes presque rien de l'endroit mais lorsque nous entrâmes dans notre chambre aux allures rustiques j'étais émerveillée. Et aussi torturée parce que c'était un parfait endroit pour un séjour en amoureuses mais que j'étais déjà si épuisée par la route que je voyais difficilement comment je réussirais à continuer de me préparer pour mon entrevue le lendemain. Puisqu'il le fallait pourtant, je grimpai l'échelle qui me conduisait à la mezzanine et m'y installais pour travailler tandis qu'Amélie se coucha et s'endormît dans notre si joli lit puisqu'elle conduirait pendant plusieurs heures le lendemain matin.

Au milieu de la nuit, je m'effondrai, épuisée physiquement et moralement. Je ne serais jamais capable d'être prête, ai-je décidé à ce moment, à tort et à raison, bien sûr. Je descendis l'échelle et rejoignis Amélie dans le lit en pleurant, lui disant que je n'irais pas à l'entrevue, que j'en étais incapable, que je ne serais jamais prête, que j'étais trop fatiguée. Persuadée que j'étais saisie par un moment de doute, ma bien-aimée me dit que ça n'avait aucun sens, que je serais évidemment prête, que j'en étais capable, que j'avais fait ça des milliers de fois travailler bien au-delà de mes forces. Je rechignai, elle se mit en rogne contre moi, convaincue que je faisais une scène et désireuse de me ressaisir. Je pleurai de plus belle jusqu'à prouver mon effondrement complet. Mon amoureuse comprit que j'étais réellement épuisée, que je ne manquais pas simplement de confiance soudainement et elle me serra dans ses bras jusqu'à ce que je me calmai, puis me dis qu'elle allait chercher quelque chose dans l'auto pour nous préparer un petit goûter. Il était environ trois heures du matin. Amélie revint avec des sandwiches qu'elle avait préparés au-dessus de la glacière. Elle les avait concoctés avec du pain aux neuf grains de notre boulangerie, du jambon, du boursin et de la roquette. Nous mangeâmes nos sandwiches dans notre lit coquet, enveloppée dans le couvre-lit rose kitsch et charmant à la fois. J'étais soudainement si bien après cet effondrement complet. Non seulement mon sandwich était-il vraiment le plus délicieux que j'avais mangé, il était le symbole de tout l'amour et de toute la dévotion de mon Amélie, capable à la fois de l'amour le plus rude et de l'amour le plus tendre.

amour

Previous post Next post
Up