Quelques notes sur N dans Best Wishes! ~

Apr 01, 2013 15:03


Après la diffusion du BW118 et l’officialisation du canon concernant le passé de N dans l’univers de l’anime, j’ai pensé qu’il serait intéressant de mettre quelques petites choses en perspective et de faire quelques comparaisons avec le traitement des jeux ! En se focalisant principalement sur la représentation de l’enfance de N (cette fameuse chambre) ainsi que sur le rôle et la responsabilité de N au temps présent entre les deux médias.

ET FORCÉMENT, C’EST PARTI DANS TOUS LES SENS, MAIS TOUJOURS EN LONGUEUR, ET JE ME SUIS RENDUE ENCORE PLUS TRISTE EN CONTINUANT DE RÉALISER DES IMPLICATIONS DE-CI DE-LÀ. SATOSHIIIIII, TON SQUISH EST MAUDIT.



Même avant l’irruption de Reshiram, élément perturbateur pour les plans de Ghetsis et pour le déroulement narratif tel qu’il avait été présenté dans les jeux Black & White, on peut noter quelques éléments distinguant les deux univers dès le passé raconté par N dans l’anime : Ghetsis et les sbires Plasma portent, notamment, leurs vêtements de Black 2 & White 2, soit ceux de la nouvelle Team Plasma. Sur ce point, il est probable que la justification soit d’ordre méta, afin d’éviter de troubler les spectateurs :

- la Team Plasma, habillée dans son ancien design, aurait dû apparaître dans les épisodes supprimés (anciens BW023 et BW024) mais n’est finalement jamais intervenue devant les protagonistes. Elle a donc été inexistante jusqu’ici pour les pour les spectateurs. Le choix du « nouveau » design pour représenter la Team Plasma semble plus logique si l’on considère que l’anime est dans sa partie Season 2, assurant la promotion des jeux Black 2 & White 2 ;





- puisque le scénario de Black & White a été avorté, il n’y a, au final, pas eu de séparation donnant naissance aux deux teams, donc aucun besoin ni justificatif pour distinguer les deux designs entre ancienne Team Plasma (cherchant, juste officiellement ou bien sincèrement dépendant des agents, le bien des Pokémon) et la nouvelle Team Plasma (cherchant à conquérir Isshu) qui s’en est démarquée par la suite. N n’étant pas resté suffisamment longtemps pour devenir leur chef, la Team Plasma des souvenirs de N était déjà loyale à Ghetsis et est restée de son côté après l’intervention de Reshiram. Cela dit, le design de la nouvelle Team Plasma nous indique peut-être, justement, que depuis le début, la Team Plasma de l’anime n’était pas exactement semblable à celle des jeux, et que les plans de Ghetsis étaient déjà différents à l’époque de la jeunesse de N.

Jusqu’ici, et peut-être que ces informations ne seront jamais données, on ne sait pas quelles étaient, dans l’anime, les intentions de Ghetsis concernant N. La seule déclaration qui a été faite au petit N concernait son avenir « en tant que chef de la Team Plasma » ; mais il n’y a aucun moyen de savoir si cette position devait s’exprimer comme dans les jeux Black & White (N devenant leur Roi, la Team Plasma se plaçant du côté de la moralité, se montrant en apparence plus insidieuse, pacifique et donnant des allocutions publiques pour convaincre et persuader la population, tout en commettant officieusement des exactions violentes mais non-publicisées dont N ignorait lui-même une partie - celles des violences physiques faites aux Pokémon) ou bien suivre des modalités plus proches de Black 2 & White 2 (la Team Plasma ne cherchant pas à cacher ses intentions de conquête, ne cherchant pas la collaboration consentie de la population, ayant recours à la violence sans s’en cacher). Dans l’anime, les intentions de N, si Reshiram n’était jamais intervenu, auraient pu être les mêmes que dans les premiers jeux (certes nobles, mais tolérant les violences faites contre les humains et s’exprimant dans un mode tyrannique et oppressif, l’aveuglement de N le poussant à calquer sa vision du monde sur la réalité sans prendre en compte les intérêts et le bien-être des uns et des autres) et conciliées avec les procédés plus directs de la Team Plasma des séquelles, d’où le design de la nouvelle organisation.





Le deuxième élément par lequel l’anime se distingue de Black & White dès l’enfance de N concerne notamment sa chambre. C’est un lieu significatif, visité juste avant la dernière confrontation contre N dans les jeux, et la seule vision que nous avons de l’enfance de N dans l’anime. Bien qu’existante et indiquée comme « le monde de N » dans les deux univers, elle est toutefois représentée différemment dans les deux cas.

Dans les jeux, le personnage-joueur la visite dépeuplée, mais porteuse des traces de présences passées incitant à reconstituer le mode de vie de N. Un jeu d’enquête s’opère et cherche à instiller le malaise à travers une série de décalages : la pièce est totalement hermétique mais brillamment éclairée (la lumière est artificielle), elle est organisée sur le mode de l’inversion (le sol représente un ciel nuageux, et un wagon, soit un objet usuellement terrestre, est coincé dans le panier de basket, en l’air), elle accueille des mouvements perpétuels mais mécaniques et non-vivant (l’avion accroché au plafond, le train au sol). Son état dégage une idée d’habitation récente (les jouets sont sortis, il y en a des vieux et des plus récents), mais également de violence à travers le désordre qu’elle abrite : les cubes sont éparpillés, le tableau est penché, le trajet du train est endigué et coupé (les rails sont bloqués, le train répète les allers-retours d’un trajet biscornu sans jamais effectuer un circuit uni et complet) et un wagon se trouve dans le panier de basket (quelqu’un a jeté l’objet à cet endroit). Les notes de jeu apparaissant au contact des objets rendent également compte d’une présence anonyme (malgré l’évidence de son identité) en s’attardant sur leur état. Cette présentation encourage l’immersion du joueur derrière son personnage-avatar : il est mentalement mis à contribution, appelé à reconstituer les actions qui ont mené à ces conséquences, guidé par ces objets qui dévoilent une part de la personnalité de N, modelé dans et par cette chambre. Tout cela avec, en fond, une nouvelle version du thème de N (déjà entendu, déjà connu, donc reconnaissable), cette fois en boîte à musique, soit un mélange entre des consonances traditionnellement enfantines et un air qui ne l’est pas - de la même façon qu’un individu apparaissant comme un adulte aurait récemment joué avec des jeux d’enfants. De façon générale, la chambre se présente comme une clef de compréhension pour déchiffrer le N présent, tordu, solitaire, aux responsabilités de chef mais aux attitudes et réactions puériles.



Dans l’anime, le flashback propose une vision directe de la vie de N au sein de la chambre. Les couleurs y sont plus sombres (la lumière n’est pas drue et la moquette n’est pas aussi clair que le ciel des jeux) et la pièce est un peu plus délabrée (des fissures sont visibles sur les murs de pierre, là où les jeux proposaient un dallage noir et blanc lisse). Le lit, absent dans les jeux, signale désormais que cette pièce est un lieu de vie permanent. Cette vision subjective (il s’agit d’un souvenir de N, forcément marqué par un ressenti) insiste davantage sur le mode d’enfermement en lui-même plutôt que ses conséquences (le modelage de N), en mettant en avant l’obscurité, l’isolation, l’immobilité (il n’y a aucune trace de technologie, le seul mouvement est celui provoqué par N lorsqu’il se renvoie le ballon) et l’oppression. Les proportions de la chambre semblent gigantesques par rapport au petit corps de N, et dégagent en-même temps une sensation d’étroitesse à travers les rainures de la moquette, rectilignes, constituant deux carrés concentriques qui se font la continuation des limites des murs.





La porte de la chambre apparaît à deux reprises dans ce souvenir, et jamais pour évoquer la sortie mais la pénétration d’autres individus : Ghetsis se tient dans l’encadrement, mais c’est également par cette ouverture que Helena, Verbena et les Pokémon visitent N. Ces deux scènes, représentatives du passé de N, sont dépeintes de façon dichotomique.

D’un côté, la visite de Helena et Verbena les présente comme des alliées et des égales : elles apportent la lumière (celle du couloir derrière elles), la compagnie (elles viennent avec des Pokémon) et les couleurs (celles de leurs corps, de leurs vêtements et des Pokémon). Elles provoquent le mouvement, puisque N, qui était assis et essentiellement immobile avant leur arrivée, devient un corps particulièrement actif à leur vue. De plus, ni les Pokémon ni Helena et Verbena ne dépassent N en taille. De façon générale, ces nouveaux arrivants constituent une présence rassurante, une part complémentaire mais similaire à l’univers de N, d’où sa remarque au présent expliquant que, même s’il ne sortait pas, « il ne se sentait pas seul ».









Au contraire, Ghetsis, lorsqu’il apparaît dans l’encadrement de la porte, domine totalement N : il est bien plus grand que lui, N reste immobile, ses vêtements clairs sont opposés à la cape noire de Ghetsis. Sur l’image, N est visuellement emprisonné par la rainure de la moquette et l’ombre de Ghetsis, doublée à gauche de l’image. La silhouette de Ghetsis imprimée au sol insiste, de plus, sur l’aspect diabolique du personnage - ses cheveux dessinent des cornes de diable au-dessus de N.





Ce portrait introduit dès lors un rapport de supériorité entre Ghetsis et N, au bénéfice de Ghetsis. Ce rapport s’avère d’autant plus ironique qu’à cet instant, Ghetsis est précisément en train d’annoncer à N qu’il est amené à devenir « le plus grand chef de la Team Plasma » : les mots et la réalité physique ne concordent pas ; les mots de Ghetsis sont mensongers ; Ghetsis est le seul en contrôle.

Il n’y a toutefois pas que la chambre. D’un point de vue mental, N, dans sa vie au château, est présenté rétroactivement comme coupé du monde sur tous les plans.

- Au niveau de sa vie personnelle, le N du présent explique n’avoir aucun souvenir d’une vie avant le château. Il se différencie des jeux, dans lesquels il se rappelait de sa vie à l’extérieur et de Ghetsis venant un jour, l’extrayant de la forêt et l’amenant dans son palais. Ces informations étant évoquées dès la scène d’ouverture de Black & White puis par N dans Black 2 & White 2, elles n’étaient pas secrètes mais assumées par N comme une part de lui-même le définissant en tant qu’individu.
Peut-être le N de l’anime se remémorera-t-il des images oubliées dans les prochains épisodes mais, pour le moment, il n’en a pas fait état : N n’a pas de passé, le château constitue sa seule origine et il y aurait toujours été enfermé. Sa personnalité est donc moins complète, tronquée par rapport au jeu, mais cette absence participe donc à conforter l’emprise que Ghetsis a sur lui, ayant toujours manipulé toutes les informations que N recevait du monde.



- Au niveau de sa vie familiale et émotionnelle, N n’a pour le moment jamais décrit sa relation avec Ghetsis comme relevant d’une dynamique ne serait-ce que vaguement assimilable à une relation père-fils. Dans les jeux, le nom était lisible sur le ballon de N dans sa chambre, Ghetsis revendiquait lui avoir fait porter le nom « Harmonia » lors des dernières révélations du Palais, et N l’appelait même « père » lors de leur confrontation de Black 2 & White 2.
Le nom « Harmonia » a été totalement absent dans l’anime jusqu’ici. N va même jusqu’à rejeter l’hypothèse d’une attache affective : lorsqu’il raconte avoir vécu toute son enfance au château, Dent fait remarquer que des personnes cherchent parfois à préserver un individu qui leur est « précieux » en le protégeant à l'intérieur, mais N le nie aussitôt en signalant qu’il a été élevé ainsi dans un but intéressé, pour servir des desseins étrangers. Aucune attache émotionnelle ne le lie à Ghetsis, Ghetsis étant uniquement présenté comme un inconnu éduqué N dans une visée utilitariste.

- Au niveau de son implication consciente, N est présenté comme une personne trompée. Helena et Verbena racontent avoir cru les paroles de Ghetsis tant qu’ils étaient en présence, mais qu’elles n’étaient que « mensonge » ; que leur pouvoir de comprendre les Pokémon a été « utilisé » (et leur ton de regret et leur position à ce moment, leurs mains sur leurs bras, renvoient une idée de souillure, de perte d’innocence). N lui-même affirme ne pas savoir ce que planifiait réellement Ghetsis. Il dit avoir été convoqué pour une « cérémonie », mais il ne décrit pas son but - on ne sait pas, au début, si l’omission était consciente ou si N ne savait réellement pas quel était son objectif, mais il affirme au temps présent qu’il ignore toujours sa nature. La cérémonie rappelle, bien sûr, le couronnement des jeux ; mais telle qu’elle est montrée, il n’y a aucun moyen de savoir si celle de l’anime avait ce rôle et, considérant l’absence de couronne, c’est même improbable. N se décrit comme un agent passif et ignorant, pas comme un chef agissant.







- Le contraste entre les vêtements noirs de Ghetsis et ceux de N revient encore une fois lors de la cérémonie, N y portant une cape blanche. L’utilisation de l’apparence de Ghetsis de Black 2 & White 2 permet une vision bien plus tranchée par rapport au couronnement des jeux, où l’ancien design de Ghetsis était lui-même était porteur de ce contraste (son bras gauche clair par rapport à son bras droit noirci, une moitié de sa robe claire et l’autre foncée). Fidèle à la tradition des jeux, l’anime n’a pour l’instant jamais montré le bras droit de Ghetsis, ce qui permet, d’un point de vue symbolique, de renforcer l’idée d’une manipulation et d’une menace : la main droite est, traditionnellement, la main « honnête », la main de la vérité, tandis que la main gauche est la main sinister (sinistre), la main du diable, la main du mensonge. Ghetsis cache le côté de la vérité et ne donne à voir que la tromperie.







- Les Sages tels qu’ils apparaissent lors de la cérémonie ne sont pas identifiables par rapport aux jeux. On ne les voit pas d’assez près pour déterminer si Vio est l’un d’entre eux (sachant que lui a un artwork officiel), il pourrait s’agir d’autres individus. Leurs vêtements ne sont pas aussi personnalisés que dans Black & White, ils sont indifférenciés, anonymes - et ils sont les seuls témoins de la cérémonie. D’ailleurs, Ghetsis, qui avait déjà un statut à part lors de celle des jeux (il apportait la couronne à N, il se tenait à ses côtés sur l’estrade), tranche encore plus avec les autres Sages dans l’anime : ses vêtements sont différents, il n’est jamais mélangé à eux, il se tient face à N et non plus en retrait par rapport à lui, et sa canne est le seul élément doté de l’emblème Plasma (là où les costumes des Sages, dans les jeux, l'affichaient également), ce qui contribue à le poser comme le symbole d’autorité.







À la différence des jeux, où le couronnement était également observé par les deux déesses, le nombre de témoins est ici réduit (on ne les voit pas sur le balcon). N lui-même est, à ce moment, séparé des Sages, seulement face à Ghetsis mais sans signe de supériorité (il n’a pas la couronne ; Ghetsis a sa canne, qui peut rappeler un sceptre, soit un objet de puissance), ce qui contribue à accentuer son isolation et son infériorité.



N stipule que la cérémonie avait eu lieu « deux ans auparavant », ce qui correspond au temps écoulé entre Black & White et Black 2 & White 2. On peut supposer que le N de l’anime avait le même âge que celui des jeux lorsqu’elle s’est déroulée (sous la forme du couronnement qu’on lui connaît). Néanmoins, l’univers de l’anime, à partir de ce point, dévie alors bien plus explicitement de la route présentée par Black & White : Reshiram avorte le scénario qui s’y déroulait, ne lui laissant aucune possibilité d’existence.

L’apparition de Reshiram se caractérise par plusieurs éléments intéressants :

- Il surgit par un mouvement descendant et repart par un mouvement ascendant ; il vit dans le ciel, ce qui rappelle son autorité divine.







- Sa couleur blanche le place, chromatiquement, du côté de N et en opposition à Ghetsis.

- Il s’agit du dragon légendaire de la « réalité » et, surtout, de la « vérité » (Zekrom étant celui du « rêve et de l’idéal ») ; de par sa nature, il entre donc en conflit avec Ghetsis dont le côté droit (celui de la vérité) est caché.

- Son attaque du château constitue évidemment une punition divine. Reshiram détruit l’édifice par ses attaques de feu : les flammes ont traditionnellement un rôle de purification devant une offense ou une souillure. Son intervention fait en effet fuir les Sages et les sbires.





- Reshiram coupe symboliquement le lien psychologique entre N et Ghetsis. Leurs expressions sont différentes (colère en connaissance de cause manifeste ; incompréhension) et présentés sur deux plans séparés.







De plus, N s’était déjà souvenu de son face-à-face avec Reshiram dans l’épisode de sa rencontre avec Satoshi - à l’époque sans en faire part au groupe :







La rencontre avec Reshiram s'est faite sans écran ni intermédiaire. Par comparaison, Zekrom était entouré par des nuages lorsque Satoshi l’a aperçu dans le premier épisode de Best Wishes! : une confrontation divine directe représente, pour beaucoup de mythologies, un danger pour la vie de l’humain mis en sa présence. Dans le cas de Zekrom, Satoshi était protégé par cette sorte de voile ou d’écran (les nuages). Il ne risquait rien. La présence de Reshiram n’a toutefois pas la même signification : elle est directe, proche, frontale, et n’a pas lieu par hasard, mais en réponse à une intention.

N est seul lorsqu’il assiste au départ de Reshiram. Ghetsis n’était plus à ses côtés. De plus, N a manifestement lu dans son cœur, d’où son interrogation à son départ : par l’obtention d’un savoir ignoré par les autres, N montre déjà qu’il reprend une forme de puissance en tant qu’individu, qu’il n’est plus une marionnette qui ne connaît que ce que Ghetsis a voulu lui montrer.





Reshiram a, une première fois, libéré N de l’emprise de Ghetsis à ce moment.

La deuxième forme de libération est placée dans sa continuité : cette fois, les acteurs en sont Helena et Verbena. Leur titre n’a jamais été évoqué dans l’anime mais, dans les jeux, leur statut, bien que jamais justifié ou expliqué, est particulier. Elles sont appelées megami, soit déesses (ou « muses » dans la traduction française), ce qui leur confère un caractère sacré. Leur action est double :

* Physiquement, ce sont elles qui sortent N, inconscient, du château dans lequel ils avaient vécu (été emprisonnés) toute leur vie. Il faisait nuit lors de la cérémonie ; les flammes de Reshiram ont apporté la lumière (soit l’élément qui cache les ombres, les superstitions et les mensonges) et le jour se lève justement lorsque le trio sort du bâtiment. Ils sont d’ailleurs baignés dans la lumière du soleil (bord supérieur droit de l’image).





* Plus abstraitement, ce sont elles qui interprètent les évènements - elles se font le lien entre la divinité et le monde humain. Ce sont elles qui décident de la justesse et de la légitimité du geste de Reshiram ; ce sont elles qui le décrivent oralement comme une punition devant un sacrilège ; ce sont elles qui pointent du doigt que Ghetsis a dû « offenser » Reshiram ; ce sont elles qui désignent Ghetsis comme un individu malveillant par rapport à Reshiram. Ce sont elles qui décrètent la nécessité de fuir, de quitter Ghetsis. Ce sont elles qui, éclairées par Reshiram, dénoncent la « tromperie » de Ghetsis à leur égard.









Leur dimension sacrée sera également perceptible lors de leur apparition au temps présent. Quand Helena et Verbena rejoignent le groupe à la fin du BW117, elles ne donnent pas le moindre signe indiquant qu’elles percevraient les autres personnages (Satoshi, Iris et Dent) ; elles se préoccupent seulement de N, qui est dans un état comateux, soit un espace d’inconscience, d’entre-deux. Helena et Verbena apparaissent elles-mêmes entourées par la brume - le brouillard et les effluves étant un élément classique permettant de communiquer avec le sacré ou bien entourant le passage d’un monde à un autre, mortel à divin, puisqu’ils brouillent les repères et distordent la réalité. Leur arrivée est liée à N et N seul. Celui-ci se trouve dans un état vulnérable, déjà hors de lui, et elles viennent le chercher pour l’emmener dans un autre univers : symbolique (le mettre en sécurité, le ramener à elles) mais également littéral (l’épisode suivant apprendra que le brouillard permet réellement de passer d’un monde à l’autre).









À partir de ce moment, Helena et Verbena sont représentées à deux reprises en train de soigner des êtres : elles acheminent N, un humain mais faisant partie de leur communauté, jusqu’à la mare dans laquelle il sera régénéré (elles catalysent donc un pouvoir surnaturel pour le transmettre au vivant), et elles ont pris pour rôle d’accompagner la convalescence des Pokémon blessés. Elles constituent une présence naturelle, lunaire et représentative du vivant : elles habitent dans la forêt, soit un monde de clair-obscur (obscurité des arbres et forte luminosité tout à la fois), et elles sont liées à la purification et aux soins - le pouvoir de la source d’eau. Ce dernier rappelle, bien sûr, leur maigre présentation dans Black & White, où Verbena (Déesse/Muse de l’Amour) soignait l’équipe du joueur et Helena (Déesse/Muse de la Paix) disait apporter à N la « quiétude ». Dans l’anime, elles guérissent et défendent en effet la tranquillité du repaire, considérant les éléments disruptifs (Satoshi et les autres) comme indésirables et les sommant ainsi de quitter leur paradis caché.





















Helena et Verbena sont celles qui ont achevé d’arracher N à un univers de domination masculine (régi par Ghetsis) ; mais, en contrepartie, elles l’ont fait passer dans un univers féminin (le monde de la forêt auprès d’elles) qui l’emprisonne également. Une fois en leur présence, N ne s’oppose jamais à elles ; il se tait parfois sans soutenir les dires des uns et des autres et, surtout, il les laisse décider de ce que doivent devenir Satoshi et les autres.







Là où le présent de N se révèle particulièrement intéressant dans l’anime, c’est que la libération du trio unitaire (N présente Helena et Verbena comme ses « nakama », ses compagnons et partenaires ; ils sont trois individus en face du trio constitué par Satoshi, Iris et Dent), telle qu’elle est finalement présentée, a été à la fois double et partielle : elle a été émotionnelle et physique (ils se sont émancipés de Ghetsis) mais eux-mêmes reproduisent précisément l’univers qu’ils ont quitté en basant leur nouveau monde sur la ségrégation, l’isolation et le rejet :

* N présente la maison (certes lumineuse, aérée, faisant sentir l’extérieur) comme leur repaire « caché ». Les fissures du bâtiment rappellent celles du manoir de Ghetsis, même si toutes les nuances de clarté lui donnent une atmosphère plus positive ;







* Helena et Verbena rappellent leur désir d’avoir voulu « protéger » N, évoquent leur « errance » avant de trouver cet endroit (il ne s’agissait pas d’un voyage mais de la recherche d’une destination, qu’elles ont fini par trouver en s’installant à nouveau dans un lieu fixe) ;

* les Pokémon présents ont été « emmenés ici » : mais ils sont par-là même isolés physiquement dans cet autre monde ;

* sur le plan verbal, Helena, Verbena et N dénoncent à différents degrés les actes de violence envers les Pokémon. Il ne s’agit plus que de la Team Plasma, un groupuscule spécifique : ils blâment l’espèce humaine toute entière, la dépeignent sous un jour menaçant et hostile. Helena et Verbena iront même jusqu’à affirmer qu’il vaudrait mieux que tous les Pokémon et tous les humains soient définitivement séparés des uns et des autres, et que Satoshi, Iris et Dent ne sont que des intrus pour « la terre idéale des Pokémon », les représentant comme un danger, une souillure potentielle ; comme indignes d’y rester.

Où se placent-elles ainsi que N dans cette dichotomie ? Elles ne se présentent effectivement pas comme humaines sur le plan physique (« les humains » sont les autres, elles vivent dans un autre monde, elles sont présentées à travers un pouvoir de guérison). Elles sont accompagnées par deux Pokémon psychiques, Gothiruselle et Sirknight, connus pour leurs corps humanoïdes et possédant des traits féminins : les humaines comme ces Pokémon possèdent une force surnaturelle et entretiennent le flou de la frontière entre les deux espèces. De la même façon, Helena et Verbena portent tout de même des traces d’ambivalence : elles rejettent la communauté humaine dans son entièreté, se sont réfugiées dans cet espace hors du monde, mais elles évoquent tout de même leur désir d’avoir voulu voir l’extérieur avant de trouver cet endroit.

Lorsqu’elles observent Satoshi et les autres s’amuser avec les Pokémon, depuis l’intérieur alors qu’eux sont à l’extérieur, l’image les montre derrière les barreaux de la fenêtre : comme derrière les grilles d’une nouvelle prison dont elles ne sont pas encore sorties - voire, qu’elles refusent partiellement de quitter.









N se distingue déjà d’elles. En traquant la Team Plasma, il a déjà voyagé ; il a peu à peu changé au contact de Satoshi et des autres, a appris à (partiellement) s’ouvrir et à prendre le temps de comprendre les motivations des Pokémon au lieu de les regarder derrière le filtre de ses principes. Il entendait déjà leur langage et leurs émotions ; il a appris à les écouter. Puisqu’il connaît les deux groupes, il assume le rôle de médiateur entre Helena et Verbena, et Satoshi et les autres : il donne à ces premières un moyen de faire confiance à ces derniers à travers Pikachu et Kibago ; il explique la nature et la fonction de la maison aux nouveaux venus ; il est celui qui raconte le passé (arguant que Satoshi et les autres ont « déjà été impliqués » et les incluant donc, à la différence de Helena et Verbena qui les excluaient d’emblée) ; et il est celui qui interrompt la dispute entre les deux groupes au moment où la Team Plasma parvient à pénétrer leur monde. Quand Satoshi avance qu’humains et Pokémon peuvent vivre ensemble, la dernière réponse de N, sur un ton triste, est : « Si cela pouvait devenir vrai... » - il ne dit pas « qu’il n’y croit pas » (même s’il le rend implicite), son avis est plus nuancé ou, au moins, incomplètement assumé.























De façon générale, c’est le problème de fond des formulations de N depuis le début (et que Helena et Verbena se révèlent partager) : il parle par exclusion, par rejet ou par la négative.

« Je ne te déteste pas » en souriant à Satoshi pour signifier qu’il avait éveillé sa sympathie et son intérêt ; « Je ne peux pas tolérer que les humains utilisent les Pokémon » et acceptant seulement de considérer que leurs rapports ne relèvent pas de l’utilisation lors de rencontres ponctuelles (Miruhog) ; « Tous les humains ne sont pas mauvais » en faisant comprendre à Helena et Verbena que l’espèce entière n’était pas bonne à jeter (mais, toujours, comme si certaines exceptions positives se détachaient d’une norme négative).





Lorsque Helena et Verbena dénoncent le fait que Ghetsis leur a menti, Satoshi et les autres sont montrés par un plan au cadre droit ; mais quand l’image passe à elles, elles sont de travers et l'image continue de s'incliner. Ces plans font finalement écho à ce que N avait dit sur les Pokémon de la maison, expliquant qu’ils étaient « physiquement guéris » mais que leur cœur était « toujours blessé ».





Lors du départ de N, Helena et Verbena, le trio Rocket, pourtant dans un autre endroit, a quelques mots intéressants à ce sujet. Nyarth fait en effet remarquer, en indiquant le brouillard, que tout est « blanc » autour d’eux. Kojirô le corrige alors en le désignant à la place comme des « ténèbres totales » : ils en font ainsi une opposition naturelle à l’idée de clarté, soulignent qu’on ne peut rien y voir.



Le brouillard dans lequel Helena et Verbena vont et viennent est physique, mais leur univers tout entier ne serait-il pas également un brouillard d’aveuglement ?

Satoshi, Iris et Dent représentent un contrepoint : durant leur parcours, ils ont eux-mêmes été témoins de problèmes ou ont personnellement subi des blessures émotionnelles ponctuelles impliquant des Pokémon. On l’a par exemple vu à travers la difficile relation entre Iris et Doryuzu, ou bien, de façon moins spécifique, à travers les Pokémon ayant été abandonnés qui ont été recueillis par Satoshi au cours de ses voyages. Ce n’est peut-être pas anodin si, dans cet épisode, Doryuzu et Chaoboo sont précisément les Pokémon d’Iris et de Satoshi appelés pour combattre la Team Plasma : deux Pokémon ayant ressenti ou subi une trahison par un humain, ayant surmonté cette crise et restauré une confiance mutuelle (Doryuzu), ou bien trouvé chez un autre humain l’estime, l’affection et la confiance anciennement refusées (Chaoboo). Deux Pokémon blessés mais étant parvenus à guérir, à avancer grâce à des humains, et étant à présent des alliés pour combattre ceux qui menacent les Pokémon, les humains, et N, Helena et Verbena eux-mêmes.







Satoshi et les autres n’ont pas vécu la même chose, bien sûr ; ils n’ont jamais été victimes d’abus et de manipulation émotionnelle aussi longue et planifiée ; et eux n’ont peut-être pas eu de travail d’ouverture à faire pour vouloir, comme ils l’ont annoncé, « continuer leurs efforts » afin que les relations entre humains et Pokémon se développent au mieux. Ils se montrent idéalistes, bien sûr, mais avant tout, dans cette situation, présentés comme optimistes face au pessimisme de N et des autres. Les rencontres de Satoshi et des autres ont été plus nombreuses et représentatives des relations telles qu’elles existent entre humains et Pokémon dans l’univers de l’anime ; ils se font donc naturellement les défenseurs de la réalité qu’ils perçoivent en refusant le rejet et en contestant la norme de maltraitance évoquée par N et les autres.











Et continuent d’essayer d’atteindre et de littéralement tendre la main aux Pokémon qui les fuyaient après avoir verbalement exposé leur ligne de conduite ; le trio est toujours en action.









Dans l'arc Episode N, deux épisodes ont été constitués par une bonne part de flashbacks racontant l'origine d'un personnage. Dans le BW118, le passé de N. Mais avant cela, l'anime a rappelé le passé de Satoshi (BW116) et de la relation l’unissant à Lizardon : un passé marqué par une progression, par un voyage physique et mental, par une ouverture. Un passé que Satoshi racontait avec le sourire, là où le passé de N l’interdit à ce dernier. Deux horizons différents, deux vies posées en comparaison.

***

Au niveau de ses actions, l’anime propose un portrait plus blanc de N, le présentant comme une victime passive. Il n’a jamais fait de mal lui-même (puisqu’il n’est jamais sorti du château avant sa fuite), il ignorait les desseins de Ghetsis (et même s’il culpabilise à présent de ne pas avoir tenté de l’arrêter plus tôt, il n’aurait eu aucun moyen ou raison de le faire), il n’a aucune autorité sur les agents Plasma puisqu’il n’a jamais été leur chef (il n’a jamais porté de couronne, symbole d’autorité ; le titre de Roi n’a même jamais été mentionné dans l'anime) et va même jusqu’à recevoir des blessures de la part de simples sbires. Le N des jeux étaient certes plus gris dans son comportement (tyrannique, oppressif, extrémiste, cherchant à imposer sa volonté, même si son intention était peut-être bonne dans son principe et qu’il avait lui-même été initialement manipulé), mais la question de sa responsabilité y a été esquivée sans vraiment apporter de réponse : Adeku (Maître de la région, figure d’autorité) a considéré que N n’y était pour rien (Ghetsis serait le seul responsable), N n’a jamais été jugé, dit que Adeku lui a pardonné et, même s’il a justement réfléchi à la façon de réparer ses actes dans les séquelles, il a voyagé ailleurs et n’a concrètement rien fait. Dès le moment où N est devenu et a assumé le rôle de Roi de la Team Plasma, il était consciemment impliqué, mais jusqu’à quel point y avait-il consenti si cet engagement n’avait pas été effectué en pleine connaissance de cause, en pleine possession de ses moyens, en pleines capacités de jugement objectif ? Ce sont des questions délicates, complexes et risquées, et il est en partie compréhensible que les jeux aient préféré ne pas s’y attarder trop longuement.

Le portrait de N dans l’anime, plus moral que dans les jeux, a avant tout lieu d’être parce que N n’a jamais eu le temps de devenir une victime active et elle-même tyrannique dans cet univers. Il apparaît également décalé, avec des considérations et un comportement tranchant par rapport à des personnages plus sociaux, il se montre autoritaire et dur, il dédaigne la différence ou ce qui ne correspond pas à ses considérations dans un premier temps, mais il ne porte pas la responsabilité d’avoir lui-même causé du mal, ordonné ou incité la Team Plasma à commettre certaines de ses exactions.



Même si la Team Plasma de l’anime accusait déjà des différences avec celle des jeux (N n’a aucun souvenir d’avant le château, la Team Plasma « noire » a toujours été la seule existante, Helena et Verbena n’ont semble-t-il jamais porté le titre de « déesses », Ghetsis a exercé une emprise moins insidieuse sur N et ne s’est, dans ce que l’on a vu, jamais présenté comme son subalterne), Reshiram, en surgissant lors de la cérémonie, a en quelques sortes sauvé N de la route dans laquelle il se teintait le plus.

Néanmoins, l’attitude de N, Helena et Verbena est présentement plus négative que celle des jeux, justement parce qu’ils ont été privés du processus qui leur avait permis de se détacher totalement de l’emprise et de la vision du monde imposée par Ghetsis. L’intervention de Reshiram a provoqué leur fuite et leur mise en opposition, certes, mais cette fuite a été caractérisée et continuée par l’isolation : N n’a plus de passé mais plus vraiment d’avenir non plus, tous les trois étaient seuls en partant mais ils se sont par la suite enfermés dans leur solitude, « à l’abri » mais en se coupant du monde. À la différence des jeux, Helena et Verbena ne sont pas incluses dans une communauté plus large, où elles habitaient certes à l’extérieur de Hodomoe City, mais en périphérie proche, avec de la compagnie humaine (avec Rot, un ancien Sage, et d’anciens sbires en plus des Pokémon) et avec un espoir d’intégration progressif dans la société (la population de Hodomoe connaît l’existence de la maison Plasma et, même s’ils s’en méfient et que les deux groupes ne se mêlent pas énormément, les choses vont en s’améliorant).



La libération de N, Helena et Verbena a, dans l’anime, été gagnée seuls, mais elle apparaît clairement incomplète : ils sont toujours en danger permanent, que celui-ci soit objectif ou internalisé. En effet, au-delà des menaces qui planent sur eux (ils se savent toujours potentiellement pourchassés, N a conscience d’être recherché), leur enfermement est physique et mental : ils n’ont pas encore appris à s’ouvrir au monde et, pire, N, qui commençait à accepter la différence et à cesser de calquer ses présupposés sur les autres, repart en arrière dès lors qu’il est remis au contact de Helena et Verbena.





Par son intrusion prématurée, Reshiram a empêché N de devenir coupable et l’a sauvé sur un plan moral mais, en contrepartie, le conflit des héros n’ayant jamais eu lieu, le présent de N dans l’univers de Best Wishes! en est devenu plus lourd. Il se bat seul contre la Team Plasma (à la différence de Black 2 & White 2 où une faction le soutient), il est en fuite (Ghetsis le recherche) et est toujours englué par les principes que Ghetsis lui a inculqués, dans une vision du monde pessimiste (considérant par défaut que les humains peuvent causer du tort aux Pokémon). Même s’il le considère à présent comme un être malveillant, N, jusqu’ici, ne s’est pas totalement purifié de l’influence de Ghetsis ; et il est justement plus triste de constater que même en ayant compris depuis deux ans que l’éducation de Ghetsis était la cause et l’origine de tromperies, N en soit toujours affecté à ce point, incapable de s’en détacher, voué à les considérer comme normatives alors même qu’il commençait à évoluer.

Ainsi, il est, dans l’anime, à nouveau un personnage gris de l’entre-deux : à la fois parce qu’il apparaît comme un lien entre humains et Pokémon, et à la fois parce qu’il reconnaît les mensonges de Ghetsis comme tels mais ne parvient pourtant pas à totalement s’en extraire, se condamnant ainsi à ne pas intégrer une société dont la logique et les motivations lui échappent. À la différence des jeux, la résistance de N est cette fois passive, basée sur la fuite et l’esquive (Helena, Verbena et lui s’étant littéralement réfugiés dans un autre monde) au lieu d’actes totalitaires. En évitant d’impliquer une large communauté, en se coupant de l’extérieur et de la diversité, N en pâtit personnellement.

L’anime va très certainement proposer une résolution positive sur ce plan, même si on en ignore encore le déroulement. On sait néanmoins que dans le premier des épisodes « climax » de l’arc, N et Satoshi (et Pikachu) vont se retrouver isolés et qu’ils auront manifestement une conversation dans les souterrains : un endroit sombre, au moins partiellement refermé (il y a des briques derrière eux).






Les yeux de N, habituellement, dérangent parce qu'ils n’ont pas d’éclat, parce qu'ils sont mats au milieu des autres personnages ; l’effet sera manifestement dû à un feu mais, lors de cette discussion, N aura tout de même, physiquement, cette lueur à son tour.

Peut-être qu’il faudra visionner la scène comme un écho supposé rappeler la chambre de N, mais où, cette fois-ci, Satoshi et Pikachu seront présents pour l’aider à définitivement se libérer du passé ?

Après la chute physique vient l’anabase, après tout.

MAINTENANT, PLEUREZ SUR L’UNKNOWNSHIPPING AVEC MOI PARCE QUE AAAAAAH BÉBÉS.

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