Saint Seiya - Shura/Deathmask/Marine - A#2 - Jalousie

Aug 16, 2011 16:54

Titre : Question de priorité
Auteur : alaiya666
Fandom : Saint Seiya
Personnages/Couple/etc : Deathmask (Angelo) / Shura - mention de Marine
Rating : R
Thème : A#2 - Jalousie
Disclaimer : Masami Kurumada
Notes de l’auteur : toujours contexte UDC, toujours du fangirlisme, de la prise de tête, de l'angst et un soupçon de messieurs tout nus. Antérieur à A#6


27 mai 2005, Madrid, Espagne…

« C’est quoi, cette gueule d’enterrement ? »

Shura n’avait pourtant posé qu’un seul pied dans le salon. La remarque tout en élégance de son compagnon ne suffit cependant pas à le figer sur le seuil de la chambre, et ce fut sans répondre qu’il alla se jucher sur le tabouret, les traits encore chiffonnés par un sommeil haché et le cheveu en berne.

La tasse fumante de café qui se matérialisa sous son nez s’agrémenta très vite d’une tête suspicieuse de Cancer, lequel s’installa en face de lui, fleurant bon le gel douche et l’eau de toilette du Capricorne. Depuis combien de temps l’Italien était-il debout, Shura n’en savait fichtre rien, si ce n’était que c’était son absence à ses côtés qui l’avait tiré de son cauchemar.

Le souvenir de ce dernier dut très certainement lui allonger un peu plus la figure, car de critique, le regard d’Angelo passa au mode inquiet :

« Hé… fit doucement ce dernier, tu es sûr que ça va ? » Relevant la tête, l’Espagnol finit par consentir à un sourire qu’il espérait rassurant. Après tout, l’un et l’autre avaient parfaitement intégré - par la force les choses - la gradation tacite contenue dans le “ça va ?” qu’ils étaient susceptibles d’échanger sous peine de s’entendre répondre un non sans autre variation.

Donc, non, Shura n’allait pas bien, comme chaque jour que les dieux faisaient. La douleur était là, tapie quelque part dans un coin de son cerveau toute prête à jaillir de sa boîte telle un clown à l’humour douteux. Il devait mesurer chaque geste accompli du bras gauche, se montrer chiche et précautionneux et même cela pouvait s’avérer insuffisant à lui épargner crises de souffrance et accès de paralysie. Sans oublier, bien entendu, les dommages collatéraux de ce dommage physique, lesquels oscillaient entre profonde déprime et colère impuissante.

Angelo avait une conscience aiguë de la situation et en cet instant, ce n’était pas les altérations familières qu’il pistait sur le visage de son vis-à-vis, mais bien ce qu’il n’avait pas l’habitude d’y trouver. Et qui nourrissait une tristesse inédite dans le regard sombre et étroit du Capricorne.

« Ça va aller, ne t’inquiète pas.

- Mouais. » Le Cancer désigna le café du menton : « Tu devrais le boire tant qu’il est encore chaud. » Et de mettre son propre conseil en application, tout en allumant sa première cigarette de la journée.

Shura lui sut gré de son soudain silence, effort pour le moins notable de la part de l’Italien. Ce dernier avait tout de même appris, au bout de plusieurs semaines, à respecter une certaine retenue lorsque cela était nécessaire. En ce sens, il ne désespérait pas de le convaincre in fine de partir. Même si en ce jour très précis, il ne souhaitait qu’une chose : qu’il demeurât auprès de lui. Au plus près de lui, très exactement, à l’instar des jours passés. Ceux au cours desquels ils avaient tout deux parachevé leur chute vers le point de non-retour.

L’Espagnol retint un rire désabusé tandis que, parfaitement conscient du fil de ses propres pensées, son regard s’égarait sur la silhouette d’Angelo, dont le corps souple exhalait force et puissance, jusqu’à se perdre à la base de son cou, sous le col ouvert de la chemise. Juste là, où une veine battait sous le tatouage traditionnel du Cancer. En d’autres temps et d’autres circonstances, Shura se serait considéré comme parfaitement ridicule ; depuis quand le sexe palliait-il le chagrin ? Il tira à son tour une cigarette du paquet ouvert entre eux, sur le bar. Depuis, peut-être, qu’il n’avait plus rien d’autre à sa disposition pour s’y raccrocher.

Il entoura de ses mains celle d’Angelo qui lui tendait du feu, et ce dernier la lui laissa. De nouveau le Cancer jeta un coup d’œil à son alter ego, en proie à l’incertitude. Quelque chose ne tournait pas rond, quelque chose… d’inhabituel. Mais il savait qu’il n’obtiendrait pas de réponse, quelle que soit la façon de demander. Et cela ne lui plaisait pas. Il percevait sans difficulté aucune le désir de Shura à son égard, mais sous-jacente à cette chaleur qui en émanait et qui déjà le gagnait à son tour, une sensation qui lui était étrangère le mettait mal à l’aise. Comme si une part de son amant s’était soudainement détachée d’eux et l’entraînait là où l’italien ne pouvait pas le suivre.

Il répondit pourtant à la brusque sollicitation des lèvres qui prirent les siennes par-dessus leur petit-déjeuner. Une langue impérieuse s’imposa contre la sienne et fit preuve de suffisamment d’autorité pour qu’il acceptât de quitter son siège et son café à moitié bu pour accompagner l’Espagnol jusqu’à leur chambre.

« Tu sais que tu n’as pas encore pris ta douche ? » Laissa échapper Angelo quelques minutes plus tard tandis qu’il reconnaissait de sa langue le goût de sa propre sueur sur le torse du Capricorne. Ce dernier enfouit ses doigts nerveux dans la chevelure rebelle de son compagnon, l’obligeant à se perdre en bas de son ventre :

« Je n’ai pas l’intention d’en prendre une, aujourd’hui. »

La pulsation de leurs cosmos en harmonie accompagnait la danse lente et profonde de l’Italien dans le corps de son alter ego qu’il maintenait contre lui, et qui répondait à ses sollicitations avec une énergie peu commune. Il lui semblait que chaque seconde voyait Shura l’entourer un peu plus loin, avec une avidité qu’il rendait volontairement douloureuse. Bientôt, un râle échappa à l’Espagnol tandis qu’il s’empalait jusqu’à la dernière extrémité, Angelo joignant sa jouissance à la sienne et ce, bien malgré lui. Il y était presque. Tout au plaisir qu’il pourchassait avec application, Shura avait baissé sa garde, celle qu’il gardait relevée depuis son réveil. Le Cancer avait cru toucher du doigt ce que l’autre lui cachait, et sa frustration était à présent d’autant plus grande que son amant se détachait déjà de lui, cosmos y compris. Ce qu’il ne faisait jamais en temps “normal”. Et lorsqu’il se retourna dans sa direction, ce fut pour le voir allongé sur le dos, sa poitrine se soulevant encore amplement tandis qu’il reprenait son souffle, et les yeux hermétiquement clos.

Angelo garda sa réflexion acerbe pour lui, lorsqu’il avisa les ridules qui s’étaient invitées entre les sourcils du Capricorne. Cet interlude ne l’avait pas apaisé. L’Italien avait bien compris que la jouissance que son compagnon lui avait soutirée n’avait eu pour seul objectif qu’une satisfaction purement égoïste de sa part. Ou un soulagement. Et le Cancer n’avait rien à y voir.

Sa réaction était totalement irrationnelle, il le savait, mais cela ne l’empêcha pas de se relever rapidement et de quitter la chambre, laissant un Shura somnolent enchevêtré dans les draps en désordre. Quand bien même l’un et l’autre avaient conservé une certaine forme de quant-à-soi tout au long des vingt et quelques années qui avaient nourri leur amitié, c’était loin d’être encore le cas depuis ces dernières semaines. La carapace du Capricorne avait déjà volé en éclats lorsque Angelo avait débarqué à Madrid ; il lui avait suffi d’un geste pour en ôter les derniers lambeaux. Ce n’était pas ce qu’il avait souhaité, c’était pourtant ce qu’il avait eu, à son corps défendant tout d’abord et puis… Après tout, ils étaient seuls. Seuls dans un monde auquel ils avaient tourné le dos. Seuls, face à face, sans plus aucun fard. Il ne leur était resté plus rien à cacher dès lors qu’ils se furent donnés et offerts, bien au-delà des corps qu’ils avaient unis. Jusqu’au point de mieux connaître l’autre que soi-même.

Alors, quoi ? « Où est passé ce foutu briquet de bordel de… » Là, sous le couvercle de la boîte de sucre. Une cigarette coincée au coin des lèvres, il décida de s’occuper les mains, espérant, sans trop y croire, qu’il réussirait à penser à autre chose. Et pas à ce qui, sans prévenir, éloignait tout à coup Shura de lui. Une demi douzaine de tasses et de soucoupes lavées et un rangement approximatif de salon effectué plus tard le trouvèrent avachi dans le fauteuil sous la fenêtre, en train de gratter la cicatrice de son pouce gauche. Shura avait beau se trouver dans la pièce d’à-côté, le Cancer ne se débarrassait pas de la désagréable impression d’être tout seul. Et il boudait sa raison qui lui serinait qu’il n’était qu’un complet crétin et qu’il avait passé l’âge de se créer des problèmes là où il n’y en avait pas. Possible que quelque mois plus tôt - allez, une bonne douzaine - il ne se serait pas pris la tête à ce point. Mais possible aussi qu’à cette époque là, la cuirasse n’avait pas encore achevé de se fendre. Et pour couronner le tout, la sensation tenace d’avoir déjà éprouvé cette frustration sur laquelle il n’arrivait pas à mettre de nom tournait en boucle sous son crâne. Et merde ! Pourquoi fallait-il donc que…

Le rangement n’avait jamais été la première des spécialités du Cancer, et la pile de paperasses qu’il avait plus ou moins sommairement constituée sur la console derrière la porte d’entrée se fit fort de ne pas le démentir lorsqu’elle s’écroula et s’éparpilla sur le tapis. Levant les yeux au ciel - un réflexe culturel sans nul doute - il s’extirpa des coussins fatigués. Un peu plus ou un peu moins…

Il n’avait pas fait attention à cette enveloppe. L’adresse de Shura écrite au recto avec une écriture fine et serrée, elle s’ornait d’un liseré noir sur son pourtour. Et n’avait pas été ouverte. Il la retourna pendant quelques instants, avec des doigts hésitants. Un coup d’œil sur le cachet lui confirmait qu’elle avait été postée dans la semaine et avait dû arriver… quoi, la veille ? Il n’eut pas besoin de vérifier que Shura ne risquait pas de surgir dans son dos ; son aura en disait assez long sur la force des bras de Morphée. Et entre ses quelques notions de base en matière de politesse et sa curiosité coutumière, il ne balança pas plus longtemps.

« Oh quel con… » Cette fois encore le ciel ne lui fut d’aucun secours, et reportant son attention sur le bristol, il laissa échapper un soupir consterné. Et quelque peu contrit. Il avait oublié. Un vague relent d’autodéfense tenta bien de protester qu’il n’était pas censé s’en souvenir parce qu’après tout, ça ne le concernait pas, cependant il le musela aussi sec. L’anniversaire de la mort d’Imma [1]. Bien sûr que ça le concernait. Cela ne l’avait d’ailleurs jamais autant concerné que depuis ce jour funeste où, pile une année plus tôt, il avait vu Shura l’inflexible se briser pour la première fois.

La famille du Capricorne. Avec un sourire triste - de ceux qu’il se gardait bien de jamais les laisser lui échapper devant qui que ce soit - Angelo comprit d’où venait ce sentiment de déjà-vu qui le taraudait depuis le matin. Parce qu’il avait éprouvé exactement le même près de vingt années plus tôt et ce, à chaque fois que l’Espagnol, alors un adolescent tout comme lui, quittait le Sanctuaire pour aller passer quelques jours, voire semaines, au sein de sa famille. Ces jours de départ que l’Italien abhorrait, au cours desquels Shura ne portait plus la moindre attention sur ce qui l’entourait en Grèce, son esprit déjà tout entier dirigé vers ceux qu’il allait retrouver, ceux qui lui étaient chers, ceux qu’un futur Cancer rejeté par sa mère lui enviait avec une hargne qu’il avait toujours peiné à dissimuler. Dans ces moments-là, sa raison n’avait souvent plus tenu qu’à un fil, alors que le seul ami qu’il avait jamais eu le rejetait à son tour.

Depuis, il avait eu l’occasion de rencontrer - une fois - cette fameuse famille qu’il avait tant jalousée. Et sa frustration s’était amoindrie. Elle n’était pas si secrète, puisque Shura avait accepté de la partager avec lui, n’est-ce pas ? Bon sang, ils étaient encore si jeunes à l’époque… Il n’était alors qu’un sale gosse qui n’avait de cesse de faire payer la terre entière pour sa vie minable. Il n’avait certes pas mérité que Shura lui confie ainsi son seul trésor.

Il regarda de nouveau les lettres élégantes imprimées sur le carton. Une cérémonie d’hommage était organisée ce jour à Zahara. Oui, il aurait pu s’en douter, et Shura le savait lui, si bien d’ailleurs qu’il n’avait pas jugé bon d’ouvrir l’enveloppe. Ni de s’y rendre.

Un réflexe de protection, dérisoire, avait sans doute présidé à la décision de l’Espagnol. Un an ne lui avait pas suffi pour faire son deuil, il s’en était d’ailleurs ouvert à Angelo. Retrouver les siens, et leur chagrin, n’aurait rien arrangé. Pas alors qu’il n’avait pas encore découvert la voie du pardon qu’il se devait à lui-même. Et si ses pensées s’étaient malgré tout dirigées vers le souvenir de sa sœur en ce triste anniversaire, il avait cru bon de se réfugier auprès du seul être capable de le comprendre, parce que ce dernier l’avait trop envié.

Angelo replaça le bristol dans l’enveloppe, qu’il mêla à la paperasse dont il prit soin, cette fois, de la caler derrière une pile de magazines. Et quand bien même le Capricorne en extirperait un peu plus tard ledit courrier… Le Cancer espérait qu’il ne lui tiendrait pas rigueur de sa curiosité. Après tout, il venait de lui faire gagner quelques heures de tranquillité d’esprit au cours desquelles l’Italien ne le harcèlerait pas, pas vrai ? Et d’un haussement d’épaules, Angelo chassa la gêne qu’il ressentait par anticipation à l’idée du contenu des explications qu’il aurait bien fini par lui arracher.

Une heure plus tard…

« Où est-il encore passé, cet animal ? » Cela en devenait agaçant. L’Espagnol conserva cependant les yeux fermés encore quelques secondes, le temps de se rappeler que, non, ce n’était pas l’attitude de son compagnon qui l’irritait mais plutôt sa propre réaction, ce sentiment de manque qui s’en venait lui tordre furieusement les entrailles dès qu’il percevait son absence. Il s’en voulait pour ça - et ce, depuis cette première fois où il avait cédé, de son plein gré qui plus est - d’autant plus qu’il avait une conscience aiguë que cela ne pouvait que contribuer encore un peu plus à leur chute. Et comme il fallait qu’il en soit conscient pour deux…

Cependant, aujourd’hui ça ne comptait pas. Sa raison lui rappela insidieusement qu’il se trouvait là encore une excuse des plus fallacieuses mais en toute franchise, la raison, en ce jour particulier, n’avait pas voix au chapitre. Du moins ce fut qu’il lui opposa tandis qu’il se retournait sur le dos, non sans tenter de faire fi du tiraillement désagréable dans son épaule, annonciateur d’heures pénibles à l’horizon. Tiens, encore une bonne raison pour que le Cancer le rejoigne, là, tout de suite : au simple souvenir du bien-être que le cosmos, si complémentaire du sien, allait lui prodiguer, les muscles contractés du Capricorne manifestèrent des velléités de détente.

Egoïste ? Fort bien. Shura s’en accommoderait sans difficulté, pourvu que cela ne dure qu’une journée. Et tant pis pour la petite voix intérieure qu’il entendait ricaner devant ce qu’elle désignait comme de la mauvaise foi. « Par les dieux, laissez-moi oublier ce que j’ai été, juste pour cette fois… » Et le soupir épuisé qui lui échappa valait pour toutes les excuses du monde.

Le silence qui remplaça ses pensées s’orna bientôt d’un bourdonnement qui, de toile de fond, se mua en sourdine désagréable. Il n’y avait pas prêté attention tout à l’heure ; la voix du Cancer filtrait sous la porte vitrée de la chambre depuis un moment suffisamment conséquent pour qu’il ne se rappelle pas d’un silence “différent” depuis son réveil. Un coup d’œil au chevet, de l’autre côté du lit, le renseigna : portable disparu, l’Italien était en train de téléphoner.

Shura ne distinguait rien des mots prononcés par son alter ego, sans doute installé sur l’un des deux tabourets dans le coin cuisine. Mais il n’en avait pas besoin : il imaginait parfaitement Angelo, une chemise enfilée à la diable et une cigarette allumée entre son index et son majeur en train de tracer de larges circonvolutions hasardeuses dans l’espace autour de lui, en train de parler à Marine. Pourquoi elle ? Parce que s’il s’était agi de n’importe qui d’autre - à savoir l’un de leurs semblables - l’Italien n’aurait pas pris soin de fermer la porte de la chambre, ni de parler à un niveau sonore très largement en dessous de ses habituelles décibels siciliennes.

Ils n’avaient jamais véritablement abordé le sujet ensemble. Celui des coups de fil en tout cas, parce que pour le reste, l’Espagnol avait agité le spectre Marine sous le nez d’Angelo plus souvent qu’à son tour. Il avait grandement besoin d’un levier de persuasion pour éloigner le Cancer et que c’était ce qu’il avait trouvé de mieux. Le seul capable de lui clouer le bec suffisamment longtemps pour que le Capricorne ait l’illusion d’avoir marqué un point. Au moins un. Non, l’existence de la jeune femme était loin d’être un tabou entre eux, mais il fallait croire que le plus mal à l’aise des deux n’était pas celui que la morale aurait montré du doigt de prime abord.

Angelo le savait. Ou du moins, il avait intégré cette information au fil des jours, surprenant une crispation sur le visage sévère de l’Espagnol dès lors que le prénom de l’Aigle clignotait sur l’écran ou qu’il surprenait le Cancer en grande conversation. Et Shura regrettait amèrement d’avoir ainsi fait montre de sa gêne. Maintenant que l’Italien la partageait, cela voulait dire… Il passa ses mains sur son visage fatigué, mais ce geste ne fit rien disparaître pour autant. Bien au contraire, il était là, son corps nu sur les draps, encore et malgré tout empreint de cette langueur bienheureuse qui survenait immanquablement après qu’ils se furent… aimés.

Shura souhaitait désespérément avoir encore des doutes ; la réalité des mots et des gestes d’Angelo lui déniait cette dernière illusion. Et lui-même n’avait plus la moindre possibilité de mentir depuis que la confiance que le Cancer lui avait témoignée lui avait arraché les mots qu’il s’était interdit de prononcer.

Le Capricorne n’avait pas le droit d’y croire, il ne voulait pas, il le refusait. Le contact que conservait Angelo avec sa compagne avait ceci de confortable qu’il étayait la conviction qu’il alimentait, fut-ce de plus en plus difficilement au fil du temps. Et il y avait des jours, comme celui-ci en particulier, où tout lui semblait vain. Où lui-même avait soif de cet amour qu’il désirait rejeter par-dessus tout. Où il se leurrait volontairement en écartant de ses pensées ce qu’il représentait pour croire qu’il avait droit à la vie. Celle qu’il avait voulu offrir à Angelo en s’éloignant de lui, en le confiant à Marine.

Oui, en ce jour, le besoin de l’autre était le plus fort. Ils auraient tous les trois bien le temps de poursuivre leur savant petit numéro d’équilibriste, dès le lendemain s’il le fallait. Mais pour l’heure, Shura n’avait qu’une seule envie, celle de se perdre quelque part dans le temps, environné d’une seule voix et d’un seul corps. Et oublier.

Il fit alors ce qu’il n’avait encore jamais fait : exercer sa priorité. Le Cancer eut un sursaut de surprise lorsque le bras de l’Espagnol s’enroula autour de ses hanches, sous sa chemise débraillée, et lorsqu’il en sentit le corps nu se plaquer contre son dos. Collant de toute urgence une main contre son téléphone, il souffla :

« Bon sang, mais qu’est-ce que tu fous ?!

- Viens. » Et Shura de le faire taire d’un baiser vorace tout en lui ôtant le téléphone avant de le refermer dans un claquement sec [2].

[1] Diminutif de Immaculada, la sœur cadette de Shura, laquelle s’est pendue, n’ayant pu supporter l’assassinat de son mari et de son fils par les gardiens des Portes, sous les yeux d’un Capricorne impuissant.

[2] 2005 : les clapets sont encore à la mode.

a#2 jalousie, saint seiya

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