le chemin de la perdition - originale - fic n°1

May 24, 2007 10:52

Titre : Chaussettes et petites cuillères
Auteur : flo_nelja
Thème : Le chemin de la perdition
Fic n°1
Fandom : Originale (Martin est un des personnages de Machine de Turing, mais il n'est pas besoin de savoir quoi que ce soit sur lui pour lire ça, tellement c'est éloigné niveau esprit et scénar)
Personnage : Martin
Rating : G
Disclaimer : Je crois qu'il est plus ou moins à moi...



Martin ne perdait ni les chaussettes ni les petites cuillères, avant.

Il ne les rangeait pas toujours très bien, pourtant. De temps en temps, une chaussette atterrissait derrière le canapé, une petite cuillère glissait derrière la table de chevet alors qu'ils prenaient le petit déjeûner au lit. Mais elle n'était pas perdue. Martin avait une très bonne mémoire et se rappelait fort bien qu'elle était là. Tôt ou tard, il retournait la chercher et la remettait avec indulgence sur le droit chemin de la machine à laver.

Pourtant, depuis que Laure était partie, il avait en quelque sorte perdu ce talent. Non pas qu'il fut tombé dans la décrépitude, ou quelque chose du genre. C'était plus son esprit lui-même qui refusait inconsciemment de se rappeler ses cheveux étalés sur le dossier du fauteuil, son sourire triomphant quand elle réussissait particulièrement le repas, la finesse de sa main sur de dessus de sa pile de CD. L'oubli était un voile, résistant et doux, fait pour le protéger.

Mais cela n'aidait pas à se rappeler quelques petits détails.

Il avait pourtant l'impression d'être beaucoup plus précis qu'avant, de ne plus jamais remettre à plus tard ses rangements, avec un souci du détail presque maniaque. Pourtant, toujours, il manquait une cuillère, une ou deux chaussettes - jamais de la même paire, bien sûr.

C'était quelque peu mystérieux.

Il aurait sans doute pu retourner tous les coussins de tous les canapés de la maison, vérifier derrière chaque meuble, sur chaque étagère, dans le panier à linge sale, le réfrigérateur, les boîtes à chaussures et les boîtes de DVD, mais l'expérience lui avait appris que c'était inutile.

Une chaussette disparue, ou une petite cuillère disparue, ne se retrouvait plus.

Et il n'était pas moins vain de les chercher que de s'allonger sur le canapé pour, les yeux mi-clos, rêver de ce qui leur était arrivé.

Peut-être y avait-il un monstre quelconque qui rampait dans sa maison la nuit et les dévorait. Un monstre vert, aux yeux globuleux, aux grosses molaires - les petites cuillères ne sont pas la chose la plus faciles à broyer, et, quand on y pense, les chaussettes non plus, surtout celles en fibres synthétiques.

Ou alors peut-être étaient-ce deux monstres différents, l'un d'entre eux fait de métal, et l'autre de tissu. Pauvres bêtes, combien de maisons devaient-ils faire avant de trouver la nourriture nécessaire à leur survie ! Peut-être certains réussissaient-ils à trouver refuge dans une usine de chaussettes ou de cuillères. Ce devait être l'aboutissement ultime, pour eux.

Ou alors, peut-être, tout simplement, les chaussettes et les cuillères étaient-elles parties toutes seules.

Elle avaient franchi un portail majestueux. Elles avaient suivi des chemins garnis de pieds - de pots de yaourt - enfin, de quoi que ce soit qui puisse avoir un sens symbolique pour une chaussette ou une petite cuillère. Elle avaient affronté des aiguilles prêtes à en découdre, des fers à souder pour lesquels une bonne cuillère était une cuillère fondue. Et puis, arrivées au bout de leur route, elles avaient attendu leur jugement.

Il y avait sans doute des chaussettes divines - des dieux des chaussettes, ou peut-être des chaussettes de dieux, la différence pouvait être bien mince. Et aussi des petites cuillères éthérées chargées de séparer le bien du mal. Les chaussettes dépareillées se retrouvent-elles, quelque part dans leur éternité à elles ? Et les petites cuillères, restent-elles vides éternellement, et si oui trouvent-elles un autre sens à leur existence ?

C'était étrangement réconfortant de se poser ces questions. De les imaginer exister quelque part, autrement, ailleurs.

Il devait y avoir quelque part un paradis, ou un enfer, pour les chaussettes perdues, les petites cuillères perdues, et les amours perdues.

fandom : original, theme : le chemin de la perdition

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