Défi: reflexion-Dune-Abimes.
Titre : Abimes
Auteur :
mrs_a_jones
Type : fanfic
Genre : Général.
Fandom : Dune
Personnage(s) : Gaius Helen Mohiam, Anirul Shadow-Tonkin, Shaddam Corrino, Hasimir Fenring, Margot Fenring, Irulan, Chalice et Wensicia Corrino. Jessica et Léto Atréides (évoqués).
Défi : reflexion
Rating :PG
Disclaimer: Le monde de Dune ainsi que tous les personnages cités appartiennent à Franck Herbert, Brian Herbert et Kevin J Anderson.
Spoilers: Avant Dune, La Guerre des Machines. L’action se déroule pendant le tome 2 d’Avant Dune « La maison Harkonnen »
Un profane, comme ce jeune serviteur efféminé au-delà du raisonnable qui passait de groupe en groupe un plateau de verres remplis à la main, ne verrait en elle qu’une vieille femme plongée dans ses pensées. Digne, austère, longue et sèche. Vêtue de la traditionnelle aba noire et du voile des sœurs. La diseuse de Vérité de l’Empereur. Une des multiples femmes qui attendaient à la porte de l’impératrice en travail. C’est l’image qu’elle offrait aux regards étrangers quand elle sortait dans ce monde en perpétuel mouvement, quand elle était obligée de se rendre dans cette cour impériale qu’elle méprisait au plus haut point. Ils se croyaient tous si importants et ils étaient tous si facilement manipulables. Cet empereur fat et suffisant le tout premier. Comme cela avait été facile de le convaincre de prendre comme épouse la révérende mère Anirul. Il n’y avait vu qu’une inoffensive acolyte, belle à se damner. Ce paon arrogant qui tournait comme un gros bourdon multicolore rongé par l’attente d’un héritier. Il pouvait toujours attendre…
Un profane aurait été incapable de comprendre la profondeur de ses réflexions, des pensées tortueuses d’une révérende mère du Bene Gesserit. L’empereur ne devait pas avoir de fils. Jamais. Pas de concurrence pour leur futur élu. Il pouvait avoir autant de filles qu’Anirul pourrait en porter, c’était tout ce que l’ordre permettrait. Des filles pour le programme génétique. Elle tirait déjà ses plans, passant en revue les maisons du Landsraad. Vernius, Moritani, Ecaz, Atréides…
Oui, Atréides, une maison intéressante, déjà prise dans d’autres entrelacs mais pourquoi pas ? Oui… le jeune Léto n’avait pas encore pris femme, l’aînée des Corrino, Irulan n’avait que trois ans mais qu’importe la différence d’âge dans les unions dynastiques. La seconde, Chalice, à qui pourrait-elle convenir ? Cela demandait réflexion.
Pour une femme comme elle, la réflexion était bien plus profonde et bien plus riche que pour n’importe quel autre vivant. La profondeur en était abyssale. Qui, dans le monde des vivants, pouvait en dire autant ? Quelques navigateurs de la Guilde peut-être ou encore un mentat exceptionnel comme cet Hasimir Fenring, l’ombre doucereuse de son empereur de pacotilles. Dangereux sujet que cet homme à posture de fouine, un imprévu tout à fait regrettable dans le programme. Venu trop tôt et incomplet. Inutilisable mais à garder sous surveillance. Elle laissa là le comte Fenring pour reprendre l’écheveau de pensées qu’elle avait un instant cessé de dévider.
Non, en réalité, non.
Quel navigateur pouvait s’enorgueillir de se souvenir depuis autant de temps, de voir les ramifications, de percevoir les plans à l’intérieur des plans. Quel navigateur se souvenait, non, avait vécu le jihad buttlerien dans sa chair et dans son âme et pouvait se souvenir de la longue errance des tribus zensunnies ? Quel mentat pouvait se rappeler des planètes mortes et d’Omnius ? Elle, oui. Chaque réflexion était enrichie, sublimée jusqu’à la quasi perfection par les expériences multiples. Un homme de la Terre originelle avait dit qu’on ne pouvait concevoir l’avenir sans connaitre le passé, le Bene Gesserit gardait le passé et tissait la trame du présent pour dessiner l’avenir.
-Orgueil ! Attention à l’orgueil, murmuraient des voix.
-Il n’y a aucun orgueil à admirer le travail bien mené, répondait une autre voix.
Gaius Helen Mohiam, révérende mère crainte et révérée, maillon primordial de la longue chaine de projet Kwisatz Haderach, s’offrait une petite promenade dans la mémoire seconde. Elle n’avait rien de mieux à faire, pendant qu’Anirul poussait de toutes ses forces pour mettre au monde une troisième fille. La fille de sa fille à elle, qui grandissait étroitement surveillée par les rectrices sur Wallach IX, porterait l’élu et son ordre s’arrêterait enfin dans sa, si longue marche pour contempler l’univers au creux sa main.
Un bruit ténu déclencha un tourbillon de réactions. On se pressait contre les portes closes de la chambre de naissance. Elle resta à l’écart, attendant que la foule se disperse, que l’empereur aille noyer sa déception avec une des multiples femmes de son harem et que les gardes s’écartent pour lui céder le passage.
La chambre était paisible, tendue de soie jaune d’or et de cristaux musicaux sensés apaiser la future mère et accueillir l’enfant en toute sérénité. Aux côtés de l’impératrice se tenaient nourrices et suivantes, toutes membres de l’Ordre. Anirul était parfaitement calme et dispose, elle tenait dans ses bras sa nouvelle fille. Sur les genoux de Margot s’agitait la petite Chalice, le nez au niveau de la courte pointe de soie constellée de pierreries, Irulan regardait le bébé avec curiosité. Quel charmant spectacle !
-Mes félicitations, révérende mère, dit-elle en s’inclinant légèrement.
-Voici ma fille, Wensicia, répondit Anirul.
Mohiam se demanda bien ce qu’on allait pouvoir faire de celle-là et le rôle qu’elle serait amenée à jouer dans l’avenir. Encore et toujours matière à réflexion.
FIN.