Toute la lumière que nous ne pouvons voir - Anthony Doerr (2014 / Albin Michel, 2015)
(600 pages, soit 100 km de plus pour le challenge Tour du Monde. Total : 3500 km et 13 pays pour 40 livres)
Saint-Malo, août 1944. Tandis que les bombes américaines s'abattent sur la ville, une adolescente française et un jeune soldat allemand se terrent dans les décombres, tentent chacun de survivre à la fin de la guerre. Marie-Laure est parisienne et aveugle, sa vie toute entière s'est longtemps cantonnée au jardin des Plantes et au Museum d'Histoire Naturelle, dans la société des savants, des romans d'aventure offerts à chaque anniversaire et d'un père serrurier jamais à court d'ingéniosités pour aider sa fille à surmonter son handicap. Werner, lui, est orphelin, élevé dans un pays gris de houille, avec pour seule perspective d'avenir la mine qui dévora autrefois son père, pour seule échappée une vieille radio rafistolée par ses soins, pour seul espoir son talent formidable pour les mathématiques et la technique. Ils ne se connaissent pas, seuls les hasards du conflit les ont amenés là, dans la vieille citadelle sur l'océan où ils finiront peut-être par se croiser et entrevoir le fil ténu qui les lie.
Par courts chapitres entrecroisés, dans un style précis et joliment évocateur, Anthony Doerr façonne deux existences attachantes dont les ressorts - très simples tout d'abord puis de plus en plus soumis aux chaos de l'Histoire - ne tardent pas à former un effet de suspense très prenant. C'est un roman très plaisant à lire, plein de charme, de poésie et parfois d'humour malgré la dureté de ce qu'il évoque. Un roman dont je comprends fort bien le succès, assez mérité, même s'il manque un peu d'âpreté et reste un peu facile à mon goût (la prétendue profondeur de la fin ne m'a pas vraiment convaincue !) J'ajouterai tout de même un bon point supplémentaire pour la documentation très serrée qui nourrit la fiction sans jamais l'étouffer, et évoque la France de ce temps avec autant de fluidité qu'un français aurait pu l'écrire.
Lu juste avant une escapade à Saint-Malo, c'était tout à fait bienvenu, et j'ai regretté de ne pas l'avoir emporté pour retracer les chemins de Marie-Laure au fil de mes propres balades :-)