Traduction "Remise en Question" du fandom Skip Beat! - Chapitre 13

Sep 03, 2015 02:37

[Publié sur Fanfiction.net entre Octobre 2010 et Janvier 2013, original disponible à l'adresse suivante sur le site.]https://www.fanfiction.net/s/5912588/13/

Auteur : Mystic Rains
Traductrice : Hermi-kô
Sixième jour, troisième partie : Excuses
Je sais ce que disent tes amis

« Tu gâches juste ton amour et ton temps »

Sho tapota paresseusement son crayon contre le dessus de table délabré, jetant un vague regard sur le gribouillage qui était de sa propre main. S'approprier des paroles était habituellement un bon moyen de passer le temps pour lui, ce qui était utile vu que son stock de musique pré-composée était terriblement bas. Il avait le spectre d'une chanson errant dans son esprit, mais ces deux lignes étaient les seules paroles concrètes qu'il avait pu fixer.

Il était assis recroquevillé dans l'un des box, portant une casquette des Yankees et un sweat bien trop grand. Heureusement, le café étant vide il n'avait pas à se soucier de fan girls hystériques, mais s'il ne s'était pas déguisé, Kyoko l'aurait repéré en moins de deux. Il savait combien elle était observatrice. Le miroir sur le mur du fond était idéalement placé : il pouvait voir la porte et le box derrière lui tout en le gardant dans l'ombre. Jetant constamment des coups d'œil, Sho souriait dans l'expectative du temps qui passait. Il n'avait pas été aussi excité de la voir depuis la Saint-Valentin, aussi confiant dans ses plans pour ce soir qu'il l'avait été pour le 14 février.

Si seulement il y avait quelque chose à manger …

D'une façon bizarre, il se souvenait également de sa faim durant la Saint-Valentin. Il était facile de s'en souvenir, vu que ce jour-là, le goût des chocolats de Kyoko (D'accord, plutôt les chocolats super chers qu'il avait acheté pour Kyoko mais qui lui avait finalement été retournés) ayant été la chose qu'il désirait le plus. C'est parce qu'il était aussi affamé maintenant qu'il l'avait été l'autre jour. Ils avaient été si bons que le chanteur en avait recommandés d'autres, malgré son aversion pour les choses sucrées, mais le goût de ceux-là n'avait pas été aussi appétissant que la première fois.

La faim était la meilleure des épices, non ?

Il pouvait sentir son ventre gronder, et il grimaça légèrement alors que ses abdos se resserraient instinctivement. Aussi affamé qu'il pouvait l'être, il savait qu'il fallait mieux rester silencieux. L'idée de demander de la nourriture à la nana rose bonbon était aussi suicidaire que d'essayer de l'embrasser.

« Qu'as-tu dit ? » La voix n'était pas simplement glaciale. Elle était en dessous de zéro. C'était vicieux. C'était la voix d'une mort imminente. C'était la vivante Yuki Onna, la mythique reine des glaces. Aussi belle que mortelle.

Il n'était pas sûr de la manière dont elle avait pu se téléporter en haut des escaliers aussi vite, toujours est-il que l'écho de sa voix le captivait immanquablement, tellement de velours liquide qu'aucun des managers n'osait regarder dans sa direction. Un aimant pour tout ce qui concernait Kyoko, Sho se glissa silencieusement en haut des marches pour observer l'action entre les barreaux de la rambarde. Kanae se rapprochait de Shoko, qui commença à trembler de peur.

« Est-ce que vous êtes en train de me dire que votre chouchou a parié avec cet homme qu'il pourrait conquérir mon amie pour le bien de son image ? »

Incapable de faire autre chose, Shoko hocha vivement la tête.

Dans une furie monstre, ses yeux s'enflammèrent tandis qu'elle se tournait vers l'autre manager. Elle se transforma rapidement en démon sous ses yeux. Ses cheveux commencèrent à s'élever dans les airs et elle montra ses griffes acérées au manager qui jouait les marieuses. Yashiro poussa un cri aigu digne d'une adolescente et se recroquevilla dans un coin de la pièce.

« Et vous ! Vous laissez simplement votre perle rare abuser d'elle… ? Vous n'avez pas essayé de l'en dissuader ? Vous n'avez pas réfléchi à ce que ça serait pour elle ? Comment elle se sentirait ? Quel scandale cela ferait à sa nouvelle carrière ? »

« Ma-ma-ma-je-je-je-Re-Re-Re-ai-ai. » La langue de Yashiro lui faisait défaut, alors qu'il glissait le long du mur jusqu'au sol. L'engueulade de Shoko avait été assez déroutante, mais cette autre fille le surplombant était des plus terrifiants. Si cet acteur à deux balles était le Roi Démon de LME, alors cette fille devait certainement en être la Reine. Sho réalisa combien il avait de la chance d'avoir pu s'échapper aussi facilement.

« Je ne le dirai qu'une fois, Yashiro. » Elle cracha son nom comme une malédiction. « Restez. Loin. De. Kyoko. Gardez votre perle rare loin d'elle. Ne vous approchez pas des vestiaires de LoveMe. Ne l'appelez pas. Ne la regardez pas. Si vous le faites, je vais direct voir le Président, et s'il ne fait rien, alors je vous ferais moi-même dégringoler de votre piédestal. »

Gardant toujours le silence, les trois spectateurs encore muets regardèrent l'actrice ulcérée dégainer son téléphone. Elle s'écarta de la cage d'escalier et composa furieusement un numéro. Après une conversation hachée et rapide, ponctuée de cris furieux, elle revint vers eux.

« Vous ! » Elle pointa du doigt Shoko, qui avait finalement eu assez de sens commun pour s'échapper lentement au bas des marches. « Vous venez avec moi ! »

« Excusez-moi ? » Prononça Shoko, surprise. Elle avait déjà causé bien plus d'ennuis que prévu. Elle était prête à pousser sa gueulante, pas à se faire gueuler dessus.

« Elle ne me croira jamais. Vous ne faites pas partie de l'affaire. Vous pensez clairement que c'est mal, n'est-ce pas ? » Kanae baissait les yeux vers la manager, la défiant de la contredire. Immobile quelques marches en-dessous du monstre rose, sa manager à lui hocha la tête avec reluctance. « Vous me conduirez à sa rencontre. »

« J-je ne pense pas que ce soit une bonne idée. » Riposta vivement Shoko, mettant encore plus de marches entre elles. « Je suis sûre que si quelqu'un doit lui dire, ça devrait être son a… »

Un simple regard plein de mépris mit fin à ses protestations.

« Si vous ne venez pas, je pars sur le champ voir Tokyo Entertainment, » déclara l'actrice d'une voix menaçante. « Je connais leur passé. » Nul besoin de précisions pour la manager. Sho la regarda déglutir. Ce qu'elle s'astreignait à voiler à la face du monde était sur le point d'être divulgué.

Sho pausa, réfléchissant aux ramifications d'une telle situation.

Si cette nana va voir Kyoko, cette dernière saura alors que j'ai parié au beau gosse qu'il pourrait la conquérir. Kyoko sera en rognes contre moi, bien sûr. Elle continuera de me haïr, ce qui me fournira une plus grande présence dans l'esprit de Kyoko. C'est exactement ce dont j'ai besoin ! Et en plus de ça, Kyoko va probablement commencer à détester ce pompeux abruti de même. Elle ne le considérera plus comme son senpai. Il ne sera jamais capable de la conquérir. Ainsi je ne rêverais jamais plus d'elle attirée par ses manières de playboy. Je gagne à tous les coups !

Sho grimpa les marches qui le séparaient de sa manager. Les yeux des deux femmes s'écarquillèrent, surprises de sa soudaine réapparition.

« Je suis d'accord ! Déballons-lui tout ! »

Il n'avait même pas vu le coup venir. Il se plia presque en deux et dût se rattraper à la rambarde.

Mais où avait-elle appris à frapper comme ça ?

Bien qu'il soit sûr de ne pas pouvoir s'asseoir pour au moins une semaine, le jeu en valait la chandelle: En valait vraiment la chandelle. Il congratula son propre génie au vu de la situation. Si Kyoko savait que son précieux senpai l'utilisait, elle allait le haïr. Vu qu'elle ne connaissait le pathétique acteur que depuis un peu plus d'une année à peine, Kyoko le virerait purement et simplement de sa vie. Ce qu'elle ne pouvait pas faire avec lui. Il avait connu Kyoko depuis qu'elle avait six ans. Leur relation était un lien impossible à briser.

Avec la voie libre, il dominera de nouveau son esprit. C'était tout ce qu'il voulait.

Il sourit sardoniquement et abaissa le crayon sur son bloc-notes. Une autre parole avait germé dans son esprit et il sut qu'il était un génie à la seconde où il se relut :

Je ne te laisserai jamais changer d'avis

Le son d'éclaboussures d'eau était faible au début, puis commença à gronder de plus en plus fort. C'était le son woosh que produisaient les roues en fonçant au travers d'une pellicule d'eau conséquente.

Shoko regarda avec ahurissement les portes vitrées du café se déformer, une vague d'eau de pluie glaciale les frappant à grande vitesse. A travers les zigzags, elle pouvait apercevoir un vélo rouge pétant et une petite silhouette dessus. La bicyclette se retourna brusquement sur sa roue avant et dérapa pile devant les portes, balançant une autre giclée d'eau contre le bâtiment. Le cœur de Shoko tomba comme une pierre dans sa poitrine.

Se levant de son siège, Kanae se mit debout au milieu de l'allée, les mains sur les hanches. Observant, et attendant.

Garant le vélo sous l'auvent du restaurant, la porte automatique s'ouvrit en grand. Une petite clochette résonna à l'entrée du client.

« MOKO-SAN ! »

Pressentant ce qui allait se passer, Kanae eut le réflexe de saisir la tête de Kyoko alors qu'elle approchait à vive allure afin de tenir la fille trempée hors de portée. Kyoko agita ses bras, essayant envers et contre tout d'emprisonner son amie dans un câlin briseur d'os. Heureusement les bras de la victime étaient plus longs et cette dernière fut donc capable de se soustraire à l'étreinte passionnée.

« Ah mo ! Est-ce que tu t'es regardée ? » La grande actrice avait l'air fâché, mais ce n'était rien en comparaison de sa rage passée. Son exaspération laisserait presque place à de la jovialité. « Tu comptes me mouiller aussi ? »

« Mais ! Mais ! » Kyoko arrêta de se débattre, sans pourtant replier ses bras tendus, guettant toujours un câlin qui ne viendrait pas. Ses yeux étaient remplis de larmes de joie et Shoko esquissa presque un sourire à la ténacité candide de Kyoko à vouloir montrer son affection. La petite actrice était quasiment trempée jusqu'aux os de la tête aux pieds, et encore elle ne semblait pas réaliser que sa jupe gouttait et que sa chemise collait à elle. « Tu m'as appelé ! Je suis si contente que c'est toi qui aies engagé la conversation ! Nous sommes amies, alors ! »

Les mimiques de sourire s'évanouirent sur les visages de l'actrice et de la manager tandis que Kanae relâchait lentement sa prise. Kyoko inclina la tête sur le côté de perplexité, ne comprenant pas le changement d'ambiance dans l'air.

« Assis-toi, » soupira Kanae, se frottant les tempes. « Nous devons te parler. »

« Hai ! » Acceptant aisément, Kyoko se tourna vers la table pour la première fois. Ses yeux s'écarquillèrent un peu en reconnaissant la manager de sa Némésis déjà assise dans le box. Peu encline à être impolie, Kyoko s'inclina et la salua chaleureusement, faisant sourire faiblement la manager en retour. Intérieurement, Shoko grimaça. Quel mal-être s'était de voir cette pauvre fille être trahie à nouveau, par un autre homme qu'elle admirait. Si elle était Kyoko, elle ne voudrait plus jamais la rencontrer.

« Vous êtes de repos ce soir, Aki-san ? » S'enquit poliment Kyoko, alors que Kanae se glissait dans le box à côté de la manager. « Je ne vois pas cet idiot de … »

Le visage de Kyoko s'assombrit tandis que la fin de sa phrase restait en suspens.

Une brusque quinte de toux éclata derrière les deux femmes. Kanae donna vivement un coup de coude bien placé. L'homme encapuchonné derrière elles s'arrêta de tousser aussi vite qu'il avait commencé.

« Je lui ai demandé d'être là. J'ai quelque chose à t'annoncer. » Déclara Kotonami. Ses mots étaient lourds et abrupts, et Shoko devina qu'elle était sur le point de tout déballer sur-le-champ. La coupant, Shoko commença à parler en premier.

« Avant ça… Est-ce que Tsuruga a passé beaucoup de temps avec toi dernièrement ? »

Kyoko prit le temps de réfléchir. Elle se cala plus confortablement et se tapota le menton.

« Je… pense que oui. » Dit-elle d'une voix trainante. Elle ne semblait pas avoir été frappée par les visites de son senpai récemment. « J'ai vu Ren-san plus souvent que d'habitude cette semaine. »

« Ren ? Depuis quand est-ce que tu l'appelles comme ça ? » S'insurgea Kanae, visiblement choquée. « Tu ne m'appelles même pas Kanae ! » La toux forcée recommença de plus belle, et cette fois ce fut Shoko qui envoya son coude pour le faire taire.

« Je peux t'appeler Kanae ? » S'exclama Kyoko, de surprise et de joie mêlées. « Kanae-chan ! » Kyoko jaillit de sa chaise, et essaya de capturer sa meilleure amie dans une étreinte à travers la table. Shoko sursauta, prise de court par la soudaine effusion d'affection amicale. De nouveau, Kanae repoussa son amie du bout des bras, échappant de justesse à un câlin étouffant.

« Ah mo ! Kyoko, ce n'est pas le sujet ! Le fait est que Tsuruga t'utilise ! »

Toute activité stoppa au moment où les mots quittèrent ses lèvres. Le temps s'immobilisa, et la scène entière fut prise dans la glace. Le silence à la table était tel qu'un pétale pouvait tomber et être perçu comme un coup de feu.

La figure de Kyoko était si incroyable, tellement en opposition avec ses yeux semblables à deux billes d'or sous le choc. C'était comme si Kanae avait dit à Kyoko que le soleil était simplement une ampoule électrique, réglé pour se lever, se coucher, briller et baisser selon un obscur minutier, et espérait que Kyoko la croie.

« Moko-san… ne dis pas des choses comme ça. » Kyoko laissa échapper un petit rire, si semblable au tintement de clochettes, brisant le silence. Elle reprit contenance et se rassit. « Ren-san ne m'utiliserait pas pour quoi que ce soit. Je ne suis que son humble kohaï. Il est juste poli, faisant en sorte que je me sente bien à LME parce que je suis dénuée de talent et aussi pitoyable qu'une limace … »

Elle avait dit ça d'une manière si neutre et si rationnelle que les deux femmes étaient momentanément soufflées. Est-ce qu'elle pensait réellement être dénuée de talent alors qu'elle apparaissait dans plusieurs drama à succès ? N'avait-elle pas vu le buzz autour de son nom depuis quelque temps dans le milieu ?

« … Pourquoi m'utiliserait-il ? »

La simple idée que Ren pourrait l'utiliser pour quoi que ce soit était de l'ordre de l'impossible pour Kyoko. La situation toute entière ressemblait beaucoup à ce que Kanae avait imaginé pour l'ancienne Kyoko si quelqu'un avait commencé à lui parler de Shou, avant qu'elle ne fasse son entrée dans le show business. Ren Tsuruga était son senpai chéri. Apparemment il s'était bien plus incrusté dans la vie de son amie qu'on y avait compté.

« Je n'arrête pas de te dire de t'intéresser aux médias ! »

Fourrageant dans un large sac, Kanae sortit quelques titres à gros tirages et les étala sur la table. « On raconte partout que Tsuruga est gay ! » Elle passa sa main sur les couvertures des magazines comme si c'étaient des cartes à jouer. « Il veut te conquérir et t'utiliser pour démentir la rumeur ! » Kyoko se pencha sur l'étalage et survola les gros titres du regard sans vraiment y prêter grande attention.

« Je parie qu'il est devenu super amical avec toi cette semaine, hein ? »

« Plutôt, mais … »

« Il t'a demandé de l'appeler Ren, n'est-ce pas ? »

« Après un an, oui, mais … »

« Il est déjà venu te récupérer à l'école auparavant. Il est clairement venu dîner ce soir. C'est ça ? »

« Ben oui … mais Moko-san … »

« Non, Kyoko ! » L'actrice énervée attrapa l'un des magazines et le planta sous les yeux de Kyoko comme preuve. « Je te dis qu'il t'utilise. Si vous êtes en assez bons termes pour vous appeler par vos prénoms, tu ne crois pas qu'il aurait mentionné le problème qu'il rencontre actuellement avec la Presse ? »

« Moko-san, » commença Kyoko de manière rassurante, essayant de paraître confiante malgré l'agacement grandissant de son amie, « je sais qu'il ne m'utilise pas. »

« Comment peux-tu en être si sûre ? » Répliqua furieusement Kanae à sa meilleure amie. « Est-ce que tu lui fais plus confiance qu'à moi ? »

De nouveau, Kanae allait se retrouver toute seule tandis que sa meilleure amie prenait le parti de quelqu'un d'autre. Elle était furieuse. Pourquoi est-ce que ça se passait toujours comme ça ? Pourquoi c'était toujours le mec à la place de la copine ? Ses frères et sœurs à sa place ?

Comme si elle était brusquement à court de vapeur, la voix de Kanae s'essouffla et elle détourna la tête. « … Ta meilleure amie ? »

« Non non ! J'ai confiance en toi, Moko-san ! Je t'assure ! » Gémit Kyoko. Elle se saisit à travers la table des mains de sa meilleure amie et les pressa d'une manière rassurante. Seule la table l'empêchait d'étreindre Kanae comme il le fallait.

« Je te fais plus confiance qu'à quiconque ! C'est juste que … c'est Ren Tsuruga, quoi ! C'est l'homme numéro 1 du pays ! Pourquoi voudrait-il quelqu'un comme moi ? Il peut draguer les plus belles et plus brillantes Japonaises ! Pourquoi devrait-il se forcer à me fréquenter alors que quelqu'un d'autre pourrait résoudre son problème plus facilement encore ? »

« A cause de lui. » Déclara simplement Kanae, soulignant le mot « lui » de manière extrêmement noire.

« Lui ? » Demanda Kyoko, perplexe.

« Sho, » soupira Shoko, parlant pour la première fois. « Sho a parié avec lui qu'il n'y arriverait pas. Sho a défié Tsuruga de sorte que s'il n'arrivait pas à te conquérir en une semaine… Tsuruga aurait à annoncer publiquement qu'il était gay. »

Kyoko recula comme si on l'avait giflé. Elle lâcha les mains de Moko-san. « Sho… Tsuruga… Il a relevé le défi ? » Ses yeux étaient de nouveau écarquillés, mais cette fois elle semblait percuter ce qui se passait.

« Oui… » Shoko baissa la tête. Elle laissa le silence s'installer, permettant à Kyoko d'ingurgiter l'info. « Je ne savais pas ce qui se tramait jusqu'à ce que tout soit décidé, et je n'ai pu que confondre Yash… »

« Yashiro était aussi au courant ? » S'étrangla Kyoko de surprise.

« Kyoko-san… Je … » Commença Shoko avec hésitation, se demandant si lui raconter exactement tout était la bonne chose à faire avec elle.

« Je pensais que ça lui plaisait aussi … Je pensais qu'il avait enfin commencé à me respecter … » Sa voix se brisa. « Je pensais qu'il était… qu'il jouait exactement comme Corn aurait dû … »

Corn ? * Se demanda Shoko. Comment peut-on réagir comme un légume ? Immobile, elle se tenait droite sur sa chaise, regardant la pauvre fille.

« Il était toujours capable de m'avoir pour jouer avec lui … » Kyoko attrapa l'ourlet de sa jupe détrempée et la serra si fort que l'eau en jaillit, éclaboussant le sol. Sa voix devenait plus douce à chaque mot : « Si convaincant que l'on ne peut pas s'empêcher de répondre … »

Les deux femmes étaient pétrifiées sur leurs sièges, regardant l'actrice passionnée se dégonfler émotionnellement, juste sous leurs yeux. La Kyoko qu'elles connaissaient aurait dû flamber de rage maintenant, dans un ouragan de destruction et de haine. Au lieu de ça la fille devant elles se … brisait. Elle tombait en morceaux juste en face d'elles et il n'y avait rien qu'elles ne puissent faire pour l'aider. Peu sûres de quoi faire ou quoi dire pour la réconforter, elles baissèrent le regard et laissèrent le silence faire son œuvre.

Et alors ? Voilà !

Où était la rage pure ? Où était la livreuse enragée qui lui balançait des boîtes de nourriture et lui déclarait rev… ?

Elle l'aimait.

Il ne pouvait pas s'en empêcher. Le crayon cassa entre ses doigts et le sang pulsa à ses oreilles. La colère qu'elle aurait dû ressentir se déverser en lui.

Le caquètement cruel emplit le restaurant. Il brisa le silence tandis que le musicien sentait son regard virer au rouge.

« Tu devrais être ravie. » Shou frappa de ses poings la table, s'en servant pour se mettre debout. Il se tourna pour regarder son amie d'enfance. Le choix de ses parents pour sa future épouse. « Personne ne draguerait une inconnue, simplette et débutante collante à moins d'y être forcé, surtout une célébrité telle que Ren Tsuruga. »

Elle leva les yeux sur lui, mais ses yeux dorés étaient inertes et vides, comme si son regard passait à travers lui pour contempler la vérité derrière tout ça. Elle ne sembla même pas surprise de le voir là.

« Shou ! Que fou… » Sa manager essaya de le tirer par la manche pour qu'il se rassoit mais il se dégagea avec force. Il s'avança vers la fille en pleurs avec un pas lourd, marchant à l'adrénaline.

« Même si tu es propulsée en haut de l'affiche au Japon, tu resteras cette pleurnicharde qui joue sans cesse les moutons. »

Le culot qu'elle a de paraître si blessée, si perdue ! La seule personne qui amenait ce regard sur sa figure auparavant était sa mère. Elle ne s'énervait qu'avec moi et elle a grandi malgré ça. Elle ne ressemblait pas à ça ! Elle ne gémissait pas comme ça !

Ses mots étaient brutaux, cracher à cause de l'émotion du moment sans rien pour les réfréner. Sa rage jaillissait. La tête de Kyoko s'abaissa, fixant ses genoux du regard. Et elle n'essuyait toujours pas ce stupide air dévasté de sa tronche.

« Même ta mère ne te voulait pas ! Pourquoi quelqu'un comme lui te traiterait-il de la sorte sans avoir une bonne raison, hein ? »

Elle n'avait jamais eu un air si désespéré lorsqu'il avait été là. La seule personne qu'elle avait aimée suffisamment pour ressentir une telle souffrance avait été sa mère.

Jusqu'à aujourd'hui.

Il la saisit par les épaules et la mit sur ses pieds. « Je suis le seul qui t'aidera. Je suis le seul qui te supportera à jamais, comme il doit être ! Je suis ton prince ! »

Le brusque mouvement de son bras à elle lui fit fermer les yeux. Il savait ce qui allait se passer, et il attendait la baffe. Cette poussée de rage, ça c'était sa Kyoko.

Sa paume ouverte s'immobilisa dans les airs, si près de la joue de Sho qu'il était sûre d'avoir été touché. Il n'y avait pas de douleur, pas le son de la peau frappant la peau, mais il devait avoir été frappé. Il avait besoin de l'être. Il n'y avait pas moyen qu'elle se retienne pour lui maintenant. Il devait rester dans son cœur.

« Il n'y a pas de princes, Shoutarou. »

Sa voix semblait si creuse qu'il l'entendit à peine. Secouant sa tête, elle lui montra enfin son visage. Son regard était tellement mort, manquant la joie de vivre à laquelle il s'était habitué. Il n'y avait ni la haine qu'il souhaitait, ni le regard en amouraché qu'elle lui avait autrefois adressé étant petit.

Amenant sa main à son visage, elle essuya l'humidité qui coulait de ses yeux. C'était un geste colérique. Elle essaya de le faire rapidement, mais de toute façon l'action restait la même. Il la lâcha abruptement et s'écarta paniqué.

Kyoko n'avait pas pleuré. Pourquoi était-elle en train de pleurer ? Où était sa colère ?

« Je suis désolée … » Murmura-t-elle, se détournant.

La stupidité de son commentaire le gifla bien plus fort qu'elle ne l'aurait intentionnellement fait. Pourquoi devrait-elle s'excuser ? Il venait de la massacrer. Il avait dit des choses… qu'il pensait ne jamais lui dire. Maintenant elle était en train de pleurer et elle s'excusait quand même auprès de lui ?

« Je ne voulais plus jamais refaire ça en face de toi … »

Evidemment que Kyoko pleurait. Elle pleurait toujours lorsqu'ils étaient gamins et il n'avait jamais su quoi faire. Jusqu'au jour où elle s'arrêta … et elle n'avait plus pleuré en face de lui depuis lors. Même les jours où il savait que Mogami-san la rejetait à l'auberge Kyoko disparaissait juste puis revenait avec un sourire plaqué sur la figure. Pendant combien de temps lui avait-elle caché ses larmes ?

« Kyoko … ? » Il avait l'impression d'avoir de nouveau huit ans, regardant sa meilleure amie aux cheveux nattés, sa seule véritable amie en fait, souffrir. Pourquoi s'inquiétait-elle toujours pour lui au lieu de penser à elle ? Même après autant d'années, il ne connaissait toujours pas les mots pour rendre les choses meilleures.

Sa voix était intime et pleine de regrets. Shou demanda, tendant le bras vers elle : « Kyoko ? Je… je ne voulais pas dire ça… j'étais juste en colère… ce pari, c'était juste une blague… »

Il toucha son épaule mais elle s'écarta comme si elle s'était brûlée. Ses yeux étaient secs mais sa voix n'était plus qu'un spectre :

« Je pense… que j'en avais besoin. Pour enfin grandir. » Kyoko redressa la tête et marcha silencieusement jusqu'aux portes. Le moment se changea en heures tandis qu'on n'entendait que le bruit de ses pas dans le minable café.

Les portes automatiques s'ouvrirent et le son de la pluie emplit l'air. Elle se retourna vers le petit groupe, et leur donna un dernier triste mais sincère sourire.

« Merci …à tous. » Chuchota Kyoko avant de se faufiler entre les portes. La clochette tinta lorsqu'elle partit.

Note de l'auteur : Etiez-vous touché ? Je l'espère vraiment vraiment beaucoup. Je voulais que ce soit un chapitre des plus percutants. Je n'ai jamais écrit une altercation de cette amplitude et je voulais jouer sur les cordes sensibles (juste un tout petit peu). La colère et/ou la tristesse sont toutes deux acceptables. Laissez-moi savoir si ça a marché.

Non, je ne suis pas une fan des Yankees. Mais je suis New-Yorkaise et je devais bien glisser une allusion à ma ville natale quelque part. **

Comme d'habitude, merci à Runa pour être ma beta-lady ainsi que ma responsable audio ! Les paroles sont copyrightées Maroon 5 « Back at your door ». C'est l'inspiration du chapitre.

Note de la traductrice : Un chapitre bien rempli ! Les amateurs de Sho ont pu apprécier sa performance, ceux de Kyoko ont pu sortir leurs mouchoirs tandis que Kanae en a soufflé plus d'un ! L'histoire se corse mais Ren a plus d'un tour dans son sac, n'est-ce pas ? J'espère que vous avez pu saisir toute la puissance de la trame^^ Miki bozu de lire en tout cas cette traduction qui je l'espère rend hommage comme il se doit au talent de Mystic-Rains. Ladymangas je t'adore pour être ma propre Relectrice-chasseuse-de-fautes-de-frappe sur cette fic démentielle^^'

*Corn pour Kyoko c'est l'Homme de sa Vie, c'est … pas Shou de sûr. En Français ça signifie maïs, d'où l'incompréhension de Shoko à la mention de ce nom.

**Les Yankees sont l'équipe de baseball de New-York par excellence. Comme les Red Sox pour Boston (Je ne suis pas de là n'empêche).

Paroles que j'ai dû traduire pour la compréhension de cette fanfic dans leur version originale :

And I know what your friends say

"He's just wasting his love and time"

I will never let you change your mind

ff, ms, 10/10-01/13, translation, skibi

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