Titre : Obscurité
Auteur : Bostaf
Thème : Ombre
Genre : fantastique
Rating : G
Nombre de mots : 720
Note : Suite d’Effraction.
La poussière et l’odeur de moisissures le prirent à la gorge et il lutta pour ne pas éternuer. Il n’y voyait rien. Seul un faible rayon de lumière éclairait la pièce à travers le soupirail et c’était loin d’être suffisant. Il sortit alors une lampe de poche qu’il avait eu la prévoyance d’emporter et attendit qu’elle descendît à son tour.
« Claire, appela-t-il d’une voix étouffée lorsque le délai d’attente expira. »
Quelques secondes plus tard, le temps de rassembler son courage, et elle se tenait à côté de lui, faisant elle aussi la grimace face à l’odeur de renfermé. Son regard inspecta rapidement la salle, autant que lui permettait la lueur délivrée par la lampe électrique. Des cartons poussiéreux étaient entassés les uns sur les autres, appuyés contre les parpaings nus des murs de la cave sur lesquels se découpaient leurs silhouettes inquiétantes et difformes tandis que des poutres de soubassement pendaient d’épaisses toiles d’araignées.
« Charmant, murmura-t-elle. »
Il haussa les épaules. La maison avait été abandonnée bien longtemps avant leur propre naissance et il ne se souvenait pas que quiconque soit venu ici depuis une dizaine d’années. Il ne s’attendait pas à ce que la cave fût étincelante. Quant à la masse grouillante d’insectes tapis dans l’obscurité, elle ne pouvait rien contre eux. Il n’y avait pas à s’en inquiéter.
« Sortons d’ici, chuchota-t-elle. »
De la cave ou de la maison ? Il lui saisit néanmoins la main et l’entraina vers la porte, pataugeant dans cette épaisse de poussière sur laquelle tous deux imprimaient leurs pas. La planche de bois craqua lorsqu’il posa un pied sur le premier degré de l’escalier. Elle espéra que les marches n’étaient pas pourries au point de céder sous leur masse. Ses craintes s’avérèrent nulles puisqu’ils parvinrent sans encombre devant la porte qu’il poussa du dos de la main. Elle ne bougea pas.
Il sentit immédiatement Claire arrêter de respirer sous la panique et son cœur aussi accéléra subitement, mais il leur intima à tous les deux de se calmer. Il lâche alors momentanément sa main pour saisir la poignée de la porte et pesa de tout son poids sur le battant. Elle céda avec un petit craquement. Claire s’autorisa alors à respirer de nouveau l’air chargé de poussière mais quelque chose dans l’expression du jeune homme la troubla.
« Anthony ? »
Il secoua la tête : il ne voulait rien lui dire, ce qui la remua encore un peu plus. Néanmoins elle n’insista pas et lui emboîta le pas sans rien ajouter de plus lorsqu’il avança. La cuisine ne lui semblait pas beaucoup différente de la cave. Les fenêtres obturées par les volets clos ne laissaient passer que quelques rais de lumière et, à la lueur de la lampe de poche, elle distingua la même couche de poussière qui recouvrai le carrelage, le plan de travail…toutes les surfaces planes en somme. Cependant un détail attira son attention : une tasse, posée à l’extrémité de la table, en face d’un tabouret qui, à bien y regarder, n’était pas aligné avec les autres, rangées sous la table. Elle frissonna.
Sans cette poussière, elle aurait pu croire que quelqu’un vivait encore ici. Deux assiettes, un verre étaient « en train » de sécher à gauche de l’évier, salière et poivrier étaient sagement posés près de la vieille cuisinière à gaz dont la grille était relevée… Comme si les habitants étaient partis brusquement sans rien prendre.
Tandis qu’elle inspectait la cuisine, Anthony rallia le couloir d’où il pouvait voir la porte d’entrée, l’escalier et le séjour. Il attendit un peu que Claire le rejoignît et joua avec sa lampe de poche, balayant les murs du faisceau lumineux. Ça avait dû être une jolie maison, autrefois. Lumineuse, éclairée par les nombreuses fenêtres. De jolies poutres décoratives traversaient le plafond. Il arrivait même à percevoir les vestiges d’un papier peint jaune qui tapissait les murs de la salle de séjour et sur la table, près du fauteuil, un vieux phonographe qui… Il lâcha sa lampe de poche et n’entendit pas le bruit sec qu’elle produisit en tombant sur le carrelage. La vision d’horreur le pétrifia sur place et le laissa glacé jusqu’aux os.
Deux yeux le fixant. Une silhouette longiligne qui se balançait dans l’ombre. Pendue à une des poutres du salon.
La lumière s’éteignit.