Défi : "Toute première fois" : La chèvre et ses books

Jan 23, 2011 15:23

 

La scène se passe dans la salle des professeurs par cette douce soirée de septembre 1971. Un maigre feu brûle dans l’âtre ; les soirées sont déjà fraîches. L’automne est là précocement. Leurs visages éclairés par les flammes dansantes, quatre professeurs bavardent. Les directeurs de maison, la sèche McGonagall veillant sur Gryffondor, le grassouillet Slughorn mi-sourire passant rêveusement son index rondouillard sous son épaisse moustache de morse, l’encore jeune mais épanouie Chourave, nouvellement nommée directrice de Poufsouffle dont le décolleté généreux n’échappe pas à l’œil de son voisin (et pour cause : ils sont juste au même niveau) le minuscule professeur Flitwick perché sur sa chaise comme le symbole de Serdaigle sur son perchoir, échangent anecdotes et cancans autour d’une tasse de thé.

Une pause bien méritée après une journée de classe, avant de rejoindre leur bureau pour quelques corrections ou régler divers problèmes entre élèves en salle commune. Un rituel ancré dans leurs pratiques comme le crachin sur le sol britannique (et le whisky dans les gosiers écossais ; ou à défaut, la bière).

Le directeur est encore absent. Sans doute quelque obligation administrative, un parent harcelant ou inquiet ou une nouvelle livraison de chocogrenouilles. C’est pourquoi, lorsqu’un bruit de pas retentit depuis le couloir, toutes les têtes se tournent dans cette direction, s’attendant à son entrée. Mais les pas furibonds n’annoncent nullement le débonnaire directeur…

Irma Pince (faisant une entrée virulente, un sac à la main qu’elle dépose la porte franchie) : Au chenapan ! Au sacripant ! Au garnement ! A l’arsouille ! Justice Saint-Jérôme ! Je vais le pendre, je vais l’assassiner, je vais lui couper la gorge s’il me dérobe un seul portulan !

Flitwick (de sa voix pointue) : Qui peut-ce être ? Qu’est-il advenu ?

McGonagall (persiflage haut perché et nez pointant en cap) : Ah vous n’allez pas l’encourager ! Demeurez « Avare » de telles questions ou vous allez relancer son débit (murmuré en direction de Slughorn) et pas de boissons malheureusement… (Se tournant maintenant vers la bibliothécaire) Alors, nous direz-vous le nom de celui qui en veut à vos précccccieux ? Encore l’un de mes gryffondors ? Black ou bien Potter ? A moins que ce ne soit les deux ; on me l’a dit, il faut que vous vengiez car, si ce n’est eux, c’est donc leurs pairs ou encore l’un des miens !

Irma Pince (se drapant dans sa vertu outragée, la vieille fille attrape le minuscule- supplément de la Gazette traînant là pour frapper Flitwick sur la tête ; s’en prendre aux plus petits, quelle belle mentalité ma foi. Le Quidditch news étalant ses énormes photos à la une ou mieux, l’épais bottin sorcier auraient moins souffert de l’expérience. Mais que fait la S.P.J.* ?) : Pas la peine de me regarder tous, et de vous mettre à rire ! Vous verrez qu'ils auront part sans doute aux vols que l'on me fera. Allons vite, des délateurs, des montreurs du doigt, le concierge, le Directeur, des chaînes, des potences et des bourreaux. Je veux le faire prendre devant tout le monde ! Black et Potter, ces gibiers de potence ne sont pas en cause, pour une fois. C’est encore « lui » ! Toujours « lui » ! Slughorn, quand vous ferez vous obéir des élèves de votre maison ! Un simple, un ridicule premier année ! (Arrête sa diatribe et bras croisés sur le journal cabossé, paix à son encre, toise le rondouillard directeur de Serpentard.)

Slughorn (demeurant confortablement vautré dans son fauteuil au coin du feu, lève un sourcil narquois et son petit doigt en l’air, afin qu’il suive sa main portant la tasse de thé à ses lèvres) : Encore « lui » ? (énorme soupir provoquant un tsunami dans la tasse ; vive les soucoupes) Très chère Irma, je vous répète que je n’ai aucun soucis avec cet élève. Un brillant jeune esprit, d’une somptueuse délicatesse dans le touillage à la spatule malgré sa jeunesse. Et vous verriez avec quelle minutie il débite les ingrédients. Une perle !

McGonagall (se moquant affectueusement) : Une perle noire. Que faites-vous donc de ma Lily Evans dont vous vantiez tant les mérites encore la semaine passée ? Déjà oubliée dans les vapeurs d’une de vos potions ? Est-ce le rouge de sa chevelure qui vous indispose ou celui de sa maison ? Avouez que vous seriez ravi qu’elle appartienne à la vôtre.

Slughorn (reposant soucoupe et tasse) : Qui ne le serait pas ! Aussi charmante que brillante, un caractère agréable. Il suffit de la voir s’entendre aussi bien avec les élèves de sa maison qu’avec les miens, très chère et…

McGonagall (coupant abruptement son collègue) : S’entendre aussi bien avec LES élèves de votre maison ! Fichtre non ! Juste avec un seul ! Avec « lui » uniquement. Quant à son caractère, je crois que Black et Potter n’en ont pas la même opinion que vous. Si elle ne change pas, dans quelques années elle sera une parfaite préfète.

Chourave : Mais de qui parlez vous donc ? Qui est ce « lui » dont vous parlez tous ?

Irma Pince (toisant avec dédain) : Votre esprit est troublé ! Vous ignorez où il est, qui il est et ce qu’il fait ? Hélas, ma pauvre directrice des Poufsouffles, ma pauvre directrice, ma chère amie, on vous a privé de raison. Et puisqu’on vous l’a enlevée, vous avez perdu votre support, votre perception, votre esprit…

Interrompant la discussion, Albus Dumbledore le directeur (qui ignore encore sa fonction au juste ?) fait son entrée, côté cour, ou plutôt côté court, personne ne l’ayant entendu entrer.

Dumbledore : Je vous souhaite le bon soir à tous. Puis-je vous questionner sur la teneur de la discussion que vous menez avec tant d’entrain ?

Chourave (pouffant à moitié) : Irma nous joue sa grande scène VII de l’acte IV de la bibliothécaire injustement flouée par un élève, une premier année de Serpentard d’après ce que j’en ai compris. Mais j’ignore qui il est et quels sont les faits qui lui sont reprochés.

McGonagall et Slughorn (en chœur, un sourire en coin) : Toujours le même.

Dumbledore : Encore « lui » ?

Irma Pince (satisfaite de trouver enfin le bon interlocuteur) : Oui.  C'en est fait, je n'en puis plus. Il faut qu'avec beaucoup de soin  « on » ait épié l'heure;  et l' « on » a choisi justement le temps que je parlais à ce charmeur de concierge. Sortons. Je veux aller quérir le fautif, et faire donner la question à toute sa maison : vous verrez qu'ils ont part sans doute au tort que l'on m'a fait. (Attrape Dumbledore par le bras et tente de l’entraîner loin des ricaneurs enthéïnés)

Dumbledore (ne bougeant pas d’un poil de barbe ; c’est un roc, c’est un pic, c’est un…. hum… cet homme-là) Ma chère Irma, m’expliquerez-vous ce que vous « lui » reprochez cette fois ou dois-je consulter une voyante ?

Irma Pince : Il était une fois de plus attablé à un écritoire ; ceux de la dernière travée, les plus isolés, loin de la lumière et surtout, de ma chaire. Premier arrivé après les cours et dernier à sortir comme toujours. Heureusement, je n’ai plus à appeler notre concierge à la rescousse pour parvenir à le déloger. Je le gardais cependant  à l’œil. Sa besace était trop volumineuse pour être honnête. J’ai pensé dans un premier temps qu’il cherchait à dérober un de mes préc… ouvrages, soupçon renforcé par ses nombreux va et vient  entre mes rayonnages ; ceux des Potions ont sa préférence. (Sourires débonnaires des directeurs de l’école et de Serpentard) Mais non, son dessein était bien plus infâme. (S’arrête et toise son auditoire jouant sur la dramatisation de sa narration)

McGonagall (nullement impressionnée) : Oh arrêtez avec vos airs de tragédienne « en tics » ! Nous apprendrez -vous enfin ce qu’il a commis de si grave pour que vous troubliez ainsi notre breuvage ?

Irma Pince : (se drapant dans son susceptibilité froissée mais le journal est trop cabossé et Flitwick trop éloigné) J’y viens ! Si vous ne m’interrompiez pas sans cesse… (Mauvaise foi off ; soupire et reprend) N’écoutant que ma conscience professionnelle, j’attendis l’un de ses nouveaux départs dans les tréfonds de mes rayonnages pour perquisitionner son cartable et j’y trouvais… CECI ! (est partie chercher l’objet du délit du sac qu’elle avait déposé en entrant : un nounours rapiécé)

Un silence règne sur la salle…

Le professeur Chourave retient difficilement ses gloussements de rire tandis que le professeur Slughorn se prend soudain de passion pour l’entretien du feu, juste dérivatif à son hilarité comme en témoigne les tressaillements compulsifs de sa moustache. Le professeur McGonagall reste plantée, bien droite dans son siège, contemplant la bibliothécaire d’un air navré et pincé tout à la fois, mimique nécessitant une longue expérience professorale. Quant au professeur Dumbledore, il se contente de recueillir « l’objet du délit ».

Dumbledore (gratouillant le ventre du nounours) : Comme il est meugnon ! Regardez (il désigne la queue de la peluche), il a même été recousu avec amour.  (S’adressant à nouveau à la bibliothécaire) C’est un « nounours ». Nous direz-vous en quoi ce plantigrade menace vos ouvrages ?

Irma Pince (plus froissée que le dernier devoir de Pettigrow trainant au fond de son sac) : Ce nou… Cet objet n’était pas seul. Il côtoyait en plus des parchemins vierges, plumes et encre, une chandelle et un pyjama.

Dumbledore (soupirant) : Arf, il a recommencé. La réponse négative à sa lettre n’ayant pas été suffisante, je l’avais convoqué dans mon bureau après sa deuxième tentative pour lui réitéré mon refus et expliquer pourquoi sa requête ne pouvait obtenir mon accord.

Chourave (revenant à la rescousse) : Quelqu’un va-t-il finir par m’éclairer ! Je ne comprends rien à tout ce que vous racontez ! Qui a recommencé ? Quel est le dangereux récidiviste de première année et quel est son crime ?

Slughorn (reprenant part à la conversation) : Il s’agit d’un de mes plus jeunes élèves, le petit Severus Snape, l’ami de Lily Evans. Le seul crime dont il est coupable est d’aimer passionnément les livres. (A Irma Pince) Seriez-vous jalouse très chère ? Pour ma part, j’ai bien du mal à lui reprocher ce penchant.

Dumbledore : Mais de là à demander un changement de dortoir pour la bibliothèque, il est un pas que je ne saurais franchir.

Chourave (étonnée) : C’est le petit timide mais très sérieux toujours habillé de tenues sombres et un peu trop grandes ? Il vous à demander à ... ?

Irma Pince : (pincée) … à envahir Ma bibliothèque, oui !

Dumbledore : Timide n’est pas le qualificatif que j’emploierais. Réservé, observateur et légèrement misanthrope ; il a quelques difficultés à se lier d’amitié avec ceux de sa maison…

McGonagall : (en apparté, désolée) : Après « l’Avare », le « Misanthrope ». Ce n’est plus une école mais un théâtre… dramatique.

Dumbledore (poursuivant comme si de rien était) : ... et assoiffé de connaissances, ce qui explique son goût pour les livres et le lieu qui les renferme. Il m’a écrit une supplique, charmante, naïve et touchante, pour obtenir l’autorisation de placer son lit dans le vieux placard à balais de la bibliothèque, prétextant ses difficultés relationnelles avec ses pairs et les exigences d’apprentissage de sa scolarité. Vous avez entendu la suite. Mon refus ne l’a pas découragé. Alerté par une lueur visible en pleine nuit, notre concierge l’a débusqué une première fois. Sermonné par mes soins, il a pourtant recommencé en vain et s’apprêtait à une nouvelle tentative.

Irma Pince : (outrée) L’exploit ? Laissez-moi rire (elle n’en donne pourtant pas l’impression). Ne voyez-vous pas qu’il risque de déclencher un incendie !

McGonagall : Je vous en prie, nous ne sommes pas à Alexandrie.

Dumbledore (s’interposant pour éviter le crêpage de chignons tout en continuant à expliquer au professeur Chourave) : Si vous l’aviez vu le premier jour ! J’étais justement à la bibliothèque ce jour-là. Quand Severus Snape arriva dans la bibliothèque, ce fut un ravissement général. Jamais de vieux grimoires il n’en avait vu d'aussi jolis. Il les ouvrit comme autant de merveilles. Toute cette  gamme lui mit  le cœur en fête. Le petit Severus était heureux ! Plus de borne, plus de limite... rien qui l'empêchât de bouquiner, de dévorer à sa guise... C'est là qu'il y en avait des livres ! Et quels livres ! Poussiéreux, analystes, corrélés, comptant parfois plus de mille pages... C'était bien autre chose que les étagères de sa maison. Ici, les étagères étaient si hautes !...

Toute une forêt de tomes innombrables débordant de formules !... L’élève renfermé, courait et s’émerveillait le long des rayonnages. Puis, tout à coup il se redressait d'un bond sur ses jambes. Hop ! le voilà partie, la tête en l’air, à travers ses cheveux longs, tantôt sur une pile, tantôt au fond d'un écrin, là-haut, en bas, partout... On aurait dit qu'il y avait dix Severus Snape dans la bibliothèque. C'est qu’il n'avait peur de rien le Serpentard. Il soulevait d'un bras de lourds dictionnaires vieillots qui l’empoussiéraient au passage. Alors, tout éternuant, il allait le déposer sur quelque pupitre proche et se secouer loin des fragiles feuillets... Une fois, s'avançant au bord du bureau, un sourire aux lèvres, il aperçut devant, toute sèche en sa chaire, le maître de ces lieux avec les yeux clos. Cela le fit rire aux larmes.  (Ainsi que les professeurs écoutant mais pas une certaine personne)

- Que c'est débile ! dit-il ; comment peut-on dormir là-dedans ? Pauvre être ! De ce savoir toute entourée, elle se croyait au moins plus intelligente que le reste du monde...

En somme, ce fut une bonne première journée pour le petit Severus Snape. Vers le milieu de la soirée, en feuilletant de droite à gauche, il tomba sur Melle Pince enfin éveillée en train de renvoyer les retardataires. Notre jeune élève en robe verte fit sensation. Il lui donna le plus grand mal à partir hors de ces lieux depuis longtemps...

Irma Pince (Sentant la narration tourner en sa défaveur, interrompt les épanchements du vieux schnock du directeur) : Je constate que vous n’avez trouvé aucune solution à ce problème ambulant. Il est pourtant aisé : un renvoi pur et simple pour manquements graves et répétés au règlement de cette école !

Les directeurs de maison (choqués) : OOOOhhhhh !

Slughorn : Ou lui proposer votre place après ses ASPICS.

Les directeurs de maison (ricanants) : Hihihihihihi

Dumbledore (avant qu’Irma Pince n’est fini d’ouvrir la bouche pour protester) : Nous verrons tout cela après le repas. Je le convoquerai encore Irma, et finirai bien par lui faire entendre raison. (Se tournant vers les directeurs de maison) Il me semble que vous êtes attendus dans vos salles communes respectives. Je ne vous retiens pas davantage.

Slughorn (se dirigeant vers la porte accompagné de ses consoeurs) : Dois-je donner une punition au jeune Snape Monsieur le Directeur ?

Dumbledore : Ce serait justifié mais je peux m’en charger si vous préférez. A moins que vous ayez déjà une idée.

Slughorn : Absolument ! Je songeais à lui donner un long devoir de recherche sur les ingrédients inusités dans des potions étudiées en première année.

Dumbledore : Voilà qui me paraît tout à fait approprié. Où se dérouleront ces longues recherches ? Dans vos cachots sous votre surveillance ?

Slughorn : Impossible. Je n’y ai pas assez d’ouvrages… A la bibliothèque bien sûr ! Qu’en dites-vous…

Et tout ce petit monde sort, sous les rires des professeurs et les piaillements de dépits de la bibliothécaire…

....................................................

* S.P.J. Société Protectrice des Journaux… Flitwick est bien assez « grand » pour se défendre tout seul ^^

défi: toute première fois, irma pince, horace slughorn, albus dumbledore, severus snape, fanfic, pomona chourave, minerva macgonnagal

Previous post Next post
Up