[DW/TW] Le lion, le loup et le nouveau-né (2/2)

Aug 12, 2011 21:08

Carillon
I : Le lion, le loup et le nouveau-né
Fandom : Doctor Who/Torchwood
Genre : Gen, Xover, fluff, angst, UA à la fin de l’arc End of Time.
Censure : G à R
Personnages : Le Docteur, le Maître, Ianto Jones.
Univers : Carillon
Mots : 10 994 mots en tout
Date : janvier/février 2010
Disclaimer : Doctor Who et Torchwood sont les exclusives de Russell T. Davies qui ne les mérite toujours pas et de la BBC.

Merci à brisby_pops pour son soutien et sa béta :)

partie 1

Carillon
I : Le lion, le loup et le nouveau-né (2/2)

Partie 2 : Reconnaissance

Après l’intervention sur le Maître, une certaine routine se met en place. Ils voyagent. Le Docteur est aux anges et tout le monde peut le voir. Il a le Maître à ses côtés, dans son camp, pour la première fois depuis si longtemps que le Docteur ne saurait vraiment dire quel nombre de minutes se sont écroulées entre ce moment et le précédent. Il a un nouveau compagnon aussi.

Ianto Jones est la personne la plus curieuse et la plus intelligente qui n’ait jamais fait parti de son équipage. Tous les autres avaient leur force, ce petit quelque chose qui faisait que le Docteur les aimait mais Ianto avait plus. Il y avait cette envie d’apprendre toujours présente, une vivacité d’esprit, une grande connaissance et une façon de réfléchir si humaine tout en étant autre.

Il n’était pas humain, ni alien, encore moins seigneur du temps et cette ignorance dans laquelle se trouvait le Docteur le faisait bondir sur place d’excitation. Enfin un challenge, enfin quelque chose qu’il ne savait pas et dont le Temps ne voulait pas lui murmurer la réponse à l’oreille. C’était fantastique et brillant.

Il se souvenait du jeune Jones, perdu dans le chaos de Canary Wharf. Vaguement ce jeune homme criant, traînant le corps déchiqueté et à moitié converti d’une jeune femme en train de mourir, ni humaine, ni cyberwoman. Mais à l’époque, il ne lui avait prêté aucune attention et contrairement à Donna Noble, aucun atome aucune ligne temporelle ne lui mettait son importance en valeur.

Et puis après sur le Vaillant. Le Maître avait eu l’air si furieux quand on lui avait amené Ianto Jones menotté dans le poste principal où il était exposé à la vue de tous, fragile et l’ombre de lui même. Il se souvenait de Ianto Jones, droit et fier et effrayé mais déterminé à ne pas le montrer.

Il y avait eu quelques coups mais le Maître avait un autre jouet à l’époque pour passer sa frustration, bien plus satisfaisant. Il ne l’avait pas tué, pas trop torturé, trop intrigué et étrangement content de s’être fait surprendre par un humain insignifiant qu’il croyait avoir neutralisé. Comme si le Maître avait à l’époque reconnu le potentiel de Ianto Jones sans vraiment le savoir. Après tout, si le Docteur n’avait pas su, le Maître ne pouvait pas savoir non plus.

Il l’avait fait enfermé, l’avait fait disparaître dans les cellules à l’autre bout du vaisseau, si bien que Jack ne l’avait jamais soupçonné. Jack ne voyait que ce qu’il voulait bien voir de toute façon et il ne changerait probablement jamais non plus.

Le Docteur soupira de bonheur, assis sur son transat de bois dans les plaines d’Ixionis, la plus belle planète qu’il n’avait jamais vu en dehors de la Terre. Il n’y avait que des prairies à perte de vue d’un jaune topaze magnifique. Le ciel était d’un bleu rosé fabuleux grâce aux gaz de son atmosphère et la mélodie des grillons luthiers résonnaient sur des kilomètres à la ronde, détendant comme peu de choses à sa connaissance.

C’était le Maître qui avait suggéré ce voyage. Ianto Jones et lui s’entendaient à merveille, à son plus grand étonnement et soulagement. Ianto l’obligeait à réfléchir autrement et les provoquaient tous deux à maintes reprises sur des sujets divers et variés. Il tourna la tête.

Ianto Jones se tenait droit, une tasse de café à la main fumant avec un arôme délicieux que le Docteur pouvait sentir d’ici. Ce talent propre à Ianto Jones de faire des breuvages à se damner le rendait maintenant totalement indispensable à la vie à bord du TARDIS. Ianto avait réussi à le convaincre que le café n’était pas un ennemi ce qui était une prouesse en soi. Le Maître n’aimait que le chocolat, succombant à maintes reprises à son plaisir pour les choses sucrées qui ne disparaissait jamais quelque soit la régénération.

« Temps ! Asseyez-vous donc Ianto Jones, vous me donnez le vertige ! s’insurgea le Maître en acceptant enfin la tasse tendue.
-Avec joie. »

Leur dispute - c’en était une pour le Maître, ce n’était qu’une épreuve de patience pour Ianto - le faisait toujours sourire avec affection. Leur jeune compagnon s’installa dans l’herbe, soupirant avec délectation.

« Cette planète est-elle à votre convenance ? s’amusa le Docteur.
-Elle est magnifique. Merci.
-Je crois que notre ami prend votre amour pour la musique au sérieux. »

Le Maître lui envoya un regard si noir que le Docteur n’en voyait plus la couleur originale. Ce qui ne l’empêcha de sourire avec malice.

Ianto Jones était un scientifique dans l’âme. Après de nombreuses observations, il était venu voir le Docteur avec des carnets entiers de notes illisibles et des idées pleins la tête. Son idée de base était un principe millénaire que de bons nombres de scientifiques humains avaient étudié sans en découvrir les mystères.

La musique au service de l’ordre dans le Chaos. Ianto Jones avait passé des jours dans la bibliothèque du TARDIS, engloutissant les livres à une vitesse extraordinaire. La théorie qui disait que la musique était l’arme ultime contre le Chaos était intéressante mais si puérile en soi que le Docteur ne s’y était jamais penché. Mais les recherches de Ianto Jones l’avait amené à la regarder d’un autre œil. C’est ainsi qu’après plusieurs jours, Ianto avait abordé le sujet avec le Maître.

Leurs débats musicaux avaient failli venir à bout de la patience légendaire du Docteur. Jusqu’à ce qu’il se rende compte de la finalité de ces arguments et de ces recherches. Venir à bout des tambours.

« La musique adoucit les mœurs. » était un vieux proverbe terrien, Ianto en avait fait une vérité scientifique. Il avait permis de calmer le Maître au plus mal de ses crises de folies grâce simplement à quelques notes de violon ou de piano jouées avec une précision et un but précis et non pas à des fins purement esthétiques.

Les résultats étaient plus qu’impressionnants et le Docteur souriait toujours quand il voyait le Maître plongé dans une sorte de torpeur, les écouteurs d’un iPod dans les oreilles. Le pauvre ne se doutait même pas qu’il faisait l’objet d’une étude scientifique poussée qui n’avait pour seul but que de lui épargner la torture des tambours.

Le Docteur les avait entendu, il ne pouvait qu’imaginer l’horreur que ce devait être de les entendre à longueur de journée, la nuit, empêchant la moindre pensée calme, cohérente. Il en frissonna rien qu’à cette idée.

« Voulez-vous que j’aille chercher votre manteau, Docteur ?
-Non merci Ianto Jones. Profitez donc de ce paysage, notre prochain voyage ne sera peut-être pas aussi reposant.
-Et cela ne me gênera aucunement rassurez-vous. » sourit Ianto avant de se recoucher dans les hautes herbes.

Et c’est ainsi qu’ils passèrent les trois jours suivants. Ils l’avaient bien mérité après tout. Le Temps n’avait jamais eu d’emprise ici, ils pouvaient se détendre un peu.

***
« Vous savez, conquérir ce monde ne calmera pas ce besoin de dominer que vous éprouver. Ce sera encore si éphémère que vous n’en sortirez que frustré et plus furieux qu’en commençant. » commenta Ianto du haut de l’émetteur de Polaris, leur dernière escale.

Le Maître se retourna vers lui, en rage. Ianto resta calme. Le Maître n’était pas entièrement responsable de ses actes les trois quarts du temps. Il y avait ce besoin compulsif de conquête et de guerre si profondément inscrit dans ses veines, qu’il ne s’en séparerait probablement jamais. Des centaines d’années à subir les tambours violents dans sa tête, à entendre les guerres, les cris et les pleurs, n’avaient fait que le rendre plus violent avec le temps.

Quelque chose sur Polaris avait fait disjoncté une fois de plus le maigre contrôle que Ianto et le Docteur avait réussi à faire gagner à leur compagnon. Ianto n’était pas sûr de savoir quoi mais le résultat était le même. Le Maître se tenait là en haut de l’émetteur qui servait de lien entre tous les êtres de cette planète, prêt à en prendre les commandes. Deux choix s’offraient à lui, tous les court-circuiter et les assassiner purement et simplement pour gagner une planète ou prendre possession de leurs esprits et en faire des esclaves quelconques.

La subtilité n’était plus trop sont fort à ce degré de folie. Le Docteur était prisonnier du TARDIS plus bas, maintenant précairement l’équilibre entre les planètes entourant Polaris tandis que Ianto était là, aux cotés du Maître qui, autrefois, l’avait torturé pour savoir ce qu’il faisait à bord de son vaisseau en étant un autre homme.

Ianto avait foi en le Maître, peut-être naïvement, mais il n’était pas le seul. Tout n’était qu’une question de paroles bien choisies maintenant. Il s’assit calmement aux pieds du Maître, ignorant le regard hagard qu’il savait braquer sur lui, méfiant et agité.

Il regarda au loin les plaines bleutés de la planète grouillant de vie angoissé, ressentant un danger inconnu. « Deux empereurs ne sont destinés qu’à se faire la guerre, sauf s’il y a quelqu’un pour établir et maintenir la paix du royaume. » se rappela-t-il.

« Vous n’êtes pas fait pour dominer le monde.
-Quoi ?! s’indigna le Maître relâchant légèrement la prise sur la commande bricolée qu’il tenait fermement dans la main
-Après tout si l’on observe les faits, aucune de vos dernières tentatives de conquête n’a tenu le coup.
-Elles étaient toutes brillantes ! protesta le Maître avec véhémence.
-Vos plans sont toujours assez faibles et prévisibles. Asservissement, violence, usage exagéré de la force, domination et totalitarisme.
-C’est tout ce que ce genre d’insectes méritent, gronda le seigneur du Temps.
-Prendre le contrôle d’une planète ou d’une population n’est pas si dur C’est de le maintenir qui s’avère compliqué.
-Je ne vois pas où vous voulez en venir.
-Observons votre prise de pouvoir en tant que Howard Saxon. Vous aviez eu la patience, la finesse avant votre accession au poste de premier ministre. Il y a eu le Vaillant, le réseau Archange, les gens n’étaient même pas conscients de leur subordination, mieux il en était heureux.
-Je sais, sourit machiavéliquement le Maître avec une certaine fierté.
-Et il a fallu que vous choisissiez de tout sacrifier pour plus d’action, de massacres et de cris. Là était votre erreur. Dès l’instant où les Toclafanes sont apparus à bord du Vaillant et ont éliminés le président américain face aux caméras du monde entier.
-C’était nécessaire.
-Complètement inutile. Il suffit de se baser simplement sur l’Histoire. Que ce soit celle de la Terre ou de l’Espace. L’empire d’Alexandre le Grand, l’empire Ottoman, l’empire Byzantin. La plupart était immense et tout puissant. Il y avait une répression certes mais le peuple la tolérait. Les gens ne sont pas difficiles à combler. L’empire d’Hitler et plus tard l’URSS était voué à l’échec dès leurs premières pierres. Comment voulez-vous que les gens acceptent de vivre dans la peur et la délation.
-C’est la base de toute dictature !
-Je ne suis pas d’accord. Un peuple demande protection, sécurité et prospérité à ses dirigeants. Il n’a besoin que de ça. Une population est plus qu’heureuse de suivre un leader qui les protège, les comprend et les respecte. Même si les mesures ne sont pas forcément bien mises en place comme dans la majorité des gouvernements, l’honnêteté d’un chef face aux difficultés et la promesse d’un avenir meilleur sont nettement plus efficaces qu’un raid punitif de nuit pour servir d’exemple. Je ne connais personne qui laisserait des gens qu’ils aiment être confrontés à de tels risques. D’où la naissance des mouvements révolutionnaires ou résistants. »

Ianto se laissa aller en arrière, s’appuyant sur les mains dans un silence troublé. Il avait semble-t-il réussi à initier le doute dans les plans du Maître. L’homme se frottait le menton pensivement.

« Le raisonnement se tient. Cependant, je ne suis pas convaincu.
-Je vous invite à abandonner votre idée de conquête de Polaris et à revenir avec moi dans le TARDIS. Je vous assure que des recherches approfondies sur le sujet vous permettrez d’y voir plus clair. Vous verrez que vos méthodes sont à repenser. Un de mes professeurs de faculté disait : « Avec la connaissance vient la réussite. ».
-Je suis déjà brillant !
-Vous ne ferez que gagner en puissance donc avec une lecture attentive et analytique des récits historiques de batailles, d’empires et de stratégies, annonça Ianto en se levant pour lui faire face.
-Fort bien, conclut le Maître en déposant la commande dans la main tendue de Ianto.
-Maintenant si vous voulez bien aller régler le problème de l’équilibre du système au plus tôt je suis sûr que ce projet avancerait bien plus vite.
-Je suis d’accord. Je n’aime pas perdre mon temps et cet imbécile de Docteur est trop volatile pour arriver à résoudre ce problème rapidement, je suis brillant après tout.
-Comme vous ne cessez de me le répéter.
-Venez Ianto Jones. »

Ianto sourit avec fierté et satisfaction et ramena leur compagnon fugitif dans le vaisseau, où le Docteur et le Maître se lancèrent dans une compétition acharnée pour prouver qui était le plus intelligent des deux. Ianto sourit et soupira, avant d’aller se préparer une grande tasse de moka chaud.

On ne pouvait vraiment pas dire que sa nouvelle vie était ennuyeuse.

***
Ce fut un son très léger qui sortit le Maître de sa lecture approfondie de « Conquêtes et Empires de T4.106 à T5.107 ». Les plans de Ianto Jones étaient toujours très bien ficelés. Le Maître aurait aimer pouvoir en retirer toute la gloire mais il savait que ce n’était pas vrai. Il était déjà brillant avant que le Maître ou le Docteur ne lui enseigne, il le serait encore bien après leur instruction.

Le Maître aimait la compagnie de Ianto pour de nombreuses raisons. Sa présence calmait la cacophonie dans sa tête et la présence oppressante de l’Univers qui leur rappelait qu’ils étaient sans cesse poursuivis. Il soupçonnait que c’était l’une des raisons aussi pour lesquelles le Docteur était si enamouré de leur nouveau compagnon. Ca et le thé.

Lui préfèrait de loin le chocolat mais le moka de leur si jeune et intrigant ami n’était pas le plus mauvais des mets non plus. Il regardait un peu mieux maintenant, toujours plus attentivement, prêt à bondir à chaque tentative louche de sa part et pourtant il se surprenait à laisser de plus en plus souvent le bénéfice du doute au jeune homme.

Et aujourd’hui ses observations le conduisirent à une conclusion bien étrange. Ianto Jones était recroquevillé dans le fauteuil de pilotage qui avait sûrement vu de meilleurs jours en temps de guerre qu’après huit cent ans à subir la conduite de son imbécile d’ami. Il n’émettait aucun son plus haut que l’autre, juste une respiration lente et régulière comme le tempo d’une berceuse qu’il connaissait depuis peu de temps.

Il avait étudié Ianto Jones aussi bien qu’il avait été étudié et sa plus grande énigme jusque là était en rapport au cycle de sommeil de leur jeune passager. Jones ne dormait jamais seul. Le Maître avait essaié à plusieurs reprises de le surprendre endormi mais jamais il ne se laissait aller. Bien sûr, il dormait, aucun organisme pensant ne pouvait survivre sans sommeil mais le cycle de Ianto Jones était très erratique et le Maître n’aimait pas ça. Jones ne se cachait pas pour se reposer au contraire. Il profitait du moindre moment de longs voyages ou même courts pour fermer les yeux, entouré d’eux seigneurs du Temps et le Maître savait à quelques point ils pouvaient être bruyants, excentriques, insupportables et il s’interrogeait vraiment sur la santé mentale de Ianto Jones.

« Comment fait-il ?! s’exclama-t-il alors sans destinataire particulier, troublé et frustré de ne pas pouvoir avancer dans son étude.
-Qui donc ? demanda curieusement le Docteur, le nez dans ses calculs de trajectoire.
-Jones ! Il doit y avoir quatre cent pièces dans ce vaisseau et il s’endort toujours dans ce vieux tas de ressors inconfortable ! »

Le Docteur sourit avec affection sans lever les yeux.

« Je ne pense pas que ce soit un problème de situation, Maître.
-Si ce n’est pas ça, qu’est-ce que c’est ?! Du pur masochisme ? Je suis immortel et peut changer de colonne vertébrale à mon bon vouloir et pourtant je n’échangerai pas Gallifrey contre dix minutes dans ce siège, s’emporta-t-il.
-Non mon ami. Vous vous méprenez. Ca n’a rien à voir avec l’endroit mais plutôt avec la compagnie, expliqua le Docteur en se retournant vraiment.
-Compagnie ?
-Et je vous croyais brillant, soupira le Docteur avec amusement. Ianto Jones n’aime pas dormir seul.
-Oh. »ne put s’empêcher de dire le Maître avec étonnement.

Il jeta un nouveau regard sur leur camarade de voyage. Ne pas vouloir dormir seul.

« Quelle idiotie. Dormir, c’est dormir. Seul ou pas, cela ne devrait pas avoir la moindre importance.
-Il semblait que notre jeune compagnon ne soit pas de votre avis. Peu de gens aiment dormir seul.
-Vous ne dormez pas.
-Je dors, protesta sans conviction le Docteur. Je n’aime pas arrêter de courir, donc mon sommeil n’est guère reposant à moins que j’en ai vraiment besoin. Et puis, après tout, je n’ai pas souvenir de vous en train de vous reposer non plus.
-J’ai trop de choses à apprendre mais je n’ai pas peur. Je n’aime pas perdre mon temps quand il y a des choses à faire.
-C’est une chose que j’approuve et apprécie. Ianto Jones est juste différent. »

Le Maître se frotta le menton. C’était étrange et absurde mais si propre à Ianto Jones et sa drôle de nature qu’il n’était soudainement plus du tout perdu dans ses interrogations et se trouva même idiot de ne pas y avoir penser plus tôt.

Il prit alors une grande décision. Déposant un bout de carte solaire dans le gros volume qu’il avait entamé la veille, il se lèva et secoua doucement Ianto Jones par l’épaule. Le jeune homme ouvrit les yeux au ralenti comme l’un de ses chats ridiculement adorables que Lucy avait voulu avoir à Downing Street.

« Il y a un problème ?fit la voix ensommeillée.
-Ianto Jones. Un tel comportement puérile n’est pas à la hauteur de votre potentiel. Dorénavant, si vous êtes fatigué, dites-le. Ce ne sont pas quelques heures de repos qui vont manquer à ma lecture ou au Temps. Je vous ordonne de descendre dans la première chambre que vous trouvez.
-Bien, sourit Ianto avec un bonheur non dissimulé, probablement à cause du sommeil.
-Quand à vous, Docteur. Ca ne vous ferait pas de mal de nous rejoindre. Si le Temps ne vous a pas encore rattrapé, il ne le fera pas en une nuit ! »

Le Maître croisa les bras sur sa poitrine pour amplifier le poids de ses mots. Le Docteur rit discrètement derrière ses lunettes et s’inclina.

« A vos ordres. »

Le Maître hocha la tête, satisfait de cette conclusion à l’affaire et il descendit vers les quartiers de repos, ses deux compagnons sur les talons. Il y avait vraiment des fois, où il ne comprenait pas les gens.

***>
« Je vous trouve trop docile, depuis que vous êtes devenu mélomane, protesta un jour le Docteur alors que le Maître finissait « « Conquêtes et Empires de T9.1014 à T1.1016 » dans un fauteuil de cuir sorti du Temps savait où .
-Je croyais que ça vous rassurerait de pouvoir me contrôler. N’était-ce pas ce que vous aviez promis à ces petits cafards sur le Vaillant ?
-Non. Enfin, pas vraiment. Ce manque de rébellion de votre part me rend nerveux.
-Vous m’en voyez navré. Souhaitez-vous que je vous assomme d’une décharge et que je vole à la domination d’un monde quelconque pour calmer votre angoisse ?
-Pourquoi pas ? Au moins ça ferait assez de remous dans le temps pour rendre les voyages un peu plus intéressants !
-Fort bien. Veuillez vous préparer au choc, je ne tiens pas à ce que Ianto Jones assiste à une régénération précoce. Après tout, je le crois plutôt attaché à celle-ci même si les raisons me dépassent, prévint le Maître en se frottant les mains.
-Ne faites pas votre ignorant. Je suis brillant et vous le savez, ce serait dommage de risquer une telle chevelure, s’indigna le Docteur en agitant les cheveux avec insistance.
-Messieurs. » interrompit Ianto calmement, distribuant thé et moka.

Le Docteur regarda le Maître se rasseoir dans son lourd siège de cuir dont il ignorait complètement la provenance et dégustant son breuvage avec un tel calme que le Docteur se demande un instant si on ne lui avait pas changé le Maître. Le Docteur but son thé, s’installa dans son fauteuil en boudant.

« Si le manque d’action vous rend agité je suis sûr que nous pouvons trouver une destination pour partir à l’aventure, commenta Ianto, adossé au poste de commandes.
-Là n’est pas la question Ianto Jones ! Il n’y a plus aucun mérite à dompter le Maître s’il est coopératif !
-Excusez-moi. Puis-je savoir quand vous m’avez dompté ?! » protesta le Maître avec véhémence.

Le Docteur sourit avec triomphe ! Enfin un peu d’animation. La tranquillité le rendait paranoïaque. Ianto se tourna vers lui avec un regard si réprobateur que Le Docteur se sentit s’enfoncer un peu sur lui-même.

« Je pense que ce que le Docteur essaie de dire, c’est qu’il est troublé mais heureux de voir que la présence des tambours ne semble plus vous causer autant de soucis qu’auparavant.
-Je peux sentir quand vous essayez de me tromper Ianto Jones ! Je ne suis pas un imbécile !
-Loin de moi cette idée, Maître. Mais vous savez à quel point, je n’aime pas les confrontations agressives.
-Ce n’est pas une raison.
-Fort bien. Docteur ? Puisque vous avez si éloquemment fait remarquer ce fait, pourquoi ne pas continuer votre raisonnement jusqu’au bout. » lança Ianto Jones avec un ton sombre qui fit frissonner le Docteur.

Il soupira et jeta tout à tour un œil sur la réprobation de Ianto Jones et le défi colérique du Maître.

« Je suis heureux que les tambours ne vous fassent plus souffrir. La théorie de Ianto Jones s’est avéré très efficace et vous m’en voyez ravi. Je vous prie d’excuser mes propos malvenus.
-Quelle théorie ?
-La théorie musicale capable d’instaurer l’ordre au sein du Chaos.
-Vraiment ? Pouvez-vous m’éclairer Jones ? gronda le Maître.
-La musique adoucit les mœurs, je me suis donc dit que le plus sûr moyen d’apaiser les tambours dans votre tête était avec la musique.
-Les tambours sont de la musique, Ianto Jones ! s’écria le Maître au bord de la rage.
-Faux. Ce que vous entendez n’est pas de la musique. C’est une sorte d’acouphène désagréable qui agit un peu comme la torture chinoise de la goutte d’eau, faisant basculer dans la folie avec la répétitivité du son, du rythme, son intensité et son volume. Il était donc évident d’essaier de calmer cette torture avec un autre rythme, une mélodie organisée et esthétique avec un contrôle d’intensité et de volume. Ce qui vous a permis de vous calmer et d’avoir des pensées simples et rationnelles sans s’emporter et attiser votre colère à cause de votre impuissance face à l’absence totale de contrôle.
-Encore une fois vous démontrer votre intelligence, Ianto Jones. Mais je vous prierai la prochaine fois que vous voulez vérifier une théorie de ne pas la tester sur moi.
-A la condition unique que vous l’acceptiez comme aide. Vous ne pouvez nier son impact capitale sur votre bien-être récent.
-Je ne le nie pas. Je n’aime qu’on me force de l’aide.
-Pensez donc aux progrès que vous avez dans la stratégie et la tactique ainsi que votre compréhension des peuples depuis que la musique et la théorie vous permettent de vous concentrer sur autres choses. »

Le Maître prit la pose très particulière, réservé à des réflexions intenses et poussées. Le Docteur n’avait pas dit un mot et devait bien avouer que son manque de tact et son empressement avait failli causer un désastre. Ianto était vraiment exceptionnel quand il s’y mettait. Il était évident que sans lui, les deux seigneurs du Temps se seraient jeter l’un à la gorge de l’autre en moins de temps qu’il ne faut pour dire paradoxe.

« Vos arguments sont infaillibles. Cependant, je tiens à vous prévenir. Une autre entourloupe pareille et ma réaction ne sera peut-être pas aussi posée.
-Ce que je comprends et accepte. Je vous consulterai à l’avenir pour toute question relative à votre personne.
-Merci. »

Le Maître se rassit dans son siège sans quitter Ianto des yeux, ouvrant le livre à la page marquée avant de retourner à son chapitre. Le Docteur se retint de pousser un soupir.

« Docteur. »

Il avait peut-être relâché son attention un peu trop vite.

« Je crois que vous et moi devrions discuter de la définition du terme confidentiel et diplomatie. »

Il était mort.

***>
A peine furent-ils de retour dans l’enceinte du TARDIS que le Maître passa ses bras autour des épaules de Ianto et le serra dos contre poitrine. La prise était forte et presque insupportable. Ilse contenta de fermer les yeux et de déposer une main sur les deux jointes contre ses clavicules.

Il pouvait sentir les deux cœurs encore affolés battre contre ses omoplates. Le Maître respirait fort contre sa nuque et Ianto le laissa faire. Il avait du mal à réconcilier l’image du Maître des premiers jours de son mandat avec celui-ci. A croire qu’il ne revint jamais entièrement lui-même.

Il était étrangement heureux que quelqu’un s’accroche à lui aussi fort. Jack ne l’avait jamais vraiment fait, pas avec autant de désespoir, pas avant la fin. Il ouvrit les yeux, le cœur gros et retint un sourire indulgent en direction du Docteur qui observait la scène à distance. Il y avait un léger froncement de sourcils, confus et ennuyé sur son visage, une réticence à approcher semblable à un animal blessé.

Ianto lui sourit tout de même et l’invita à approcher d’un geste de la tête et de la main. Le Docteur la saisit dans la sienne, si froide que Ianto s’en inquiéta. Le Docteur se détendit doucement, le visage triste comme Ianto ne l’avait encore jamais vu.

« Je vais bien. » murmura-t-il à leur intention pour ne pas les brusquer.

Le Docteur émit un léger soupir de soulagement malgré tout et s’avança de quelques centimètres, si subtilement que même Ianto aurait pu l’ignorer, sauf qu’il était un observateur hors pair.

Le Maître laissa un souffle un peu tremblant lui échapper. Il referma une seconde sa prise sur lui avant de la relâcher de plus en plus, jusqu’à ce que les bras ne soient que posés contre lui. Ianto sut à ce moment-là, qu’il ne pourrait jamais plus reculer. Il l’entendait lui aussi. L’avertissement des peuples, passant de planètes en planètes, de générations en générations, se changeant d’une simple mise en garde à une prophétie. Il frémit de peur face à une telle importance, face au pouvoir qu’on lui octroyait. Il se détacha du Maître sans que celui-ci ne le laisse aller bien loin, accroché qu’il était à son bras, son autre main. Ianto la libéra malgré tout pour la poser sur la joue du Maître, sans desserrer celle qui empêchait le Docteur de fuir en courant.

Les yeux verts et sombres du Maître étaient perdus, incapables de se poser une seconde sur quelque chose et d’y rester, les pupilles si petites malgré l’obscurité de la pièce. Ianto posa son front contre le sien et écouta. La cacophonie dans la tête de leur compagnon était si forte que Ianto faillit reculer. Mais il tint bon, endura l’intensité à en perdre ses propres pensées. Puis il mit en pratique ce qu’il avait appris : il écouta et diffusa. Il entra doucement dans le trou noir qu’était l’esprit du Maître. Il pouvait le voir, ce néant qui voulait l’engloutir tout entier et qui n’y gagnerait rien d’autre qu’un bref soulagement avant de se sentir de nouveau désespéré, désireux d’en avoir plus, toujours plus, de dominer, de posséder. Il entra et laissa sa chanson doucement faire reculer les tambours, les envelopper d’une autre mélodie plus douce et plus calme, moins envahissante, plus rassurante.

Et ça fonctionnait. Le Maître se relaxa considérablement, vidé de ses forces et de son énergie, jetés aux quatre vents en essayant d’épancher sa soif de rétribution sur les Proximiens tandis que le Docteur serra sa main à en faire grincer les os les uns contre les autres.

« Venez. »

Et ils obéirent. Les seigneurs du temps obéirent à quelqu’un. Ianto le mena par la main jusqu’en bas dans la chambre qu’ils partageaient maintenant pour le repos. Ils s’installèrent, sans que jamais l’un d’eux ne se détache de lui. Le Maître s’endormit dans ses bras très rapidement, les bras autour de sa taille, la main de Ianto dans ses cheveux. Le Docteur resta plus réservé, s’approchant le plus possible de son dos sans le toucher, il partagea sa chaleur et ne fit que lui tenir la main.

« Tout va bien. » murmura-t-il aussi bien pour bercer celui que beaucoup considéraient comme fléau que pour celui qu’on appelait sauveur contre lui.

Ianto ne dit plus rien. Il laissa les deux seigneurs du Temps se rassurer, se reposer des événements de la journée et des vagues dans le Temps que ce désastre avait occasionné.

« Vous nous tuerez un jour, Ianto Jones.»

Le Docteur prononça ses paroles avec une fatalité qu’il ne lui connaissait pas et si faiblement que Ianto les aurait manqué si elles n’avaient pas chuchoté contre son oreille.

« Non, Docteur. Je ne le permettrai jamais. » répondit-il, ses mots résonnant comme celle d’un dieu édictant un précepte inviolable.

Et seul à cet instant, il sentit le Docteur se détendre et s’endormir à son tour.

***>
Le Maître ne se sentait pas très bien au réveil. Il avait la nausée, mal au crâne mais il était au chaud, au calme. Il n’y avait pas de soleil pour le déranger ni faire vrombir le sang dans ses vaisseaux cérébraux. Il avait le corps engourdi et les yeux avait dû mal à faire le point.

Il se demanda quel traitement il avait subi pour souffrir d’autant d’effets secondaires quand les souvenirs de la veille revinrent en flash violents derrière ses paupières, lui donnant le tournis, les cœurs dans l’estomac. Il tâtonna à ses cotés, un peu paniqué.

La main du Docteur se posa sur son front et le rallongea doucement sur le lit, la tête sur ses genoux. Le Maître laissa échapper un soupir vaguement soulagé et embarrassé. Il n’était pas pour autant réconforté. Ses muscles lui faisaient mal tellement il était angoissé.

« Il est allé chercher de quoi vous remettre d’aplomb. Si vous tendez l’oreille vous pourrez vous en rendre compte par vous même, murmura son compagnon et le Maître lui en fut immensément reconnaissant.
-Que s’est-il passé après ?
-Rien d’important. Il est là, vous êtes de nouveau parmi les conscients et le TARDIS en mouvement. C’est la seule chose qui compte. »

Le Maître ne répondit pas pendant un moment. Il ferma les yeux, respira profondément, son esprit s’étirant pour chercher la présence de Ianto Jones. Le Docteur avait raison. Tout allait bien. Il sentait l’odeur du chocolat, du jus de pomme et de toasts grillés à peine beurrés et entendait une douce mélodie chantonnée dans la cuisine.

Tout allait bien.

« Je trouve étonnant de vous voir ainsi à mes côtés » renifla-t-il dédaigneusement.

La main caressa doucement son front avant de rester là, juste présente et réconfortante. Il entendit le soupir triste au dessus de lui mais le Maître n’avait pas envie d’ouvrir les yeux pour voir les émotions dans ceux de son ami-ennemi.

« Vous étiez mal. Pourquoi voulez-vous que je sois ailleurs ?
-Vous m’évitez presque comme la peste depuis l’arrivée de Ianto Jones. Même avant ça, après la fin des Lords. Que dis-je ?! Depuis Gallifrey.
-C’est injuste. Vous ne vous précipitez jamais vers moi non plus, mon ami. »

Le Maître laissa échapper un reniflement amer. Le Docteur était un idiot. L’avait toujours été. Il voulait toujours aider, jamais comprendre. Si seulement il avait pris le temps d’écouter, ils se seraient évités tant de soucis, tant de déchirements.

Le Maître se souvenait d’un temps où les prairies rouges de son père à perte de vue étaient leur royaume. Où le Temps les ignorait et où ils tourmentaient les créatures qui paissaient là. Où les artifices des Animateurs les faisaient s’extasier bêtement devant de simples jeux de lumières et où ils passaient des heures à les recréer, se brûlant des doigts qui avaient changé tant de fois. Toutes les marques et les cicatrices avaient disparu au fil des régénérations, comme un vieux rêve.

« Ca fait bien longtemps que nous ne sommes plus amis, vous et moi.
-Nous avons toujours été amis et le seront toujours. Vous êtes le Maître.
-Et vous le Docteur.
-Comme nous l’avions toujours dit depuis nos premiers pas.
-Vous ne saviez pas parler à cette époque! S’exclama le Maître.
-Et vous aimez me le rappeler à chaque fois.

Le Maître entendait le sourire.

-Je ne propose pas à tout le monde de voyager avec moi, vous savez.

Il ouvrit les yeux et le foudroya du regard en réponse.

« Les gens m’accompagnent mais ils ne sont pas vous, rectifia le Docteur en haussant les épaules. Ils ne pilotent pas le TARDIS. Je ne leur offre pas ma vie que je vous ai toujours offert la mienne, précisa le Docteur avec certitude et embarras.
-Je ne vous ai jamais demandé le TARDIS.
-Non. Vous me l’avez pris pour me punir.
-Vous le méritiez. Vous m’aviez oublié.
-Je ne peux oublier ni vous, ni nos querelles et encore moins nos souvenirs heureux. Je souhaite juste en avoir de nouveau. Vous êtes le seul qui peut me comprendre et pourtant vous me repoussez à chaque fois. Je ne suis pas invincible, continua le Docteur toujours avec ce calme serein qui énervait le Maître à chaque fois.
-Vous est-il jamais venu à l’idée que je n’avais pas besoin de vous ? De vos grands sermons et de vos grandes promesses ? Je ne voulais qu’une chose de vous et j’ai dû la forcer, comme le reste. Était-ce donc si dur de vous approcher et d’écouter ? Vous dites que je suis le seul qui peut vous comprendre et vous n’avez jamais essayé de le faire avec moi. Pourquoi le devrais-je ? »

Le Docteur perdit toute contenance et le Maître crut un instant voir passer un voile de larmes sur ses grands yeux sombres.

« J’avais peur. Vous n’êtes pas la plus abordable des créatures.
-C’est le Temps qui se moque de l’Espace ! s’exclama le Maître avec un amusement non fin bien qu’amer.
-Vous ne voulez pas de mes promesses mais je vais quand même vous en faire une. Je vous écouterais. Maintenant et à l’avenir, je vous écouterais quand vous me le demanderez aussi bien que quand vous ne le voudrez pas. »

Le Maître fit une grimace de dégoût. Les promesses, personne n’avait jamais su les tenir, il avait appris à les briser tant on lui avait montré l’exemple. Il avait peu de foi en elles. Encore moins dans le Docteur. Après tout, ils s’étaient tant trahis…

« Nous ne sommes plus seuls, vous et moi. Nous sommes ensemble et nous avons Ianto Jones. Nous pouvons changer. Je veux changer. Vous m’avez toujours été trop précieux pour que je vous perde. Maintenant je sais que je peux arriver à vous garder. Je ferais mon possible. Vous devez juste me laisser faire.
-J’essaierai. » confia le Maître.

Le Docteur lui fit un léger sourire un peu tremblant et se pencha pour poser son front contre le sien. Et cette fois, le Maître écouta à son tour. La porte s’ouvrit si discrètement, qu’il crut l’avoir imaginé. Le Docteur ouvrit les yeux et le fixa avec intensité pendant de longues secondes.

Ils détournèrent la tête au même instant pour voir Ianto Jones déposer le plateau sur la petite table de nuit. Le jeune homme leur sourit doucement.

« Le petit déjeuner est servi. »

Le Maître se redressa, la gorge nouée par toutes ces attentions et ces paroles. Il en avait été si longtemps privé. Il prit une grande inspiration, repoussa les pulsations de sa tête aussi loin qu’il put et finit par se détendre.

« Merci, Ianto. »

***>
Ils se réveillèrent tous trois au même instant avec un frisson synchronisé. Le Docteur bondit du lit et se précipita dans l’escalier en colimaçon. Ianto se dégagea avec plus grande mesure, tous ses nouveaux instincts agités, comme un son de cloche qui cherchait à le prévenir d’un danger imminent.

Pourtant rien ne pouvait les atteindre dans les profondeurs du vortex, bien à l’abri dans le vaisseau. Il réarrangea sa chemise et son pantalon du mieux qu’il put. Il aurait dû se changer avant de se laisser aller au sommeil.

Le Maître posa une main sur son bras, serrant plus fort qu’il ne le faisait. Il avait le regard sombre et le visage sérieux. Ianto lui fit un bref sourire compréhensif.

« Nous devrions le rejoindre avant qu’il n’attire de plus gros problèmes que ce qui a l’air de s’annoncer. »

Ianto et le Maître coururent à leur tour à l’étage. Le Docteur virevoltait d’une commande à l’autre avec un air de panique sur le visage qui laissait Ianto sans voix. La Maître se joignit à la danse appuyant sur des commandes auxquels Ianto ne pourrait pas donner de nom mais dont il connaissait le rôle instinctivement.

-Que se passe-t-il ? demanda-t-il, incapable d’identifier ce sentiment de peur profonde au creux de son estomac qui lui donner envie de vomir et de frissonner sans raison.
-Quelque chose de grave, répondit sombrement le Docteur.

Il s’arrêta brusquement, regardant le plafond de la salle de contrôle, l’oreille tendue. Le Maître renifla dédaigneusement et s’occupa du seul moniteur. Ianto voyait les symboles s’affoler et de nouveau apparaître avec des couleurs plus vives les unes que les autres.

« Doc… Vous me…cevez… »

Ianto sentit son cœur se serrer si fort dans sa poitrine qu’il eut peur qu’il explose d’un coup.

-L’anomalie, déclara le Maître.

Ianto ne dit mot et regarda le Docteur ajuster les commandes. La communication s’améliora d’un coup.

« Docteur, nous avons besoin de vous. Vous devez impérativement venir. Il ne s’agit plus de m’ignorer. Quelque chose de grave est en train de se passer et il n’est plus temps d’enfoncer la tête dans le sol et d’attendre que ça se passe ! Vous devez venir, il en va de la survie de la planète. Je ne peux pas faire ça tout seul. »

-Jack… murmura Ianto.
-Ianto Jones, restez-là. Gardez un œil sur lui. Je dois partir, déclara le Docteur.
-Parce que votre petit jouet vous appelle, cingla le Maître.
-Vous avez senti la perturbation aussi bien que moi, coupa sèchement le Docteur avec un regard sombre.
-Et alors ? A force de jouer avec le Temps, vous allez finir par le contrarier. Vous n’avez donc rien appris !.
-C’est l’Espace qui se moque du Temps !
-Il ne s’agit pas de moi ! s’écria le Maître.
-C’est pour çaq u’il doit rester là !
-Et que vais-je faire ? Du thé en lisant un livre pour vous attendre ? trancha Ianto.

Le Maître approcha et lui prit la main. Ce n’était pas souvent que le Maître faisait preuve d’affection ou de tendresse et Ianto le savait rien qu’à la surprise sur le visage du Docteur.

-Bravo Docteur, vous avez réussi à le mettre en colère.
-On me reproche assez de ne pas être intervenu la dernière fois. Je fais ça pour son bien ! se défendit le Docteur.
-Pourquoi ? Pourquoi retourner sur une planète qui vous a donc si peu apporter. Qui vous a vu mourir ? demanda le Maître en ignorant complétement son autre compagnon..
-Parce que c’est ma planète. Je suis né là-bas. Ma famille y vit. Je ne suis pas assez fort pour ignorer mon ancienne vie. Ce n’est parce que je ne veux pas y retourner que je vais ignorer les cris de détresse, répondit Ianto.
-Êtes-vous sûr, Ianto Jones ? s’inquiéta le Docteur en venant à sa rencontre.
-Je ne pourrais me pardonner d’être resté là sans agir. Je suis mort pour la Terre, ce serait dommage que mon sacrifice ait été vain si rapidement, sourit-il faiblement.
-Très bien. Accrochez-vous. Je vais pousser les moteurs.

Ianto acquiesça et se dirigea vers la rambarde. Le Maître le fixait avec incompréhension mais le rejoignit rapidement. Il avait des choses plus important qu’eux dans cet univers. Leur bulle ne pouvait qu’exploser à un moment ou à un autre. Autant que ce soit pour une bonne cause. Il espérait seulement qu’il n’ait pas à faire face à Jack trop rapidement.

Fin, premier one-shot.

couples : ten/master/ianto, univers : carillon(ot3bis+1)

Previous post Next post
Up