Regulus,
Tu as raison, Regulus. Tout a commencé à dégénérer bien avant nous. Avec tes chercheurs, tes ministres et tes juges, justement. Dévoyés dans des questions inutiles. Dans un confort nauséabond, dans un luxe stupide. Jusqu'à oublier ce que nous étions avant cela, avant tout. Des guerriers, Regulus. Des guerriers, abâtardis dans des métiers de bourgeois jusqu'à n'avoir même plus envie d'inventer, de gouverner, de juger. C'est de cela que s'est souvenu mon père lorsqu'il a nommé son aînée. De cela que se sont peut-être souvenus tes parents lorsqu'ils t'ont donné un nom. Un roi est un chef de guerre avant tout. Même un petit roi.
Et nous avons été ce qu'eux n'avaient jamais eu l'audace ou l'occasion d'être. Nous avons été guerriers à notre tour, petit Black. Sous l'égide du seul maître digne de nous et de nos ancêtres, un être dont la puissance et la soif de gloire égalaient enfin les plus grands mages-guerriers du passé. Mais la grandeur, la grandeur véritable, s'appelle aujourd'hui folie. Pauvre monde pathétique.
Toi, tu as gâché ton combat en voulant livrer une bataille qui te dépassait. Moi, je continuerai le mien. Coûte que coûte, tant qu'il restera une goutte de ce sang maudit dans mes veines. Même si je vis en un temps qui ne reconnait plus que les abâtardis, les médiocres, les faibles. Même si nous avons perdu depuis longtemps, depuis des siècles.
Ils peuvent gagner des guerres, nous jeter en prison, nous tuer ou trafiquer notre magie. Quoi qu'il arrive, je ne leur accorderai jamais la victoire de me voir renoncer. Jamais.
N'as-tu donc jamais ressenti ça, Regulus ? Le frémissement du combat, cette jouissance austère et sauvage à défier la vie, à porter la mort pour se reconnaître et renaître enfin ? Ou tout ceci n'est que folie, pour toi, aussi ?
B.