Samedi 8 octobre, nous partons visiter plus en détails la citadelle de Rabat, où nous n'avions fait qu'un tour très superficiel au tomber du soleil, deux jours plus tôt. Nous garer en centre-ville est un peu moins compliqué que l'autre jour, il y a moins de monde et nous avons repéré les ruelles à l'écart dont les parcmètres sont absents.
Au coin de Savina Square, un saint nous regarde passer depuis sa niche. Un peu plus loin, c'est une boutique de verrerie qui retient notre attention - une des spécialités de Malte, à l'origine de très belles créations. Cette boutique-là est fermée, mais nous trouverons largement de quoi nous laisser tenter un peu plus loin...
Par dessous la forteresse, là où commence la barrière grise, un visitor's center a été aménagé dans d'ancienne citernes. Le lieu vaut le coup d'oeil et, dans une muséographie très moderne et réussie, permet d'entrer un peu plus en détails dans l'histoire de la ville.
Les premières traces d'occupation du lieu remontent à l'âge du Bronze, mais il est probable qu'il ait été investi plus tôt, au temps des temples de Xaghra.
A l'époque phénicienne puis romaine, c'est à peu près le seul site de peuplement sur l'île, un temple à Junon occupe alors l'emplacement de l'actuelle cathédrale.
La ville romaine est ensuite abandonnée, transformée en un simple château autour duquel la population gozitane se concentre toujours, prête à s'y réfugier en cas d'attaque. En 1551, dix ans avant le grand siège de Malte évoqué
par ici, les forces Ottomanes de Sinan Pacha attaquent Gozo : toute négociation est refusée, le château tombe au bout de quelques jours et 6000 gozitains sont emmenés comme esclaves.
La forteresse, ruinée, est vite reconstruite, mais elle passe au second plan tant que durent les travaux de La Valette. Il faut attendre la toute fin du XVIe siècle et une nouvelle attaque corsaire pour qu'une véritable modernisation soit entreprise, donnant naissance aux bâtiments qu'on voit aujourd'hui.
Pendant quelques décennies encore, jusqu'en 1637, les habitants de l'île sont soumis à un couvre-feu qui les oblige à rester entre les murs de la Citadelle du crépuscule à l'aube.
Entrons par la grande porte qui mène droit à la cathédrale...
De passages voûtés en petites ruelles, nous voici bientôt sur le rempart - enfin, bientôt, c'est sans compter les pièges semés sur notre chemin, et la grosse demi-heure que nous passons dans une boutique à choisir quelques bijoux en filigranne d'argent, autre spécialité maltaise diversement raffinée mais qui recèle moult petites choses ravissantes.
Place au point de vue avec une échappée vers la baie de Marsalforn, facilement reconnaissable par cet amusant petit mamelon qui la domine, dont le Christ rédempteur donne aux lieux des faux airs de mini Rio.
En dessous de nous, s'étagent les toits en terrasse de Rabat.
Sous les hautes murailles, bien des choses ont été aménagées. Une petite association locale permet, bénévolement, de visiter un ensemble composé d'une ancienne poudrière, de vastes citernes taillées dans la roche, qui rappellent un peu celles de la Casa Rocca Piccola, et d'un abri antiaérien de la Seconde guerre mondiale.
De l'ancienne ville, il ne reste plus grand chose. Quelques maisons, dont peu sont encore habitées, un entrelacs de jardins clos, et par derrière, les vestiges de demeures depuis longtemps arasées par le temps ou les aléas de l'Histoire. Dans l'heure du déjeuner, sous le soleil écrasant, certains coins ont des allures de ville fantôme assez fascinants...
Comme il commence à faire faim, nous partons en quête d'un lieu pour nous restaurer. Sans sortir de l'enceinte, le choix se compose de deux alternatives : un assez grand café, doté d'une belle terrasse ombragée malheureusement trop bruyante et qui sent un brin le graillon, et un petit resto plus discret (Ta'Rikardu) installé dans une maison toute en hauteur. Au rez de chaussée, une salle boisée, chaleureuse, fait aussi office d'épicerie. Au dessus, plusieurs salles de pierre, puis au bout d'un minuscule escalier à vis digne des passages secrets d'un très vieux château, nous arrivons enfin sur la terrasse, pas bien grande, mais avec une jolie vue sur la cathédrale et une table à peu près ombragée pour nous accueillir.
Après le déjeuner, flânant toujours à travers les ruelles, nous tombons sur un petit musée folklorique qui nous semble assez sympa et qui vaut effectivement le détour. Outre les collections de vieux outils et objets, c'est surtout l'occasion de découvrir de l'intérieur un enchevêtrement complexe de vieilles demeures, reliées entre elles par de nombreux passages, cours intérieures, escaliers et jardins. Visite d'autant plus agréable que nous sommes à peu près seules !
Suit un dernier tour sur le rempart...
...puis nous regagnons les abords de la cathédrale...
...recevons au passage la bénédiction de Jean-Paul II...
...et nous voilà reparties.
Quelques courses plus tard, l'après-midi touche déjà à sa fin. Une jolie balade vespérale nous attend encore autour d'une petite crique, Mgarr ix-Xini, au sud de l'île
Evidemment, nous abordons les lieux par le mauvais côté et sommes obligées de nous garer bien en amont, avant que les petites routes ne deviennent impraticables (merci à la promeneuse qui nous signale la chose avant qu'il ne soit trop tard). Dédaignant la plage plongée dans l'ombre, nous poussons par la falaise jusqu'à une vieille tour de guet qui domine la mer.
Au creux de la vallée, cet étrange bâtiment se révèle, après plus amples investigations,
une ancienne station de pompage construite à la fin du XIXe siècle pour approvisionner les villages voisins en eau de source.
Derrière la tour, bien à l'abri mais le nez sur la mer, une petite tente est dressée : celle d'un jeune couple qui logeait la veille au soir à notre auberge, avec qui nous discutons un moment en regardant un bout de lune accrocher des scintillements féeriques sur la mer.
Mais la lumière décline de plus en plus et il nous faut rentrer tant que les reliefs du chemin restent encore discernables... tout en luttant contre des armées de moustiques particulièrement voraces. Une autre spécialité locale, assez douteuse celle-là. Audrey combat toujours vaillamment, je suis pour ma part à ce stade plus ou moins résignée à me faire pomper le sang et à m'arracher la peau. Trois mois plus tard, il me reste encore des cicatrices !
Itinéraire de notre journée :
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