Titre: La Dernière Mission
Auteur:
annaoz Pairing: Neville/Harry
Rating: PG-13 (pour l'instant)
Nombre de mots: 2800
Ceci est une fiction longue commencée pour l'anniversaire d'
itsuki59, avec un futur pairing Neville/Harry et un plot assez touffu :) Pour ne pas m'engager dans un nouveau truc dont je ne verrai pas la fin, je me tiendrai à 10 chapitres (siouplaît siouplaît, faites que je m'y tienne).
Ca faisait trois jours que la pluie tombait sans discontinuer, emportant la mousse précieuse accrochée aux racines des arbres longeant la rivière, formant des torrents de boue et obligeant la faune du cours d’eau et des alentours à remonter à contre courant là où le fleuve avait son embranchement.
Il faisait continuellement humide et le vent rendait la lutte encore plus rude pour celui qui avait choisi de marcher au dehors par ce temps de veille d’apocalypse.
Celui qui marchait en ce moment même au beau milieu des bois, pataugeant jusqu’à mi-mollets dans une gadoue spongieuse et bizarrement trop animée pour être rassurante, n’avait pas vraiment décidé d’être là.
Ca aurait pu être une tâche ordinaire de plus, une de celles pour lesquelles Scrimgeour l’employait à présent, ô douce ironie qui avait fait de lui l’homme du Ministère après avoir été celui d’Albus Dumbledore. Ca aurait pu, mais ça ne l’était pas tout à fait.
Le prix pour devenir Auror ne lui avait pas semblé élevé quand il avait fallu prendre place à côté de Ron dans les rangs des stagiaires, de suivre avec lui la formation accélérée à laquelle avaient droit tous les heureux futurs participants à l’effort de guerre.
Voldemort était tombé, il en avait pris personnellement soin, aidé par Ron, Hermione et quelques adultes de l’Ordre.
Tout le chemin pour faire de celui qui était la cause de tellement de failles dans sa vie un être humain avait été long, la quête, puis la destruction, des horcruxes leur avaient demandé des mois de recherches et de patience, mais finalement, toutes les épreuves passées les avaient unis au-delà de ce qu’ils auraient pu imaginer en six ans de vie scolaire sous la tutelle de Dumbledore.
Le Lord noir avait été facile à abattre pour Harry, quand ses alliances et ses Mangemorts si peu fidèles s’étaient évanouis dans la nature plus rapidement que la brume matinale.
Après la chute, il avait pourtant fallu reconstruire, et c’est à ce moment que le Ministère s’était aperçu que tous les Sorciers n’étaient pas aussi aisément disposés à accepter la nouvelle d’un monde forcément bon, pur, débarrassé de ses forces nuisibles.
Plusieurs anciens disciples de Voldemort, si prompts à ficher le camp quand leur Maître avait eu besoin de leurs mains armées, s’étaient dressés depuis pour récupérer les miettes qu’ils prétendaient être leurs.
Et plutôt que de devoir faire face à un foyer d’opposants organisés, le Ministère avait dû admettre que les bouquets de résistance fleurissaient partout dans le Commonwealth.
Les jeunes recrues Aurors étaient donc devenues corvéables à l’infini, enchaînant les gardes et les missions, plusieurs tombant dans des traquenards et des ruses auxquels on ne les avait pas préparés.
C’était à cause d’un piège tendu par un Dolohov trop content d’avoir réussi une nouvelle évasion d’Azkaban que Ron s’était retrouvé privé pendant plus de six mois de l’usage de ses jambes, ce qui avait sonné le glas des ambitions d’Harry.
Il s’était juré que ce serait sa dernière mission, que travailler ne lui importait pas tellement en fin de compte, qu’il était bien assez riche et bien trop dégoûté pour avoir envie d’en voir plus.
Les rebelles perdaient de leur force, ils ne seraient bientôt plus qu’une poignée.
Scrimgeour et sa petite garde prétorienne pouvaient bien s’occuper de balayer dans les derniers recoins de ce qu’il considérait comme étant son fief, Harry, lui, avait décidé de s’en laver les mains.
S’il était là aujourd’hui, les mains dans les poches et le col de sa cape remonté pour protéger son visage de la piqûre de la pluie, c’était uniquement parce que les deux personnes concernées le touchaient particulièrement.
Neville Londubat. Bellatrix Black, veuve Lestrange.
Il ne savait pas réellement lequel des deux traquait l’autre.
Bellatrix était en fuite depuis un moment déjà et, bien qu’elle ait été la dernière à quitter le flanc de son Seigneur, elle avait disparu dès qu’il avait été certain qu’il ne se relèverait pas.
Neville ne s’était pas évaporé aussi vite, mais presque.
Peu de temps après, sa grand-mère était décédée et l’avait laissé seul responsable de ses parents internés et de sa vieille maison du Lancashire, aux poutres rongées par les termites.
Un jour que son grand-oncle Algie était venu lui rendre visite, il avait trouvé porte close, et, quand il avait enfin réussi à briser le sortilège un peu sommaire qui protégeait les lieux, il avait été profondément surpris de voir tous les meubles recouverts de sorts anti-poussières, la chambre de Neville fermée à double tour, ainsi que la plupart des photos familiales, habituellement disposées sur le manteau de la cheminée, manquantes.
Il avait alerté immédiatement le Ministère, en vain car nul ne s’était inquiété de la disparition du jeune homme.
Pas même Harry ni Hermione, tous deux trop préoccupés par l’état de santé de Ron à ce moment-là.
Il avait fallu que Ginny s’emporte, lui reprochant sur l’oreiller après une de leurs trop nombreuses disputes, de ce qu’il ne se souciait plus de personne à part lui-même, lui rappelant qu’on était sans nouvelles de Neville depuis plus de quatre mois, pour qu’il demande enfin au Ministère ce qui était prévu pour retrouver le jeune Londubat.
Ce à quoi on lui avait répondu que sa recherche n’était pas prioritaire, à moins, bien évidemment, qu’il ne veuille lui-même s’en charger.
Harry avait pesté, les avait mentalement envoyé se faire foutre, avant de demander qu’on lui livre les maigres informations personnelles qu’on gardait sur Neville et le privilège de faire compter cette mission dans ses quotas, ce qui le permettrait d’enfin remplir le contrat exclusif qu’il avait avec la section des Aurors et à demander, si l’envie le taraudait, un futur et prolongé congé sans soldes.
Cela arrangeait aussi bien le Ministère que lui-même, le statut du Survivant revanchard, renâclant à mettre les œillères imposées par Scrimgeour avait fini par lasser tout le monde.
En fouillant les archives du Ministère de la Magie, Harry Potter avait appris sur Neville Londubat plus qu’en six années de dortoir partagé.
En quittant l’Atrium ce jour-là, celui qui avait signé le début de sa dernière mission, il avait eu beaucoup de mal à s’ôter de l’esprit les confessions goguenardes de Bellatrix et Rodolphus Lestrange.
Elle surtout s’amusait de ce que les Londubat avaient été coriaces, de ce que la séance avait été longue et « musclée » pour ne finalement rien en tirer.
Il avait serré la mâchoire en lisant toute la morgue qui transpirait du témoignage de la meurtrière de son parrain, mais jusqu’à une certaine ligne, en bas de la troisième page du registre, il n’avait rien appris qu’il ne sache déjà.
En terminant le compte rendu des interrogations des Lestrange, il avait dû sortir précipitamment, pris par l’envie incontrôlable de vomir toute la bile qu’il sentait remonter dans sa gorge.
Neville avait été présent pendant le supplice de ses parents.
Présent et certainement conscient de la scène qui se déroulait devant ses yeux de petit garçon de 18 mois.
Harry avait gardé en mémoire le cri de sa mère et l’éclair du kedavra, mais la rupture avec ses parents avait été brutale et rapide.
Il n’avait pas eu à supporter les heures de souffrances et de supplications, il n’avait pas été le jouet que se passaient les Mangemorts pendant que son père et sa mère luttaient contre la douleur la plus abjecte.
Comment aurait-il pu grandir et aimer avec une telle dette de haine dans le cœur dès la petite enfance ?
Comment avait fait Neville ?
Cela, il ne l’avait appris que le surlendemain, en fouillant à nouveau les archives et en découvrant le courrier très bref qu’Augusta Londubat avait envoyé au Département des Mystères, s’alarmant de ce que le Obliviate lancé sur le petit avait été mal fait et qu’ils auraient de ses nouvelles si l’enfant devait garder des séquelles de leur grossièreté à lancer le sort.
Tout prenait sens après ça !
La maladresse de Neville, son étourderie, son manque d’assurance, sa crainte quasi maladive devant l’autorité, tout était conséquence de ce qu’il avait subi un choc traumatique enfant, immédiatement empiré par un sort mal utilisé.
Harry avait suffisamment aidé Ginny a révisé sa Pathologie des Sortilèges pour connaître les effets désastreux que certains pouvaient avoir.
Bellatrix Lestrange était doublement responsable de la vie bancale de Neville Londubat, et cette salope infâme n’était toujours pas aux mains des Aurors pour enfin payer pour ses crimes… la justice brillait définitivement par son absence dans ce foutu Monde Sorcier.
Après avoir rassemblé un maximum d’informations sur le passé de Neville, Harry avait dû réfléchir au présent pour finalement se retrouver sous la pluie battante, sur la trace de son ancien compagnon Gryffondor.
Avant d’en arriver là, il y avait eu plusieurs visites à faire, de vieilles connaissances à recontacter.
Il n’avait rien tiré de Seamus et Dean, encore moins des sœurs Patil. Lavande n’avait pas voulu lui ouvrir, prétextant que son époux, un moldu, ne désirait pas qu’elle garde des contacts avec son passé.
Restait Luna Lovegood.
Revoir Luna avait été étrange, beaucoup plus qu’il ne se l’était imaginé en franchissant les portes accordéons un peu désarticulées qui menaient à son « bureau ».
Le journal n’existait plus, Oswald Lovegood, le père de Luna, avait arrêté les presses le jour où il avait reçu des menaces directes qui parlaient du chemin que sa fille prenait quotidiennement pour rejoindre le bâtiment et de ce qu’il serait tellement dommage qu’il lui arrive quoi que ce soit dans le cas où il persisterait à distiller les vérités dérangeantes parmi le fatras de stupidités du magazine.
Cela, Harry l’avait découvert seulement en fouillant les archives du Ministère, il ignorait d’ailleurs si Luna elle-même était au courant.
Quand il la vit, ses longs cheveux blonds mangeant son visage pendant qu’elle essayait visiblement de reproduire au fusain une photographie surexposée d’une vague forme animale, sa baguette toujours plantée derrière l’oreille et la voix chantonnant doucement ce qui aurait pu être une berceuse, il comprit que peu importait qu’elle soit ou non au courant, le temps s’était arrêté pour elle cinq ans auparavant.
Elle avait été ravie de le voir, et lui très vite perdu devant le flot de ses questions : tout tournait autour de ses années à Poudlard, du dernier match de quidditch des Gryffondor avant que la moitié de l’équipe perde à jamais le goût de revoler, lui y compris, des cours de Firenze, de la sévérité de cette Hermione Granger qui semblait toujours lui en vouloir de quelque chose, de ce qu’il formait un très joli couple avec Ginny, de ce que les réunions de l’AD lui manquaient un peu.
Il était resté la plupart du temps silencieux, attrapant les mouches avec sa bouche ouverte quand Luna replongeait dans un souvenir tellement précis du passé qu’il lui fallait un effort de concentration pour le faire remonter à la surface.
Ce n’est qu’à partir du moment où elle lui avait confié que Colin Crivey prenait vraiment de jolies photos et que c’était dommage qu’il ne soit plus là pour les prendre à présent qu’il était mort, quand elle avait semblé reprendre pieds dans sa réalité à lui aussi, qu’il avait osé lui parler de Neville.
Elle avait répondu qu’il allait très bien, d’après les lettres qu’il lui envoyait chaque semaine depuis qu’il était parti en vacances en lui demandant de rendre de temps en temps visite à ses parents.
Il ne l’avait pas contredite sur le sens des vacances de Neville, avait simplement demandé à voir les lettres en question.
Elle avait soupiré un peu et semblé réellement confuse en lui répondant qu’elle ne les avait pas, parce que Neville lui demandait à chaque fois de les détruire après lecture.
Il s’était levé, prêt à partir et déçu par ce nouveau coup dans l’eau et ne s’était retenu de quitter la pièce que quand elle avait dit que s’il avait aussi des vacances à prendre, ce serait gentil d’aller lui rendre visite dans sa famille, chez son arrière grand-mère Callidora Black.
Il avait essayé, vraiment essayé de ne pas la brusquer ensuite pour qu’elle lui en dise plus, qu’elle lui parle de cette arrière grand-mère sur laquelle Neville n’avait JAMAIS soufflé un mot, en six années d’école, mais elle lui avait souri, si largement, si heureusement, qu’il avait été incapable de résister à l’envie de faire disparaître ce sourire.
« Au fait, Ginny et moi avons rompu. » lui avait-il murmuré, au moment de la laisser replonger dans ses photos jaunies et sa petite névrose ordinaire.
« Oh je sais, » avait-elle répondu, le visage à nouveau caché par son rideau de cheveux lâches. « Mais ça ne vous empêche pas de former un joli couple. »
Il l’avait quitté furieux, contre elle d’abord qui jouait si bien de sa folie douce pour rester en dehors de leurs douleurs rémanentes, contre lui surtout qui s’irritait de voir que d’autres s’en tiraient mieux que lui, surmontaient ce qu’il se plaisait à croire insurmontable, ce qui justifiait sans efforts son aigreur, sa mauvaise humeur et les coups de poing qu’il donnait dans le mur à côté de son lit à chaque fois que Ginny claquait la porte sur son déchaînement.
Après avoir quitté Luna, après qu’il ait couru sans halte jusqu’à l’appartement que partageaient Ron et Hermione, il s’était senti mieux, la gorge écorchée par l’envie de boire plutôt que par celle de crier.
Ses amis étaient seuls et il était soulagé de ne pas avoir buté contre un autre membre de la famille Weasley en poussant la porte de leur salon, il n’était pas d’attaque pour de nouveaux reproches.
Comme il s’y était attendu, Hermione avait cligné des yeux en entendant le nom de l’aïeule de Neville et s’était tout de suite plongée dans un vieux volume détaillant la généalogie des familles de sang pur subsistantes du Monde Sorcier.
Ron et lui l’avaient entendue pester entre ses dents devant la complexité du découpage du bouquin, mais il n’avait pas fallu une demi-heure pour qu’elle griffonne, triomphante, les informations qu’il lui manquait.
Callidora Black, veuve de Harfang Londubat, mère d’Augusta et d’Algisbert Londubat, accessoirement grande tante de Bellatrix Black, semblait toujours habiter la demeure familiale.
Son amie, dans son incroyable efficacité, lui avait même déniché une gravure de la masure telle qu’elle devait être cinquante ans auparavant.
Sous le dessin, la légende indiquait que le sort de repousse-moldus avait été à ce point puissant qu’il avait fait pousser toute une forêt de résineux traversée d’une multitude de ruisseaux, géographiquement peu commune dans le comté d’Argyllshire.
En remontant vers le Nord avec son balai et en survolant de nuit la largeur de cette région de l’Ecosse, il n’avait pas été long à remarquer la fameuse forêt.
Y pénétrer sans briser en deux son Eclair de Feu avait été délicat, l’endroit était bien trop touffu et la pluie persistante faisait remonter du sol une vapeur chargée d’odeurs d’humus et de moisissure.
Il avait mis pied à terre et avait commencé à marcher, ne s’arrêtant que pour s’appuyer contre un tronc le temps de renouveler le sort d’imperméabilité de sa cape et d’avaler quelques biscuits.
Il ignorait comment le vent arrivait à franchir la barrière des arbres pour lui opposer un surplus de résistance mais il avait rarement eu autant de mal à franchir une distance aussi courte.
Quand il avait enfin aperçu l’ombre grotesque d’une baraque en ruines, enchâssée au cœur d’une clairière minuscule dessinée par un autre réseau de ruisseaux, ça faisait trois jours qu’il avait commencé à marcher.
Il était rompu, épuisé, sale et affamé.
Il était sur ses gardes.
C’était une demeure BLACK, rien ne prouvait que la maîtresse des lieux était aussi pacifique que son arrière petit-fils, rien ne prouvait non plus que Neville était bien là.
Il tentait de remuer dans sa tête toutes les données de base apprises au début de sa formation d’Auror, les règles élémentaires de prudence, les sorts à garder sur le bout de la langue impérativement, mais la fatigue était tellement forte qu’il oublia tout.
Il marcha sans se soucier du bruit de ses pas, franchit le petit pont glissant qui enjambait les ruisseaux, ses chevilles enfoncées dans la boue laissant derrière lui des traces plus visibles que s’il les avait à dessein éclairées d’un halo.
Derrière une fenêtre brillait la lumière d’une chandelle.
C’est tout naturellement qu’il se précipita pour coller son nez à la vitre. Rien ne bougeait à l’intérieur, mais il aperçut juste à temps dans le reflet du verre la silhouette imposante levant le bras derrière lui.
Il était peut-être imprudent, il n’en restait pas moins rapide et adroit. L’autre n’eut que le temps d’une respiration supplémentaire avant de se retrouver frappé d’un stupéfix.
Ce n’est qu’après avoir essuyé ses lunettes de la pluie qui s’écrasait dessus qu’il reconnut Neville Londubat.