Cauchemar du matin, chagrin

Nov 06, 2005 12:51

Quimper. Nous nous trouvons dans la grande maison des voisins d’en face. Nous sommes nombreux, et nous préparons une fête. Naturellement, je suis affectée aux cuisines, où j’ai apporté deux cartons contenant des plats et des petits appareils électro-ménagers. L’un est à moi, l’autre à ma mère. Alors que nous nous affairons, plusieurs voitures arrivent en trombe dans la rue et se garent devant la maison. Elles sont bourrées jusqu’à la gueule de racailles apparemment décidées à faire un casse dans ce quartier bourgeois où habitent mes parents. Comme nous sentons le coup venir - vandales venus tout détruire dans une maison d’un quartier favorisé -, nous rangeons soigneusement nos ustensiles en tentant de les cacher. J’empaquète avec un soin terrible le carton de ma mère, je dissimule plus ou moins habilement mon mixer sur le frigo, et c’est là qu’ils font irruption dans la maison. Etrangement, ces racailles modernes ressemblent à s’y méprendre à des voyous tout droit sortis de Ken le survivant. Nous sommes adorables avec eux, comme si cela allait les amadouer. Nous tentons de gagner du temps. Et effectivement, j’ai l’impression de faire causette pendant une heure avant qu’ils ne partent, les un après les autres, tandis que l’un d’eux nous fait monter de force à l’étage. Une fois là-haut, il me regarde et me dit : « Toi, tu as été méchante. » Je ne comprends pas bien pourquoi. Il glisse une main gelée sous ma jupe, et je glousse bêtement « Hiii, t’as les mains froides. » Il me lance littéralement à terre, ouvre les jambes au-dessus de mon visage. Je me dis qu’il va sortir sa bite et me demander de le sucer, mais je me trompe. Il commence à pisser, à travers son pantalon, et voudrait que j’avale. Seulement, le tissu absorbe une bonne partie de sa pisse, et il ne parvient pas à viser ma bouche. Je ferme les yeux et je me dis que ce serait pourtant pas mal que j’en récolte une bonne partie, histoire de pouvoir lui recracher à la gueule. Quand je rouvre les yeux, il est redescendu, non sans nous avoir donné à chacun une pièce de deux euros, pour des raisons qui nous échappent totalement. Nous entendons des bruits de marteau. Je risque un œil par-dessus la rampe, et je vois celui qui nous a parqués en haut planter méthodiquement des clous entre les portes et les chambranles, entre les battants des fenêtres et les carreaux. Je me dis que cette dernière manœuvre est parfaitement inutile, puisque cela ne nous empêchera pas de briser le verre en cas de besoin. Et en parlant de besoin, nous ne pressentons que trop bien le sort qu’ils nous réservent. Ca sent l’essence à plein nez. En ce qui concerne la façon dont je vais mourir, j’ai depuis toujours deux phobies : le feu et la noyade. C’est vraiment pas de bol. Alors que le feu commence à crépiter, je me dis que tout le soin que j’ai apporté à l’empaquetage et à la protection des affaires de ma mère aura été bien vain, et cela m’attriste profondément. Puis je tente de faire abstraction des bruits qui m’entourent - feu, pleurs, cris - afin de chercher une solution. Il nous faudrait une fenêtre qui ne soit pas trop en hauteur, ou qui nous permette d’accéder au mur d’un voisin. Et puis, le mec qui a tout cloué, il l’a fait de l’intérieur. On peut donc supposer, s’il a été bête jusqu’au bout, qu’il n’aura pas pensé à condamner l’issue par laquelle il est sorti précipitamment après avoir mis le feu à la maison. Il nous faut absolument trouver cette issue. De toute façon, dans le pire des cas, la caserne des pompiers est à moins de deux minutes d’ici, ils devraient arriver rapidement. Et puis, au bout d’un moment, je sors de mes conjectures et je me rends compte que j’ai vraiment du mal à respirer. La moitié des gens présents sont morts, et je me sens mourir aussi. Ce n’est pas la chaleur, mais l’air. Je suffoque. Mes poumons sont comme tapissés d’une suie noire et gluante qui les empêche de fonctionner. Les grandes goulées d’air que j’aspire ne font qu’empirer les choses. Ma tête tourne. J’ai trop chaud. Je glisse lentement, lentement, vers le néant, où plus rien ne peut m’atteindre.
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