Titre : Doute (chapitre 1)
Auteur :
soleil_ambrienFandom : Original (La Porte de Daath)
Personnages : Gabriël, Mikhaël, évocation de Sammaël
Rating : PG, peut-être PG-13 pour thèmes religieux ?
Disclaimer : Tiens, pour une fois, c'est à moi; cette histoire. Enfin, ces caractérisations, en tout cas. Les anges et Lucifer sont dans le domaine public, évidemment.
Notes : Oui, bon, je poste dans le désordre, désolée... Au fait, qui serait intéressé pour tout lire, dans longtemps, quand
flo_nelja m'aura bêta-lue et tout ? Parce que je compte faire une liste de diffusion exprès, en fait...
Note 2 : Justement, en parlant de Nelja, elle m'a prêté un livre sur les anges (Archive des Anges, d'Alix Saint-André) qui mentionne une fête dédiée à Saint Michel le 17 novembre. Je n'en trouve aucune trace sur le Net, mais sur les conseils de Mil... de
grand_chat_mot (
), je vous cite donc le livre comme source. ^^
Chapitre 1 : Doute
«…était à leurs yeux inacceptable. Alors, le Conseil décida de l’exiler sur la Terre, bien qu’il s’agît là de l’un des huit archanges. Parmi ceux qui l’avaient côtoyé, certains protestèrent, et tentèrent de le persuader de revenir sur ses positions. D’autres, au contraire, ne firent rien. C’était mon cas. »
Fragment des Chroniques du Royaume des Cieux, par l’archange Gabriël.
Fleurs vives et colorées, buissons odorants. La vie, partout frémissante. Papillons légers, lézard vert et argenté sur une pierre, au bord du lac d’un bleu profond. Ciel magnifique.
Heureusement, ce Jardin n’est qu’illusion. Ce serait terrible que de véritables animaux luttent pour survivre dans ce lieu de paix, s’attaquent mutuellement et salissent de leurs excréments cet endroit sacré.
C’est pour cela que j’apprécie tant cet endroit. Notre Royaume est bien plus pur que la Terre. Ce ne sont pas de véritables insectes, de véritables animaux, lourds et charnels, qui s’entredévorent ici. Aucune chaîne alimentaire n’existe en ces lieux, juste le pouvoir de Dieu qui crée une image de ce monde, un simple reflet.
J’aime à m’assoir sur l’un des bancs de marbre blanc, et laisser dériver mes pensées. Et observer les autres rêveurs qui cherchent, comme moi, à échapper au monde étouffant du palais. Ils déambulent paisiblement, en contemplant la splendeur qui les entoure. Colonnes de pierre parfaites et parterres de roses toutes identiques. Ils ne sentent pas toujours qu’ici aussi, la réalité est artificielle, crée de toutes pièces par le Dieu Unique.
Moi, si. A chaque instant. Et cette vie me plaît plus qu’on ne peut l’imaginer. La pureté de cet endroit n’a pas de fin. Bien davantage que si ce lieu était réel, mille fois plus.
Aujourd’hui, les promeneurs habituels ne sont pas les seuls à hanter ces lieux. Mikhaël, là-bas, n’est pas venu pour se reposer, du moins pas cette fois. J’en suis sûr.
Il le cherche. Moi qui le connais si bien, je devine cela à son air fébrile, à sa manière de hâter le pas alors qu’il traverse le Jardin. Seul, au milieu de l’allée centrale, il a l’air pressé, un peu éperdu. Ses cheveux roux flottent un peu tandis qu’il tourne la tête d’un côté, puis de l’autre. On aurait dit qu’il doit accomplir une tâche à tout prix.
Mon pauvre Mikhaël, ton combat est perdu d’avance, et tu le sais.
Il m’aperçoit et s’élance vers moi, comme vers un point d’ancrage. Il espère sans doute puiser en mon attitude une stabilité, un détachement. Ce calme dont il est pour le moment incapable de faire preuve.
Comment peut-on être aussi secoué de passions ?
« Gabriël … » Il rassemble ses esprits, réfléchit à ce qu’il va me dire. Je me doute déjà de ce qu’il va me demander. Il va vouloir que je l’aide, c’est certain. En attendant qu’il prenne la parole, je cueille un myosotis et le fais tournoyer entre mes doigts. Je voudrais feindre l’indifférence. En réalité, c’est pour me donner une contenance.
Mikhaël m’a toujours un peu déstabilisé, lui et ses émotions fluctuantes. Il est impulsif, hésitant, pétri de contradictions. Je ne le comprends pas vraiment, en fait.
Il plonge ses yeux d’or rouge dans les miens et dit, d’une voix qui tremble un peu :
« Il faut que tu viennes avec moi. Pour le convaincre. »
Je m’y attendais, évidemment. Il va essayer de m’entraîner dans son entreprise folle, dans sa quête désespérée. Il sait bien que c’est sans espoir, pourtant. Sammaël est obstiné. Ce n’est absolument pas le genre de personne à se repentir, ou quoi que ce soit d’autre du même acabit. Il ne renoncera jamais.
Mais Mikhaël n’y croit pas. Enfin, il affecte de ne pas y croire.
Mes yeux se tournent vers la fleur que je tiens toujours. Je la fixe à dessein, afin que mon regard ne croise pas le sien. Il pourrait peut-être y lire les conclusions auxquelles je suis parvenu.
Car je me doute vaguement de ses motifs. La plupart des autres archanges les pressentent également. Mais nous fermons les yeux, pour que les classes subalternes ne soient pas au courant. Quoi qu’il en soit, nous lui pardonnons, car en dehors de cela, Mikhaël demeure le plus droit d’entre nous. Le plus juste. Le plus puissant.
Qui l’eût dit, en apercevant ce pauvre être bouleversé ? S’il avait été plus autoritaire, il aurait pu m’obliger à l’accompagner. S’il avait été cruel, il aurait même pu me menacer. Mais cela ne ressemble pas à Mikhaël.
Je ressens presque de la peine à l’idée de devoir lui opposer un refus. Je laisse tomber la petite fleur bleue, avant de lui répondre.
« Non, tu dois y aller seul. Moi, il ne m’écoutera jamais. »
En vérité, il ne t’écoutera pas non plus, mon malheureux Mikhaël, me dis-je tandis qu’il hoche gravement la tête et reprend sa recherche éperdue. Je le suis du regard, et je perçois alors son immense détermination. Son immense désespoir, également.
Sammaël ne l’écoutera jamais. Quoique…
Qui sait ?